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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1ère Chambre A
ARRET DU 13 SEPTEMBRE 2018
Numéro d'inscription au répertoire général : n° 15/07921
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 MAI 2013
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 09/02060
APPELANTE :
SA AXA FRANCE
313 Terrasse de l'Arche
[...]
représentée par Me Emily X... de la SCP ARGELLIES, X... , avocat au barreau de Montpellier, postulant
et substituant Me Olivier Y..., avocat au barreau des Pyrénées Orientales, plaidant
INTIME :
Monsieur Jean-Pierre F...
né le [...] à Paris (75) de nationalité française
[...]
[...]
représenté par Me Raymond Z... de la SCP VIAL PECH DE LACLAUSE Z... E..., avocat au barreau des Pyrénées Orientales
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 07 Mars 2018
RÉVOCATION ET NOUVELLE CLÔTURE LE 27 JUIN 2018
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 JUIN 2018, en audience publique, Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Présidente
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON
en présence de Madame Manon CHABERT, greffier stagiaire
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par Madame Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY, Présidente, et par Madame Elisabeth RAMON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
**********
FAITS ET PROCEDURE
Monsieur F... a conclu avec l'entrepreneur A... un contrat de louage d'ouvrage pour la réalisation du gros oeuvre de sa maison au sein du lotissement [...] à [...] (66) et en a confié la maîtrise d'oeuvre à la société Adap international.
À la suite de la liquidation judiciaire de Monsieur A..., Monsieur F... a confié à G... B..., selon marché de travaux du 16 avril 2007 complété par 4 avenants des mois de mai et juin, la poursuite du chantier abandonné au stade des fondations.
En raison d'un impayé d'un montant de 133'434,02 € , Monsieur B... a refusé de continuer les travaux.
Par ordonnance de référé du 19 novembre 2007, rendue à l'initiative de l'entrepreneur, Monsieur C... a été désigné en qualité expert et a déposé son rapport le 28 septembre 2009.
Monsieur D... a été désigné parallèlement comme expert par la cour d'appel de Montpellier le 22 juin 2010 dans une procédure initiée par la société Adap international.
Par exploit du 4 mai 2009 Monsieur B... a assigné, devant le tribunal de grande instance de Perpignan, Monsieur F... en paiement du solde des travaux.
Monsieur F... a lui-même assigné en garantie la société Adap international et la société Axa France iard, son assureur, par exploits des 4 et 9 novembre 2009.
Le 11 février 2011 la société Axa France a assigné la société mutuelle du Mans assurances (MMA) en garantie au motif que la société Adap international était assurée auprès d'elle avant le 1er janvier 2007.
Par jugement du 14 mai 2013 le tribunal a :
' dit n'y avoir lieu à annulation du rapport d'expertise déposé par Monsieur C...
' dit n'y avoir lieu à sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise de Monsieur D...
' condamné Monsieur F... à payer à Monsieur B... la somme de 11'963,61 € au titre du solde restant dû sur le prix des travaux exécutés jusqu'à l'arrêt du chantier avec intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2007
' déclaré Monsieur B... responsable, in solidum avec la SARL Adap international du retard d'exécution des travaux de gros oeuvre tenant l'absence de mise en oeuvre de personnel suffisant et l'arrêt du chantier indûment motivé par le non paiement de sa dernière facture de situation
' condamné Monsieur B..., in solidum avec la SARL Adap international, à payer à Monsieur F... une somme de 40'000 € en réparation du préjudice subi du fait du retard tenant l'absence de mise en oeuvre de personnel suffisant et la résiliation fautive du marché par Monsieur B...
' déclaré la société Adap international responsable de défaut de conformité altimétrique de l'ouvrage
' condamné la société Adap international à payer à Monsieur F... une somme de 62'956,12 € avec intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2010, au titre du coût de reprise du défaut de conformité altimétrique
' condamné la société Adap international à payer à Monsieur F... une somme de 74'799,89 € correspondant au montant du trop-perçu sur les honoraires et prix des prestations exigibles avec intérêts au taux légal
' condamné la société Adap international à payer à Monsieur F... une somme de 76'000 € à titre de dommages et intérêts complémentaires en réparation du préjudice tenant au retard de jouissance qui lui est imputable distinctement de celui qui lui est imputé in solidum avec Monsieur B...
' dit n'y avoir lieu à nullité du contrat d'assurance souscrit par la société Adap international auprès de la société Axa France, à effet au 1er janvier 2007, ni à faire application de la règle proportionnelle prévue par l'article L 113'9 du code des assurances
' condamné la société Axa France au paiement solidaire avec la société Adap international des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci au profit de Monsieur F... au titre des indemnités compensant le retard d'exécution du chantier dans la limite d'une somme globale de 77'213 €
' condamné in solidum Monsieur B..., la société Adap international et la société Axa France à payer à Monsieur F... une somme de 6000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
' ordonné l'exécution provisoire de la décision
' condamné Monsieur B..., la SARL Adap international et la société Axa France, in solidum, aux dépens.
La société Adap international a relevé appel de cette décision le 19 août 2013.
Par ordonnance du 7 octobre 2015 le conseiller de la mise en étata:
' disjoint l'instance en deux instances distinctes
' renvoyé à la mise en état la partie d'instance relative aux demandes formées par Jean-Pierre F... à l'encontre de la société Axa France, appelante à titre incident
' ordonné la radiation de l'autre partie de l'instance relative aux demandes formées par G... B... contre Jean-Pierre F... et aux demandes formées par ce dernier contre la SARL Adap international et G... B...
' dit que l'affaire ne sera rétablie, sauf constatation de la péremption, que sur la justification de l'exécution des causes du jugement assorties de l'exécution provisoire.
Vu les conclusions de Jean-Pierre F... remises au greffe le 7 mars 2018,
Vu les conclusions de la société Axa France remises au greffe le 27 mars 2018,
Vu l'ordonnance de clôture du 27 juin 2018,
MOTIFS
- Sur la demande de nullité du contrat d'assurance souscrit par la société Adap international':
Sur le fondement de l'article L 113'8 du code des assurances, la société Axa France conclut à la nullité du contrat d'assurance, conclu le 26 mars 2007 avec effet au 1er janvier 2007, conclu avec la société ADAP international, au motif que cette dernière avait parfaitement connaissance du sinistre apparu sur le chantier de Monsieur F... dès le mois de janvier 2006 et qu'elle a omis de le déclarer lors de la conclusion du contrat.
Il appartient la société Axa de rapporter la preuve du défaut intentionnel de déclaration du risque et de son incidence sur l'objet de ce risque.
La mauvaise foi de l'assuré est sanctionnée par la nullité du contrat d'assurance lorsqu'est démontrée son intention de tromper l'assureur.
L'assuré est tenu d'informer l'assureur des circonstances de nature à lui faire apprécier le risque qu'il prend en charge et l'existence d'une fausse déclaration intentionnelle doit être appréciée au regard des déclarations faites par lui lors de la conclusion du contrat.
En l'espèce le contrat d'assurance précise qu'il a été établi sur la base des déclarations de la société ADAP international. Or celle-ci a indiqué qu'au cours des trois dernières années elle n'avait été mise en cause dans aucun sinistre.
Les conditions générales de la police définissent le sinistre comme toutes conséquences dommageables pouvant mettre en jeu une ou plusieurs garanties du contrat.
Or il résulte des comptes-rendus de chantier des 12 mai et 8 novembre 2006 et des courriers de réclamation adressés par le maître d'ouvrage à la société ADAP international, maître d'oeuvre, les 28 octobre et 29 novembre 2006 (pièce 4,6,7 et 8 du dossier de la société Axa) que dès le mois de janvier 2006 il a été constaté que le garage était totalement inaccessible comme bâti environ 60 cm au dessus du niveau de la route et ce, en raison de l'élévation par la société ADAP international du niveau des fondations à l'origine d'un positionnement initial incorrect du niveau de fond de fouilles, d'un défaut d'implantation altimétrique de l'immeuble et donc de l'impossibilité d'accéder au garage.
L'expert judiciaire préconise l'adaptation du sol du garage pour le rendre accessible et notamment la destruction de la dalle, la reprise en sous oeuvre et la réfection de cette dalle et du seuil. Il relève la responsabilité de la société ADAP dans la survenue de ce désordre.
En outre le problème d'accessibilité du garage a révélé un problème général d'adaptation de la construction au terrain imposant des modifications de structure de la maison pour un coût total de 63'273 € TTC.
Ainsi ce dommage connu depuis le mois de janvier 2006 par la société ADAP international correspond à la définition contractuelle du sinistre puisqu'il a entraîné des conséquences dommageables de nature à mettre en jeu la garantie de la société Axa France.
Le caractère intentionnel de cette absence de déclaration est manifeste puisque la société ADAP international, assurant la maîtrise d'oeuvre du chantier, participant aux réunions de chantier et destinataire des courriers recommandés du maître d'ouvrage ne pouvait sincèrement déclarer qu'elle n'était mise en cause dans aucun sinistre.
Les difficultés relatives au niveau de la construction et aux difficultés d'accessibilité du garage ayant perduré tout au long de l'année 2006, la société ADAP international ne pouvait les ignorer au moment de la conclusion du contrat et c'est donc de mauvaise foi qu'elle a omis de signaler ces circonstances afin de ne pas se heurter à un refus d'assurance ou au paiement d'une cotisation supplémentaire.
Le maître d'oeuvre ne pouvait pas, de bonne foi, penser échapper à la mise en jeu de sa responsabilité puisqu'il n'a remédié au désordre d'aucune manière ainsi que l'a constaté l'expert judiciaire.
Mal informée, la société Axa n'a pas contracté en toute connaissance de cause puisqu'elle n'a pu apprécier le risque qu'elle prenait en charge.
Les conditions de la nullité du contrat, aux termes de l'article L113'8 du code des assurances, sont remplies.
Le fait pour la société Axa d'avoir participé aux opérations d'expertise ne permet pas à Monsieur F... d'affirmer qu'elle a manifesté sans équivoque sa volonté de renoncer à invoquer la nullité de la police d'assurance. En effet la participation contradictoire aux accedits organisés par l'expert judiciaire permettait à la société Axa de préserver ses droits en formulant éventuellement toute observation technique ou de fait.
Il convient donc de prononcer la nullité du contrat d'assurance souscrit par la société ADAP international auprès de la société Axa France le 26 mars 2007 avec effet au 1er janvier 2007 et de réformer de ce chef le jugement.
En conséquence Monsieur F... devra rembourser à la société Axa France les sommes réglées en application de l'exécution provisoire ordonnée par le premier juge.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement uniquement en ce qu'il a :
' dit n'y avoir lieu à nullité du contrat d'assurance souscrit par la société ADAP international auprès de la société Axa France,
' condamné la société Axa France au paiement solidaire avec la société ADAP international des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci au profit de Monsieur F... dans la limite de la somme de 77'213 €,
' condamné la société Axa France au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné la société Axa France aux dépens.
Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
Prononce la nullité du contrat d'assurance conclu entre la société Axa France et la SARL ADAP international le 26 mars 2007 avec effet au 1er janvier 2007.
Condamne Jean-Pierre F... à rembourser à la société Axa France les sommes qu'elle lui a réglées en exécution du jugement de première instance.
Dit n'y avoir lieu à application en faveur de la société Axa France de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne Jean-Pierre F... aux dépens de l'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
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