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25/06/2019 | FRANCE | N°16/06752

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre c, 25 juin 2019, 16/06752


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre C



ARRET DU 25 JUIN 2019



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/06752 - N° Portalis DBVK-V-B7A-MZ5Q







Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 JUILLET 2016

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/05112







APPELANTE :





OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX DES AFFECTIONS IATROGENES

ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES Etablissement Public (ONIAM)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Mélanie MAINGOURD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Solenn ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 25 JUIN 2019

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/06752 - N° Portalis DBVK-V-B7A-MZ5Q

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 JUILLET 2016

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/05112

APPELANTE :

OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES Etablissement Public (ONIAM)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Mélanie MAINGOURD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Solenn GRALL, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMEES :

Madame [C] [Y]

née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 1]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Georges INQUIMBERT de la SCP CHRISTOL I./INQUIMBERT G., avocat au barreau de MONTPELLIER

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE

(Caducite)

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Mutuelle PRO BTP - KORELIO

Caducite

[Adresse 4]

[Adresse 4]

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 24 Avril 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 MAI 2019,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère et Madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère faisant fonction de Présidente

Madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée

Madame Emmanuelle ROUGI'', Conseillère, magistrat de permanence désignée par ordonnance en date du 9 mai 2019 du Premier président de la cour d'appel de Montpellier

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère faisant fonction de Présidente en remplacement de Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre régulièrement empêché, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, greffière.

*

**

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 16 septembre 2009, Madame [C] [Y], alors âgée de 47 ans, a subi une ablation de deux hernies cervicales en raison d'une arthrose cervicale responsable d'une névralgie cervico-brachiale. L'intervention a été réalisée par le docteur [L] à la Clinique [Établissement 1], à [Localité 2] (34). Les suites de l'intervention étaient marquées par la constatation d'une hémiparésie droite.

Considérant que son hémiparésie avait été causée par sa prise en charge par le docteur [L], Madame [C] [Y] a saisi le Président du tribunal de grande instance de Montpellier, statuant en référé, afin d'obtenir la tenue d'une expertise au contradictoire du docteur [L], de la Clinique [Établissement 1], de l'ONIAM, de la CPAM et de PRO-BTP.

Par ordonnance du 26 juillet 2011, le président du tribunal de grande instance de Montpellier a désigné le professeur [S] en qualité d'expert, qui, au terme de son rapport d'expertise, a conclu à un accident médical ayant entraîné « une hémiplégie spastique droite (côté dominant), station debout impossible, absence de déficit cognitif ».

Par acte d'huissier du 25 août 2014, Madame [C] [Y] a assigné l'ONIAM devant le Président du tribunal de grande instance de Bobigny, statuant également en référé, afin qu'il lui soit alloué une indemnité provisionnelle à valoir sur l'indemnisation définitive de ses préjudices.

Par ordonnance en date du 28 novembre 2014, le Président du tribunal de grande instance de Bobigny a condamné l'ONIAM à verser à Madame [C] [Y] la somme de 200 806 € à valoir sur son préjudice résultant de l'accident médical dont elle a été victime le 16 septembre 2009.

Par acte d'huissier délivré le 3 août 2015, Madame [C] [Y] a assigné l'ONIAM, la CPAM et la mutuelle PRO BTP KORELIO devant le tribunal de grande instance de Montpellier, statuant au fond, afin d'obtenir l'indemnisation définitive de ses préjudices. Au termes de ses dernières écritures, elle sollicitait les sommes suivantes :

Pertes de gains avant consolidation'''''''...'''.' 67.650 €

- Assistance par tierce personne avant consolidation '''.' 09.803,72 €

- Dépenses de santé et frais divers ''''''...''''. 11.154,14 €

- Aides techniques '''''''''..'''''''' 57.118,32 €

- Frais d'adaptation du logement '''''''...'''''2.373,90 €

- Frais d'aménagement du véhicule ''''..'''''''82.410,76 € - Préjudice professionnel ''''''''''''''........2.166,66 €

mensuels du 18 juin 2012 à la date du jugement à intervenir ;

- Préjudice professionnel futur '''''''''''''..670.774 €

- Incidence professionnelle '''''''''''''...'67.077,40 € - Tierce personne après consolidation ''''''''''...4.869,10 €

mensuels du 30 juillet 2012 à la date du jugement à intervenir ;

- Tierce personne future ''''''...'''''''.. 1.507.414,93 €

- Déficit fonctionnel temporaire total ''...''''''''... 29.700 €

- Souffrances endurées '''''''''''''''''..30.000 €

- Préjudice esthétique temporaire ''''...'''''''' ..5.000 € - Déficit fonctionnel permanent ''''...'''''''..'.250.000 €

- Préjudice esthétique permanent '...'''''''..''''15.000 €

- Préjudice d'agrément '''...''''''''''''..'.25.000 €.

Madame [Y] sollicitait en outre le versement de la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le dispositif du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier le 5 juillet 2016 énonce :

'dit que Madame [C] [Y] a été victime lors de l'intervention du 16 septembre 2009 d'un accident médical non fautif dont les conséquences sont anormales eu égard au caractère exceptionnel de la complication dont elle a été victime,

'en conséquence, dit que l'ONIAM devra indemniser Madame [C] [Y] des conséquences dommageables imputables à l'accident comme suit :

' dépenses de santé actuelles : rejet

' frais divers : 235,50 €

' perte de gains professionnels actuels : néant

' aide humaine jusqu'au présent jugement : 174 096 €

' dépenses de santé futures : 874 €

'frais divers après consolidation : 3597 €

'frais d'aides techniques et domotiques : rejet

'frais d'aménagement du domicile : 352,15 €

'frais d'aménagement du véhicule : 48 242,87 €

' perte de gains futurs : 124 131,32 €

' incidence professionnelle : rejet

' aide humaine après jugement : rente trimestrielle de

13 530 € payable à terme échu à compter du 5 juillet 2016, dont devront être déduit le montant versé par la CPAM au titre du supplément tierce personne et le montant de la PCH effectivement versé à la victime pour la période correspondante, la rente étant par ailleurs revalorisée dans les conditions de l'article L. 351'11 du code de la sécurité sociale et son versement étant suspendu en cas d'hospitalisation d'une durée d'un mois au moins,

' déficit fonctionnel temporaire : 23 100 €

' souffrances endurées : 30 000 €

' préjudice esthétique temporaire : néant

' déficit fonctionnel permanent : 114 318 €

' préjudice esthétique permanent : 8000 €

' préjudice d'agrément : 0 €

' préjudice sexuel : 50 000 €

'rappelle que les sommes d'ores et déjà exigibles s'entendent en deniers ou quittances, les provisions allouées devant être déduites,

'déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

'ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,

'déboute Madame [C] [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

'dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens par elle exposés.

Le jugement considère au vu du rapport d'expertise que l'état de santé de [C] [Y] est imputable à la survenance d'un accident médical rarissime sans faute et que l'ONIAM ne conteste ni sa mise en cause ni le droit à indemnisation de la demanderesse.

Sur l'indemnisation des préjudices :

-dépenses de santé actuelles : rejet car Madame [C] [Y] ne justifie pas que la somme de 532 € correspondant à un séjour en centre de rééducation est restée à charge alors qu'elle a une complémentaire santé (PRO BTP Korelio).

-frais divers : pas de contestation

-perte de gains professionnels actuels : aucune indemnisation, les indemnités journalières de la CPAM ayant couvert plus que la perte de salaires

-assistance tierce personne : 6 heures par jour à 13 € (pas de justification d'une aide extérieure) soit 174 096 € jusqu'au jugement. Le tribunal considérant ici que si la PCH peut être déduite, en l'espèce son paiement résulte de l'état antérieur de [C] [Y] (sclérose en plaques) de sorte qu'elle ne doit pas être déduite.

-dépenses de santé futures : pas de contestation

-frais divers après consolidation : retient les frais de pédicure (à hauteur de 70 % compte tenu de l'état antérieur) mais pas les frais d'épilation à visée esthétique, dont la prise en charge par la solidarité nationale ne s'impose pas

-frais d'aides techniques et domotiques : jugés non nécessaires (fauteuil électrique, siège toilette élévateur...)

-frais d'aménagement du domicile : 352,15 €, le conseil général ayant versé des sommes à ce titre, la réfection éventuelle de la terrasse relevant de l'entretien normal d'un immeuble d'habitation et rien n'établit que de nouvelles portes permettraient une meilleure circulation en fauteuil.

-frais d'aménagement du véhicule : 48 242, 87 €, renouvellement tous les 7 ans

-perte de gains professionnels futurs : 124 131,32 €, le tribunal relevant notamment qu'il ne sait rien de la carrière passée ni des droits à retraite de Madame [C] [Y], et déduisant la pension d'invalidité de troisième catégorie versée par la CPAM,

-incidence professionnelle : rejet car pas de justification d'un préjudice supplémentaire, n'étant pas justifiée comme prétendu la perte de l'opportunité d'une promotion et/ou d'une augmentation de salaire,

-aide humaine après le 5 juillet 2016 : 13 530 € par trimestre, correspondant à 6 heures par jour au taux horaire de 22 € (afin de lui permettre de recourir à une aide professionnelle), dont devront être déduites la majoration tierce personne versée par l'assurance-maladie et la PCH versée par le département,

-déficit fonctionnel temporaire : 23 100 €

-souffrances endurées évaluées à 5,5/7 : 30 000 €

-préjudice esthétique temporaire : non justifié

-déficit fonctionnel permanent : taux de 50 % : 114 318 €

-préjudice esthétique permanent : 3,5/7 : 8000 €

-préjudice d'agrément : pas de justificatifs

-préjudice sexuel : 50 000 €, retenant deux composantes (libido et attitude à la réalisation de l'acte) même si l'expert ne le précise pas.

L'ONIAM a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 7 septembre 2016.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du

24 avril 2019.

Par ordonnance du 23 février 2017, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'encontre de la CPAM et de la mutuelle PRO BTP KORELIO.

L'affaire a été fixée pour les débats devant la cour d'appel de Montpellier à l'audience du 15 mai 2019.

Les dernières écritures prises par l'ONIAM ont été déposées le

21 mars 2017.

Les dernières écritures prises par Madame [C] [Y] ont été déposées le 20 décembre 2017.

Le dispositif des écritures de l'ONIAM énonce :

'Vu les dispositions des articles L. 1142-1 II et suivants du code de la santé publique ;

'Vu l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles et les annexes y afférentes ;

'Vu le rapport d'expertise judicaire ;

'Sur l'appel de l'Oniam

'Infirmer le jugement du 5 juillet 2016 en ce qu'il a condamné l'Oniam à verser à madame [Y] la somme de 174.096,00 € au titre de l'aide humaine jusqu'au

5 juillet 2016 et une rente trimestrielle de 13.350 € sous réserve de la déduction de la somme de 1.088,50 € versée au titre de la PCH ;

'Liquider le préjudice d'aide humaine de la manière suivante:

' Tierce personne temporaire : 29.356,30 € ;

' Tierce personne permanente : 568.244,82 € sous réserve de la déduction des prestations servies non communiquées intégralement ;

'Sur l'appel incident de Madame [Y]

'- Réduire les demandes indemnitaires de Madame [Y] à de plus justes proportions et liquider ses préjudices de la manière suivante :

' Frais d'aménagement du logement : 352,15 € (après déduction de la PCH)

' Déficit fonctionnel temporaire : 13.200 € ;

' Souffrances endurées : 20.722 € ;

' Préjudice esthétique : 5.125 € ;

' Déficit fonctionnel permanent : 114.318 €.

'- Dire que Madame [Y] ne justifie pas de la pratique d'activités sportives ou de loisirs avant l'accident du 16 septembre 2009 et en conséquence débouter Madame [Y] de sa demande au titre du préjudice d'agrément ;

'- Dire que Madame [Y] n'apporte pas les éléments utiles au calcul des aides techniques indemnisables par l'Oniam ;

'- Dire que Madame [Y] ne justifie pas des aides perçues au titre de l'aménagement de son véhicule et sera en conséquence déboutée de sa demande.

'- Dire que Madame [Y] ne justifie pas d'une perte de gains professionnels actuels et en conséquence la débouter de sa demande ;

'- Dire que Madame [Y] ne justifie pas du montant de la pension d'invalidité perçue en 2014 et en conséquence la débouter de sa demande au titre de la perte de gains professionnels futurs. A titre subsidiaire évaluer ce poste de préjudice à la somme de 88.121,42 € ;

'- Dire que Madame [Y] ne justifie pas d'une perte de chance d'obtenir une promotion ou une augmentation de salaires et en conséquence la débouter de sa demande au titre de l'incidence professionnelle ;

'En tout état de cause

'- Dire que la provision versée par l'Oniam devra être déduite;

'- Dire que l'Oniam ne saurait supporter les débours des tiers payeurs ;

'- Débouter les tiers payeurs de leurs demandes éventuelles ;

'- Condamner Madame [Y] aux dépens dont distraction au profit de la SCP Casanova ;

Le dispositif des écritures de [C] [Y] énonce :

'Confirmer le jugement de première instance en ce qu'il :

' a retenu son droit à indemnisation intégrale,

' a retenu un besoin en aide humaine de 6 heures par jour, auquel s'ajoute une heure d'aide par une infirmière,

' n'a pas soustrait la PCH perçue avant consolidation sur l'évaluation du poste de tierce personne,

' au regard des montants alloués au titre des frais divers, des frais de santé après consolidation et du préjudice sexuel

'Réformer pour le surplus :

'En conséquence, condamner l'ONIAM à lui verser :

' 532 € au titre des frais de santé avant consolidation restant à charge et s'ajoutant à la créance de la CPAM de

61 482, 41 €,

' 235,50 € au titre des frais divers,

' 25 948, 81 € au titre des pertes de gains avant consolidation,

'109 803, 72 € au titre des besoins en tierce personne avant consolidation,

' 874 € au titre des frais restant à charge après consolidation et qui s'ajoutent à la créance de la CPAM de 185 343,21 €,

' 9712,11 € au titre des frais divers après consolidation de podologue et d'esthéticienne,

' 77 486,54 € au titre des frais d'aides techniques,

' 8871,09 € à titre de provision à valoir sur l'indemnisation définitive des frais d'aménagement du logement,

' 83 990,05 € au titre des frais d'aménagement du véhicule,

' 2166, 66 € multiplié par le nombre de mois écoulés du

18 juin 2012 à la date de la décision à intervenir au titre du préjudice professionnel durant cette période, dont il convient de déduire 1901 € perçus à titre des salaires pour l'année 2015,

' 671 918 € au titre du préjudice professionnel futur dont il conviendra de déduire la créance de la CPAM de

131 850,14 €,

' 80 192 € au titre de l'incidence professionnelle,

' 4869,10 € multiplié par le nombre de mois écoulés du

30 juillet 2012 à la date de la décision à intervenir au titre de la tierce personne durant cette période,

'1 509 985, 81 € au titre de la tierce personne future, dans l'hypothèse où ce poste de préjudice serait versé sous forme de rente, celle-ci sera due trimestriellement, à terme à échoir, revalorisé chaque année selon l'indice de revalorisation des rentes et ne pourra être suspendue qu'en cas d'hospitalisation supérieure à 45 jours et se voir imputer du montant de la prestation compensation du handicap, que dans l'hypothèse d'une perception effective de celle-ci,

' 29 700 € au titre du déficit fonctionnel temporaire total,

' 30 000 € au titre des souffrances endurées,

' 5000 € au titre du préjudice esthétique temporaire,

' 250 000 € au titre du déficit fonctionnel permanent,

' 15 000 € au titre du préjudice esthétique,

' 25 000 € au titre du préjudice d'agrément,

' 50 000 € au titre du préjudice sexuel,

'réserver l'indemnisation du poste d'aménagement du domicile,

'dire et juger que les sommes allouées en principal seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la demande en justice et que les intérêts seront capitalisés par année entière à compter de cette même date, en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

'condamner l'ONIAM à payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits au profit de la SCP CHRISTOL & INQUIMBERT sur leur affirmation de droit, sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile.

MOTIFS

La mise en cause de l'ONIAM et le droit à indemnisation de Madame [C] [Y], victime d'un accident médical très rare, n'est pas plus contesté en appel qu'en première instance.

Il sera rappelé que la Cour d'appel de Montpellier applique désormais le barème actualisé de la Gazette du Palais, édition 2018, qui retient un taux d'intérêt de 0,5 %. C'est donc ce barème qui sera appliqué, par souci d'équité, comme étant usuel dans le ressort de la juridiction.

Sur les préjudices patrimoniaux

1/ Les préjudices patrimoniaux temporaires

* Les dépenses de santé actuelles

Les débours de la CPAM s'élèvent à la somme de 61 482,41 €.

Il convient de rappeler que, s'agissant de l'indemnisation des dommages résultant d'accidents médicaux, l'ONIAM intervenant au titre de la solidarité nationale, n'est pas auteur responsable du dommage, de sorte que les recours subrogatoires des tiers payeurs, notamment la sécurité sociale, ne peuvent être exercés contre lui.

Seuls les frais restés à la charge de Madame [C] [Y] peuvent être indemnisés.

Cette dernière fait valoir que s'ajoutent à ses débours des frais non remboursés pour le séjour en centre de rééducation [Localité 3], du 1er novembre 2009 au 1er février 2010 pour un montant de 532 €.

La CPAM a pris en charge au titre de ce séjour des frais à hauteur de 42 187,60 €.

Madame [C] [Y] produit trois factures payées au centre hospitalier [Localité 3] pour 104,50 €, 161,50 € et 266 €.

Le premier juge a justement considéré qu'il n'était pas justifié que cette somme était demeurée à sa charge alors qu'elle bénéficie d'une assurance complémentaire santé PRO BTP Korelio qui a pu prendre en charge la part du coût du séjour présenté comme demeurée à charge.

Or, Madame [C] [Y] ne produit en appel que le relevé de l'assurance-maladie et les factures mais aucun justificatif émanant de la mutuelle notamment les relevés des prestations perçues après l'accident.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande au titre des dépenses de santé actuelles.

* Les frais divers

Le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a alloué à Madame [C] [Y] la somme de 235,50 € correspondant aux frais de médecin-conseil.

Il y a donc lieu de le confirmer sur ce point.

* L'assistance par tierce personne temporaire

Le tribunal a indemnisé l'aide humaine temporaire sur la base d'un besoin de 6 heures quotidiennes au coût horaire de 13 € et a considéré que la prestation de compensation du handicap (PCH) ne pouvait être déduite s'agissant de l'ONIAM, dans la mesure où elle est imputable à l'état antérieur de la demanderesse.

L'ONIAM qui explique que son appel porte principalement sur l'aide humaine, considère qu'elle doit être évaluée avant et après consolidation, sur la base de 5 heures par jour (la sixième heure étant effectuée par une infirmière dont le coût est pris en charge par l'assurance-maladie). Le taux horaire de 13 € pour l'assistance tierce personne avant consolidation n'est pas contesté mais l'ONIAM sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a, après pourtant avoir reconnu le principe de la déductibilité de la prestation de compensation du handicap, refusé de la déduire.

Madame [Y] sollicite, pour sa part, une indemnisation sur la base de 6 heures quotidiennes au prix de 23,86 € de l'heure et la confirmation du jugement en ce qu'il n'a pas soustrait la PCH.

L'expert judiciaire indique dans son rapport :

« L'assistance par une tierce personne est indispensable :

-par l'époux et par une tierce personne de l'extérieur

-une infirmière vient pour la toilette et l'aide pour la douche et les transferts

-en somme une auxiliaire de vie est indispensable chaque jour, de 9 heures à 15 heures, soit 6 heures par jour pour faire la toilette, les courses, le ménage, les transferts sécurisés. »

Si l'expert judiciaire fait référence à une infirmière qui vient pour la toilette et l'aide pour la douche et les transferts, il inclut bien cette heure dans les 6 heures retenues même s'il utilise le terme « auxiliaire de vie », puisqu'il précise que cette dernière intervient pour la toilette et les transferts sécurisés, actes effectués par l'infirmière. Il ne sera donc retenu que 5 heures puisqu'une heure est prise en charge par la sécurité sociale.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

S'agissant du coût horaire, il convient de rappeler que l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce-personne ne saurait être réduite en cas d'assistance bénévole par un proche de la victime.

En l'absence de justificatifs de la dépense exposée avant consolidation, il y a lieu de fixer le taux horaire à 18 €.

La durée de 767 jours pour l'aide humaine avant la consolidation du 18 juin 2012 n'est pas contestée, soit une période entre le

26 février 2010, date du retour à domicile au 4 avril 2012, date d'une nouvelle hospitalisation en centre de rééducation fonctionnelle jusqu'au 30 juillet 2012.

Le poste de la tierce personne temporaire doit donc être indemnisé comme suit :

3835 heures X 18 € = 69 030 €

Le jugement sera réformé sur ce point.

Le premier juge a ensuite justement retenu, en application de l'article L. 1142'14 du code de la santé publique, que la PCH devait, s'agissant de l'ONIAM, être déduite mais qu'en l'espèce, la somme de 1052,87 € résultait d'une décision du département du Gard du 21 avril 2009, soit antérieure à l'accident médical et était donc nécessairement imputable à l'état antérieur de Madame [C] [Y].

Contrairement à ce que soutient l'ONIAM, l'aide prise en charge par le conseil général du Gard n'atteint pas les « temps plafond » fixés à l'annexe 2-5 du code de l'action sociale et des familles. En tout état de cause, les arguments développés sont sans intérêt pour la période antérieure à la date de consolidation du 18 juin 2012 dans la mesure où la décision du 21 avril 2009 a fixé l'aide humaine due en raison de la sclérose en plaques pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2014 et qu'il n'y a eu de modifications que le 30 septembre 2013, soit postérieurement à la date de consolidation.

Il n'y a donc pas lieu de déduire la somme de 26 918,38 € au titre de la PCH versée pendant la période de 767 jours précitée.

* La perte de gains professionnels actuels (PGPA)

Ce poste de préjudice correspond aux pertes de revenus subies par la victime durant sa période d'incapacité de travail avant consolidation, soit en l'espèce du 17 septembre 2009 au

18 juin 2012.

En appel, Madame [C] [Y] fait valoir une perte de revenus de 25 948,81 € (et non plus de 35 429,84 € comme en première instance).

Le premier juge a considéré qu'il n'y avait lieu à aucune indemnisation complémentaire dans la mesure où les indemnités journalières avaient couvert plus que la perte de salaire.

Il y a effectivement eu un maintien du salaire, à l'examen des bulletins de salaire des mois de septembre à décembre 2009.

En outre, la cour constate qu'il n'y a aucune baisse de salaire par rapport aux mois de janvier à août 2009, soit antérieurement à l'opération chirurgicale litigieuse. La prime d'ancienneté notamment est maintenue et il n'est pas justifié de la perte de primes ou de rémunération. Madame [C] [Y] ne produit en effet en appel aucun autre bulletin de salaire que ceux de l'année 2009, de sorte qu'il n'y a toujours pas d'information sur le maintien de salaire au-delà de 2009.

Ainsi, par des motifs et un calcul pertinents, étant relevé que l'ONIAM retient le salaire de référence de l'année 2008, le premier juge a justement, au vu des avis d'imposition 2010 à 2012, retenu une perte globale imputable de 25 911,50 € pendant la période considérée, de laquelle il convient bien de déduire les indemnités journalières versées par la CPAM entre le 1er janvier 2010 et le 30 juin 2012, soit 32 220,16 €. Le simple examen des trois derniers bulletins de salaire de 2009 permet de constater que le cumul net imposable n'intègre pas les indemnités journalières versées par la sécurité sociale et pourtant bien perçues par Madame [C] [Y].

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a considéré qu'il n'y avait lieu à aucune indemnisation au titre du poste de la perte de gains professionnels actuels.

2/ Les préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)

* Les dépenses de santé futures

Le premier juge a justement considéré qu'il était resté à charge de Madame [C] [Y] la somme de 874 € au titre de soins énergétiques à domicile.

Il n'y a pas lieu d'écarter cette demande au motif que les soins énergétiques ont été effectués par une association 'La Fabrique des initiatives' qui ne serait pas « un professionnel de la santé mais une entreprise d'accompagnement des entrepreneurs « , dans la mesure où ils ont été prescrits par son médecin traitant « pour des douleurs secondaires à l'intervention (hernie discale cervicale opérée 16/09/09) ».

Il convient donc de confirmer le jugement sur ce point.

* Les frais divers après consolidation

Madame [C] [Y] sollicite ici la somme de 9717,11 € au titre des frais de pédicure tous les deux mois (ongle incarné, coupe d'ongle, ablution hyperkératose) ainsi que d'épilation des sourcils en raison de l'impotence de sa main droite.

Le dispositif des écritures de l'ONIAM ne comporte aucune

précision à ce titre et il sollicite dans les motifs la confirmation du jugement.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a accordé la somme de 3597 € au titre des frais de pédicure.

S'agissant des frais d'épilation des sourcils, il ne peut être contesté, au regard des conclusions de l'expert reprises dans ses écritures par Madame [C] [Y], une impotence de la main droite. Cependant, outre le fait qu'il n'est pas justifié l'absence de recours à une esthéticienne avant l'intervention, il s'agit-là d'un préjudice indemnisé dans le cadre du déficit fonctionnel permanent qui couvre les troubles dans les actes de la vie quotidienne, dont fait partie, pour une femme, l'épilation.

Le jugement sera donc confirmé.

* Les frais d'aides techniques et domotiques

Madame [C] [Y] sollicite la somme de 77 486,54 € correspondant à des frais de fauteuil roulant manuel avec motorisation légère, des frais annexes et d'assurance, des peaux d'agneau pour la prévention des escarres, des frais de petits matériels (porte-gobelet, pinces de prévention, prises électriques télécommandées et coussins de relaxation, épluche-légume électrique, ouvre-bouteille spécialisé), matelas, sommier et canapé adaptés ainsi que de soulève-malade.

L'intimée indique qu'elle souhaiterait faire l'acquisition d'un fauteuil roulant électrique pliant plus adapté à ses déplacements que celui pris en charge par la sécurité sociale. Elle produit un devis pour un 'fauteuil roulant électrique pliant SmartChair XL (innovation)'. Or, l'intimée ne justifie pas de la nécessité d'un tel matériel alors que l'assurance maladie a versé un 'capital frais d'appareillage' d'un montant global de 32 919,46 € comprenant les frais de « véhicules pour handicapé physique » et alors qu'elle dispose à ce titre d'un fauteuil électrique dont aucune pièce au dossier ne permet de connaître les caractéristiques. Il est par ailleurs fourni des attestations d'assurance de fauteuil électrique mais aucun justificatif de paiement des montants de primes correspondantes. Il n'est pas non plus démontré que la facture 'ajile ' 100 pièces ' cache vis écrou de protection M8 clef de 13 mm' concerne le fauteuil roulant. La nécessité des autres petits matériels électriques n'est pas justifiée au regard de l'état de santé.

Il convient de relever, pour le surplus, que l'expert judiciaire ne s'est prononcé ni sur le matériel dont a besoin Madame [C] [Y], ni sur le coût de ce matériel et la fréquence de son renouvellement. Si Madame [C] [Y] n'est pas obligée de justifier de l'acquisition du matériel et peut produire un devis, il convient de rappeler que le juge doit statuer en fonction des besoins de la victime décrits dans le rapport d'expertise et dans la limite de ces besoins mais également de la périodicité du renouvellement du matériel et en tenant compte de l'âge de la victime. Ainsi, s'agissant du siège de toilettes élévateur 'solo' d'un montant de 1957,50 € qui n'a donc jamais été acheté depuis l'accident, la seule production d'un devis n'est pas suffisante pour établir la nécessité d'une indemnisation à hauteur de 9098,46 € comprenant l'acquisition et le renouvellement tous les 5 ans à partir de 2021.

S'agissant également des peaux d'agneau, d'un matelas et sommier adaptés, d'un canapé ou d'un soulève-malade, il n'est justifié ni de la nécessité de ces acquisitions, notamment aucune prescription médicale (sauf pour le soulève-malade), ni d'une prise en charge par la sécurité sociale qui prend normalement en charge lorsqu'ils sont nécessaires les lits médicalisés, les matelas et coussins anti-escarres ainsi que le soulève-malade. En l'espèce, l'état des prestations date du 5 mai 2014 et concerne en tout état de cause le coussin escarres et son renouvellement.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes au titre des aides techniques et domotiques.

* Les frais d'aménagement de logement

L'expert judiciaire considère qu'un certain nombre d'aménagements doivent être apportés au logement de Madame [C] [Y], ainsi construire une rampe d'accès en maçonnerie, élargir les portes pour permettre l'accès en fauteuil et aménager la salle de bain.

Madame [C] [Y] produit des factures relatives à la fourniture et pose de nouvelles menuiseries ainsi qu'un système de motorisation pour porte pour un montant total de 2930,92 €. Elle ne justifie toutefois pas que ces frais sont en relation avec l'accident médical et n'établit pas que des portes abîmées ont dû être remplacées en raison de la circulation du fauteuil. Il ne ressort pas des factures produites que les nouvelles portes seraient plus larges que les anciennes et permettraient dès lors une meilleure circulation en fauteuil. Cette demande sera donc rejetée.

L'intimée n'explique pas pourquoi elle a acheté deux barres d'appui à un peu plus de trois ans d'intervalle. Il convient donc de n'en retenir qu'une seule à hauteur de 58,53 €.

Ne sont pas contestés par ailleurs par l'ONIAM, les travaux de remplacement du gravier par du mortier pour 3971 € et la confection d'une rampe d'accès pour un montant de 4568,90 €.

Il n'est pas contesté que Madame [C] [Y] a perçu, au titre des rampes d'accès, la somme de 2871,28 € versée par le conseil général du Gard.

S'agissant de la somme de 5375 € versée également par le conseil général, Madame [C] [Y] fait valoir qu'elle a été versée pour

l'aménagement de la salle de bains. Il apparaît toutefois que cette somme lui a été versée sur justificatif mais l'intimée n'en produit aucun aux débats.

L'ONIAM ne peut donc être condamné qu'à la somme de :

(3971 € + 4568,90 € + 58,53 €) - (2871,28 € + 5375 €) = 352,15 €.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

* Les frais d'aménagement du véhicule

Madame [C] [Y] sollicite à ce titre la somme de

83 990,05 €.

L'appelant ne conteste ni le principe de l'indemnisation de ce préjudice ni le surcoût de 14 870,76 € pour l'acquisition du nouveau véhicule, il indique simplement que Madame [C] [Y] ne justifie pas des prestations perçues au titre de la prestation de compensation du handicap. Toutefois, le premier juge a justement relevé que le poste « véhicule » n'apparaissait pas sur les notifications relatives à la PCH, de sorte qu'il n'est pas établi qu'une aide spécifique aurait pu être accordée pour l'acquisition d'un véhicule adapté.

Cependant, le premier juge n'a pas intégré dans son calcul le surcoût lors de la première acquisition.

Il y a donc lieu d'indemniser ce poste de préjudice comme suit, en retenant un renouvellement selon l'usage tous les 7 ans :

*Première acquisition en 2016 : 14 878 76 €

*renouvellement tous les 7 ans à compter de 2023 :

14 870,76 € / 7 x 23,995 (prix de l'euro de rente viagère pour une femme de 61 ans selon la Gazette du Palais 2018) = 50 974,84 €.

Il convient donc d'accorder à l'intimée la somme de 65 853,60 €. Le jugement sera réformé sur ce point.

* La tierce personne permanente (après consolidation)

Il sera retenu, comme pour l'assistance temporaire, la base de 5 heures par jour au taux horaire de 18 €, Madame [C] [Y] ne produisant que des devis et non les justificatifs des dépenses exposées.

Madame [C] [Y] n'ayant pas la qualité d'employeur, le calcul annuel sera fait sur la base de 365 jours.

A partir de ces éléments, il convient de déterminer le coût annuel de la tierce personne, d'allouer à la victime les arrérages échus en capital entre la date du retour au domicile (30 juillet 2012) et la date du présent arrêt, et les arrérages à échoir après la décision, sous forme de rente et ce, dans l'intérêt de la victime dont il convient de protéger l'avenir.

- Du 30 juillet 2012 au 24 juin 2019 :

2520 jours x 5 heures = 12 600 heures X 18 € = 226 800 €

Le décompte de la sécurité sociale mentionne le montant de la pension d'invalidité imputable à l'accident médical comprenant la majoration pour tierce personne mais ne distingue pas précisément les deux prestations lorsqu'il détermine le montant des arrérages échus et à échoir, de sorte que la majoration tierce personne ne peut être déduite sans erreur dans le cadre du présent poste de préjudice. Le montant sera donc déduit du poste de la perte de gains professionnels futurs, étant relevé que l'ONIAM déduit la somme de 108 870,68 € des deux postes de préjudices.

- À compter du présent arrêt :

La rente annuelle au titre de l'aide humaine permanente s'élève donc à :

365 X 5 X 18 = 32 850 € qui sera versée trimestriellement selon les termes du dispositif du présent arrêt.

Comme pour l'assistance tierce personne temporaire, il n'y a pas lieu de déduire la PCH allouée avant l'accident médical et qui ne lui est pas imputable. L'expert judiciaire n'a certes pas distingué entre l'aide humaine liée à la sclérose en plaques et l'aide humaine liée à l'accident médical mais il sera relevé que le nombre d'heures mensuelles octroyé par le conseil général du Gard, soit 91, n'a pas été modifié lors du renouvellement de l'aide en 2013. Il n'est donc pas démontré pas l'ONIAM que l'accident médical aurait modifié sur ce point les droits initiaux de l'intimée. Le jugement sera donc ici réformé en ce qu'il a déduit pour le futur la PCH. Enfin, il n'y a pas lieu de déduire la majoration tierce personne dans la mesure où le capital pension invalidité de 108 870,68 €, déduit au titre du poste de la PGPF, comprend cette prestation comme l'explique le décompte de la sécurité sociale notamment en sa note de bas de page (4).

* La perte de gains professionnels futurs (PGPF)

Il n'est pas contesté que le licenciement du 1er juillet 2015 trouve sa cause dans l'accident médical.

Il y a lieu de retenir, comme l'a fait le premier juge, le salaire de référence 2008 majoré compte tenu de l'évolution générale des salaires, soit 26 000 €.

- De la date de consolidation (18 juin 2012) jusqu'au présent arrêt :

Madame [C] [Y] aurait dû percevoir (26 000 €/12) x 84 mois = 182 000 €

L'intimée fait ensuite justement valoir que la décision de première instance comporte une erreur en ce que le tribunal a retenu un revenu de 26 370 € qui correspond sur l'avis d'imposition 2013 sur les revenus 2012 aux salaires et à la pension d'invalidité.

En réalité, Madame [C] [Y] a perçu au vu des avis d'imposition :

- à compter du 18 juin 2012 et au titre de l'année 2012 : 3413,50 € de salaire

- en 2013 : aucun salaire, la somme de 16 275 € correspondant à la pension d'invalidité

- en 2014 : aucun salaire, la somme de 19 589 € correspondant à la pension d'invalidité

- en 2015 (au vu de l'avis d'imposition correspondant produit en appel) : un reliquat de salaire de 1901 €

Il convient donc de déduire la somme de 5314,50 € au titre des salaires perçus jusqu'au licenciement.

Il sera déduit également la somme de 22 979,46 € au titre des arrérages échus de pension d'invalidité imputable selon le décompte de la CPAM (correspondant au changement de catégorie, de la 2ème ' déjà en place avant l'accident litigieux ' à la 3ème catégorie qui seule est imputable).

Il n'y a pas lieu à déduire la pension PRO BTP déjà perçue avant l'accident.

Il revient donc à l'intimée :

182 000 € - 5314,50 € - 22 979,46 € = 153 706,04 €

- A compter du présent arrêt :

Le tribunal a justement considéré, tenant compte des droits à la retraite acquis, que la capitalisation ne pouvait intervenir sur une base viagère mais sur la base de l'euro de rente temporaire. La cour ajoutera que la loi garantit aux invalides le bénéfice d'une pension à taux plein et prévoit également que les périodes de perception des pensions d'invalidité donnent lieu à la validation gratuite de trimestres qui sont assimilés à des périodes d'assurance pour le calcul de la pension vieillesse, par dérogation au principe dit de

« contributivité ».

Il revient en définitive à Madame [C] [Y] :

26 000 € X 4,867 (correspondant au prix de l'euro de rente temporaire publié à la Gazette du Palais 2018 pour une femme de 57 ans en juin 2019 et jusqu'à l'âge prévisible de la retraite soit

62 ans ) = 126 542 €

Il convient de déduire de cette somme la pension invalidité catégorie 3 versée par la CPAM soit 108 870,68 €, soit un reliquat de 17 671,32 € pour l'intimée.

Il revient donc à Madame [C] [Y] au titre de la perte de gains professionnels futurs, la somme totale de :

153 706,04 € + 17 671,32 € = 171 377,36 €

* L'incidence professionnelle

Madame [C] [Y] sollicite la somme de 80 192 € au titre de l'incidence professionnelle, soit 10 % de la perte de gains professionnels futurs, faisant valoir outre la perte de l'épanouissement et de la reconnaissance sociale qu'apporte le travail, la perte du bénéfice d'une progression de carrière importante en tant que cadre dans les travaux publics, de son incidence sur la retraite, des possibilités de promotions.

Il convient de rappeler s'agissant de l'épanouissement ou de la reconnaissance sociale, que cette perte est indemnisée au titre du déficit fonctionnel permanent.

Par ailleurs, la seule production du barème des minima des cadres des travaux publics de 2008 à 2016 ne permet pas de faire la preuve de la perte de chance de bénéficier d'une augmentation de salaire ou d'une promotion.

Seule est justifiée la perte du bénéfice de l'épargne salariale de 320 € par an qui peut être indemnisée comme suit :

320 € X 4,867 (prix de l'euro de rente temporaire) = 1557,44 €

Sur les préjudices extra-patrimoniaux

1/ Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires

* Le déficit fonctionnel temporaire

L'expert judiciaire a retenu un déficit fonctionnel temporaire total du 17 septembre 2009 au 18 juin 2012, soit durant 33 mois.

La cour n'est pas tenue par le référentiel de l'ONIAM.

Le premier juge a justement retenu, selon la jurisprudence habituelle, une indemnisation égale à la moitié d'un SMIC, soit 700 € par mois pour réparer la gêne occasionnée dans les actes de la vie courante.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a octroyé une somme de :

700 € X 33 = 23 100 €

* Les souffrances endurées

Il s'agit des souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique jusqu à la consolidation.

L'expert judiciaire a évalué les souffrances endurées à 5,5/7.

Au vu de ce taux et de l'exposé des faits tels que ressortant du rapport d'expertise qui permet de constater la réalité de ce préjudice, la somme de 30 000 € a justement été évaluée par le premier juge.

* Le préjudice esthétique temporaire

Il s'agit de l'altération de l'apparence physique, même temporaire, justifiant une indemnisation.

Si l'expert judiciaire n'a pas retenu de préjudice esthétique temporaire puisqu'il n'évalue qu'un dommage permanent de 3,5/7 lié notamment aux déformations du corps, au confinement au fauteuil roulant et à l'utilisation occasionnelle de cannes, cependant, à la lecture de l'exposé de la maladie traumatique, il existe bien un préjudice esthétique temporaire autonome liée notamment à l'image dégradée pendant la longue hospitalisation.

Il sera accordé une somme de 3000 €. Le jugement sera réformé sur ce point.

2/ Les préjudices extra-patrimoniaux permanents

* Le déficit fonctionnel permanent

Il s'agit des séquelles conservées par la victime à l'issue de la consolidation.

Selon l'expert judiciaire, les séquelles imputables à l'accident médical sont représentées par une hémiplégie spastique droite (côté dominant), station debout impossible, absence de déficit cognitif.

Le déficit fonctionnel global est de 70 % selon lui mais il existe un état antérieur lié aux troubles neurologiques liés à une sclérose en plaques, correspondant à un déficit fonctionnel permanent de 20 % qui doit être déduit.

Madame [C] [Y] réclame la somme de 250 000 € et l'ONIAM propose celle de 114 318 €, retenue par le tribunal.

Compte tenu de l'âge de la victime au moment de la consolidation, soit 50 ans et le taux de déficit imputable de 50 %, il convient de retenir une valeur du point de 3240 €.

Il convient donc d'accorder à Madame [C] [Y] la somme de 3240 X 50 = 162 000 €. Le jugement sera réformé sur ce point.

* Le préjudice esthétique permanent

L'expert a donc évalué ce préjudice à 3,5/7 compte tenu des conséquences esthétiques de l'hémiplégie (déformations du corps, confinement au fauteuil roulant, utilisation occasionnelle de

cannes ...).

Au vu de ces éléments, la somme de 8000 € allouée par le tribunal est justement évaluée.

* Le préjudice d'agrément

Ce poste de préjudice répare l'impossibilité, les limitations ou les difficultés pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs et non pas la perte de qualité de vie subie avant consolidation laquelle est prise en compte au titre du déficit fonctionnel permanent. Le préjudice d'agrément est celui qui résulte d'un trouble spécifique lié à l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité sportive ou de loisirs.

L'appréciation se fait in concreto, en fonction des justificatifs, de l'âge, du niveau sportif notamment, le tribunal ayant justement rappelé que l'indemnisation de ce préjudice se fait sur justificatifs au regard des éléments de preuve des activités spécifiques de sport et de loisirs pratiquées antérieurement par la victime. Constatant ensuite que Madame [C] [Y] ne produisait aucun document en ce sens, il a rejeté la demande.

L'expert judiciaire retient certes un préjudice d'agrément mais les attestations produites en appel qui précisent que Madame [C] [Y] aimait sortir, s'amuser, danser, faire du shopping et de la randonnée lors de certains week-end ou séjours de vacances, ne permettent cependant pas de retenir l'existence d'un préjudice répondant à la définition juridique du préjudice personnel distinct que constitue le préjudice d'agrément. En effet, la privation des agréments, de la qualité de vie et des troubles ressentis dans les conditions d'existence personnelle et sociale dont il est fait état relève de l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent.

Il convient donc ici encore de confirmer le jugement.

* Le préjudice sexuel

Ce poste de préjudice n'est pas contesté. Le jugement sera également confirmé.

Sur les dépens et les frais non remboursables

L'appelant qui échoue en sa demande principale supportera les dépens de l'appel à recouvrer au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile mais il n'est pas inéquitable de ne pas faire application de l'article 700 du même code.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu le 5 juillet 2016 par le tribunal de grande instance de Montpellier, sauf en ce qui concerne l'aide humaine temporaire et permanente, les frais d'aménagement du véhicule, la perte de gains professionnels futurs, l'incidence professionnelle, le préjudice esthétique temporaire et le déficit fonctionnel permanent

Et statuant à nouveau sur ces postes,

FIXE l'indemnisation due par l'ONIAM comme suit :

- aide humaine temporaire  :69 030 €

- aménagement du véhicule :65 853,60 €

- aide humaine permanente :

*en capital, la somme de 226 800 € pour la période du

30 juillet 2012 au 24 juin 2019

*une rente annuelle viagère de 32 850 € payable trimestriellement, indexée selon les dispositions prévues par la loi du 5 juillet 1985 et suspendue en cas d'hospitalisation à partir du 46e jour et ce, à compter du 25 juin 2019.

- perte de gains professionnels futurs :171 377,36 €

- incidence professionnelle  : 1557,44 €

- préjudice esthétique temporaire  : 3000 €

- déficit fonctionnel permanent  : 162 000 €

RAPPELLE que ces sommes s'entendent en deniers ou quittances, les provisions allouées devant être déduites,

REJETTE le surplus des demandes,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel,

CONDAMNE l'ONIAM aux dépens de l'appel, distraits au profit de la SCP CHRISTOL & INQUIMBERT conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

MM/NA


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 16/06752
Date de la décision : 25/06/2019

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°16/06752 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-25;16.06752 ?
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