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27/02/2020 | FRANCE | N°19/02164

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre civile, 27 février 2020, 19/02164


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER





2e chambre civile

(anciennement dénommée 1ère chambre D)





ARRET DU 27 FEVRIER 2020



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/02164 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OCVZ







Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 MARS 2019

JUGE DE L'EXECUTION DE BEZIERS

N° RG 18/01586







APPELANTE :



SAS DSO CAPITAL, immatriculée a

u RCS de Paris sous le N°B 821 693 918, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me LAMBERT substituant Me Christel DAUDE ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

(anciennement dénommée 1ère chambre D)

ARRET DU 27 FEVRIER 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/02164 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OCVZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 MARS 2019

JUGE DE L'EXECUTION DE BEZIERS

N° RG 18/01586

APPELANTE :

SAS DSO CAPITAL, immatriculée au RCS de Paris sous le N°B 821 693 918, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me LAMBERT substituant Me Christel DAUDE de la SCP D'AVOCATS COSTE, DAUDE, VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [O] [C]

né le [Date naissance 1] 1956 à [Localité 12] ITALIE

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me VERGNAUD substituant Me Aziza BATAL-GROSCLAUDE, avocat au barreau de BEZIERS

Madame [K] [Z]

née le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 11] - ITALIE

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me VERGNAUD substituant Me Aziza BATAL-GROSCLAUDE, avocat au barreau de BEZIERS

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 25 Novembre 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 DECEMBRE 2019, en audience publique, Mme Myriam GREGORI ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la cour composée de :

Madame Véronique BEBON, Présidente de chambre

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

Mme Nelly SARRET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Ginette DESPLANQUE

L'affaire, mise en délibéré au 23/01/20, a été prorogée au 30/01/20 puis au 13 février 2020 puis au 27 février 2020.

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Madame Véronique BEBON, Présidente de chambre, et par Mme Ginette DESPLANQUE, Greffier.

-----------------

EXPOSE DU LITIGE :

Par acte en date du 8 juin 2018, la SASU DSO CAPITAL, venant aux droits de la SA BNP PARIBAS, agissant en vertu d'un jugement rendu le 26 mars 1992 par le tribunal de commerce de Nanterre, signifié le juin 1992 selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, a fait délivrer à [O] [C] et [K] [Z] un commandement de payer aux fins de saisie-vente, afin d'obtenir paiement de la somme de 100.056,51 euros en

principal, intérêts et frais.

Par acte d'huissier du 4 juillet 2019, [O] et [K] [Z] ont saisi le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Béziers aux fins de contestation de ce commandement aux fins de saisie-vente.

Par jugement du 19 mars 2019, le juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Béziers a :

- constaté l'absence de qualité à agir de la société DSO CAPITAL,

- prononcé la nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente délivré le 8 juin 2018,

- débouté [O] [C] et [K] [Z] du surplus de leurs demandes,

- condamné la société DSO CAPITAL à payer à [O] [C] et [K] [Z] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société DSO CAPITAL aux entiers dépens.

Ce jugement a été notifié à la SASU DSO CAPITAL par le greffe du juge de l'exécution par lettre recommandée avec demande d'avis de réception revenu signé le 21 mars 2019.

La SASU DSO CAPITAL a interjeté appel de cette décision par déclaration du 29 mars 2019.

Par conclusions signifiées par la voie électronique le 22 novembre 2019, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SASU DSO CAPITAL demande à la cour de :

* réformer en ses entières dispositions le jugement rendu le 19 mars 2019 par le Juge de l'exécution près le Tribunal de Grande Instance de BEZIERS,

et statuant à nouveau :

- dire et juger que la S.A.S DSO CAPITAL a qualité et intérêt à agir à l'encontre de Monsieur [O] [C] et de Madame [K] [Z],

- dire et juger valide l'acte de signification du jugement réputé contradictoire du TRIBUNAL de COMMERCE de NANTERRE du 26 mars 1992,

- dire et juger que la créance de la société DSO CAPITAL à

l'encontre de Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] n'est pas prescrite,

Ce faisant,

- valider le commandement de payer aux fins de saisie-vente signifié à Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] par exploit d'huissier du 08 juin 2018,

* Subsidiairement, sur le seul montant visé dans le commandement de payer signifié le 08 Juin 2018 :

- valider le commandement de payer aux fins de saisie-vente signifié à Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] par exploit d'huissier du 08 juin 2018 pour un total de 95.512,02 euros.

- débouter Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] de l'intégralité de leurs contestations, fins et demandes,

* En tout état de cause :

- condamner Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] à payer chacun à la SAS DSO CAPITAL la somme de 750 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens.

Par conclusions signifiée par la voie électronique le 21 novembre 2019, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] demandent à la cour de :

* confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 mars 2019 par le Juge de l'exécution près le Tribunal de Grande Instance de BEZIERS,

* Ce faisant, à titre principal, juger que la société DSO CAPITAL n'avait pas qualité à agir à la date du commandement et conséquement prononcer la nullité du commandement de payer, délivré le 08 juin 2018.

* prononcer la nullité de l'acte de signification délivré le 02 juin 1992 selon procès-verbal de recherches infructueuses en vertu des dispositions des articles 114, 659 et 693 du code de procédure civile

* dire et juger que le jugement rendu le 26 mars 1992 par le tribunal de commerce de NANTERRE est non avenu en vertu des dispositions de l'article 478 du CPC faute de signification régulière

* prononcer la nullité du commandement aux fins de saisie-vente du 08 juin 2018 en raison de la signification irrégulière et de la caducité du jugement rendu le 26 mars 1992 par le tribunal de commerce de NANTERRE fondant les poursuites.

* prononcer la caducité du jugement fondant les poursuites et dire que le jugement rendu le 26 mars 1992 par le tribunal de commerce de NANTERRE est non avenu

* A titre subsidiaire :

- juger que la cession de créance communiquée au cours de la procédure est nulle comme entachée de fraude et conséquemment est inopposable à M. [C] et à Madame [Z] aux débats

- juger que la cession de créance est inopposable à M. [C] et à Madame [Z] au regard de l'existence de la clause de stipulation pour autrui dès lors que l'absence de signification de la cession de créances aux débiteurs, n'est pas contestée, en vertu des articles 1205 et 1206 du code civil (art 1121 code civil ancien)

- juger que la cession de créance est inopposable à M. [C] et à Madame [Z] au regard de l'absence de quittance subrogative justifiant que la société DSO CAPITAL est propriétaire de la créance alléguée

- juger que la cession de créance est inopposable à M. [C] et à Madame [Z] dans la mesure où le débiteur cédé figurant sur l'annexe 1 de la cession de créance est « CAPRICE D'OR ».

- juger en tout état de cause que la société DSO CAPITAL n'avait pas qualité à agir à la date du commandement de payer, délivré le 08 juin 2018 et que la régularisation opérée en cours de procédure, ne peut rétroagir à la date du commandement de payer, délivré le 08 juin 2018

- en conséquence, juger irrecevables les demandes formées par la société DSO CAPITAL

- dire et juger que l'action en recouvrement des condamnations prononcées par le jugement rendu le 26 mars 1992 par le tribunal de commerce de NANTERRE était prescrite au jour où la société DSO CAPITAL a notifié la cession de créances par voie de conclusions le 04 octobre 2018.

- juger irrecevables les demandes formées par la société DSO CAPITAL

* A titre infiniment subsidiaire :

- dire et juger que la société DSO CAPITAL ne rapporte pas la preuve du montant, en principal de la créance cédée dans la mesure où le prix de la cession n'est pas renseigné et le montant de la créance cédée alléguée à l'encontre de M. [C] et Mme [Z] n'est pas mentionné.

- rejeter la demande en paiement formée par la société DSO CAPITAL.

* En tout état de cause :

- condamner la société DSO CAPITAL au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- condamner la SASU DSO CAPITAL venant aux droits de la SA BNP PARIBAS au paiement de la somme de 3000 euros en vertu de l'article 700 du

code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIVATION

Sur la nullité du commandement de payer aux fins de saise-vente du 8 juin 2018 tirée du défaut de qualité à agir de la SASU DSO CAPITAL et de l'inopposabilité de la cession de créance

Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] soulèvent à titre principal le défaut de qualité à agir de la SASU DSO CAPITAL en exécution du jugement du 26 mars 1992 rendu par le tribunal de commerce de Nanterre à la demande de la société BNP PARIBAS en faisant valoir qu'à défaut pour la société DSO CAPITAL d'avoir procédé à la signification de la cession de créance invoquée de la société BNP PARIBAS en date du 27 juin 2016, conformément à l'article 1690 ancien du code civil applicable en l'espèce, cette cession ne leur est pas opposable et la SASU DSO CAPITAL ne dispose donc pas d'un titre exécutoire fondant le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018, atteint en conséquence de nullité. Subsidiairement, ils développent des moyens tirés de l'innopposabilité de la cession de créance et tendant aux mêmes fins.

La SASU DSO CAPITAL justifie que suivant convention de créances en date du 27 juin 2016, la société BNP PARIBAS a cédé à la SAS DOS Interactive en pleine propriété ses créances, lesquelles figurent sur une liste jointe en annexe 1 de la convention, que sur cette liste figure une créance portant la référence n° 08470-00350-07/01/1997-00001000007 dont le débiteur est 'Caprice d'Or', que la dite référence figure également en totalité ou en partie sur les actes de l'huissier chargé du recouvrement de la créance par la BNP PARIBAS antérieurement à la cession en exécution du jugement du 26 mars 1992 (signification d'un certificat de non-contestation du 4 février 2005 à Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z], courrier de l'huissier du 15 février 2008 à BNP) et que si le jugement du 26 mars 1992 condamne personnellement Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] au paiement des sommes dues à la société BNP Paribas, il mentionne également que c'est en leur qualité d'exploitant de l'enseigne 'Caprice d'Or', de sorte qu'il convient de considérer que la cession de créances concerne bien la créance détenue par la société BNP PARIBAS envers Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] en vertu du jugement du 26 mars 1992 fondant le commandement de saisie-vente du 8 juin 2018. Il est indifférent que la liste des créances cédées soit incomplète, dés lors que seul importe la certitude que la créance en cause est bien comprise dans la liste en question.

Aux termes de l'article 1690 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, le cessionnaire n'est cependant saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.

Aucune disposition n'impose néanmoins au créancier de signifier la cession de créance dans un délai imparti, cette signification pouvant intervenir tant que le débiteur cédé ne s'est pas acquitté de sa dette et pouvant résulter de tous actes de procédure de nature à informer le débiteur à condition qu'ils contiennent les éléments nécessaires à son exacte information quant au trasnfert de la créance. Or, en l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] n'ont pas procédé au règlement des causes du commandement du 8 juin 2018. La SASU DSO CAPITAL justifie au surplus aux termes de ses conclusions tant devant le premier juge qu'à hauteur de cour, qu'elle a informé les débiteurs de la cession de la créance en faisant mention de cette cession intervenue entre BNP PARIBAS et DSO Interactive puis de l'apport partiel d'actifs comprenant cette même créance par DSO Interactive à DSO CAPITAL et qu'elle a régulièrement communiqué aux débiteurs lors de cette instance la convention de cession de créance et le traité d'apport partiel, pièces numérotées 6 et 7. Ces conclusions contiennent les éléments nécessaires et suffisants permettant aux débiteurs d'identifier la créance cédée et leur nouveau créancier et les mettant en mesure de se libérer valablement entre les mains de DSO CAPITAL. Il ne ressort, par ailleurs, de la convention de cession communiquée aux débiteurs aucun montage frauduleux, l'acte étant parfaitement lisible et l'absence d'indication du montant de la créance cédée étant indifférente, les autres mentions figurant sur la liste et telles que relevées précédemment étant suffisantes pour l'identifier. Le prix de la cession non mentionnée dans l'acte en cause n'est pas davantage un élément d'information nécesssaire à l'information du débiteur cédé quant au transport de sa créance et de manière générale, le fait que certaines mentions aient été masquées en blanc n'altérant pas la nature de l'acte et sa réalité mais ayant uniquement pour objet de ne pas dévoiler aux débiteurs des informations confidentielles ne les concernant pas.

La cession de créance ayant donc été signifiée valablement à Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] par voie de conclusions au cours de l'instance en contestation du commandement de payer du 8 juin 2018, elle doit être considérée comme leur étant parfaitement opposable, les dispositions prévues à l'article 1205 du code civil (ancien article 1121 alinéa 1er) et relatives à la stipulation pour autrui invoquées par les appelants n'ayant pas à s'appliquer.

Si l'article 4 en son alinéa 2 de la convention de cession du 27 juin 2016 prévoit que le cessionnaire pourra faire parvenir au cédant pour signature une quittance subrogative pour chacune des créances cédées, il ne s'agit que d'une simple faculté et l'alinéa 1er de ce même article prévoit que 'le cessionnaire sera à la date d'entrée en vigueur de la convention subrogé de plein droit dans la totalité des droits, privilèges, hypothèques et actions que le cédant posséde à l'encontre des débiteurs cédées sur les créances cédées, .....sans restriction, ni réserves', de sorte qu'il n'est nul besoin pour la société DSO CAPITAL de produire une quittance subrogative pour justifier de sa qualité à agir.

Il est également établi que la DSO Interactive a fait l'apport à la SASU DSO CAPITAL de l'ensemble de ses actifs (biens, droits et obligations) composant la branche d'activité 'rachat de créances' suivant traité d'apport partiel d'actifs soumis au régime des scissions en date du 30 juillet 2016, acte ayant fait l'objet d'une publication au BODACC le 19 août 2016, ainsi qu'il en est justifié, contrairement aux affirmations des appelants et prévoyant expressément que la société bénéficiaire, en l'occurence, la SASU DSO CAPITAL sera subrogée purement et simplement dans les droits et obligations de la société apporteuse, soit la société DSO Interactive et dans le bénéfice et la charge des contrats de toute nature liant cette dernière à des tiers et se rattachant exclusivement à la branche d'activité 'Rachat de créances'. Cet apport d'actifs emportant transmission universelle du patrimoine attaché à la branche d'activité 'Rachat de crédit' ainsi apportée, la créance que la société DSO Interactive détenait à l'égard de Monsieur [O] [C] et de Madame [K] [Z] en vertu du jugement du 26 mars 1992 a été automatiquement transmise à la société DSO CAPITAL, le rachat des créances de la société BNP PARIBAS étant clairement identifié en dernière page de la liste des rachats de créances figurant en annexe 2 faisant mention de la date de la convention de cession de créances du 27 juin 2016.

Enfin si le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 mentionne que la SASU DSO CAPITAL agit aux droits de la société BNP PARIBAS alors qu'elle agit aux droits de la société DSO Intervactive agissant elle-même aux droits de la société BNP PARIBAS, ce libellé ne saurait entraîner la nullité de l'acte alors qu'il n'est démontré l'existence d'aucun grief à l'encontre des débiteurs, lesquels sont informés par la délivrance de cet acte de l'existence de leur nouveau créancier aux lieu et place de leur créancier originaire, BNP PARIBAS, leur permettant d'une part, contrairement aux allégations des intimés, de faire le lien avec leur dette contractée auprès de BNP PARIBAS et d'autre part de pouvoir procéder au règlement de cette dette auprès de leur nouveau créancier, l'omission de la mention relative à la chaîne des cessions de créance et à l'existence de la DSO Interactive n'ayant pu entrainer aucune confusion dans l'esprit des débiteurs sur l'origine de la dette et la destination éventuelle de leurs paiements.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de considérer que la SASU DSO CAPITAL avait donc qualité à agir en faisant délivrer à l'encontre Monsieur [O] [C] et de Madame [K] [Z] le dit commandement en exécution du jugement du 26 mars 1992. C'est, en conséquence, à tort que le premier juge a constaté le défaut de qualité à agir de la SASU DSO CAPITAL et a prononcé la nullité du commandement en se fondant sur l'absence de signification de la cession de créance.

Il convient donc d'infirmer la décision entreprise et statuant à nouveau de dire que la SASU DSO CAPITAL avait qualité à agir en faisant délivrer à l'encontre Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 en exécution du jugement du 26 mars 1992 , et de rejeter tant la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] à ce titre que la demande de nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018.

Sur la prescription de l'exécution du titre

Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] soulèvent la prescription de l'exécution du jugement du 26 mars 1992 , la cession de créance ne leur ayant été signifiée que suivant conclusions du 4 octobre 2018 alors que le délai de prescription était acquis depuis le 19 juin 2018.

La SASU DSO CAPITAL fait valoir que le délai de prescription a été interrompu par la délivrance du commandement litigieux, soit le 8 juin 2018.

Aux termes de l'article L. 111-4 du Code des procédures civiles d'exécution, issu de la loi n° 2008 -561 du 17 juin 2008, l'exécution des titres exécutoires ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long.

L'article 26-II de la loi précitée et l'article 2222 alinéa 2 du code civil prévoient que les dispositions de la loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

En l'espèce, le titre dont l'exécution est en cause est un jugement rendu le 26 mars 1992, soit avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2008 -561 du 17 juin 2008, alors que la prescription applicable avant cette date aux voies d'exécution était trentenaire en vertu de l'article 2262 de l'ancien code civil.

Le délai de prescription de 30 ans qui courrait initialement jusqu'au 22 mars 2022 n'étant pas expiré au moment de l'entrée en vigueur de la loi n° 2008 -561 du 17 juin 2008, le nouveau délai de prescription de 10 ans prévu par la loi s'est substitué à la prescription trentenaire, ce nouveau délai de prescription ayant

commencé à courir à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi, soit à compter du 19 juin 2008, la loi précitée étant d'application immédiate et son entrée en vigueur s'étant donc effectuée le lendemain de sa publication.

L'exécution du jugement du 22 mars 1992 pouvait, en conséquence, parfaitement être poursuivie jusqu'au 19 juin 2018 et n'était donc pas atteinte par la prescription au moment de la délivrance du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018, peu important la date à laquelle la cession de créance a été notifiée aux intimés.

Il convient de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription et soulevé par les intimés.

Sur la nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente en l'absence de signification régulière

Les intimés soutiennent que la signification du jugement du 26 mars 1992 rendu par le tribunal de commerce de Nanterre fondant le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 et effectué le 2 juin 1992, suivant procès-verbal de recherche infructueuse, ne leur a pas été signifié régulièrement en l'absence de diligences de l'huissier pour rechercher leur domicile et pour leur délivrer l'acte à personne alors même que la société BNP PARIBAS connaissait leur lieu de domicile personnel. Ils demandent, en conséquence, à la Cour de prononcer la caducité du jugement du 26 mars 1992 en application de l'article 478 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article 689 du code de procédure civile, les notifications sont faites au lieu où demeure le destinataire de l'acte s'il s'agit d'une personne physique.

Il ressort, par ailleurs, de l'article 659 du code de procédure civile, que lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile , ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.

En l'espèce, il ressort de la signification du jugement réputé contradictoire du 26 mars 1992 effectuée le 2 juin 1992 que l'huissier de justice s'est déplacé [Adresse 3] [Localité 10], adresse figurant sur le jugement, qu'il a constaté qu'aucune personne répondait à l'identité des deux destinataires de l'acte ni à leur domicile ou leur résidence, qu'il a été déclaré par la librairie se trouvant dans les lieux que les susnommés étaient partis sans laisser d'adresse, que poursuivant ses recherches et investigations, tant auprès des principaux voisins, qu'auprès du commissariat de police et du bureau des PTT du quartier, il s'est alors avéré que les destinataires de l'acte étaient actuellement sans domicile, ni résidence, ni lieu de travail connu et qu'enfin le 'CAPRICE D'OR' n'était pas inscrit au registre du commerce de Nanterre.

Monsieur [O] [C] et à Madame [K] [Z] prétendent qu'ils demeuraient au jour de cette signification ' [Adresse 9]- [Localité 8]'. Ils produisent à cet égard deux factures EDF-GDF l'une en date du 2 septembre 1991, l'autre en date du 2 septembre 1992. Cependant ils ne produisent aucune pièce de nature à établir que la BNP PARIBAS avait connaissance, au moment de la signification du jugement, de cette nouvelle adresse, alors même qu'il ressort des mentions du jugement que l'adresse dont le créancier avait connaissance au cours de la procédure judiciaire est bien celle dont l'huissier de justice a tenu compte pour procéder à sa signification.

Si, par ailleurs, l'obligation pour Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] d'informer la société BNP PARIBAS de leur changement de résidence, ne dispensait pas l'huissier de justice de faire toutes diligences pour rechercher l'adresse réelle des destinataires de l'acte et pour signifier ses actes à la personne de ces derniers, il convient de considérer, en l'espèce, que les diligences mentionnées par l'huissier de justice pour la signification de l'acte à la dernière adresse connue des appelants, et particulièrement, le fait d'avoir interrogé la personne résidant en leur lieu et place, les voisins, le commissariat de police et le bureau des PTT du quartier et d'avoir même tenté de localiser par son inscription au registre du commerce de Nanterre la société ' Le Caprice d'Or' exploitée par Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z], suffisent à établir la réalité, ainsi que le caractère sérieux et suffisant des recherches effectuées par l'huissier de justice pour les localiser sans qu'il ne puisse lui être fait grief de n'avoir pas poursuivi ses investigations, ni d'avoir limité celles-ci à une recherche au seul nom de la société.

La signification en date du 2 juin 1992 du jugement du 26 mars 1992 a donc été valablement délivrée et n'est pas entachée de nullité, le jugement du 26 mars 1992 n'encourant, en conséquence, aucune caducité tirée de l'application de l'article 478 du code de procédure civile .

La SASU DSO CAPITAL disposait bien d'un titre exécutoire au sens de l'article L 111-3 du code de procédure civile d'exécution lui permettant de faire délivrer valablement le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018.

Il convient donc de rejeter la demande formée par les intimés aux fins de voir déclarer nul ledit commandement pour ce motif.

Sur la contestation relative au quantum de la créance

Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] contestent le quantum de la créance figurant sur le commandement litigieux en faisant valoir que l'acte de cession ne leur permet pas d'opérer un contrôle sur le montant des sommes réclamées.

Aux termes de l'article L 211-1 du code de procédure civile, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur.

Il importe peu que la convention de cession de créances du 27 juin

2016 ne contienne aucun élément de nature à vérifier le quantum de la créance, dés lors que l'acte portant sur l'exécution du titre contient les éléments nécessaires permettant d'effectuer ce contrôle et que le créancier produit au cours de l'instance devant le juge de l'exécution saisi des contestations du débiteurs les pièces justificatives relative à la créance.

Or, en l'espèce, le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 comporte le décompte suivant :

- Principal 1393, 38 €

- Principal 60 173, 90 €

- Article 700 457, 35 €

- Frais antérieurs (dépens) : 397, 71 €

- Intérêts échus 36 723, 88 €

- Frais 850, 78 €

- Coût de l'acte 76,91 €

-A 444-31 CC 427, 14 €

- A déduire, acomptes 444, 54 €

Soit un total de 100 056, 51 €.

La SASU DSO CAPITAL produit le titre exécutoire constitué par le jugement du 26 mars 1992, lequel condamne les débiteurs au paiement des sommes suivantes :

- 91 940 francs (14 016, 16 €) en principal au titre du solde débiteur d'un compte courant, avec intérêts au taux légal à compter du 19 avril 1991

- 398 257, 07 francs (60 713, 89 €) en principal au titre d'une ouverture de crédit pour réglement d'un prix de cession d'un droit au bail, avec intérêts conventionnels au taux de 11, 96 % l'an à compter du 8 avril 1990

- 3000 francs (457, 35 €) au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- 271 francs (41, 31 €) au titre des dépens à recouvrer.

Elle justifie également d'un acte de saisie du greffier en chef du tribunal d'instance de Béziers du 19 décembre 2006 en matière de saisie des rémunérations du travail de Monsieur [C] portant sur la créance en cause à concurrence d'un montant total de 106 347, 25 € comportant le détail du principal, des frais, des intérêts échus et des acomptes versés.

Elle produit encore un décompte des frais de l'huissier en date du 15 février 2008.

Dés lors, Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] ont parfaitement été en mesure de contrôler le montant de la créance et de faire valoir leurs contestations éventuelles à ce titre. Cependant, à défaut pour eux de porter des contestations précises sur le quantum de la créance figurant au commandement de payer, les intimés se contentant de faire état des montants exorbitants des condamnations prononcées à leur encontre par le jugement du tribunal de commerce du 26 mars 1992, que le juge de l'exécution n'a pas le pouvoir de modifier et d'affirmer que le droit cédé est incontestablement litigieux, la Cour n'est saisie d'aucun moyen précis de contestation portant sur le montant de la créance, tel que figurant à l'acte du 8 juin 2018, la SASU DSO CAPITAL justifiant quant à elle d'une créance liquide et exigible.

Il convient, en conséquence, de rejeter la contestation soulevée par Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] sur le montant de la créance et de valider le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 à concurrence du montant y figurant.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] succombant à l'ensemble de leurs fins de non-recevoir et de leurs contestations, ils ne justifient pas de l'abus de procédure dont la SASU DSO CAPITAL serait responsable à leur égard.

Il convient donc de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] de leur demande à ce titre mais par substitution de motifs, le premier juge ayant fondé ce rejet sur l'insuffisance de démontration du préjudice subi.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] succombant à l'ensemble de leurs demandes, la décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a condamné la SASU DSO CAPITAL à leur payer la somme de 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance. Statuant à nouveau, ils seront déboutés de cette demande. Pour les mêmes motifs ils seront déboutés de leur demande fondée sur les mêmes dispositions en cause d'appel.

L'équité ne commande pas de faire bénéficier à la SASU DSO CAPITAL des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Elle sera également déboutée de ce chef de demande.

Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z], parties succombantes à l'instance, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Infirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions,

Statuant à nouveau :

- dit que la SASU DSO CAPITAL avait qualité à agir en faisant délivrer à l'encontre de Monsieur [O] [C] et de Madame [K] [Z] le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 en exécution du jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 26 mars 1992

- rejette, en conséquence, les demandes de nullité du commandement de payer aux fins de saise-vente du 8 juin 2018 tirée du défaut de qualité à agir de la SASU DSO CAPITAL et de l'inopposabilité de la cession de créance

- déboute Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile

Et y ajoutant :

- rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'exécution du titre exécutoire

- rejette la demande de nullité du commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 et tirée de l'absence de signification régulière du jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 26 mars 1992

- rejette la contestation soulevée par Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] sur le montant de la créance faisant l'objet du commandement de payer aux fins de saise-vente du 8 juin 2018

- valide, en conséquence, le commandement de payer aux fins de saisie-vente du 8 juin 2018 à hauteur de la somme 100 056, 51 € en principal, accessoires, frais et intérêts.

- déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne Monsieur [O] [C] et Madame [K] [Z] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

NS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/02164
Date de la décision : 27/02/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 5A, arrêt n°19/02164 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-27;19.02164 ?
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