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03/07/2018 | FRANCE | N°16/00282

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre c, 03 juillet 2018, 16/00282


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre C



ARRET DU 03 JUILLET 2018



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00282





Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 DECEMBRE 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 14/01837





APPELANT :



Monsieur André X...

né le [...] à Arnière/Iton (27)

de nationalité Française

Retraité

[...]

représ

enté et assisté de Me Jacques- Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2016/1187 du 03/02/2016 accordée par le bureau d...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 03 JUILLET 2018

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/00282

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 DECEMBRE 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 14/01837

APPELANT :

Monsieur André X...

né le [...] à Arnière/Iton (27)

de nationalité Française

Retraité

[...]

représenté et assisté de Me Jacques- Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2016/1187 du 03/02/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEES :

SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié [...]

représentée par Me Alexandre Y..., avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant substitué par Me Lola Z..., avocat au barreau de MONTPELLIER

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES P.O. représentée par son Directeur en exercice domicilié [...]

[...]

assignée le 18/05/2016 à personne habilitée

n'a pas constitué avocat mais a fait connaître ses débours par courrier du 20/07/2016

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 02 Mai 2018

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 MAI 2018, en audience publique, madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère

Madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée auprès du Premier président de la cour d'appel de Montpellier par ordonnance n° 17/247-vpp du 11 décembre 2017

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 6 septembre 2004, Monsieur André X... a fait l'objet d'une intervention chirurgicale pour traiter une spondylolisthésis L4-L5 pratiquée par le Docteur A... au sein de la POLYCLINIQUE SAINT ROCH à CABESTANY (66330).

Au décours de cette opération, il a contracté une infection nosocomiale par staphylocoque doré ayant nécessité notamment plusieurs réinterventions, la mise en place d'une chambre implantable et un traitement antibiotique par voie parentérale.

Suite à l'avis favorable de la CRCI qui a retenu l'existence d'une infection nosocomiale sur la base de l'expertise ordonnée, les Mutuelles du Mans, assureur de la Clinique, a proposé une provision de 4000 € refusée par Monsieur André X..., lequel a ensuite saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Perpignan qui, par ordonnance du 2 mars 2006, lui a alloué une provision de 20000€.

La procédure devant la CRCI n'aboutissant finalement pas à un règlement amiable, Monsieur André X... a saisi le juge des référés afin de voir désigner un nouvel expert.

En lecture du rapport d'expertise du Docteur Annie B..., Monsieur André X... a assigné la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH et la CPAM DES PO devant le tribunal de grande instance de Perpignan.

Le dispositif du jugement rendu sur son assignation par le tribunal de grande instance de Perpignan le 1er décembre 2015 énonce :

'Vu le rapport du Docteur B...,

'Juge la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH entièrement responsable des conséquences dommageables de l'infection nosocomiale dont Monsieur André X... a été victime à la suite de l'intervention chirurgicale pratiquée le 6 septembre 2004,

'Déboute Monsieur André X... de sa demande de complément d'expertise,

'Condamne la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à payer à Monsieur André X... en quittance ou deniers la somme de 13 241,34 € en indemnisation de son préjudice,

'Constate que le montant des prestations versées par la CPAM DES PO pour le compte de Monsieur André X... s'élève à la somme de 19 924,34 € suivant décompte définitif en date du 6 septembre 2013,

'Condamne la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à payer à Monsieur André X... la somme de 2000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

'Ordonne l'exécution provisoire,

'Condamne la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH aux entiers dépens et en autorise la distraction conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le jugement relève que le caractère nosocomial de l'infection, confirmé par les conclusions du rapport d'expertise judiciaire, n'est pas contesté de même que le droit à indemnisation de Monsieur André X....

S'agissant de la demande de complément d'expertise, le premier juge l'analyse en une demande de contre-expertise, non justifiée en l'état des expertises déjà réalisées qui permettent de constater qu'aucune incapacité permanente ne pouvait être rattachée à l'infection nosocomiale et que l'impossibilité de reprendre l'activité de maçon était en relation avec la pathologie initiale de lombalgie avec irradiation dans les régions fessières gauche et droite.

Sur les préjudices, le premier juge estime notamment que la perte de gains professionnels actuels n'est pas établie, de même que l'incidence professionnelle, le déficit fonctionnel permanent et le préjudice d'agrément.

Monsieur André X... a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 13 janvier 2016.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du

2 mai 2018.

L'affaire a été fixée pour les débats devant la cour d'appel de Montpellier à l'audience du 23 mai 2018.

Les dernières écritures prises par Monsieur André X... ont été déposées le 8 juin 2016.

Les dernières écritures prises par la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH ont été déposées le

19 avril 2016.

La CPAM des PO n'a pas constitué avocat mais a adressé à la cour le montant de ses débours par courrier reçu le 20 juillet 2016.

Le dispositif des écritures de Monsieur André X... énonce :

'Tenant le rapport du 19 juillet 2007,

'Tenant le rapport du 16 janvier 2012,

'Tenant les dispositions des articles L. 1142'1, L. 1142'1'1 du code de la santé publique,

'déclarer la clinique SA MEDIPOLE «POLYCLINIQUE SAINT ROCH» entièrement responsable des préjudices subis par Monsieur X...,

'dire qu'elle devra en réparer les entières conséquences,

'infirmer tant sur le quantum que sur la nécessité de compléter le rapport d'expertise, la décision dont appel,

'à titre principal, inviter l'expert à compléter son rapport :

' en se prononçant sur l'origine de douleurs subies ou sur l'aggravation imputable aux suites de l'infection

nosocomiale et des interventions chirurgicales,

' en fixant le taux du déficit fonctionnel permanent,

' en se prononçant sur le préjudice d'agrément,

' en se prononçant sur la perte de gains professionnels futurs,

' en se prononçant sur l'incidence professionnelle,

'à titre subsidiaire, et pour le cas où la demande de complément d'expertise ne serait pas accueillie, condamner la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à verser à Monsieur André X... les sommes suivantes:

' 567, 50 € au titre des dépenses de santé actuelles,

' 155, 42 € au titre des dépenses de santé futures,

' 1648 € au titre du déficit fonctionnel temporaire,

' 13120 € au titre du déficit fonctionnel permanent,

' 5000 € au titre du préjudice d'agrément,

' 5204, 63 € au titre de la perte de gains professionnels actuels,

' 39050, 15 € au titre de la perte de gains professionnels futurs,

' 127 083, 12 € au titre de l'incidence professionnelle,

' 1000 € au titre du préjudice esthétique permanent,

' 15000 € au titre du pretium doloris,

'déclarer commun à la CPAM DES PO auprès de laquelle Monsieur André X... est immatriculé le jugement à intervenir,

'condamner la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à verser à Monsieur André X... la somme de 2000 € titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

'constater dans la décision à intervenir que Monsieur André X... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.

Dans ses écritures, auxquelles la cour invite les parties à se référer pour un exposé complet, Monsieur André X... reproche en premier lieu à l'expert judiciaire de ne pas s'être prononcé sur l'ensemble des postes de préjudices faisant partie de sa mission, dont le préjudice d'agrément, les incidences professionnelles et de rester taisant sur certains des aspects du déficit fonctionnel permanent qui ne se limite pas selon l'appelant aux séquelles fonctionnelles mais concerne aussi la douleur permanente, la perte de qualité de vie et les troubles dans les conditions de vie alors qu'atteint initialement d'une lombalgie, il indique que les douleurs se sont considérablement accentuées suite à l'infection nosocomiale.

Subsidiairement, si la cour ne faisait pas droit à la demande d'expertise complémentaire, l'appelant soutient que le lien de causalité entre les différents préjudices subis détaillés dans ses conclusions et l'infection nosocomiale et ses suites est parfaitement établi, avec cette précision qu'il a subi une aggravation de la pathologie initiale et qu'avant la survenance de l'infection il était en capacité de poursuivre son activité professionnelle sans gêne rédhibitoire.

Le dispositif des écritures de la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH énonce :

'Vu les articles 1142'1 et suivants du code de la santé publique,

'vu les pièces versées aux débats et objet d'un bordereau annexé aux présentes

' confirmer le jugement du 1er décembre 2015 en ce qu'il a écarté la demande de contre-expertise,

' pour le surplus :

' au principal : déclarer satisfactoire l'offre du 5 juin 2008 à hauteur de 7716 €,

' au subsidiaire : confirmer le jugement du

1er décembre 2015 qui a fixé le préjudice de Monsieur André X... à 13241,34 €,

' En tout hypothèse :

' dire que Monsieur André X... devra rembourser le trop perçu ou qu'à tout le moins la provision allouée par l'ordonnance du 2 mars 2006 sera à déduire des sommes fixées par la cour,

' débouter Monsieur André X... du surplus de ses demandes et le condamner aux dépens de la présente instance mais aussi de la procédure de référé,

' le condamner au paiement de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures, auxquelles la cour invite les parties à se référer pour un exposé complet, la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH rappelle en premier lieu que la condamnation de première instance est intervenue en deniers et quittance, ce qui signifie que doivent être déduites les provisions déjà versées.

L'intimée indique ensuite que l'expert a parfaitement répondu à sa mission, qu'il n'a constaté aucune séquelle et l'absence de déficit fonctionnel permanent, les épisodes infectieux liés à l'infection nosocomiale ayant complètement disparu.

L'intimée reprend ensuite au principal ses offres pour ensuite subsidiairement se ranger à une confirmation du premier juge, relevant in fine pour justifier sa demande de condamnation aux dépens et à l'article 700, que l'appelant a multiplié les procédures coûteuses pour elle et pour la collectivité.

MOTIFS

L'existence d'une infection nosocomiale et le droit à indemnisation de l'appelant ne sont pas contestés.

Sur la demande de complément d'expertise

L'appelant reproche à l'expert judiciaire, le docteur Annie F..., de ne pas s'être prononcé sur l'ensemble des postes faisant partie de sa mission.

Il convient de relever au préalable qu'il n'a formulé aucun dire à ce sujet et soumet finalement à la cour des documents médicaux tous antérieurs à l'expertise médicale réalisée le 25 novembre 2010 qui permettait pourtant le débat contradictoire nécessaire.

L'appelant reproche plus précisément à l'expert judiciaire de ne pas s'être prononcé sur l'origine des douleurs subies ou sur l'aggravation imputable aux suites de l'infection nosocomiale et des interventions chirurgicales, de ne pas avoir fixé le taux du déficit fonctionnel permanent et de ne pas s'être prononcé sur le préjudice d'agrément, sur la perte de gains professionnels futurs et sur l'incidence professionnelle. Plus précisément, sur le déficit fonctionnel permanent, il indique que seule a été prise en compte la composante physiologique mais non les deux autres aspects de ce préjudice que sont les souffrances permanentes et l'atteinte dans les conditions d'existence.

Il convient toutefois de constater que l'expert judiciaire, après avoir examiné Monsieur André X... et relevé les doléances formulées par lui dont les douleurs importantes en position assise ou débout prolongée ainsi que la gêne dans les gestes de la vie quotidienne, indique largement en conclusion «il n'y a pas de séquelles proprement liées à l'infection». Ce qui signifie bien qu'il ne retient aucune conséquence quelle soit fonctionnelle ou autre. Il est précisé dans le rapport que Monsieur André X..., maçon salarié, a été sujet depuis 1997 à des lombalgies anciennes qui irradiaient vers les fesses et la face postérieure des cuisses et qu'il y a eu brutalement une accentuation de ces signes avec difficultés à marcher, ce qui a motivé la consultation auprès du Docteur A..., l'infiltration puis l'intervention chirurgicale de septembre 2004. Il est relevé que depuis le mois d'avril 2005, date de l'arrêt du traitement antibiotique, les épisodes infectieux liés à l'infection nosocomiale ont complètement disparu. L'expert estime qu'ensuite l'hospitalisation intervenue en avril-mai 2006 au centre antidouleur de l'hôpital Saint Éloi ne concernait pas l'état infectieux. Il relève qu'une I.R.M. du rachis lombaire pratiquée le 27 mai 2008 ne montrait pas d'élément particulier décelable, pas de fibrose pathologique ni de récidive herniaire. Il n'établit non plus aucun lien s'agissant des séances de kinésithérapie suivies ultérieurement.

Le Docteur Laurent C..., expert près la cour d'appel de Montpellier désigné par la CRCI Languedoc-Roussillon et qui s'est adjoint un sapiteur en qualité de neurochirurgien, aboutissait le

8 février 2007 à des conclusions similaires, ainsi notamment à l'absence d'incapacité permanente partielle en relation avec l'infection nosocomiale. Il indiquait que l'examen de l'IRM lombaire réalisée le 20 novembre 2016 montrait qu'il n'y avait pas de retentissement anatomique de l'infection nosocomiale, notamment pas de spondylodiscite, ce qui veut dire qu'il n'y avait plus d'infection vertébrale. Il précisait que l'examen clinique, au cours duquel il relevait la persistance de douleurs et une sensibilité diffuse du rachis lombaire et dont il considérait qu'il avait été amélioré par l'opération chirurgicale, était en relation avec sa pathologie lombaire constituant un état antérieur. Il estimait que ses conditions de vie actuelle (douleurs dorsales quotidiennes irradiant dans les deux fesses voir dans les deux cuisses et ce de façon bilatérale, les séances de kinésithérapie, la marche difficile mais améliorée ainsi que la non reprise de certaines activités notamment) n'étaient pas imputables à l'infection nosocomiale dont il avait été victime. Il indiquait également que les conditions de vie décrites ainsi que l'impossibilité de pratiquer le métier de maçon n'étaient pas en rapport avec l'infection nosocomiale dont Monsieur X... avait été victime.

Il ressort suffisamment de ces éléments que les souffrances permanentes et les troubles dans les conditions de l'existence ne sont pas en lien avec l'infection. Il ne peut donc être reproché à l'expert judiciaire de n'avoir évalué aucun taux de déficit fonctionnel permanent, de ne pas avoir retenu de préjudice professionnel ou économique ainsi que de préjudice d'agrément, même s'il ne mentionne pas cette exclusion précisément pour chaque poste de préjudice. En réalité et clairement, en dehors du dommage esthétique lié aux cicatrices, il n'est admis que des préjudices temporaires.

A l'appui de sa demande de complément d'expertise, l'appelant produit la note d'information des patients qui mentionne que le but de l'intervention de septembre 2004 était de supprimer les douleurs dans les membres inférieurs. Cette seule indication ne saurait démontrer que les douleurs et les troubles invoqués sont en lien avec l'infection, étant relevé que le même document indique que si l'intervention assure de bons résultats de manière régulière sur les douleurs par compression neurologique, les douleurs lombaires sont cependant peu modifiées.

Les correspondances et le certificat des différents médecins qui ont suivi Monsieur André X... après la date de consolidation, ne permettent pas plus d'établir le lien entre les souffrances et l'infection nosocomiale. Le docteur G... indique simplement «qu'il ne va pas mieux malgré la guérison son infection». Le docteur Charles D..., neurologue, indique qu'il présente «un ensemble symptomatique dû à un traumatisme lombaire majeur consécutif à la chirurgie». Dans le même sens, le Docteur H..., rhumatologue, relève que «le patient conserve des douleurs lombaires avec irradiation des deux fesses qui n'ont d'ailleurs jamais rétrocédé depuis la première intervention chirurgicale». Le docteur E... A SIOU évoque des douleurs résiduelles de complications de chirurgie du rachis. Ces praticiens paraissent ainsi mettre en cause la chirurgie elle-même mais non l'infection nosocomiale qui seule relève de la responsabilité de la clinique.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, l'expertise judiciaire est suffisamment probante pour que la cour puisse se fonder sur ses conclusions et il y a donc lieu de rejeter la demande de complément d'expertise qui est formulée par l'appelant.

Sur l'indemnisation des préjudices

A. Sur l'évaluation des préjudices patrimoniaux

1/ Les préjudices patrimoniaux temporaires

* Les dépenses de santé actuelles

Les premiers juges ont retenu la somme de 510,97 € au titre des dépenses de santé non prises en charge par les organismes sociaux, soit le ticket modérateur de la Clinique 14,25 €, les actes de biologie médicale 34 €, l'achat d'un corset 226,10 €, le centre de rééducation la Pinède 45,75 € et le Vancomycine injectable 190,87 €.

Monsieur André X... réclame la somme de 567,50 € mais les documents produits en pièce n° 13 ne comprennent aucun autre frais que ceux précisément pris en compte par le jugement qui sera donc confirmé sur ce point.

* La perte de gains professionnels actuels

Il est constant que Monsieur André X... a perçu la somme de 7512,03 € au titre des indemnités journalières versées par la sécurité sociale et le complément de salaire versé par la mutuelle.

Par des motifs pertinents, les premiers juges ont considéré que les quelques bulletins de salaire de l'agence d'intérim MANPOWER produits, desquels il résultait seulement qu'il avait travaillé dans le courant des mois de juillet et août 2004 avant l'accident médical pour un salaire global de 1909,14 € étaient insuffisants à établir qu'il avait travaillé de manière régulière et continue ni qu'il percevait comme prétendu un salaire mensuel moyen de 1750 €.

En appel, Monsieur André X... se contente de produire les mêmes pièces sans critiquer le jugement de première instance sur ce point et sans verser aux débats les avis d'imposition sur le revenu des années précédentes.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a été décidé qu'il n'était justifié d'aucune perte de gains indemnisable.

2/ Les préjudices patrimoniaux permanents

* Les dépenses de santé futures

Les premiers juges ont retenu la somme de 141,57 € au titre de frais restés à charge après consolidation et justifiés, ainsi électrodes 83,45 € et 8,02 €, hôpital Saint Jean 36,65 €, médicaments 0,83 € et clinique Saint Pierre 12,62 €.

Monsieur André X... réclame la somme de 155,42 € mais les pièces versées (n° 13) ne comprennent aucun autre frais que ceux précisément pris en compte par le premier jugement qui sera donc ici encore confirmé.

* Sur la perte de gains professionnels futurs et l'incidence professionnelle

Par des motifs pertinents que la cour adoptera les premiers juges ont ici relevé que tant l'expert judiciaire que le Docteur C... avaient tous deux conclu, au regard de la disparition complète des épisodes infectieux liés à l'infection nosocomiale depuis avril 2005 et de l'absence de toute séquelle en résultant, que l'impossibilité pour Monsieur André X... de reprendre son activité professionnelle de maçon n'était pas en rapport avec ladite infection, et que les éléments produits aux débats démontraient par ailleurs que la persistance des douleurs et le placement en invalidité étaient en relation avec la pathologie initiale de lombalgie avec irradiation dans les régions fessières gauche et droite mais non avec l'infection nosocomiale.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement sur ce point.

B. Sur l'évaluation des préjudices extra-patrimoniaux

1/ Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires

* Le déficit fonctionnel temporaire

Il inclut pour la période antérieure à la consolidation, la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d'agrément, éventuellement le préjudice sexuel temporaire. L'évaluation des troubles dans les conditions d'existence tient compte de la durée de l'incapacité temporaire, du taux de cette incapacité (totale ou partielle), des conditions plus ou moins pénibles de cette incapacité.

La somme de 733,30 € réclamée par Monsieur André X... au titre du déficit fonctionnel temporaire total de 44 jours correspondant aux périodes d'hospitalisation subies entre le

5 septembre 2004 et le 31 décembre 2004, n'est pas contestée.

S'agissant des périodes de déficit fonctionnel temporaire partiel de 30% entre les périodes d'hospitalisation, l'appelant fait justement valoir que l'expert judiciaire n'a pas précisé le terme de la période de déficit fonctionnel temporaire.

Il sera relevé que la date de consolidation a été fixée au 20 avril 2005 correspondant à l'arrêt définitif de l'antibiothérapie nécessitée par l'infection nosocomiale.

Il y a lieu dès lors de faire droit à la demande de l'appelant à hauteur de 915 €, selon son calcul qui prend en compte la période du 1er janvier 2005 au 20 avril 2005 et évidemment dans la limite du montant demandé.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement sur ce point et d'accorder à Monsieur André X... la somme totale de 1648 € au titre du poste de déficit fonctionnel temporaire.

* Les souffrances endurées

Il s'agit des souffrances tant physiques que morales subies par la victime pendant la maladie traumatique jusqu à la consolidation.

L'expert judiciaire évalue les souffrances endurées à 4/7.

Il convient de relever que l'infection a nécessité cinq interventions chirurgicales avec curage de la plaie opératoire et drainage de l'abcès, divers séjours à l'hôpital, une antibiothérapie longue avec mise en place d'une chambre implantable qui a été suivie d'une paraphlébite du membre supérieur droit. Il ressort de l'attestation de l'infirmière produite par l'appelant que le traitement était puissant, nécessitant des précautions d'asepsie et de manipulation rigoureuses.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la demande formée à hauteur de 15 000 € est justifiée.

Le jugement sera réformé sur ce point en ce qu'il a accordé la somme de 10 000 €.

2/ Les préjudices extra-patrimoniaux permanents

* Le déficit fonctionnel permanent

Il s'agit des séquelles conservées par la victime à l'issue de la consolidation. Il sera rappelé que l'expert judiciaire n'en retient aucune.

Monsieur André X... n'apporte pas la preuve que les souffrances endurées et la diminution de la qualité de vie subies depuis la date de consolidation sont en lien avec l'infection nosocomiale, étant rappelé que la pathologie initiale de l'appelant consistait en des lombalgies irradiantes vers les fesses et les cuisses et que l'intervention initiale a été motivée par une accentuation de ces signes.

Il n'est nullement démontré non plus que les séances de kinésithérapie relatives au rachis lombaire commencées en novembre 2009 sont en lien avec l'infection nosocomiale.

Il y a donc lieu de débouter Monsieur André X... de sa demande au titre du déficit fonctionnel permanent.

* Le préjudice esthétique permanent

L'expert a évalué ce préjudice à 1/7 au titre de l'aggravation de la cicatrice lombaire et celle relative à la pose du port-à-cath.

La somme de 1000 € accordée par les premiers juges n'est pas discutée par les parties.

* Le préjudice d'agrément

Si l'expert judiciaire ne mentionne pas expressément dans ses conclusions l'existence ou non d'un préjudice d'agrément, l'absence de ce préjudice résulte de la constatation d'aucune séquelle en lien avec l'infection nosocomiale, l'expert comme relevé précédemment ne retenant, en dehors du préjudice esthétique, que des dommages temporaires. Ceci étant, le docteur C... avait quant à lui expressément exclu ce préjudice.

Monsieur André X... ne rapporte pas par ailleurs la preuve de ce préjudice. Il n'est pas démontré que l'abandon de la moto, au demeurant trois ans après la date de consolidation (le certificat de cession de la Honda datant du 15 juin 2008), soit en lien avec l'infection nosocomiale, étant rappelé que la pathologie initiale de l'appelant consistait en des lombalgies irradiantes vers les fesses et les cuisses et que l'intervention initiale a été motivée par une accentuation de ces signes. Il en est de même des autres limitations d'activités dont il est fait état.

Il y a donc lieu de confirmer le premier jugement sur ce point.

Sur les dépens et les frais non compris dans les dépens

Il y a lieu de confirmer le premier jugement en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel seront mis à la charge de l'intimée et l'équité justifie d'accorder à Monsieur André X... la somme de 1800 € au titre des frais non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant par arrêt réputé contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Perpignan du 1er décembre 2015 en toutes ses dispositions, sauf en celles relatives au montant de l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire et des souffrances endurées,

Et statuant à nouveau de ces deux chefs et sur le montant total du préjudice,

FIXE le poste de préjudice du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 1648 €,

FIXE le poste de préjudice des souffrances endurées à la somme de 15 000 €,

CONDAMNE la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à payer à Monsieur André X..., en deniers ou quittance, la somme de 18 300,54 € en indemnisation de son préjudice,

CONDAMNE la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH à payer à Monsieur André X... la somme de 1800 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SA MEDIPOLE POLYCLINIQUE SAINT ROCH aux dépens de l'appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

MM/LR


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 16/00282
Date de la décision : 03/07/2018

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°16/00282 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-03;16.00282 ?
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