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25/11/2020 | FRANCE | N°16/00566

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 25 novembre 2020, 16/00566


MB/IM























Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 25 NOVEMBRE 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/00566 - N° Portalis DBVK-V-B7A-M6PC



Arrêt n° :



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 décembre 2016

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 15/00580


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APPELANTE :



UNION POUR LA GESTION DES ETABLISSEMENTS DE CAISSE d'ASSURANCE MALADIE MIDI PYRENEES LANGUEDOC ROUSSILLON prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me ROBERT- GILABERT avocat pour ...

MB/IM

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 25 NOVEMBRE 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/00566 - N° Portalis DBVK-V-B7A-M6PC

Arrêt n° :

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 décembre 2016

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 15/00580

APPELANTE :

UNION POUR LA GESTION DES ETABLISSEMENTS DE CAISSE d'ASSURANCE MALADIE MIDI PYRENEES LANGUEDOC ROUSSILLON prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me ROBERT- GILABERT avocat pour Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame [G] [I]

née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me CHAZOT avocat pour Me Mélanie MARREC de la SELARL LEXEM CONSEIL, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Jean sébastien DEROULEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de Clôture du 22 Septembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 OCTOBRE 2020,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

**

EXPOSE DU LITIGE

Mme [G] [I] était embauchée suivant contrat à durée déterminée poursuivi par un contrat à durée indéterminée en date du 1er février 1996 par l'UGECAM en qualité de secrétaire médico-sociale moyennant un salaire s'élevant en dernier lieu à la somme de 2 203 €.

La salariée était placée en arrêt de travail du 26 août 2012 au mois de mars 2015.

Le 5 juin 2014, elle était placée en invalidité 2ème catégorie.

A l'issue de la visite médicale de reprise, le 5 février 2015 le médecin du travail la déclarait inapte à son poste dans l'entreprise en une seule visite en raison d'un danger immédiat pour sa santé.

Par lettre du 3 mars 2015, elle était convoquée à un entretien préalable à son éventuel licenciement lequel lui était notifié le 19 mars 2015 en ces termes: 'nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier en raison de votre inaptitude à votre poste de secrétaire-médicale constatée par le médecin du travail et à l'impossibilité de procéder à votre reclassement.

En effet, le Dr [K], médecin du travail, a rendu le 5 février 2015 l'avis médical suivant'inapte au poste et à tous postes dans l'établissement. Danger immédiat pour la santé de la salariée à reprendre le travail dans cet établissement au titre de l'article R 4624-31 du code du travail. Apte à reprendre un poste administratif dans un autre établissement de l'UGECAM à l'exception de la clinique du [6]'.

Afin de satisfaire à notre obligation de reclassement, nous avons sollicité les établissements de l'UGECAM LR-MP, l'ensemble des UGECAM de France, la direction du Service Médical Régional, les CAF de l'Hérault, de la Haute Garonne, de l'Aude, du Gard et des Pyrénées Orientales, les URSSAF du Languedoc Roussillon et de Midi Pyrénées afin qu'ils recensent les postes disponibles et à pourvoir.

Par notre courrier recommandé avec accusé de réception du 25 février 2015, nous vous informions que les démarches de recherches de reclassement entreprises n'avaient pu aboutir et par conséquent de notre impossibilité de procéder à votre reclassement;

Aussi, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle sur votre poste actuel de secrétaire médico-sociale constatée par le médecin du travail avec impossibilité de reclassement .(.../...)

Estimant avoir été victime de harcèlement moral et contestant son licenciement, par requête du 16 avril 2016, la salariée saisissait le conseil de prud'hommes de Montpellier en paiement de dommages et intérêts lequel, par jugement du 9 décembre 2016, condamnait l'employeur à lui payer les sommes suivantes:

-50 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-4 406 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 440,60€ pour les congés payés y afférents,

-950 € au titre de ses frais de procédure,

et ordonnait la délivrance des documents de fin de contrats sous astreinte de 30 € par jour de retard

Par déclaration reçue au greffe le 20 décembre 2016, l'employeur relevait appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions régulièrement notifiées, l'UGECAM Languedoc Rousillon demande la confirmation du jugement en ce qu'il a rejeté la demande au titre du harcèlement moral et son infirmation pour le surplus. Elle conclut au rejet des demandes de la salariée et à l'octroi d'une somme de 2 500 € au titre de ses frais de procédure.

À titre subsidiaire, elle demande que les dommages et intérêts soient ramenés à de plus justes proportions.

Pour le harcèlement moral, elle affirme que la seule production d'un certificat médical relatant une souffrance au travail ne peut démontrer la réalité du harcèlement allégué, que la salariée se plaint d'une dégradation de ses conditions de travail avec l'arrivée d'une nouvelle direction en 2011 mais que les seules pièces qu'elle verse aux débats sont des courriels postérieurs de deux ans à son licenciement et une photographie non datée de son poste de travail, lequel aurait été vidé en son absence.

Elle affirme que ni l'avis du médecin du travail à l'issue de la visite de pré-reprise du 16 avril 2014, ni son placement en invalidité de catégorie 2 en date du 5 juin 2014 ne lui imposaient de tenter un reclassement de la salariée alors que cette dernière était toujours en arrêt de travail.

Elle indique qu'elle a respecté son obligation de reclassement en recherchant un poste au sein des structures qu'elle gère et en adressant un courrier personnalisé aux différents directeurs des autres UGECAM.

Par conclusions régulièrement notifiées, Mme [I] sollicite l'infirmation du jugement querellé et demande que l'employeur soit condamné à lui payer les sommes suivantes:

-75 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse,

-4 995,07 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 518,71 € pour les congés payés y afférents

-20 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

-5 000 € à titre de dommages et intérêts pour retard dans l'organisation de la visite médicale de reprise après mise en invalidité 2ème catégorie,

-2 000 € au titre de ses frais de procédure,

et à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 70 € par jour de retard.

Elle fait valoir, essentiellement, que dès l'arrivée de Mme [Z] à la direction en août 2011, elle a subi des pressions répétées et une dégradation de ses conditions de travail qui l'ont conduite en août 2012 à être placée en arrêt maladie pour dépression grave et phobie professionnelle.

Elle expose que l'employeur a été alerté par le CHSCT sur la situation de détresse de plusieurs salariés et qu'il n'a pas réagi, qu'elle a elle même alerté l'employeur par courrier du 20 mai 2014 de sa souffrance au travail du fait des agissements de Mme [Z] et que ce dernier n'a pas réagi. Elle ajoute que son bureau a été vidé en son absence.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère aux conclusions régulièrement notifiées par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le harcèlement moral

L'article L. 1152-1 du code du travail dispose qu' ''aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

La reconnaissance du harcèlement moral suppose trois conditions cumulatives': des agissements répétés, une dégradation des conditions de travail, une atteinte aux droits, à la dignité, à la santé physique ou mentale ou à l'avenir professionnel du salarié.

En application de l'article L 1154-1 du code du travail, il appartient au salarié qui prétend avoir été victime de harcèlement moral de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral et il incombe à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, la salariée affirme que Mme [Z] nommée en 2011 a multiplié les agissements humiliants et vexatoires (remarques désobligeantes, modification de ses congés, surcharge de travail).

Or, à l'appui de ses allégations, la salariée ne produit aucun élément probant tel que des attestations de collègues, ses plannings de congés, ses horaires de travail permettant d'établir que ses conditions de travail se sont dégradées.

Les seules pièces versées aux débats sont des courriels rédigés par ses soins et postérieurs à son licenciement ainsi qu'une photographie non datée de son bureau.

Le 3 mai 2016, le Dr [C] qui suivait la salariée a rédigé une attestation dans laquelle il précise que 'les mentions de mes certificats médicaux ne peuvent en aucun cas être compris comme attribuant l'origine de la pathologie à la relation de travail. En effet, l'évocation de la relation de travail ne correspond qu'au récit de la patiente, sur la véracité duquel je ne peux me prononcer'.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que même si la salariée se trouvait en état anxio-dépressif, l'existence d'agissement répété de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel n'est pas établie.

Le jugement déféré en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral doit donc être confirmé.

Sur l'absence de visite médicale de reprise suite au classement en invalidité

Dès lors que le salarié informe son employeur de son classement en invalidité deuxième catégorie sans manifester sa volonté de ne pas reprendre le travail, il appartient à celui ci d'organiser la visite de reprise.

En l'espèce, la salariée en continuant à envoyer des arrêts de travail à son employeur de manière continue a manifesté sa volonté de ne pas reprendre le travail.

L'employeur n'était donc pas tenu d'organiser la visite de reprise et cette demande doit être rejetée.

Sur le manquement à l'obligation de reclassement

En application de l'article L 1226-2 du code du travail, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre poste approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié.

L'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

La recherche de reclassement doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel.

C'est à l'employeur de rapporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié.

La sanction de l'obligation de reclassement ne peut donner lieu qu'au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, la salariée a été déclaré inapte à tout poste dans l'entreprise en une seule visite en raison du danger immédiat pour sa santé.

L'employeur pour justifier de sa tentative de reclassement soutient qu'il a consulté l'ensemble des UGECAM en leur adressant un courrier personnalisé.

Toutefois comme il l'admet lui même, l'employeur gère 22 structures sanitaires et sociales et emploie 1 077 salariés dont 176 dans la catégorie des personnels administratifs.

La salariée démontre que de nombreux postes qui ne lui ont pas été proposés étaient disponibles au moment de son licenciement notamment un poste de secrétaire au sein de l'ARS Aquitaine, un poste de secrétaire auprès de la CARSAT Bourgogne, un poste de technicien auprès de la CPAM de Nimes.

Au vu des ces éléments, il est établi que l'employeur qui appartient à un groupe n'a réalisé aucune recherche sérieuse de reclassement.

En conséquence, il a manqué à son obligation de reclassement ce qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

En application de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale et eu égard à son ancienneté de plus de deux ans, la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis équivalente à deux mois de salaire soit la somme de 4 406€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 440,60 € pour les congés payés y afférents.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

La salariée, âgée de 45 ans, percevait un salaire de 2 203 €, avait une ancienneté de dix neuf années. Elle justifie être inscrite à Pôle Emploi et n'avoir toujours pas retrouvé d'emploi.

La cour est en mesure d'évaluer son préjudice lié à la perte de son emploi à la somme de 30 000 € infirmant ainsi le jugement.

Sur la remise des documents de fin de contrat

Suite à la rupture du contrat de travail, la salariée est en droit de solliciter une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés conformément au présent arrêt sous astreinte de 15 € par jours de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision et ce pour une durée de deux mois.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande d'allouer à l'intimée la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement rendu le 9 décembre 2016 par le conseil de prud'hommes de Montpellier sauf en ce qu'il a fixé à la somme de 50 000 € les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qui concerne la remise sous astreinte des documents sociaux,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne l'l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie du Languedoc Roussillon à payer à Mme [G] [I] la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne à l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie du Languedoc Roussillon de remettre à Mme [G] [I] une attestation Pôle Emploi et un certificat de travail rectifiés conformément au présent arrêt sous astreinte de 15 € par jours de retard passé un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision et ce pour une durée de deux mois.

Y ajoutant,

Ordonne à l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie du Languedoc Roussillon de rembourser à Pôle Emploi les allocations chômages payées à Mme [G] [I] du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois d'allocations chômage.

Condamne l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie du Languedoc Roussillon à payer à Mme [G] [I] la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne l'Union pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie du Languedoc Roussillon aux dépens d'appel.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16/00566
Date de la décision : 25/11/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 40, arrêt n°16/00566 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-25;16.00566 ?
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