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12/12/2019 | FRANCE | N°13/01480

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre a, 12 décembre 2019, 13/01480


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre A



ARRET DU 12 DECEMBRE 2019



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 13/01480 - N° Portalis DBVK-V-B65-K232

joint avec le N°RG 17/04436





Décisions déférées à la Cour :



Arrêt au fond, origine Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 29 Juin 2017, enregistrée sous le n° 768 F-D

Arrêt au fond, origine Cour d'Appel de MONTPELLIER, décision a

ttaquée en date du 12 Mai 2016, enregistrée sous le n° 13/01480

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, décision attaquée en date du 22 Janvier 2013, enr...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 12 DECEMBRE 2019

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 13/01480 - N° Portalis DBVK-V-B65-K232

joint avec le N°RG 17/04436

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt au fond, origine Cour de Cassation de PARIS, décision attaquée en date du 29 Juin 2017, enregistrée sous le n° 768 F-D

Arrêt au fond, origine Cour d'Appel de MONTPELLIER, décision attaquée en date du 12 Mai 2016, enregistrée sous le n° 13/01480

Jugement Au fond, origine Tribunal de Grande Instance de MONTPELLIER, décision attaquée en date du 22 Janvier 2013, enregistrée sous le n° 11/01195

Vu l'article 1037-1 du code de procédure civile;

APPELANT

DEMANDEUR À LA SAISINE

Monsieur [R] [Q]

né le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant assisté de Me Stéphane FOUCAULT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMES

DÉFENDEURS À LA SAISINE

Monsieur [O] [N]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 1]

Représenté par Me François LAFONT de la SCP LAFONT, CARILLO, CHAIGNEAU, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [D] [A]

née le [Date naissance 3] 1979 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 1]

Représentée par Me François LAFONT de la SCP LAFONT, CARILLO, CHAIGNEAU, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 04 SEPTEMBRE 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 SEPTEMBRE 2019, en audience publique, Mme Brigitte DEVILLE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du même code, devant la cour composée de :

Mme Anne-Marie HEBRARD, Présidente

Mme Brigitte DEVILLE, Conseillère

M. Thierry CARLIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Nadine CAGNOLATI

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour 14 novembre 2019 prorogé au 12 décembre 2019, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Mme Anne-Marie HEBRARD, Présidente, et par Mme Nadine CAGNOLATI, Greffière.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

[W] [G] était propriétaire d'un domaine à [Localité 3] exploité par [N] [N].

Au décès de Monsieur [G], ses héritiers ont vendu une partie du domaine, la parcelle constructible cadastrée [Cadastre 1], à [O] [N], fils de [N] [N], et à sa compagne [D] [A], moyennant le prix de 120 000 € suivant acte authentique des 11 et 20 avril 2006.

Ils ont également vendu une parcelle cadastrée [Cadastre 2] à [R] [Q] moyennant le prix de 127 000 € ,suivant acte authentique du 11 avril 2006.

Le 17 juillet 2007 [R] [Q] et [O] [N] ont conjointement déposé une demande d'autorisation de lotir portant sur l'ensemble constitué par leurs deux parcelles.

Cette autorisation leur a été accordée selon arrêté municipal du 2 novembre 2007.

Messieurs [Q] et [N] ont alors chargé des entreprises de l'aménagement et de la viabilisation des parcelles sous la maîtrise d''uvre d'un géomètre expert, la SCP Bilicki-Dhombres-Osmo.

Les premiers travaux ont été effectués par l'entreprise [N] ,dirigée par le père d'[O] [N], pour un montant de 23 991,76 €, selon facture du 10 juin 2008 acquittée par [R] [Q].

Dans le courant du mois de septembre 2008 [R] [Q] et [O] [N] ont rompu leurs relations et, par courrier recommandé du 6 mars 2009, le conseil de Monsieur [Q] a réclamé à Monsieur [N] le remboursement de la moitié des débours engagés jusque-là, soit la somme de 12 130,88 € ainsi que la justification des fonds nécessaires à la poursuite du projet, notamment l'obtention d'un prêt bancaire et ,à défaut, le blocage sur un compte séquestre de la somme de 85 500 € correspondant à la moitié du coût estimé du projet.

N'obtenant pas satisfaction, [R] [Q], par exploit du 23 février 2011, a assigné [O] [N] et [D] [A] devant le tribunal de grande instance de Montpellier afin d'obtenir réparation de ses préjudices.

Par jugement du 22 janvier 2013 ce tribunal a :

'débouté [R] [Q] de ses demandes

'condamné [R] [Q] à payer [O] [N] et [D] [A] la somme de 6000 € de dommages intérêts ainsi que 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, le tout avec exécution provisoire.

Sur appel de [R] [Q] (instance répertoriée sous le n° 13.1480), la cour d'appel de Montpellier, par arrêt du 12 mai 2016, a :

-infirmé le jugement en toutes ses dispositions

'dit que [R] [Q] d'une part et [O] et [D] [A] d'autre part ont pris l'engagement réciproque de porter ensemble et de manière solidaire la mise en 'uvre administrative et financière du projet de lotissement appelé « l'enclos du château à [Localité 3]»

'dit que [O] [N] et [D] [A] ont engagé leur responsabilité contractuelle en rompant unilatéralement leur engagement

'dit qu'en l'absence de la démonstration d'une volonté contraire, les charges découlant de l'exécution de cette convention doivent être supportées par moitié par chacune des deux parties

'avant dire droit sur les préjudices, ordonné une mesure d'expertise afin notamment de chiffrer les frais engagés par Monsieur [Q] au titre des travaux effectués dans le cadre du projet de lotissement et de chiffrer la valeur vénale des terrains que Monsieur [Q] aurait pu vendre en 2008 si le projet avait abouti ainsi que la valeur vénale actuelle au jour de la vente si elle s'est réalisée

'réservé les demandes des parties ainsi que les dépens.

Sur pourvoi d'[O] [N] et de [D] [A] la Cour de cassation, par arrêt du 29 juin 2007,a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier mais seulement en ce qu'il a dit que l'engagement des parties est solidaire au motif qu'en relevant d'office le moyen tiré de la solidarité de l'engagement, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

[R] [Q] a régulièrement saisi la cour de renvoi le 7 août 2017 ( instance répertoriée sous le n° 17.4436) et a conclu le 25 octobre 2017,

Vu les conclusions de [R] [Q] remises au greffe le 22 juillet 2019 dans l'instance répertoriée sous le numéro 13/1480 et le 25 octobre 2017 dans l'instance répertoriée sous le numéro 17/4436,

Vu les conclusions de [O] [N] et [D] [A] remises au greffe le 14 janvier 2019 dans l'instance portant le numéro 13/1480,

Vu les ordonnances de clôture rendues le 4 septembre 2019,

MOTIFS

Il existe entre les deux instances répertoriées sous les numéros 13/1480 et 17/4436 un lien tel qu'il est de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de les juger ensemble.

Il convient donc d'ordonner leur jonction.

Sur la demande de nullité du rapport d'expertise :

Les intimés, [O] [N] et [D] [A], concluent à la nullité du rapport d'expertise déposé par Monsieur [R], commis par arrêt rendu par la cour le 12 mai 2016, en raison d'une atteinte au principe de loyauté des débats et au principe du contradictoire dans la mesure où il n'a pas répondu à leur dire du 7 avril 2017.

L'article 276 du code de procédure civile dispose que l'expert doit prendre considération les observations des parties et, lorsqu'elles sont écrites, les joindre à son avis si les parties le demandent.

Toutefois, lorsque l'expert a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations, il n'est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l'expiration de ce délai, à moins qu'il n'existe une cause grave et dûment justifiée.

L'expert judiciaire, [U] [R] avait pris note, dans un mail adressé le 6 janvier 2017 au conseil des parties, qu'un accord était envisageable . Il ajoutait qu'en cas d'échec des négociations, il envisageait de déposer de son rapport à la fin du mois de mai 2017.

Cependant, dans un autre mail du 1er mars 2017, il indiquait aux parties : « vous avez jusqu'au 3 avril prochain pour me faire part de vos intentions de concrétiser un accord dans les jours qui suivent ou de vos remarques sur ce projet de rapport ».

Les consorts [N]-[A] estiment à tort que le rapprochement entre les courriels du 6 janvier et du 1er mars 2017 leur permettait d'avoir quelques jours pour formuler leurs observations à compter de l'échec éventuel des transactions.

En effet le 6 janvier l'expert judiciaire envisageait seulement un dépôt du rapport à la fin du mois de mai et avait donc la possibilité de rapprocher cette date et de souhaiter un dépôt plus rapide dans la mesure où il lui appartenait de diriger les opérations d'expertise dans le respect de la contradiction. Or dans son courriel du 1er mars 2017 il était parfaitement clair puisqu'il indiquait sans ambiguïté aux parties qu'elles disposaient d'un délai jusqu'au 3 avril pour formuler leurs observations ou pour faire part d'une transaction.

D'ailleurs le conseil de [R] [Q] a adressé à l'expert des remarques dès le 3 mars 2017.

L'expert a envoyé aux parties le 27 mars 2017 un nouveau courriel leur rappelant qu'elles avaient jusqu'au 3 avril pour lui adresser des dires ou proposer un protocole d'accord. Il a ajouté qu'à défaut il déposerait son rapport en l'état.

Certes, c'est dans un mail du 30 mars 2017 que le conseil de Monsieur [Q] a précisé à l'expert que les négociations avaient échoué. Cette date était très proche du délai accordé par l'expert aux parties mais il appartenait à ces dernières de le respecter en indiquant en temps utile l'état de la transaction ou bien leurs observations.

Les consorts [N]-[A], au lieu de se livrer à des interprétations sur le sens des correspondances de l'expert, lesquelles d'ailleurs étaient dépourvues d'ambiguïté, auraient dû adresser leurs remarques ou même demander à l'expert un report du délai, ce qu'ils n'ont pas fait.

Ils ont adressé le 7 avril 2017 un dire tardif auquel l'expert n'a pas répondu conformément aux dispositions de l'article 276 alinéa 2 du code de procédure civile l'autorisant à ne pas tenir compte des observations faites après l'expiration du délai fixé.

Le conseil des consorts [N]-[A] n'allègue pas de cause grave et dûment justifiée qui aurait expliqué la tardiveté de ses observations. En effet la recherche d'un accord avait été prise en compte par l'expert qui l'avait légitimement enfermée dans un délai dans le cadre de la direction des opérations d'expertise. Cette circonstance ne caractérise pas une cause grave et dûment justifiée autorisant un dépôt tardif du dire.

En conséquence l'expert a agi en toute loyauté et dans le respect du contradictoire et la demande de nullité de son rapport d'expertise doit être rejetée.

Sur l'existence de préjudices subis par [R] [Q] :

Il est constant que [R] [Q], propriétaire de la parcelle [Cadastre 2] et les consorts [N]-[A] ,propriétaires de la parcelle [Cadastre 1], commune de [Localité 3], ont conjointement déposé, Le 4 juillet 2007, une demande d'autorisation de lotir portant sur l'ensemble constitué par ces deux parcelles.

Les parties ont débuté les premiers travaux de viabilisation et d'aménagement sous la maîtrise d''uvre d'un géomètre- expert mais ont rompu leurs relations dans le courant du mois de septembre 2008.

[R] [Q] a assigné les consorts [N]-[A] pour obtenir le remboursement de ses débours et la réparation de ses préjudices consécutifs à l'interruption de l'opération de lotissement.

La cour a jugé définitivement le 12 mai 2016 que les intimés avaient engagé leur responsabilité contractuelle en rompant unilatéralement leur engagement.

Ces derniers ont affirmé que l'appelant n'a subi aucun préjudice et la cour d'appel, par arrêt du 12 mai 2016, a ordonné une mesure d'expertise afin d'évaluer le montant des préjudices allégués par [R] [Q].

L'appelant accepte les conclusions de l'expert judiciaire à l'exception de celle relative à l'autorisation de découvert au Crédit Agricole.

Il importe donc d'examiner ce dernier point ainsi que chaque critique soulevée par les consorts [N]-[A].

Le permis de lotir a été obtenu le 2 novembre 2007 au nom des parties pour la réalisation de 4 lots et des travaux ont débuté avec l'entreprise de [N] [N], père d'[O] [N].

À la suite d'une mésentente les travaux ont été interrompus et [R] [Q] a aménagé 2 lots viabilisés sur son propre terrain qui ont été vendus en 2014.

L'expert judiciaire a chiffré les frais engagés inutilement par Monsieur [Q], à la somme totale de 19 104,01 €.

Contrairement à ce que soutiennent les intimés les aménagements réalisés auparavant n'ont pas été utiles à l'opération : le recalibrage du fossé en limite du chemin communal a dû être repris du fait de son envahissement par la végétation ainsi qu'en témoignent les photographies annexées au rapport d'expertise ; le mur de soutènement a dû être repris et le terrain remis en état.

Il y a donc lieu de retenir la somme proposée par l'expert au titre de ces frais.

L'expert judiciaire a retenu un bénéfice pour Monsieur [Q] de 125 609 € si ces parcelles avaient été vendues en 2008 et un bénéfice de 91 924 € au jour de la vente , imposition sur la plus-value déduite.

Les consorts [N]-[A] critiquent la méthode d'évaluation de l'expert et ses références pour déterminer la valeur vénale des terrains.

Ils mettent en cause sa compétence et produisent rapport d'expertise privé de Monsieur [J], expert près la cour d'appel de Nîmes.

[U] [R] est qualifié en droit de l'urbanisme et est inscrit sur la liste des experts la cour d'appel de Montpellier notamment dans la rubrique « urbanisme et aménagement urbain ».

Il est donc parfaitement compétent pour apprécier les aspects techniques et financiers d'une opération de lotissement , contrairement à Monsieur [J], spécialisé dans les techniques de commercialisation et de gestion patrimoniale et financière.

Il dispose de toutes les connaissances nécessaires pour apprécier la valeur d'une parcelle dans un lotissement, en elle-même et au regard de parcelles de même nature dans un secteur géographique voisin.

Il précise notamment que la valeur d'une parcelle de lotissement aménagé est 15 à 30 % supérieure à celle d'une parcelle individuelle puisqu'il a été nécessaire de créer la voirie, les espaces communs ainsi que différents aménagements comme le local à ordures, les coffrets des différents réseaux, les parkings etc...

Ainsi la valeur d'une parcelle est fonction des droits à construire mais aussi du niveau des prestations en matière d'aménagement.

[U] [R] a recherché à la mairie de la commune quatre références pour des ventes de parcelles loties, réalisées en 2008 et a retenu une valeur vénale moyenne de 197 600 € , net vendeur.

Il a procédé de la même façon pour des ventes réalisées en 2014 et a retenu une moyenne de valeur vénale de 168 130 € , net vendeur.

Il explique cette différence par les conséquences de la crise du secteur bancaire de 2008 et la baisse du marché du foncier à partir de 2009, marché qui n'a toujours pas retrouvé en 2014 son niveau de 2008.

Cette évolution du marché immobilier français est confirmée par le document versé au débat par les intimés qui note une morosité du marché jusqu'en 2014 et une remontée des prix de l'immobilier à partir de 2016.

Ensuite l'expert judiciaire a légitimement déduit l'impôt sur la plus-value ramenant ainsi le bénéfice que [R] [Q] aurait perçu en 2008 à 125 609 € et le bénéfice qu'il devait percevoir en 2014 à 91 924 €, soit une perte de recettes de 33 685 €, valeur septembre 2008 .

C'est en 2019 que les intimés ont fait réaliser une expertise privée non contradictoire alors qu'il aurait été judicieux qu'ils se fassent assister d'un technicien lors des opérations d'expertise en 2016.

Cet expert privé n'est pas qualifié en matière d'urbanisme et de lotissement.

Pour son évaluation il a appliqué un coefficient pour chaque caractéristique des lots afin d'obtenir un coefficient de pondération pour chacune des parcelles. Or c'est à juste titre que l'expert judiciaire n'a pas réparti le coût des travaux de viabilisation selon la position des parcelles dans le lotissement dès lors que, conventionnellement, les plans de viabilisation et de répartition des lots ont été prévus dans le permis de lotir.

Il n'y a donc pas lieu de pondérer le prix de vente et les coûts de viabilisation en fonction des caractéristiques de chaque parcelle.

L'expert privé conclut à la réalisation par Monsieur [Q] d'un gain sans déduire l'impôt sur la plus-value , alors que l'expert judiciaire précise qu'entre 2008 et 2014 les taux d'imposition sur la plus-value ont augmenté de manière importante ce qui a contribué à rendre l'opération immobilière moins rentable.

C'est à tort que les intimés soutiennent que Monsieur [Q] aurait fait un bénéfice plus important grâce à l'adoption du nouveau PLU qui autorisait la réalisation de trois constructions. En effet l'expert a envisagé cette hypothèse et a retenu que Monsieur [Q] a obtenu un meilleur rendement par la vente de deux lots. En toute hypothèse le permis de lotir ne permettait que la création de quatre lots, soit deux pour chacune des parties et Monsieur [Q] n'avait pas l'obligation de solliciter un permis de lotir modificatif pour la création de trois lots sur sa parcelle.

Il convient donc d'écarter les observations de Monsieur [J] non contradictoires et non soumises aux observations de l'expert judiciaire alors même que cet expert, non qualifié en matière d'urbanisme et de lotissement, a adopté des méthodes d'évaluation différentes et non justifiées.

L'expert judiciaire a retenu les frais d'agence pour l'estimation des valeurs vénales en 2014 dans la mesure où Monsieur [Q] a dû vendre des parcelles individuelles alors que si ces parcelles avaient été vendues dans le cadre d'un lotissement les frais de commercialisation des ventes des lots étaient inclus dans les prix de vente.

L'expert [R] a refusé de prendre en compte le coût de l'autorisation de découvert au Crédit Agricole obtenue par Monsieur [Q] dans la mesure où le contrat de crédit prévoyait que son objet était l'achat d'un logement ancien à usage du propriétaire pour une maison individuelle, résidence principale.

En fait ce contrat de crédit portait le numéro 01FT 090 21PR tandis que l'ouverture de crédit accordée à Monsieur [Q] en 2008 portait le numéro 01K 6X 0012PR.

Il s'agissait donc de deux contrats différents et le second a bien été souscrit pour l'opération de lotissement puisque les relevés bancaires y afférent mentionnent notamment le paiement de l'entreprise [N] qui avait débuté les travaux d'aménagement du lotissement.

C'est donc à juste titre que l'appelant réclame le coût de cette autorisation de découvert, soit la somme de 16 446 € calculée à partir des relevés bancaires versés au débat, puisqu'il a assumé ce coût alors que les intimés ont rompu unilatéralement les conventions engageant ainsi leur responsabilité contractuelle.

En conséquence, le préjudice total de Monsieur [Q] s'élève à la somme de 69 235,01 €.

Il lui sera accordé la somme qu'il réclame ,soit 69 000 €.

Les consorts [N]-[A] seront condamnés solidairement à indemniser le préjudice subi par Monsieur [Q] puisqu'il existe une présomption de solidarité entre commerçants et qu'une opération de lotissement qui consiste à acquérir un terrain, à le diviser en parcelles et à vendre celles-ci après avoir réalisé les équipements de voirie et d'assainissement nécessaires dans le respect de la réglementation d'urbanisme applicable, constitue une activité de nature commerciale au sens de l'article L 110'1 du code de commerce.

Sur la demande reconventionnelle des consorts [N]-[A] :

Les intimés demandent l'indemnisation de leur préjudice tant financier que moral dans la mesure où Monsieur [Q] a fait inscrire sur leur bien une hypothèque judiciaire alors même que des fonds avaient déjà été consignés entre les mains du notaire pour garantir leurs obligations.

Cette demande est recevable puisque la cour, dans son arrêt du 12 mai 2016, dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise, a réservé toutes les autres demandes des parties incluant celles relatives aux mesures conservatoires, aux dépens et aux frais irrépétibles. Ainsi la demande de dommages-intérêts des consorts [N]-[A] était réservée puisque cette réserve ne visait pas uniquement les mesures conservatoires, les dépens et les frais irrépétibles.

Sur le fond, Monsieur [Q] soutient n'avoir jamais été informé de la réalité de cette consignation et les consorts [N]-[A] ne justifient d'aucune manière que cette information lui a effectivement été transmise par eux-mêmes ou par le notaire.

Ils ne caractérisent donc pas la faute de Monsieur [Q] qui aurait abusivement pris deux garanties financières pour se prémunir de leur éventuelle insolvabilité.

La demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts doit donc être écartée.

Enfin ,eu égard au montant des sommes dont les consorts [N]-[A] sont débiteurs à l'égard de Monsieur [Q], il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire déposée le 28 janvier 2011.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant sur renvoi de cassation, publiquement, contradictoirement et par arrêt mis à disposition au greffe,

Ordonne la jonction des instances répertoriées sous les numéros 13/1480 et 17/4436.

Déboute les consorts [N]-[A] de leur demande de nullité du rapport d'expertise déposé par [U] [R].

Condamne solidairement les consorts [N]-[A] à payer à [R] [Q] la somme de 69 000 € en réparation de ses préjudices.

Déclare recevable la demande de dommages et intérêts des consorts [N]-[A] mais les en déboute.

Déboute les consorts [N]-[A] de leur demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire prise le 28 janvier 2011.

Condamne in solidum les consorts [N]-[A], en application de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à [R] [Q] la somme de 8000 € pour les frais engagés tant en première instance et qu'en cause d'appel.

Les condamne in solidum aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais taxés de l'expertise judiciaire de [U] [R] et dit que ces dépens seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 13/01480
Date de la décision : 12/12/2019

Références :

Cour d'appel de Montpellier A1, arrêt n°13/01480 : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-12-12;13.01480 ?
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