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02/03/2021 | FRANCE | N°19/01016

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 02 mars 2021, 19/01016


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 02 MARS 2021



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/01016 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OAQU







Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 DECEMBRE 2018

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 11-17-001672



jonction des RG n°19 / 1018 et n°19 / 1016 par ordonnance en date du 15 février 2019 sous le n° 19 / 1016

jonction des RG

n°19 / 1524 et n°19 / 1016 par ordonnance en date du 12 septembre 2019 sous le n° 19 / 1016







APPELANTES :



Madame [T] [I]

née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 9]

de nationalité...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 02 MARS 2021

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/01016 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OAQU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 DECEMBRE 2018

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 11-17-001672

jonction des RG n°19 / 1018 et n°19 / 1016 par ordonnance en date du 15 février 2019 sous le n° 19 / 1016

jonction des RG n°19 / 1524 et n°19 / 1016 par ordonnance en date du 12 septembre 2019 sous le n° 19 / 1016

APPELANTES :

Madame [T] [I]

née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5] (GUADELOUPE)

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substituant Me Guillaume HANRIAT avoca au barreau de STRASBOURG

Autre(s) qualité(s) : Appelante dans 19/01524 (Fond) - Intimée dans 19/01016 (Fond) et 19/01018 (Fond)

Madame [N] [M]

née le [Date naissance 3] 1991 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Autre(s) qualité(s) : Appelante dans 19/01016 (Fond) et 19/01018 (Fond) - Intimée dans 19/01524 (Fond),

INTIMEES :

Madame [T] [I]

née le [Date naissance 1] 1985 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 5] (GUADELOUPE)

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substituant Me Guillaume HANRIAT avoca au barreau de STRASBOURG

Autre(s) qualité(s) : Appelante dans 19/01524 (Fond), Intimée dans 19/01016 (Fond) et 19/01018 (Fond)

Madame [N] [M]

née le [Date naissance 3] 1991 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, et Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Autre(s) qualité(s) : Appelante dans 19/01016 (Fond), et 19/01018 (Fond) - Intimée dans 19/01524 (Fond)

SAS FONCIA [Localité 7] représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et Me Doaa BENJABER de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Autre(s) qualité(s) : Intimée dans 19/01524 (Fond), 19/01016 (Fond) et 19/01018 (Fond)

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 28 Décembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 JANVIER 2021,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

Le 15 décembre 2008, [N] [M] a loué un studio à [T] [I] pour la somme de 450 € par mois.

[N] [M] a quitté les lieux en juillet 2017.

Le 31 août 2017, [N] [M] a fait assigner [T] [I] pour obtenir réparation du préjudice de jouissance qu'elle aurait subi entre novembre 2011 et juin 2017.

Le 28 décembre 2017, [T] [I] a fait assigner la SAS Foncia, son mandataire et syndic de l'immeuble, pour obtenir sa garantie pour toute condamnation à son encontre et réparation de son préjudice du fait des fautes commises dans l'exercice de son mandat.

Le jugement rendu le 18 décembre 2018 par le tribunal d'instance de Montpellier énonce dans son dispositif :

Condamne in solidum la SAS Foncia Domitia et [T] [I] à payer à [N] [M] la somme de 7 000 €.

Condamne in solidum la SAS Foncia Domitia et [T] [I] à payer à [N] [M] la somme de 700 € au titre de l'articke 700 du Code civil.

Condamne la SAS Foncia Domitia à payer à [T] [I] la somme de 4 050 € de dommages et intérêts.

Condamne in solidum la SAS Foncia Domitia et [T] [I] aux entiers dépens de l'instance.

Le jugement expose que deux rapports du service d'hygiène communale et du Pact Habitat décrivent les désagréments subis et que la CAF a notifié la suspension du versement des APL à compter de décembre 2016 suite à ces constats. Il constate que deux décisions de justice en référé en prennent acte et que le devis de réfection produit par le propriétaire montre l'état du logement.

Le jugement retient un préjudice de jouissance à compter de novembre 2014, date du premier rapport du service d'hygiène communal, et jusqu'au 1er janvier 2017, date à laquelle [N] [M] n'a plus payé de loyer.

Le jugement relève que Foncia, dans sa qualité de syndic et de mandataire de la propriétaire, aurait dû prendre des mesures pour faire cesser les troubles. Il constate que les travaux de réfection, suite à un dégât des eaux en date de septembre 2014, n'ont eu lieu que fin 2015 et que Foncia ne peut produire aucune facture de réparation dans l'appartement de [N] [M]. [T] [I], en tant que propriétaire, est également fautive de ne pas avoir pu assurer à sa locataire un logement conforme aux prescriptions de la loi du 6 juillet 1989.

Concernant les demandes de [T] [I], le jugement expose que Foncia n'a pas à supporter la réfection totale de l'appartement. Il limite le préjudice à la perte de 9 mois de loyer à 450 €. Le jugement ne constate pas de préjudice moral distinct des loyers perdus. Le remboursement des honoraires versés à Foncia ne peut être retenu car Foncia a continué à gérer le bien.

[N] [M] a relevé appel du jugement par deux déclarations au greffe du 11 février 2019.

[T] [I] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 1er mars 2019.

Les trois affaires ont été jointes.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 28 décembre 2020.

Les dernières écritures pour [N] [M] ont été déposées le 14 décembre 2020.

Les dernières écritures pour [T] [I] ont été déposées le 2 octobre 2019.

Les dernières écritures pour Foncia ont été déposées le 16 août 2019.

Le dispositif des écritures pour [N] [M] énonce :

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la faute de [T] [I] et de Foncia et sur les quantum, statuer à nouveau.

Condamner [T] [I] et Foncia in solidum à verser à [N] [M] la somme de 16 240 € au titre du préjudice de jouissance subi entre novembre 2011 et juin 2017 (56 mois à 290€).

Les condamner in solidum à lui verser la somme de 5 000 € au titre du préjudice moral.

Condamner [T] [I] au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens, en ce compris le coût des constats d'huissier, avec application de l'article 699 du Code de procédure civile.

[N] [M] expose que les désordres ont été constatés par la mairie de [Localité 7] dans un rapport du 28 octobre 2014, qui établit notamment, que les murs se décollent, que des moisissures apparaissent, que le chauffage est insuffisant, qu'il n'y a pas les ventilations réglementaires, que le faux plafond s'est effondré et que le sol s'affaisse. Le rapport de Pact Habitat fait le même constat et note notamment un défaut d'étanchéité et une installation électrique non conforme.

[N] [M] maintient que l'état de l'appartement est désastreux depuis 2011 et que cet état des faits était connu des parties, puisque [N] [M], sur demande de Foncia, a fait plusieurs déclarations de sinistre.

Ses demandes précèdent de longue date la demande d'expulsion que fera [T] [I] à son encontre, dans le seul but d'échapper à son obligation de délivrer un logement décent. Il aurait fallu que la propriétaire mette en demeure le syndicat des copropriétaires de l'immeuble pour les travaux concernant la toiture.

[N] [M] soutient avoir subi un préjudice de jouissance du fait de l'insalubrité du logement. Elle maintient que son préjudice est constant depuis novembre 2011, date du premier dégât des eaux majeur. Elle verse aux débats des courriers qu'elle a adressé à Foncia et son assureur depuis 2011. Elle produit un courrier du 3 novembre 2011 par lequel Foncia lui a demandé de faire une déclaration de sinistre auprès de son assureur.

Si les travaux de réfection du toit ont été effectués en 2016, les travaux de rénovation de l'appartement n'ont jamais été effectués. Le devis de remise en état de l'appartement fixe un montant de 13 000 € qui montre la gravité des troubles subis. Elle ajoute qu'elle a du s'acquitter de factures EDF très importantes pour pouvoir chauffer son logement.

Elle soutient avoir également subi un préjudice moral du fait de l'insalubrité de son logement.

La CAF a suspendu les APL afin de sanctionner le propriétaire à la suite de la procédure d'indécence qu'elle a diligenté. Elle a quant à elle continué à payer sa part de loyer et c'est l'absence de remise en état du logement qui a provoqué, pour la propriétaire, la perte des APL.

Le dispositif des écritures pour [T] [I] énonce :

Juger l'appel de [N] [M] irrecevable et mal fondé.

Juger que [N] [M] ne conclut pas au débouté ou au rejet de l'appel principal ou incident de [T] [I].

A titre subsidiaire, réduire à de plus justes proportions la somme allouée à [N] [M] en réparation de son préjudice de jouissance (une somme de 3500 € apparaît raisonnable) et au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ordonner la compensation des créances réciproques en tenant compte du fait qu'il existe un impayé de loyers et charges d'un montant de 6 913, 54 €.

Condamner Foncia à garantir [T] [I] de toutes condamnations prononcées à son encontre en principal, frais, dépens, dommages et intérêts et article 700 du Code procédure civile.

Condamner Foncia aux entiers frais et dépens de cet appel en garantie.

Sur l'appel de [T] [I] :

Dire que Foncia a manqué à ses obligations contractuelles en sa qualité à la fois de mandataire de [T] [I] et syndic de l'immeuble.

Condamner la société Foncia à :

- payer à [T] [I] la somme de 12 554, 30 € TTC correspondant au devis de remise en état de son logement

- payer à [T] [I] la somme de 6 913, 54 € au titre des impayés de loyers et charges consécutifs à la cessation par la locataire du règlement de ses loyers dû au préjudice de jouissance subi du fait de l'absence de réparation entrepris et de la cessation du versement des APL par la CAF

- rembourser à [T] [I] le montant des frais d'avocat dont l'intervention n'a été rendue nécessaire que du fait de la carence et de l'inaction notable de Foncia, ces derniers s'élevant à la somme de 3 631, 92 € TTC

- verser à [T] [I] la somme de 10 500 € à raison de 500 € par mois (c'est la valeur locative du logement) à compter de juillet 2017, date à laquelle [N] [M] a quitté le logement, et ce jusqu'à la date de la vente du bien, le 25 mars 2019, en réparation de la perte financière consécutive à l'impossibilité de louer l'appartement (soit 10 500 € de juillet 2017 à mars 2019 inclus, c'est à dire 21 mois), étant précisé que le bien est resté vide de toute occupation pendant cette période

- payer à [T] [I] la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi et le temps passé sur ce dossier depuis de nombreuses années

- rembourser à [T] [I] les honoraires de gestion perçus, à savoir 3 896, 46 € TTC

Condamner Foncia à payer à [T] [I] la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner Foncia aux entiers frais et dépens de l'appel en garantie et de la procédure principale de première instance et d'appel diligentée par [N] [M] à l'encontre de [T] [I].

[T] [I] soutient que [N] [M] ne démontre aucune faute de sa part à son encontre. Elle réside en Guadeloupe et maintient qu'elle ne pouvait rien faire, sauf donner des instructions à Foncia, du fait de son éloignement et de sa méconnaissance en la matière.

[T] [I] affirme qu'elle n'a été informée qu'en 2013 des sinistres dégâts des eaux et qu'elle ne peut pas être responsable pour la période antérieure. [N] [M] a cessé de payer son loyer et a à sa charge un impayé de loyers et charges de 6 913, 54 €. Cette somme doit venir en compensation des sommes qui lui seraient allouées, selon [T] [I], qui maintient qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle mais d'une demande qui se trouvait déjà dans ses conclusions de première instance.

A titre subsidiaire, [T] [I] affirme que Foncia doit la garantir intégralement puisque la société Foncia a manqué à ses obligations en sa qualité, tant de mandataire gestionnaire, que de syndic, en refusant d'effectuer les travaux nécessaires. Elle soutient que Foncia ne l'a pas informé de l'existence d'infiltrations avant 2013, alors même que de par sa qualité de gestionnaire et de syndic, la société devait nécessairement en avoir connaissance depuis 2011. Elle soutient qu'il fallait faire des travaux de réparation et pas d'entretien. La carence de Foncia a duré de novembre 2011 jusqu'en 2016, date où les travaux de la toiture ont été réalisés.

[T] [I] affirme que Foncia est de mauvaise foi lorsqu'elle prétend n'avoir eu connaissance des dégâts qu'en 2014 alors que [N] [M] démontre sa connaissance des faits dès novembre 2011.

[T] [I] maintient que son appartement est resté vide entre juillet 2017 et mars 2019, faute de pouvoir réaliser les travaux, et qu'elle a donc été obligée de le vendre en mauvais état et à bas prix, puisque Foncia n'avait pas procédé aux réfections nécessaires. [T] [I] affirme avoir subi un préjudice moral du fait des carences de Foncia et des procédures en justice qui sont lourdes et pénibles sur le plan psychologique.

[T] [I] affirme que [N] [M] n'a pas conclu dans son dispositif au rejet ou au débouté de ses prétentions et doit donc être considérée comme ayant acquiescé à ces dernières.

Le dispositif des écritures pour Foncia énonce :

Débouter [T] [I] de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la SAS Foncia Domitia.

Condamner solidairement [T] [I] et [N] [M] aux entiers dépens.

Foncia soutient n'avoir commis aucune faute à l'encontre de [N] [M]. [N] [M] ne justifie pas d'avoir effectué une première déclaration de sinistre en 2011, ce que la compagnie AXA confirme. Foncia maintient que le sinistre est survenu en 2014 et qu'elle a, en tout état de cause, effectué les travaux nécessaires d'entretien de la toiture en tant que syndic de la copropriété, comme le montre les factures qu'elle verse aux débats. Foncia soutient que les infiltrations sont le fait, non pas d'un mauvais entretien de la toiture, mais d'un événement climatique exceptionnel, ce qui est retenu par le rapport de Saretec. Elle n'a donc commis aucune faute.

Foncia soutient que [N] [M] n'a effectué aucune démarche en 2011 pour déclarer le sinistre qu'elle affirme avoir subi. Foncia ne peut donc pas être tenu de réparer son préjudice de jouissance en 2011 et 2014. Après 2014, Foncia estime avoir fait preuve de la diligence nécessaire pour effectuer les travaux, sans commettre aucune faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle, puisqu'elle n'est pas tenue à l'égard de la locataire d'une obligation de résultat. Foncia ajoute que [N] [M] était en colocation et que son préjudice de jouissance doit donc être divisé de moitié. [N] [M] n'a pas réglé ses loyers à hauteur de 6 913, 54 € et ne justifie pas d'un préjudice moral.

Foncia soutient n'avoir commis aucune faute à l'encontre de [T] [I]. Foncia affirme avoir fait effectuer des travaux sur la toiture entre 2011 et 2015. Elle ne pouvait pas avertir [T] [I] des désordres entre 2011 et 2014 puisque aucune déclaration de sinistre n'avait été faite. Foncia soutient que [T] [I] a été informée dès 2013, puisqu'elle a participé en tant que propriétaire à la décision ayant conduit aux travaux de toiture en 2015.

Concernant l'indemnisation du préjudice subi par [T] [I], Foncia soutient n'avoir commis aucune faute de nature a avoir causé un préjudice à [T] [I]. La nécessité de remise en état du logement n'est pas de son fait mais du fait des intempéries. Les sommes avancées pour la remise en état ont été récupérées lors de la vente du bien. [T] [I] ne démontre pas que Foncia soit responsable des impayés de [N] [M]. Foncia affirme que [T] [I], réclamant déjà une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ne peut pas demander le montant des frais d'avocat. Elle ajoute que le logement n'a pas été loué entre juillet 2017 et mars 2019 car [T] [I] souhaitait le vendre et il souligne qu'elle ne démontre aucunement avoir cherché à le louer.

MOTIFS

[N] [M] locataire de [T] [I] n'a pas de rapport contractuel avec la société Foncia mandataire du bailleur, de sorte que celle-ci ne peut être condamnée à réparer le préjudice de la locataire que sur le fondement délictuel d'une faute à l'égard de la locataire dans l'exercice de sa prestation.

En revanche, la cour doit examiner pour la réparation des préjudices les conditions d'exécution du contrat de bail et du contrat de mandat.

La cour écarte le moyen dans les écritures du bailleur que la locataire aurait acquiescé à ses prétentions pour ne pas avoir conclu au débouté, au regard de la mention sans équivoque dans le dispositif de [N] [M] de débouter les adversaires de l'ensemble de leurs demandes.

La réalité des désordres et de la non-conformité du logement à une jouissance paisible comme le soulignent les rapports du service d'hygiène communale et du Pact Habitat n'est pas critiquée.

La cour constate que même en l'absence de déclaration de sinistre par la locataire, le courrier adressé par Foncia le 3 novembre 2011 fait une référence expresse à un dégât des eaux affectant le plafond du séjour, de sorte que la réalité d'un préjudice doit être retenue pour la période depuis l'échéance de novembre 2011 jusqu'à celle de décembre 2016, après laquelle le loyer n'a pas été payé, soit une période de 61 mois.

La cour retient l'appréciation pertinente par le premier juge d'un montant de préjudice équivalent à 250 € par mois.

Cependant, le bail a été conclu avec deux locataires solidaires et indivis, de sorte que une seule des locataires n'est pas fondée à prétendre à la totalité du préjudice sans démontrer avoir assuré la totalité des paiements.

Il en résulte au bénéfice de [N] [M] un préjudice mensuel limité à 125 € pour 61 mois, soit la somme totale de 7625 €.

Le paiement de cette somme relève de la responsabilité contractuelle du bailleur [T] [I].

Celle-ci n'est pas fondée à s'exonérer de sa responsabilité contractuelle envers la locataire au motif que son mandataire Foncia ne l'aurait pas prévenue.

La demande du bailleur de compensation avec une créance de loyers n'est pas fondée en considération du défaut de mise en conformité du logement avec une jouissance paisible pendant toute la durée d'exécution du bail.

La cour constate par ailleurs que la créance est établie sur une base d'un montant total du loyer mensuel alors que la prise en charge par l'APL avait cessé justement sur la constatation de la non-conformité du logement.

La cour confirme la responsabilité contractuelle du mandataire gestionnaire Foncia à l'égard de son mandant bailleur en ce qu'il n'a pas pris avec diligence les mesures nécessaires pour faire cesser les troubles alors qu'il avait également la qualité de syndic de la copropriété.

La cour relève sur le sinistre de novembre 2011 que les travaux en toiture n'ont été effectués qu'en juin 2013, que l'insuffisance des travaux a été démontrée par la survenance de nouveaux désordres en 2014, suivis de la réfection complète de la toiture en décembre 2015 seulement.

La qualité non contestée de Foncia de seul interlocuteur direct du locataire fonde la confirmation de sa condamnation solidaire avec le bailleur à la réparation du préjudice de la locataire, en raison de sa responsabilité délictuelle fautive.

[T] [I] ne démontre pas dans sa relation contractuelle avec son mandataire Foncia un préjudice en relation de causalité certaine avec la prestation du mandataire équivalent à la perte partielle de loyers depuis novembre 2011.

La cour retiendra une responsabilité limitée au remboursement du défaut de paiement total des loyers de janvier à juin 2017, situation en lien de causalité directe avec l'impossibilité pour la locataire d'obtenir un logement conforme, soit une somme de 450 € x 6 = 2700 €.

[T] [I] n'est pas fondée à obtenir le remboursement par son mandataire du montant total de travaux de remise en état du logement dont le lien avec les sinistres qui n'auraient pas été suivis avec diligence n'est pas établi, que la plupart des travaux d'électricité et de chauffage ou de ventilation réglementaire constituent des défauts d'origine imputables au seul bailleur, alors qu'il n'est pas produit un procès-verbal d'entrée dans les lieux en 2008.

La cour retiendra un montant de réparation du préjudice limité à la somme de 3000 €.

La cour constate que les travaux de réparation en toiture ont été réalisés en novembre 2015, de sorte que le bailleur a disposé du temps nécessaire à la remise en état de l'appartement avant le départ du locataire en juillet 2017, de sorte que la prétention de [T] [I] à la garantie d'une perte de loyers jusqu'à la vente du bien en mars 2019 n'est pas fondée.

La demande de remboursement des honoraires de gestion n'est pas davantage fondée alors que la prestation a été réalisée sous la réserve de l'indemnisation allouée d'une insuffisance de gestion.

[N] [M] et [T] [I] ne démontrent pas un préjudice moral distinct des indemnisations et garanties retenues.

Il est équitable de mettre à la charge de [T] [I] une part des frais non remboursables exposés en appel par [N] [M] pour un montant de 2000 €, de mettre à la charge de la société Foncia pour les frais non remboursables exposés par [T] [I] une somme de 2000 €, et de confirmer la condamnation prononcée sur le même fondement par le premier juge.

[T] [I] supportera les dépens de l'appel sans qu'il y ait lieu à garantie de la société Foncia.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement rendu le 18 décembre 2018 par le tribunal d'instance de Montpellier, sauf sur le montant de la condamnation solidaire de la société Foncia Domitia et [T] [I] en paiement du préjudice de [N] [M], et de la condamnation de la société Foncia Domitia à garantir [T] [I] ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Condamne [T] [I] à payer à [N] [M] la somme de 7625 €, solidairement avec la société Foncia Domitia à hauteur de 2700 € ;

Condamne la société Foncia Domitia à payer à [T] [I] la somme de 3000 € ;

Condamne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile [T] [I] à payer à [N] [M] la somme de 2000 €, la société Foncia Domitia à payer à [T] [I] la somme de 2000 € ;

Condamne [T] [I] aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01016
Date de la décision : 02/03/2021

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°19/01016 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-03-02;19.01016 ?
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