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05/02/2020 | FRANCE | N°17/01025

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 05 février 2020, 17/01025


PC/JF























Grosse + copie


délivrées le


à





















































2e Chambre sociale


anciennement dénommée 4e B chambre sociale





ARRÊT DU 05 Février 2020








Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01025 - NÂ

° Portalis DBVK-V-B7B-NJOU


ARRÊT n°





Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 SEPTEMBRE 2015 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE


N° RG14/377





APPELANTE :





EURL SSP MEDITERRANEE prise en la personne de son gérant M. M... Y...


[...]


[...]


[...]


Représentant : Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET,...

PC/JF

Grosse + copie

délivrées le

à

2e Chambre sociale

anciennement dénommée 4e B chambre sociale

ARRÊT DU 05 Février 2020

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01025 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJOU

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 SEPTEMBRE 2015 CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE

N° RG14/377

APPELANTE :

EURL SSP MEDITERRANEE prise en la personne de son gérant M. M... Y...

[...]

[...]

[...]

Représentant : Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

INTIME :

Monsieur Q... N...

[...]

[...]

Représentant : Me Marion RODRIGUEZ, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 DECEMBRE 2019, en audience publique, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la Cour composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Jacques FOURNIE, CONSEILLER

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Q... N... a été initialement engagée par l'EURL SSP Méditerranée selon contrat de travail à durée déterminé saisonnier à temps complet du 1er juillet 2009 au 31 août 2009 en qualité d'agent de prévention et de sécurité, niveau 2, échelon 2, coefficient 120 de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité moyennant un salaire horaire mensuel brut de 1337,57 euros.

Ce premier contrat était prolongé par avenant du 31 août 2009 jusqu'au 30 septembre 2009.

Au total neuf contrats à durée déterminée se sont succédé jusqu'au 30 juin 2012 dans les conditions suivantes :

'Du 4 janvier 2010 au 31 janvier 2011 au motif d'un emploi à caractère saisonnier.

'Du 8 avril 2011 jusqu'au 30 avril 2011 au motif d'un accroissement temporaire d'activité.

'Du 12 mai 2011 au 31 mai 2011 au motif d'un accroissement temporaire d'activité,

'Du 1er juillet 2011 au 30 septembre 2011 au motif d'un emploi à caractère saisonnier.

'Du 1er octobre 2011 au 31 décembre 2011 au motif d'un accroissement temporaire d'activité.

'Du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2012 au motif d'un accroissement temporaire d'activité.

'Du 1er février 2012 au 29 février 2012 au motif d'un accroissement temporaire d'activité.

'Du 1er mars 2012 au 30 juin 2012 au motif d'un accroissement temporaire d'activité.

Le 5 juillet 2012 Monsieur Q... N... signait un protocole d'accord transactionnel aux termes duquel moyennant le versement d'une indemnité transactionnelle globale forfaitaire et définitive de 500 € il donnait quittance à l'EURL SSP Méditerranée de la perception de toutes les rémunérations et accessoires de salaire, indemnités de congés payés, primes et indemnités de toute nature dont indemnités de frais kilométriques à lui revenir dans le cadre de l'exécution et de la cessation des contrats de travail. Aux termes du même protocole les parties renonçaient réciproquement à toute procédure judiciaire qui pourrait naître des contrats de travail les ayant liés et à contester leur qualification, les conditions de leur exécution comme de leur rupture. Chacune des parties s'interdisant de remettre en cause le protocole en justice et d'engager toute action judiciaire.

Le 6 juillet 2012 Monsieur Q... N... adressait un courrier à l'employeur afin de contester la transaction intervenue.

Par requête du 28 mars 2013 suivie d'une demande de réinscription après radiation du 25 novembre 2014 le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Narbonne aux fins de nullité du protocole d'accord transactionnel du 5 juillet 2012, de requalification de la relation travail en un contrat à durée indéterminée et de condamnation de l'employeur à lui payer différentes sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 2 septembre 2015 le conseil de prud'hommes de Narbonne, faisant droit à la demande de nullité du protocole transactionnel, a requalifié les contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée depuis le 1er juillet 2009. Il a dit le licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse. Il a condamné l'EURL SSP Méditerranée à payer au salarié les sommes suivantes :

'1546,50 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la promesse d'embauche,

' 1546,50 euros à titre d'indemnité de requalification,

' 1546,50 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

' 9279 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

' 3093 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 309,30 euros bruts au titre des congés payés afférents,

'300 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la visite médicale d'embauche,

'1500 € titrent des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes du même jugement il a ordonné la remise par l'employeur au salarié des documents sociaux de fin de contrat et bulletins de paie rectifiée sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant la notification de la décision.

L'EURL SSP Méditerranée a relevé appel du jugement du conseil de prud'hommes le 17 septembre 2015.

L'EURL SSP Méditerranée conclut à la confirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Narbonne sauf en ce qu'il a annulé la transaction, en ce qu'il a alloué au salarié des dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche, en ce qu'il a requalifié les contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et en ce qu'il a alloué au salarié des indemnités au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour irrégularité de la procédure, en ce qu'il a rejeté sa demande reconventionnelle pour procédure abusive. La société sollicite la condamnation du salarié à lui payer une somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ainsi qu'une somme de 2000 € titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur Q... N... conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul le protocole transactionnel du 5 juillet 2012, en ce qu'il a requalifié la relation de travail en un contrat à durée indéterminée, en ce qu'il a requalifié les ruptures des contrats en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a dit que la promesse d'embauche valait embauche. Estimant toutefois que le salaire de référence devait être fixé à 2458,23 euros il sollicite la condamnation de la société à lui payer avec exécution provisoire, intérêts légaux et anatocisme les sommes suivantes:

' 2458,23 euros à titre d'indemnité de requalification,

' 4916,46 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 491,65 euros bruts au titre des congés payés afférents,

' 2458,23 euros à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,

' 29498,76 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 26730,03 euros au titre des salaires non perçus à compter du 30 septembre 2009, outre 2673 euros bruts au titre des congés payés afférents,

'30000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive de la promesse d'embauche,

' 13253,84 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires du 1er juillet 2009 au 30 juin 2012, outre 1325,38 euros au titre des congés payés afférents,

' 29498,76 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

'30000 € à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice moral subi du fait d'un manquement de l'EURL SSP Méditerranée à son obligation de sécurité relative au temps de travail et au défaut de visite médicale d'embauche,

' 630,92 € à titre de rappel de salaire portant à la fois sur le bénéfice de repos compensateur pour travail de nuit, sur l'indemnité conventionnelle pour travail les jours fériés, sur la majoration conventionnelle pour travail le dimanche,

' 63,92 euros au titre des congés payés afférents,

' 4916,46 euros à titre d'indemnité pour non remise des documents sociaux de fin de contrat,

'2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle réclame également la condamnation de l'employeur à lui remettre sous astreinte de 50 € par jour de retard une attestation à destination de Pole emploi, un certificat travail et des bulletins de paie rectifiés.

Après radiation et réinscription au rôle, l'affaire était appelée à l'audience du 9 décembre 2019 à l'occasion de laquelle les parties s'en rapportaient expressément aux écritures qu'elles avaient déposées.

MOTIFS

Si au soutien du vice de consentement qu'il allègue le salarié invoque à la fois la disparité des concessions réciproques et les pressions qu'aurait exercées sur lui l'employeur, la seule attestation de Monsieur F... selon laquelle il aurait accompagné Monsieur C... à un rendez-vous à l'occasion duquel le gérant l'aurait invité à sortir des locaux en l'insultant ne suffit pas à rapporter la preuve de la réalité des pressions alléguées par monsieur C....

En revanche, il est constant qu'après avoir employé le salarié selon plusieurs contrats à durée déterminée successifs ininterrompus pour accroissement temporaire d'activité l'employeur s'engageait unilatéralement le 2 février 2012 à embaucher Monsieur C... par contrat à durée indéterminée à compter du 1er mars 2012.

Le 5 juillet 2012 Monsieur Q... C... signait un protocole d'accord transactionnel aux termes duquel moyennant le versement d'une indemnité transactionnelle globale forfaitaire et définitive de 500 € il donnait quittance à l'EURL SSP Méditerranée de la perception de toutes les rémunérations et accessoires de salaire, indemnités de congés payés, primes et indemnités de toute nature dont indemnités de frais kilométriques à lui revenir dans le cadre de l'exécution et de la cessation des contrats de travail. Aux termes du même protocole les parties renonçaient réciproquement à toute procédure judiciaire qui pourrait naître des contrats de travail les ayant liés et à contester leur qualification, les conditions de leur exécution comme de leur rupture. Chacune des parties s'interdisant de remettre en cause le protocole en justice et d'engager toute action judiciaire.

Dès le 6 juillet 2012 Monsieur Q... C... adressait un courrier à l'employeur afin de contester la transaction intervenue.

Tenant à la fois le terme mis à la relation de travail à compter du 30 juin 2012 en suite de la succession ininterrompue de contrats à durée déterminée pour accroissement temporaire d'activité rappelée ci-avant, et l'engagement pris par l'employeur le 2 février 2012 d'embaucher monsieur C... par contrat à durée indéterminée à l'issue de son CDD, il existait manifestement une contestation née ou à naître et le paiement par l'employeur d'une somme de 500 € ayant dans ces conditions pour objet de clore toute contestation afférente à la relation de travail et à sa rupture était dérisoire.

Aussi convient-il de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nul le protocole transactionnel du 5 juillet 2012.

Le salarié a notamment produit un relevé des heures de début et de fin d'activité par journée travaillée du 3 juillet 2009 au 17 août 2009 et du 1er juillet 2011 au 29 juin 2012, ce relevé comprenant également les heures de pause pour la période du 1er juillet 2011 au 29 juin 2012, si bien que ces documents sont susceptibles d'étayer au moins partiellement la demande au titre des majorations pour travail les jours fériés et dimanches, et congés payés afférents. L'employeur verse quant à lui aux débats les plannings définitifs d'activité signés du salarié de janvier 2010 à juin 2012 inclus, les bilans d'activité signés du salarié correspondant aux horaires effectivement réalisés par celui-ci pour l'ensemble des contrats à l'exception de ceux du mois de mai 2011 et de ceux de mars à juin 2012, ce qui ne permet pas de s'assurer en totalité du décompte des repos compensateurs, du décompte des majorations pour heures de nuit, dimanches et jours fériés, et du bénéfice des repos compensateurs spécifiques au travail de nuit.

Ce faisant, au vu des éléments produits et des éléments de discussion, le rappel de salaire portant sur le bénéfice des repos compensateurs pour travail de nuit s'établit à 25 €, celui portant sur les indemnités pour travail les jours fériés et sur la majoration pour travail le dimanche à 40 €, soit un total de 65 € pour la période de réclamation, outre 6,50 € au titre des congés payés afférents.

Aussi convient-il de réformer le jugement entrepris à cet égard.

Il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salariés. Il appartient toutefois au salarié demandeur de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer ses prétentions.

Le salarié demandeur doit donc produire des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Monsieur C... revendique 193,99 heures supplémentaires non payées pour l'année 2009. Or l'employeur justifie par la production des bilans d'activité signés du salarié pour la période de réclamation des horaires effectivement réalisés par le salarié et qui lui ont été payés.

Monsieur C... réclame également le bénéfice de 172,33 heures supplémentaires pour le mois de janvier 2012.Or l'employeur justifie à la fois par la production des plannings définitifs et des bilans d'activité signés du salarié pour la période de réclamation des horaires effectivement réalisés par le salarié et qui lui ont été payés.

Monsieur C... sollicite ensuite le paiement de 278,35 heures supplémentaires pour l'année 2011. Or l'employeur justifie par la production des bilans d'activité signés du salarié pour la période de réclamation des horaires effectivement réalisés par le salarié et qui lui ont été payés à l'exception de la période du 12 au 31 mai, si bien qu'au vu des éléments produits et des éléments de discussion, la cour est en mesure de fixer à 62 € le montant du rappel de salaire sur heures supplémentaires portant sur l'année 2011.

Monsieur C... sollicite enfin le paiement de 337,15 heures supplémentaires pour l'année 2012. Si l'employeur justifie de la totalité des plannings définitifs signés du salarié pour l'intégralité de la période, les bilans d'activité de mars à juin ne sont pas versés aux débats, si bien qu'en dépit des contradictions entre les plannings définitifs et les demandes du salarié, il est constant que l'employeur ne rapporte pas la preuve de l'ensemble des horaires effectivement réalisés par le salarié. C'est pourquoi, au vu des éléments produits et des éléments de discussion, la cour est en mesure de fixer à 343 € le montant du rappel de salaire sur heures supplémentaires portant sur l'année 2012.

Réformant le jugement entrepris, il convient par conséquent de fixer à la somme de 405 € le montant total du rappel de salaire sur heures supplémentaires auquel peut prétendre le salarié pour la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2012, outre 40,50 € au titre des congés payés afférents.

Si le salarié soutient ensuite qu'afin de s'exonérer de ses obligations relatives aux majorations horaires l'employeur lui faisait signer de fausses fiches de déplacement, la juxtaposition des fiches de déplacement signées du salariés, des plannings définitifs également signés du salarié et des bilans mensuels d'activité signés du salarié et récapitulant le kilométrage parcouru mensuellement par monsieur C... qui ont été versés aux débats, suffisent au regard de leur concordance pour la période de réclamation, à rapporter la preuve de la fausseté de cette affirmation. C'est pourquoi, compte tenu du faible montant d'éléments de salaire qui a pu échapper à déclaration, la preuve d'un quelconque élément intentionnel d'une infraction de travail dissimulé n'est pas rapportée.

Aussi convient-il de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé.

Le salarié soutient que l'employeur a manqué à ses obligations en matière de temps de travail, notamment en n'accordant pas 12 heures de repos entre deux services ou 24 heures de repos après 48 heures de travail, en ne prévoyant pas une interruption d'activité de 10 heures entre le passage d'un service de jour à un service de nuit ou inversement, en n'organisant pas le service de façon à laisser deux dimanche de repos par mois en moyenne sur une période de trois mois, les dimanches étant accolés soit à un samedi, soit à un lundi de repos, en dérogeant aux dispositions relatives aux durées maximales quotidiennes de 12 heures, et de 46 heures sur 12 semaines consécutives, en faisant travailler la salariée plus de six jours par semaine.

Or, il résulte des plannings définitifs et bilans d'activité des heures de travail réalisées par le salarié et signés de celui-ci ainsi que de l'ensemble des documents soumis à la cour pour l'ensemble des contrats, que le seul grief établi à ces différents égards se limite au défaut d'attribution d'un nombre très limité d'heures de repos compensateur de nuit, l'employeur justifiant par ailleurs du respect de ses autres obligations relatives aux temps de travail et aux temps de repos.

Il est en revanche constant que le salarié n'a pas bénéficié en 2009 d'un examen médical d'embauche au plus tard avant l'expiration de la période d'essai. Toutefois monsieur N... ne justifie d'aucun préjudice relativement au manquement à l'obligation de sécurité invoqué.

Contrairement à ce qu'il soutient le salarié ne justifie pas non plus qu'il ait pu relever des dispositions de l'article R4624-18 du code du travail relatives à la surveillance médicale renforcée ni qu'il ait subi un quelconque préjudice du fait de l'absence de toute visite médicale.

Partant, tandis que le salarié ne justifie d'aucun élément de nature à avoir altéré sa santé ou à apporter un trouble objectif dans ses conditions de vie, en raison du seul défaut d'attribution d'un nombre très limité d'heures de repos compensateur de nuit et de l'absence de visite médicale d'embauche, l'existence d'un préjudice moral à raison d'un manquement à l'obligation de sécurité n'est pas établie, et monieur N... sera débouté de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

Si le fait que l'activité de prévention et de sécurité de l'entreprise ne fasse pas partie des secteurs d'activité dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir aux contrats à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, les dispositions de l'article D 1242-1 du code du travail, pas davantage que celles de l'article L 1243-11 ne font obstacle à la conclusion de contrats de travail à durée déterminée successifs avec le même salarié lorsque ce contrat est conclu notamment pour pourvoir des emplois à caractère saisonnier.

La notion d'emploi à caractère saisonnier n'est pas limitée à certains secteurs d'activité. L'activité saisonnière autorisant la conclusion d'un contrat à durée déterminée correspond à des travaux qui se répètent cycliquement, c'est-à-dire avec une périodicité régulière qui ne résulte pas de la volonté de l'employeur mais qui tient à des contraintes extérieures, naturelles, techniques ou socio-économiques et qui sont effectués pour le compte d'une entreprise dont l'activité obéit aux mêmes variations.

Si l'EURL SSP Méditerranée fait valoir que les contrats à durée déterminée saisonniers ont été conclus avec le salarié à l'occasion de périodes marquées par de forts mouvements de population et par la nécessité de sécuriser de nombreux sites, elle ne justifie cependant par aucun élément que l'activité de l'entreprise obéissait aux variations saisonnières dont elle se prévaut.

De la même manière, la seule production par l'EURL SSP Méditerranée de bons de commande de marchés ne suffit ni à établir la réalité d'un accroissement de l'activité habituelle de l'entreprise ni à rapporter la preuve de son caractère temporaire.

Faute pour l'employeur de rapporter la preuve de la réalité des motifs de recours aux contrats à durée déterminée la requalification de la relation travail est par conséquent encourue, étant observé au surplus comme le soulève à juste titre le salarié que le délai de carence entre les différents contrats pour accroissement temporaire d'activité conclus fin 2011 et en 2012 n'était pas respecté.

Aussi, tenant le défaut de preuve du motif de recours dès l'origine de la relation de travail, convient-il de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié la relation de travail entre le salarié et l'EURL SSP Méditerranée en un contrat à durée déterminée à compter du 1er juillet 2009.

La salarié ne justifie que très partiellement de ses prétentions relatives aux différents rappels de salaire qu'il a réclamés. L'indemnité de requalification ne peut toutefois être inférieure au dernier salaire mensuel perçu avant la saisine de la juridiction. Sur la base des éléments portés sur le bulletin de paie de juin 2012 il convient de fixer son montant à la somme de 1471 euros et de dire que la société sera condamnée à verser au salarié ce montant à titre d'indemnité de requalification.

Le salarié réclame une indemnisation sur la base des salaires qu'il aurait dû percevoir pendant les périodes interstitielles.

Or, il ne produit aucun élément pour justifier qu'il se serait tenu à la disposition de l'employeur au cours de ces périodes.

Aussi convient-il de le débouter de la demande qu'il a formée à ce titre.

Tenant la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée, la rupture du contrat de travail intervenue sans mise en 'uvre d'une procédure de licenciement s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit au profit du salarié aux indemnités de rupture ainsi qu'à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié fonde sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure sur les dispositions des articles L 1235-2 et L 1235-5 du code du travail tandis qu'il fonde sa demande d'indemnité pour licenciement abusif sur les dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail. L'EURL SSP Méditerranée ne soutient ni ne produit aucun élément démontrant que son effectif ait pu être inférieur à 11 salariés.

Le salarié ne justifie que très partiellement de ses prétentions relatives aux différents rappels de salaire qu'il a réclamés. Par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputée avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier, soit depuis le 1er juillet 2009, peu important que la relation contractuelle n'ait pas été continue. Si bien qu'au regard d'une ancienneté supérieure à deux années révolues dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à laquelle le salarié peut prétendre en application de l'article L 1235-3 du code du travail ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Le salarié ne justifie toutefois par aucun élément d'un préjudice excédentaire. De plus, en application de l'article L 1235-3 du code du travail l'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. C'est pourquoi, sur la base des bulletins de paie des six derniers mois versés aux débats et de ce qui a été retenu ci-avant, il y a lieu d'allouer au salarié une indemnité d'un montant de 9500 € pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, réparant à la fois l'irrégularité de fond et l'irrégularité de forme.

Nonobstant la promesse unilatérale d'embauche qui lui avait été faite le 2 février 2012, le salarié dont le contrat de travail a par la suite été rompu abusivement le 30 juin 2012 ne justifie d'aucun préjudice distinct pouvant fonder sa demande indemnitaire pour non-respect de la promesse d'embauche. C'est pourquoi il y a lieu de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a alloué au salarié une indemnité spécifique à ce titre.

Tenant ce qui précède, le salarié peut également prétendre au bénéfice d'une indemnité de préavis correspondant à deux mois de salaire sur la base de la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, soit une somme de 3061 euros, outre 306,10 euros au titre des congés payés afférents.

Le salarié ne justifie à cet égard ni de la réalité de ce qu'il allègue, tenant la production par l'employeur de la copie des documents signés par le salarié pour chacun des contrats, ni du préjudice qui serait résulté pour lui de prétendus manquements faussement invoqués, étant observé qu'aucun élément ne laisse supposer que l'employeur ait pu sciemment apposer sur ces documents des mentions erronées.

Il convient en conséquence de débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

La remise des documents sociaux de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt étant de droit, il convient de l'ordonner sans pour autant qu'il y ait lieu de prononcer une astreinte.

Les créances de réparation résultant du présent arrêt ayant d'une part une nature indemnitaire, ne consistant pas d'autre part en la confirmation pure et simple de la décision rendue en première instance, les intérêts au taux légal portant sur les condamnations prononcées ne courront qu'à compter du prononcé du présent arrêt, si bien qu'il ne saurait non plus y avoir lieu à anatocisme.

En application de l'article L 1235-4 du code du travail il convient d'ordonner le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage éventuellement payées au salarié du jour de la rupture de la relation de travail au jour de la décision prononcée dans la limite de six mois d'indemnités.

Tenant la solution apportée au litige le caractère abusif de la procédure en raison de l'exercice d'une voie de droit par le salarié n'est pas démontré. Partant l'EURL SSP Méditerranée sera déboutée de sa demande reconventionnelle de dommages intérêts pour procédure abusive.

Compte tenu de la solution apportée au litige, les dépens de l'instance seront laissés à charge de l'appelante.

En considération l'équité, il convient de dire n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Narbonne le 2 septembre 2015 sauf quant aux montants des indemnités allouées au salarié, en ce qu'il a alloué au salarié une indemnité spécifique pour irrégularité de la procédure ainsi que des dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche et des dommages-intérêts pour non-respect de la promesse d'embauche, en ce qu'il a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes de rappel de salaire;

Et statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne l'EURL SSP Méditerranée à payer à Monsieur Q... C... les sommes suivantes :

-65 euros à titre de rappel de salaire portant sur le bénéfice des repos compensateurs pour travail de nuit, sur les indemnités de travail les jours fériés, sur la majoration pour travail le dimanche, 6,50 € au titre des congés payés afférents,

-405 € à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires, outre 40,50 € au titre des congés payés afférents,

-1471 euros à titre d'indemnité de requalification,

-3061 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 306,10 euros au titre des congés payés afférents,

-9500 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne la remise par l'EURL SSP Méditerranée à Monsieur Q... C... des documents sociaux de fin de contrat et bulletins de paie rectifiés conformément au présent arrêt;

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte;

Déboute les parties de leurs autres demandes;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne le remboursement par l'EURL SSP Méditerranée aux organismes intéressés des indemnités de chômage éventuellement payées au salariéedu jour de la rupture de la relation de travail au jour de la décision prononcée dans la limite de six mois d'indemnités;

Condamne l'EURL SSP Méditerranée aux dépens.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17/01025
Date de la décision : 05/02/2020

Références :

Cour d'appel de Montpellier 40, arrêt n°17/01025 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-02-05;17.01025 ?
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