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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème Chambre B
ARR'T DU 05 DECEMBRE 2018
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/03742 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NHML
Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 MAI 2017
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 14/00521
APPELANTE :
Madame Aïda C... D... épouse X...
née le [...] à Vimioso (PORTUGAL)
de nationalité Portugaise
[...]
[...]
Représentée par Me Patrick Y... de la Z..., avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
INTIME :
Monsieur Marcel X...
né le [...] à MELEN BELGIQUE
de nationalité Belge
[...]
Représenté par Me Bernard A... de la B..., avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
ORDONNANCE DE CL TURE du 17 Octobre 2018
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 NOVEMBRE 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Bernard BETOUS, Conseiller, chargé du rapport et devant Madame Cécile YOUL-PAILHES, conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Sylvie BONNIN, Présidente
M. Bernard BETOUS, Conseiller
Mme Cécile YOUL-PAILHES, Conseillère
Greffier, lors des débats :
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile ;
- signé par Mme Sylvie BONNIN, Présidente, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Madame Aïda C... D... et Monsieur Marcel X... se sont mariés le 17 mai 2007 par devant l'officier de l'état civil de la commune de Bastogne (Belgique), en ayant fait précéder leur union d'un contrat de mariage de séparation de biens.
Par ordonnance de non-conciliation en date du 28 janvier 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Perpignan a, notamment :
- autorisé les époux à introduire l'instance en divorce,
- fixé la résidence séparée des époux au 18 janvier 2011,
- attribué la jouissance du domicile conjugal situé au [...] de Lattre de Tassigny à Canet-en-Roussillon, à Monsieur X..., sous réserve des droits de chacun dans la liquidation du régime matrimonial.
Par jugement en date du 22 mars 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Perpignan a, notamment :
- prononcé le divorce des époux C... D.../X...,
- ordonné la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux,
- débouté Madame C... D... de sa demande de prestation compensatoire.
Le 29 octobre 2013, Maître E..., notaire associé à Saint-Laurent-de-la Salanque, a établi un procès-verbal de difficultés.
Par acte d'huissier en date du 27 janvier 2014, Monsieur X... a fait assigner Madame C... D..., devant le tribunal de grande instance de Perpignan, aux fins de voir:
- ordonner la liquidation de l'indivision existant entre Monsieur X... et Madame C... D...,
- ordonner l'attribution préférentielle au profit de Monsieur X... de la maison située au [...],
- lui donner acte de ce qu'il reconnaît devoir à Madame C... D... à titre de soulte, la somme de 16799,20€,
- désigner Maître F... afin de procéder aux opérations de partage et liquidation de l'indivision existante entre Monsieur X... et Madame C... D...,
- condamner Madame C... D... au paiement de la somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Par jugement contradictoire en date du 22 mai 2017, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Perpignan a, notamment :
- ordonné le partage du régime matrimonial et de l'indivision consécutive de Monsieur X... et de Madame C... D...,
- ordonné l'attribution préférentielle de la maison sise au [...] à Monsieur X...,
- fixé les droits immobiliers indivis de Monsieur X... dans la maison sise au [...] à 97,47 % et ceux de Madame C... D... à 2,53 %,
- dit que Monsieur X... est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du 18 janvier 2011,
- commis Maître F..., notaire à Saint-Laurent-de-la Salanque pour procéder aux opérations de liquidation et de partage,
- commis le juge aux affaires familiales pour surveiller ces opérations,
- débouté Madame C... D... de ses demandes,
- réserver les demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
Par déclaration au greffe en date du 04 juillet 2017, Madame Aïda C... D... a interjeté appel total de cette décision.
Dans ses dernières conclusions en date du 25 septembre 2018, Madame Aïda C... D... demande à la courde:
Au principal
- constater que Madame Aïda C... D... a collaboré pendant des années à l'activité professionnelle de son époux sans être rémunérée et a aussi contribué aux charges du mariage à hauteur de ses capacités contributives,
- constater que l'époux a contribué à hauteur de ses capacités dans le financement de l'acquisition de l'immeuble indivis et n'allègue pas avoir 'sur-contribué' aux charges du mariage,
- dire que le régime matrimonial pose une présomption irréfragable de contribution aux charges du mariage des époux à hauteur de leurs capacités contributives,
- constater que le régime matrimonial pose, en matière d'indivision, la règle selon laquelle, à défaut de convention écrite, chacun des époux est réputé avoir contribué à hauteur de ses capacités contributives,
- constater qu'il n'est pas justifié par l'époux de ce qu'il aurait contribué au-delà de ses capacités contributives et ainsi 'sur-contribué',
- constater que dans l'hypothèse d'une sur-contribution aux charges du mariage par l'époux, l'acquisition de l'immeuble en indivision par moitié chacun constitue une donation dont celui-ci n'a pas demandé la révocation conformément aux dispositions de l'article 265 du code civil,
- dire en conséquence que l'épouse a des droits équivalents à ceux de son époux sur l'immeuble indivis et qu'elle peut donc prétendre, à la moitié de la valeur de l'immeuble dans le cadre du partage à intervenir,
- dire en outre que l'épouse a droit à une indemnité d'occupation dont son époux est débiteur depuis le prononcé de l'ordonnance de non conciliation, jusqu'à la date du partage effectif, équivalent à la moitié de la valeur locative de l'immeuble,
Très subsidiairement
- dire que Madame Aïda C... D... peut prétendre à une indemnité correspondant à l'apport qu'elle a effectué lors de l'acquisition du terrain indivis à hauteur de 24 790 € le 14 juin 2002,
- dire que cette indemnité devra être revalorisée au regard de la valeur acquise de l'immeuble conformément aux dispositions de l'article 815-13 du code civil,
En toutes hypothèses
- dire que l'indemnité d'occupation due par Monsieur X... sera bien évidemment réactualisée puisqu'il occupe toujours les lieux et sera équivalente à la valeur locative de l'immeuble, la moitié de l'indemnité devant en toute hypothèse revenir, dans le partage, à l'épouse, co-indivise pour moitié de celui-ci,
- désigner tel notaire qu'il plaira à la Cour de nommer pour procéder aux opérations de compte et de partage du régime matrimonial des époux,
- condamner Monsieur X... au paiement d'une somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
L'intimé, Monsieur Marcel X..., dans ses conclusions du 12 octobre 2018, demande à la cour de:
- débouter Madame C... D... de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de PERPIGNAN en date du 22 mai 2017,
- condamner Madame C... D... au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 17 octobre 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'attribution préférentielle
Le jugement entrepris n'est pas critiqué par les parties en ce qu'il a attribué à titre préférentiel l'immeuble indivis à Monsieur X... après avoir constaté qu'il satisfait aux conditions légales, dès lors qu'il habitait dans les lieux à la date de la demande. Le jugement dont appel peut donc être confirmé de ce chef.
Sur la propriété du bien
Il ressort des pièces produites que les parties, qui s'étaient mariés le 17 mai 1997 à Bastogne (Belgique) après avoir fait précéder leur union d'un contrat de mariage de séparation de biens, ont, le 03 septembre 2002, acquis solidairement entre elles un terrain à bâtir sis à Canet-en-Roussillon (Pyrénées-Orientales) sur lequel elles ont fait édifier une maison d'habitation à l'aide de prêts.
Pour fixer les droits immobiliers indivis de Monsieur X... dans la maison sise [...] à 97,47 %, et ceux de Madame C... D... à 2,53 %, le jugement entrepris énonce que la présomption de partage des droits par moitié entre les époux lors de l'acquisition en indivision peut être combattue par tout moyen.
Cependant, les personnes qui achètent un bien en indivision en acquièrent la propriété, quelle que soient les modalités du financement. En l'espèce, dès lors que les parties avaient acquis le bien en indivision, chacun pour moitié à défaut d'autres précisions, elles ont acquis la propriété dans les mêmes proportions.
Le jugement doit, en conséquence, être réformé en ce qu'il a fixé les droits immobiliers indivis de Monsieur X... à 97,47 % et ceux de Madame C... D... à 2,53 %, alors que leurs droits sur le bien sont identiques.
L'immeuble indivis a d'autre part été édifié durant le mariage et il constituait le logement de la famille. En vertu des stipulations du contrat de mariage de séparation de biens conclu entre les époux, chacun est présumé avoir fourni sa contribution au jour le jour durant le mariage.
Le remboursement des dépenses afférentes à l'acquisition d'un terrain à bâtir et à la construction d'une maison destinée à constituer le domicile conjugal participe de l'obligation de contribuer aux charges du mariage pour chacun des époux à proportion de ses facultés contributives.
En l'espèce, la participation de chaque partie à la constitution du domicile conjugal apparaît proportionnée à leurs facultés contributives respectives.
Au vu de ces observations, le jugement déféré doit être réformé et statuant à nouveau, les droits des parties sur l'immeuble indivis seront déclarés identiques.
Sur l'indemnité d'occupation
L'ordonnance de non-conciliation du 18 janvier 2011 a accordé à Monsieur X... la jouissance du domicile conjugal moyennant versement par lui d'une indemnité d'occupation. Le jugement entrepris a, partant, exactement énoncé que Monsieur X... est redevable d'une indemnité d'occupation à compter du 18 janvier 2011, étant précisé que cette indemnité accroît l'indivision à laquelle elle est due en totalité.
En revanche, le juge ne peut renvoyer au notaire la fixation d'une créance due à l'indivision par un indivisaire. En l'espèce, le projet de liquidation de l'indivision annexé au procès-verbal de difficultés énonce que les parties conviennent que cette indemnité est évaluée à 1619,20 €, comme étant fixée en fonction de la valeur locative du bien, soit 2 000 € par mois.
Compte tenu de ces éléments d'appréciation, le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due par Monsieur X... à compter du 18 janvier 2011 peut donc être fixée à la somme de 1619,20€.
Sur les autres dispositions du jugement
Les autres dispositions du jugement, non critiquées par les parties, peuvent être confirmées, en l'absence de moyen d'ordre public susceptible d'être relevé d'office.
Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens
Aucune considération tirée de l'équité ou de la situation économique des parties ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et chacune d'elles supportera la charge de ses propres dépens, qui seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et après débats en chambre du conseil,
Réforme le jugement entrepris, mais seulement en ce qu'il a fixé les droits immobiliers indivis de Monsieur Marcel X... dans la maison sise [...] à 97,47 % et ceux de Madame C... D... à 2,53 %,
Statuant à nouveau de ce seul chef:
Dit que les droits des parties sur l'immeuble indivis sont identiques,
Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions,
Y ajoutant :
Fixe le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due par Monsieur Marcel X... à la somme de1 619,20 € à compter du 18 janvier 2011,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera ses propres dépens d'appel qui seront employés en frais privilégiés de partage et autorise les avocats de la cause à en recouvrer le montant aux conditions et formes de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
SS/BB