La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2020 | FRANCE | N°17/04911

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 10 novembre 2020, 17/04911


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 10 NOVEMBRE 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04911 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NKDJ







Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 15/00878







APPELANTES :



SCI ATOLL FRANCE SCI immatriculée au RCS de NARBONNE sous le n° 442 969 127, prise

en la personne de son représentant légal en exercice, M. [P] [L], domicilié ès qualités audit siège,

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentée par Me Hugues MOULY de la SCP HABEAS AVOCATS ET CONSEILS, avocat au...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 10 NOVEMBRE 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/04911 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NKDJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 15/00878

APPELANTES :

SCI ATOLL FRANCE SCI immatriculée au RCS de NARBONNE sous le n° 442 969 127, prise en la personne de son représentant légal en exercice, M. [P] [L], domicilié ès qualités audit siège,

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentée par Me Hugues MOULY de la SCP HABEAS AVOCATS ET CONSEILS, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

SARL L'ASTATION SARL immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° 533 062 691, prise en la personne de son représentant légal, M. [P] [L], domicilié ès qualités audit siège,

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentée par Me Hugues MOULY de la SCP HABEAS AVOCATS ET CONSEILS, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

INTIMEE :

Madame [X] [O]

née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Estelle CONQUET de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

INTERVENANT VOLONTAIRE:

Monsieur [H] [N]

né le [Date naissance 2] 1940 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Estelle CONQUET de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 07 Septembre 2020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 SEPTEMBRE 2020, en audience publique, Monsieur Philippe GAILLARD ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

[X] [O] et son frère [H] [N] sont propriétaires indivis d'une parcelle de terrain, jouxtant une parcelle appartenant à la SCI Atoll France sur laquelle a été construit à la fin de l'année 2010 une station de lavage donnée à bail à la SARL Astation.

Se plaignant de nuisances occasionnées sur sa parcelle, [X] [O] obtient par ordonnance en référé du 21 février 2012 une expertise judiciaire dont le rapport est déposé le 26 janvier 2015.

Par acte d' huissier du 9 juin 2015, elle fait assigner la SCI Atoll France et la SARL Astation pour trouble anormal de voisinage et empiètement.

Le jugement rendu le 6 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Narbonne énonce dans son dispositif :

Condamne in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation à effectuer les travaux de construction de la plate-forme horizontale préconisée par l'expert pour permettre la dépose du container de [X] [O], sous astreinte de 50 € par jour à compter de la signification du jugement sur une période de quatre mois.

Condamne in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation à effectuer des travaux de construction d'un mur antibruit préconisé par l'expert, sous astreinte de 80 € par jour à compter de la signification du jugement sur une période de quatre mois.

Condamne in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation au paiement de 9600 € au titre du préjudice de jouissance du mois d'octobre 2011 mois de mars 2015, outre 200 € par mois à compter du mois d'avril 2015 jusqu'à la réalisation du mur.

Condamne in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation à payer la somme de 2000 € titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire.

Le jugement retient la recevabilité de l'action de [X] [O] en qualité d'indivisaire pour la conservation des droits de l'indivision en application de l'article 815-2 du Code civil.

Le jugement relève que le rapport de l'expert fait état d'une modification de l'extrémité du chemin de [X] [O] ne lui permettant plus de stocker son container pour permettre le ramassage des ordures ménagères, constate depuis la propriété de [X] [O] des bruits provenant du fonctionnement de la station de lavage avec une émergence calculée dépassant la valeur limite réglementaire, sur une parcelle pour laquelle le plan local d'urbanisme prévoit l'implantation de constructions à usage d'habitation, que préalablement à la construction de la station de lavage l'environnement de la parcelle se composait d'habitations individuelles et de parcelles inoccupées.

Le jugement rejette cependant l'affirmation de [X] [O] d'une modification entraînant des difficultés d'accès à la parcelle pour des camions, au motif que l'expert relève que l'état des lieux n'est pas conforme à l'entrée unique imposée par l'administration et que les modifications apportées n'obstruent pas de manière particulière l'accès à sa parcelle, constate l'implantation de la fosse étanche conforme aux normes réglementaires et l'absence de preuve de troubles olfactifs excédant les inconvénients normaux de voisinage, et qu'il n'y a pas d'aggravation de l'écoulement des eaux de pluie.

Le jugement rejette la prétention fondée sur des empiétements minimes, en ce qu'il ne constitue pas un abus de droit et en l'absence de demande d'indemnisation sur ce fondement, ainsi que la demande d'indemnisation de la perte vénale de la maison.

Le jugement fonde les condamnations à réparation sur les propositions de l'expert judiciaire.

La SCI Atoll France et la SARL Astation ont relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 13 septembre 2017, sur les dispositions du jugement à l'exception de celles qui ont rejeté la demande d'indemnisation en réparation de la perte de valeur vénale de la maison pour nuisances.

[H] [N] a déposé le 7 mars 2018 des conclusions d'intervention volontaire.

Une ordonnance rendue le 28 mai 2019 prononce l'irrecevabilité des conclusions de la SCI Atoll France et la SARL Astation en date du 6 juillet 2018, au motif qu'elles répondent exclusivement aux écritures d'appel incident déposées le 7 mars 2018 par [X] [O] après le délai de trois mois fixés par l'article 910 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 7 septembre 2020.

La SCI Atoll France et la SARL Astation ont déposé des écritures d'appelant le 13 décembre 2017, puis de nouvelles écritures le 12 novembre 2019.

Dans un message déposé au RPVA le 14 novembre 2019, le conseil de [X] [O] demande que les écritures du 12 novembre 2019 soient déclarées irrecevables pour les mêmes motifs que l'irrecevabilité prononcée des écritures du 6 juillet 2018.

Les dernières écritures pour [X] [O] ont été déposées le 7 mars 2018.

Les dernières écritures pour [H] [N] ont été déposées le 7 mars 2018.

Le dispositif des écritures pour la SCI Atoll France et la SARL Astation énonce :

Dire irrecevable l'intervention volontaire d'[H] [N].

Déclarer [X] [O] irrecevable à agir n'étant propriétaire que de la moitié indivise du bien.

Dire subsidiairement que [X] [O] n'est victime d'aucun trouble anormal de voisinage.

Plus subsidiairement, accorder aux sociétés les plus amples délais pour exécuter une éventuelle condamnation.

Condamner [X] [O] à payer la somme de 4500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner [X] [O] aux dépens de première instance et d'appel.

La SCI Atoll France et la SARL Astation soutiennent la prescription de cinq ans de l'intervention volontaire d'[H] [N] par ses écritures du 7 mars 2018 en application de l'article 2224 du Code civil, au regard de la date des plaintes de voisinage qui ont conduit [X] [O] à une demande en référé d'une expertise le 2 janvier 2012, qu'il ne pouvait pas ignorer comme le démontre notamment le mandat donné en cours d'instance à celle-ci d'engager une procédure judiciaire pour faire effectuer les travaux préconisés par l'expert.

La SCI Atoll France et la SARL Astation soutiennent l'irrecevabilité des demandes de [X] [O] pour les motifs invoqués devant le premier juge qu'elle n'est propriétaire indivis que de la moitié de la parcelle, et que [H] [N] n'est pas intervenu en première instance, en considération des dispositions de l'article 815-3 du Code civil qui requiert de détenir au moins les deux tiers des droits indivis pour agir sur des actes d'administration et a fortiori une revendication de propriété.

Sur le trouble anormal de voisinage, ils produisent des photographies montrant que le container est renversé au pied du talus en septembre 2009 alors qu'aucuns travaux n'avaient été entrepris, que depuis le permis de construire en novembre 2010 le conteneur n'a pas changé de positionnement, ils soutiennent que le simple dépassement de la valeur maximale réglementaire de l'émergence sonore ne suffit pas à excéder les inconvénients normaux de voisinage alors que l'immeuble de [X] [O] est entouré de routes à grande circulation à proximité d'un giratoire, que celle-ci indique qu'elle loue occasionnellement sa parcelle à destination de parking de camion et engins de chantier, et qu'elle a refusé à l'expert la possibilité de mesurer le bruit à l'intérieur de son habitation, qu'elle a acquis en connaissance de cause dans une zone d'activités artisanales et commerciales.

Le dispositif des écritures pour [X] [O] énonce:

Confirmer les dispositions du jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté [X] [O] du surplus de ses demandes.

Condamner in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation au paiement de 400 € par mois au titre du préjudice de jouissance à compter du mois d'avril 2015 et jusqu'à la réalisation effective des travaux.

Condamner in solidum la SCI Atoll France et la SARL Astation au paiement de 20 000 € au titre de la moins-value du bien.

Condamner la SCI Atoll France et la SARL Astation au paiement de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la SCI Atoll France et la SARL Astation aux dépens.

[X] [O] demande la confirmation des motifs du premier juge pour retenir la recevabilité de son action, concernant une action en conservation de l'indivision tendant à faire cesser des troubles de voisinage, un empiétement, et à l'indemnisation de la moins-value du bien.

[X] [O] soutient que l'expert a caractérisé la modification sans autorisation de l'extrémité de son chemin privé en créant un plan incliné en direction de son terrain pour permettre l'écoulement des eaux pluviales, et que la pente créée ne lui permet plus de stocker son container comme l'a relevé l'expert, que l'expertise a également constaté un bruit significatif du fonctionnement de la station de lavage dont l'émergence dépasse la valeur limite réglementaire, de sorte qu'elle ne peut plus ouvrir ses fenêtres et profiter de sa terrasse et de sa piscine sans subir les nuisances.

Elle expose que son bien immobilier était édifié de nombreuses années avant l'apparition des activités artisanales et commerciales.

Elle soutient l'augmentation de l'évaluation du préjudice de jouissance par l'absence de tous travaux engagés pour réduire les troubles depuis l'introduction de l'instance, par la prise en considération de l'empiétement même de faible importance sur sa parcelle, au motif que le nouvel aménagement réalisé sans concertation ne permet plus aux camions d'accéder à son chemin, que même si l'installation de la Fosse étanche et conforme elle crée des nuisances olfactives importantes à chaque vidange.

Elle prétend démontrer la moins-value de son bien occasionné par les désordres.

Le dispositif des écritures pour [H] [N] énonce :

Donner acte à [H] [N] de son intervention volontaire et la déclarer recevable.

Faire droit aux demandes de [X] [O].

Condamner la SCI Atoll France et la SARL Astation à payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

[H] [N] déclare être intervenu au soutien de sa s'ur dont la recevabilité à agir seule était contestée, alors qu'il lui avait donné mandat d'engager la procédure judiciaire.

MOTIFS

Sur la recevabilité des écritures d'appelant du 12 novembre 2019

La cour doit rechercher pour déterminer la recevabilité des écritures d'appelant du 12 novembre 2019, comme le magistrat de la mise en état l'avait recherché dans l'ordonnance du 28 mai 2019 prononçant l'irrecevabilité des écritures précédentes en date du 6 juillet 2018, si les conclusions n'étaient pas au moins en partie destinées à développer l'appel principal et non pas à répondre à l'appel incident.

L'appel incident de [X] [O] porte sur un doublement de la base mensuelle d'évaluation de son préjudice de jouissance, et sur l'indemnisation du préjudice d'une perte de valeur vénale du bien en raison des nuisances.

La cour constate la similitude des prétentions au dispositif des écritures d'appelant du 12 novembre 2019 avec celles initiales du 13 décembre 2017.

La cour constate que les dernières écritures d'appelant du 12 novembre 2019 développent partiellement une argumentation sur les moyens des prétentions d'appel incident de [X] [O], au titre des nuisances qui pourraient fonder la moins-value de son bien, des problèmes d'accès à la parcelle, des troubles olfactifs.

La cour retiendra en conséquence la recevabilité des écritures déposées le 12 novembre 2019, sauf sur les moyens développés sous l'intitulé en page 12 et 13 :

D) l'accès à la parcelle de [X] [O], et E) le prétendu trouble olfactif.

Sur la recevabilité des actions

L'action de [X] [O] vise à demander en appel la confirmation des condamnations prononcées en première instance, et une augmentation de l'évaluation du préjudice de jouissance jusqu'à la réalisation des travaux préconisés par l'expert.

La confirmation du premier juge concerne l'évaluation du préjudice de jouissance, mais également la construction d'une plate-forme permettant la dépose du container, et la construction d'un mur antibruit.

L'article 815-2 du Code civil autorise tout indivisaire à prendre les mesures nécessaires à la conservation du bien indivis.

Les prétentions à la construction d'une plate-forme et d'un mur antibruit, n'ont pas un caractère de mesures nécessaires à la conservation du bien indivis.

Cependant, l'article 815-3 du Code civil qui énonce l'exigence d'une majorité des deux tiers des droits indivis, que ne détiennent ni [X] [O] ni [H] [N] propriétaires indivis par moitié, indique dans son dernier alinéa « si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis au su des autres et sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite concernant les actes d'administration.

Il est constant dans l'espèce qu'[H] [N] était au courant de l'action judiciaire engagée par [X] [O], et qu'il ne s'y est pas opposé alors qu'il fonde son intervention volontaire sur le soutien des prétentions de [X] [O].

La cour en déduit la réalité d'un mandat tacite pour les actes d'administration du bien indivis, caractérisés dans les prétentions au bénéfice d'un préjudice de jouissance, de la construction d'une plate-forme pour poser un container et d'un mur antibruit.

La cour ajoute que les règles énoncées par les articles 815-1 et suivants du Code civil concernant « le régime légal de l'indivision » ont vocation à protéger les droits des indivisaires et non pas les droits des tiers.

Par ces motifs substitués, la cour confirme la recevabilité de l'action de [X] [O].

L'article 2224 du Code civil énonce que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits.

Il n'est pas sérieusement contestable qu'[H] [N] ne pouvait pas ignorer les faits qui ont fondé l'action de [X] [O] lorsque celle-ci a engagé le 2 janvier 2012 un référé expertise sur les désordres à l'origine de ses prétentions.

Cependant, [H] [N] a donné un mandat express à [X] [O] en date du 29 février 2016 pour engager la procédure judiciaire de l'instance actuelle sur ces prétentions.

La cour retient que ce mandat express dépourvu d'ambiguïté caractérise une régularisation de l'action engagée par la seule [X] [O] par l'assignation initiale du 9 juin 2015, devenant ainsi une action au bénéfice de l'entière indivision, de sorte que l'intervention volontaire en appel d'[H] [N] par ses écritures du 7 mars 2018 ne constitue que la formalisation de sa présence dans l'instance judiciaire, dans laquelle était déjà depuis le mandat du 29 février 2016, moins de cinq ans après le 2 janvier 2012, l'entière indivision sur le bien objet du litige.

La cour rejette en conséquence le moyen de prescription en application du délai de l'article 2224 du Code civil.

Sur les prétentions au fond

[X] [O] et [H] [N] demandent la confirmation de la condamnation des sociétés prononcée en première instance à effectuer les travaux de construction de la plate-forme horizontale préconisée par l'expert pour permettre la dépose du container, et des travaux de construction d'un mur antibruit préconisé par l'expert.

L'expert relève sans être contredit que pour la réalisation des abords de la station de lavage a été créé un plan incliné en direction du terrain des intimés, que le représentant des sociétés présent à l'expertise, Monsieur [L], donne son accord de principe pour l'aménagement d'une partie horizontale pour permettre le dépôt du container que la pente créée ne permettrait plus de stocker en limite de propriété pour le ramassage.

L'argumentation des écritures des sociétés fondées sur des photographies avant et après la réalisation de la station de lavage montrant les différents positionnements du container, d'une part ne suffisent pas à contredire la difficulté nouvelle de positionnement du container du fait de la création non contestée d'une pente, d'autre part ne permet pas de remettre en cause l'acceptation devant l'expert de procéder à l'aménagement d'une plate-forme horizontale, constituant un aveu judiciaire.

La cour confirme en conséquence la condamnation prononcée à ce titre dans les termes du dispositif du jugement déféré.

L'expert a confié une étude acoustique à un cabinet technique dont le rapport établi que le fonctionnement de la station de lavage génère un bruit significatif sur la propriété des intimés, dont l'émergence dépasse la valeur limite réglementaire.

Le premier juge relève pour fonder l'existence d'un trouble anormal de voisinage, que le plan local d'urbanisme dédié à une zone artisanale et commerciale prévoit également l'implantation d'habitation individuelle, et que préalablement à la construction de la station de lavage l'environnement de la parcelle se composait d'habitations et de parcelles inoccupées.

Cependant, la cour constate que la preuve n'est pas suffisamment apportée que le trouble qui ne peut pas seulement résulter du dépassement d'une limite réglementaire excède dans le contexte d'environnement de la parcelle les inconvénients normaux de voisinage.

Il résulte en effet des documents de plans et de photographies produits par l'une ou l'autre partie que la parcelle des intimés se situe en bordure d'un grand rond-point de carrefour routier de rocades destinées à une importante circulation de véhicules.

Les écritures des sociétés relèvent avec pertinence que [X] [O] a déclaré louer sa parcelle pour un parking de camions et engins de chantier, que l'expertise technique acoustique n'a été réalisée qu'à l'extérieur de l'habitation, que la parcelle a été acquise dans une zone artisanale et commerciale, de sorte que l'émergence d'un dépassement anormal de l'environnement habituel quotidien nécessairement bruyant n'est pas démontrée.

La cour relève que l'argumentation développée dans les écritures de [X] [O] se contente d'un énoncé de principe des textes et des jurisprudences sans aucun élément de nature à caractériser le cas d'espèce.

[X] [O] affirme dans ses écritures que Monsieur [L] aurait également accepté devant l'expert judiciaire la construction du mur antibruit. Cependant la cour ne trouve à aucun moment cet aveu dans les écritures du rapport de l'expert, et [X] [O] n'indique pas l'endroit du propos qu'elle invoque.

La cour infirme en conséquence la condamnation prononcée par le premier juge à la construction d'un mur antibruit.

[X] [O] et [H] [N] demandent ensuite par appel incident de porter à la somme de 400 € par mois l'évaluation prononcée à hauteur de 200 € par le premier juge du préjudice de jouissance des lieux après le mois d'avril 2015.

La cour constate que le premier juge a prononcé la condamnation au paiement d'un préjudice de jouissance sur le seul fondement des nuisances sonores qui n'ont pas été retenues en appel.

La cour a statué sur le litige de positionnement du container qui ne constitue pas par ailleurs un élément de trouble anormal de voisinage.

Les écritures de [X] [O] reprennent au soutien du trouble de jouissance la modification de la pente à l'extrémité du chemin de l'accès à sa parcelle, les empiétements minimes sur les limites de la parcelle, les nuisances olfactives résultant de l'implantation de la fosse étanche, mais les investigations de l'expert ont établi sans ambiguïté l'absence de trouble particulier à ces divers titres à l'exception du positionnement du container, et [X] [O] ne caractérise par aucune pièce produite un trouble de jouissance distinct qui en résulterait.

Il en résulte que la cour infirme la condamnation prononcée en première instance au titre d'un préjudice de jouissance résultant de nuisances sonores dont le caractère de trouble anormal de voisinage n'est pas retenu, rejette les autres fondements invoqués d'un préjudice de jouissance, et en conséquence également la demande par appel incident d'augmentation de l'évaluation du trouble.

La cour constate que le motif pertinent du premier juge pour rejeter la demande d'indemnisation d'une perte de valeur vénale de l'habitation est toujours d'actualité, à défaut de produire en appel une quelconque pièce démontrant la perte de valeur invoquée.

Sur les autres prétentions

Il n'est pas inéquitable en considération de l'infirmation et la confirmation partielle du jugement de laisser à la charge de chacune des parties les frais non remboursables exposés en appel, mais de confirmer la condamnation prononcée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance dont le jugement a confirmé la condamnation à effectuer la construction d'une plate-forme pour permettre le dépôt du container.

La SCI Atoll France et la SARL Astation, à l'encontre desquelles la cour a confirmé une condamnation prononcée en première instance, supporteront la charge des dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Déclare recevables les écritures déposées le 12 novembre 2019 par la SCI Atoll France et la SARL Astation, sauf sur les moyens développés sous l'intitulé en page 12 et 13 : D) l'accès à la parcelle de [X] [O], et E) le prétendu trouble olfactif ;

Déclare recevables les actions de [X] [O] et [H] [N] ;

Confirme le jugement rendu le 6 juillet 2017 par le tribunal de grande instance de Narbonne, sauf en ce qu'il condamne la SCI Atoll France et la SARL Astation à effectuer les travaux de construction d'un mur antibruit, et au paiement d'un préjudice de jouissance ;

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ;

Condamne solidairement la SCI Atoll France et la SARL Astation aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,

P.G


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/04911
Date de la décision : 10/11/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°17/04911 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-10;17.04911 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award