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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre de la famille
ARRET DU 21 AVRIL 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 17/02403 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NEHY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 JANVIER 2017 DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ
N° RG 12/01300
APPELANT :
Monsieur [R] [D]
né le 08 Juin 1953 à SAINT FLOUR (15)
de nationalité Française
4 Rue du Monument
12520 AGUESSAC
Représenté par Me Philippe SENMARTIN avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [M] [D]
né le 17 Avril 1947 à SAINT FLOUR (15)
de nationalité Française
CHALONS
19200 AIX
Représenté par Me Gilles ARGELLIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
Monsieur [M] [I]
né le 15 Mai 1951 à CLERMONT FERRAND (63)
de nationalité Française
65 Cours de la République
63270 VIC LE COMTE
Représenté par Me Gilles ARGELLIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
Madame [B] [I] épouse [E]
née le 21 Novembre 1973 à CLERMONT FERRAND (63)
de nationalité Française
LES FIOLS
63880 OLLIERGUES
Représentée par Me Gilles ARGELLIES de, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 23 Février 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Mars 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thibault GRAFFIN, Conseiller chargé du rapport et Mme K. ANCELY
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. T. GRAFFIN, Conseiller faisant fonction de Président
Mme K. ANCELY, Conseillère
Mme M. VENET Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Dominique IVARA
ARRET :
- Contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour,
les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. T. GRAFFIN, Conseiller faisant fonction de Président, la Présidente étant empêchée et par Mme D. IVARA, Greffier.
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EXPOSÉ DU LITIGE
[A] [D] et [L] [P] sont décédés respectivement en 2009 et 2000, en laissant pour leur succéder leurs 3 enfants : [M], [N] et [R].
Par acte notarié en date du 21 juin 2002, M. [A] [D] avait fait donation à son fils M. [R] [D] de la nue-propriété d'une maison à usage d'habitation située à Aguessac. Cette donation a été consentie par préciput et hors part et par suite avec dispense de rapport à la succession du donateur.
Par testament olographe en date du 27 juin 2002, M. [A] [D] avait légué par préciput et hors part à son fils M. [R] [D] l'intégralité du mobilier meublant dépendant de sa succession.
Maître [Z], notaire à Ussel (Corrèze), a établi un procès-verbal de dires et difficultés le 26 mars 2011, les héritiers ne parvenant pas à un règlement amiable de la succession de [A] [D].
Après assignation en date du 11 septembre 2012 aux fins de liquidation partage de la succession de M. [A] [D], Mme [N] [D] est décédée le 10 novembre 2013.
M. [M] [I], son conjoint survivant, et sa fille Mme [B] [I] épouse [E], ont poursuit la procédure au nom et pour le compte de celle-ci.
Par jugement en date du 6 juin 2014, aujourd'hui définitif, le tribunal de grande instance de Rodez a :
- ordonné le partage judiciaire des successions [V] et de la communauté ayant existé entre les époux,
- désigné pour y procéder, maître [U] [H], notaire,
- jugé que la somme de 6 000 € par chèque du 9 octobre 2002 libellé au nom de M. [Y] [K] [D] devra être rapportée à la succession de M. [A] [D],
- jugé qu'il n'y a pas lieu à rapport à la succession de la somme de 9 500 € donnée
par M. [A] [D] à Mme [J] [D], sa petite fille, par chèque du 24 janvier 2005,
- débouté les consorts [F] de leur demande de rapport à la succession de [A] [D] des sommes résultant de la succession de Mme [L] [P] au titre de la créance de quasi-usufruit,
- rejeté la demande d'indemnité d'occupation relative à ce bien immobilier telle que formulée par les consorts [F] ,
- ordonné une expertise confiée M. [K] [O] avec mission de décrire et d'évaluer les biens d'Aguessac et d'en déterminer la valeur vénale actuelle en fonction de leur état à la date du 21 juin 2002 date de la donation en nue-propriété à M. [R] [D].
Le rapport d'expertise a été déposé le 3 décembre 2015.
*****
Par décision en date du 20 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Rodez a :
- homologué le rapport d'expertise de l'expert M. [O] en ce qu'il retient la valeur vénale de 107 500 € pour la maison d'habitation située à Aguessac,
- renvoyé les parties devant maître [H], notaire désigné par jugement du 6 juin 2014, afin de procéder à la liquidation de la succession de Mme [L] [P] et de celle de M. [A] [D] et de la communauté ayant existé entre eux et à l'établissement du projet d'acte liquidatif,
- dit que le notaire désigné devra intégrer dans la masse successorale à partager la somme de 6 232,28 €,
- dit que les dépens de l'instance dans lesquels sont compris les frais d'expertise seront employés en frais privilégiés de partage.
Par déclaration au greffe en date du 24 avril 2017, M. [R] [D] a relevé appel des chefs de jugement susvisés.
Dans ses dernières conclusions en date du 15 février 2022 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de leurs fins, moyens et prétentions, il demande à la cour de :
- rejeter toutes conclusions et demandes contraires,
- réformer partiellement le jugement dont appel,
- homologuer le rapport de M. [O] en ce qu'il a considéré que l'ensemble des travaux réalisé par M. [R] [D] depuis la date de la donation du 21 juin 2002 représente une valeur de l'ordre de 20% de la valeur actuelle du bien,
- évaluer l'immeuble objet de l'acte de donation du 21 juin 2002, en fonction de son état à la date du 21 juin 2002, à la somme de 74 400 € et subsidiairement à celle de 86 000 €,
- débouter les consorts [F] de leur demande tendant à ce que le notaire réintègre dans la masse successorale les sommes prétendument payées par M. [A] [D] pour le compte de son fils à hauteur de 6 232,28 €,
- renvoyer les parties devant le notaire liquidateur afin qu'il établisse un projet d'acte liquidatif des successions et communauté confondues en fonction :
De l'acte authentique en date du 1er août 1973,
De l'acte de donation du 21 juin 2002,
Du testament olographe du 27 juin 2002,
Du dispositif du jugement du 6 juin 2014,
De la valeur de l'immeuble objet de l'acte de donation du 21 juin 2002, en fonction de son état à la date du 21 juin 2002, soit la somme de 74 400 € et subsidiairement à celle de 86 000 €,
- ordonner les dépens en frais privilégiés de partage.
Les intimés, MM. [M] [D] et [M] [I], et Mme [B] [I] épouse [E] (les consorts [F]), dans leurs conclusions récapitulatives en date du 22 février 2022 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé de leurs fins, moyens et prétentions, demandent à la cour de :
- débouter M. [R] [D] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusion,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise et notamment s'agissant des valeurs immobilières, retenir la somme de 107 500 €,
A titre subsidiaire,
- juger que la valeur vénale de la maison d'habitation ne peut être inférieure à sa valeur à l'époque de l'aliénation, soit 93 000 €,
- renvoyer les parties devant maître [H], notaire, désigné par jugement du 6 juin 2014 aux fins de procéder au partage judiciaire de la succession de Mme [L] [P] et de celle de M. [A] [D] et de la communauté ayant existé entre eux et ce, eu égard tant du jugement rendu que de l'arrêt à intervenir,
- juger que M. [R] [D] ne justifie pas de s'être acquitté des travaux querellés,
En conséquence,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le notaire désigné devra réintégrer dans la masse successorale à partager la somme de 6 232,28 €,
- condamner M. [R] [D] à leur payer la somme de 3 000 € sur le fondement des disposition de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger que les dépens seront utilisés en frais privilégiés de partage, dont distraction au profit de la SCP Argellies-Apollis, avocat au barreau de Montpellier, sur son affirmation de droit.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 février 2022.
MOTIFS
Selon l'article 860 alinéa 2 du code civil, le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque de l'aliénation, d'après son état à l'époque de la donation (en ce sens, 1ère civ, 27 juin 2000, n°98-14.886).
Le bien immobilier sis à Aguessac (Aveyron) qui avait été donné par son père à M. [R] [D] en nue-propriété le 21 juin 2002, et qui avait été évalué par l'expert judiciaire à la somme de 107'500 €, a été vendu le 1er juin 2020 pour la somme de 93'000 €.
Or, l'expert judiciaire, dans son rapport du 3 décembre 2015, avait indiqué que l'ensemble des travaux réalisés par M. [R] [D] depuis la date de la donation représentait une valeur de l'homme de 20 % la valeur actuelle du bien.
Il avait ainsi relevé que des travaux avaient été effectués dans le bien immobilier concernant :
- les modifications des menuisiers extérieurs,
- le changement des sols,
- les travaux de décoration intérieure,
- la réfection totale de la salle de bain,
- les aménagements des abords.
Par ailleurs, il avait également recensé les différents documents, factures et tickets de caisse, correspondants aux travaux effectués dans le bien immobilier depuis 2002, pour un montant total de 6 232,28 €.
Il est à noter que la mission de l'expert ne comportait pas d'identifier l'origine de ces paiements, ce qu'il n'a donc pas fait.
Cependant, les consorts [F] contestent que M. [R] [D] ait lui-même réglé ces factures, alors de surcroît qu'ils indiquent sans être contredit sur ce point que le bien immobilier était jusqu'au décès de [A] [D] donné à la location à des tiers.
De surcroît, ils justifient que les travaux d'améliorations ont été payés en partie par [A] [D] à partir de son propre compte.
Or, la cour constate comme le premier juge que M. [R] [D] ne produit aux débats aucune pièce démontrant qu'il aurait réglé lesdites factures et les achats relatifs à l'amélioration du bien immobilier, et qu'il est ainsi défaillant à rapporter la preuve de l'amélioration à ses frais de l'immeuble depuis la donation de 2002.
Il convient dès lors de retenir la somme de 93 000 € correspondant à la valeur de l'immeuble au moment de son aliénation, en tenant compte des améliorations imputables à [A] [D].
Le jugement sera ainsi réformé.
Par voie de conséquence, la somme de 6 232,28 €, correspondant aux travaux effectués dans l'immeuble donné à M. [R] [D] et payés par [A] [D], ne saurait être qualifiée de libéralité rapportable à la succession.
Le jugement sera également réformé de ce chef.
Sur les autres demandes
La cour confirmera les dispositions du jugement qui ne sont pas remises en cause par les parties.
Sur les dépens
Aucune des parties n'obtenant entièrement gain de cause devant la cour, chacune d'elles conservera à sa charge ses propres dépens d'appel.
Sur les frais irrépétibles
L'équité ne commande pas de condamner la partie perdante sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
la cour, statuant par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a homologué le rapport d'expertise de l'expert M. [O], en ce qu'il a retenu la valeur vénale de 107 500 € pour la maison d'habitation située à Aguessac, et en ce qu'il a dit que le notaire désigné devrait intégrer dans la masse successorale à partager la somme de 6 232,28 €,
Statuant à nouveau,
FIXE à la somme de 93 000 € la valeur vénale de la maison d'habitation située à Aguessac qui a fait l'objet d'une donation en nue-propriété par acte authentique, le 21 juin 2002, par [A] [D] à son fils M. [R] [D],
DÉBOUTE les consorts [F] de leur demande de réintégration par le notaire, dans la masse successorale à partager, de la somme de 6 232,28 €,
CONFIRME le jugement entrepris s'agissant des autres dispositions critiquées,
DIT que chacune des parties supportera ses propres dépens d'appel,
DIT n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIERP/
LAPRÉSIDENTE empêchée
D. IVARA T. GRAFFIN