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05/10/2017 | FRANCE | N°14/05280

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0694, 05 octobre 2017, 14/05280


Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 05 OCTOBRE 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05280

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 JUIN 2014
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
No RG 12/00055

APPELANT :

Monsieur Paulin X...
né le [...]           à Salses (66600)
de nationalité Française
Mas Valette - [...]                                        
représenté par Me Philippe CAPSIE de la SCP NICOL

AU MALAVIALLE GADEL CAPSIE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMEE :

Commune SALSES LE CHATEAU
représentée par son Maire en exercice
Hôtel de [...]             ...

Grosse + copie
délivrées le
à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 05 OCTOBRE 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05280

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 JUIN 2014
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
No RG 12/00055

APPELANT :

Monsieur Paulin X...
né le [...]           à Salses (66600)
de nationalité Française
Mas Valette - [...]                                        
représenté par Me Philippe CAPSIE de la SCP NICOLAU MALAVIALLE GADEL CAPSIE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMEE :

Commune SALSES LE CHATEAU
représentée par son Maire en exercice
Hôtel de [...]                                              
représentée par la SCP NEGRE PEPRATX-NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant
et par Me Claire LERAT, avocat au barreau de MONTPELLIER, plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 13 Juin 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 04 JUILLET 2017, en audience publique, Madame Brigitte DEVILLE Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président, et par Madame Elisabeth RAMON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**********

FAITS ET PROCEDURE

Paulin X... était propriétaire indivis d'une parcelle cadastrée [...], lieu-dit  [...] sur la commune de [...] (66).

Dans le cadre d'une procédure d'expropriation initiée par la commune, le préfet, le 7 août 1992, a déclaré d'utilité publique le projet de construction d'un restaurant scolaire sur cette parcelle et ,par ordonnance du 13 novembre 1992, le juge de l'expropriation du tribunal de grande instance de Perpignan a envoyé la commune de [...] en possession de ladite parcelle.

Ce terrain a été découpé en plusieurs parcelles : la commune est propriétaire des parcelles [...] et [...] tandis que l'indivision X... est restée propriétaire des parcelles [...] et [...].

La commune a construit le restaurant scolaire sur une partie de la parcelle [...].

Le 13 décembre 2004 elle a délivré à la communauté de communes [...]un permis de construire

une salle polyvalente et sportive en partie sur la parcelle [...].

Elle a enfin construit sur le reliquat de la même parcelle un centre de loisirs.

Au motif que la parcelle [...] avait reçu des bâtiments dont la destination est différente de celle prévue initialement par l'arrêté d'utilité publique, sans que les propriétaires aient été mis en demeure de faire valoir leurs droits de rétrocession conformément aux dispositions de l'article L 12-6 du code de l'expropriation, Paulin X..., par exploit du 14 décembre 2011, a assigné la commune de [...] devant le tribunal de grande instance de Perpignan pour la voir condamner à payer la somme principale de 2 047 833,10 € au titre de la perte d'une chance de bénéficier d'une plus-value outre des dommages et intérêts en réparation d'un préjudice de jouissance.

Par jugement du 17 juin 2014 ce tribunal a :

– rejeté le moyen d'irrecevabilité soulevé par la commune de [...]
– débouté Paulin X... de l'intégralité de ses demandes
– dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
– condamné Paulin X... à payer à la commune la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Paulin X... a relevé appel de cette décision le 10 juillet 2014.

Vu les conclusions de l'appelant remises au greffe le 29 septembre 2015,

Vu les conclusions de la commune de [...] remises au greffe le 22 octobre 2014,

Vu l'ordonnance de clôture du 13 juin 2017,

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'action :

Paulin X... était propriétaire indivis de la parcelle [...] expropriée au profit de la commune de [...].

En application des dispositions de l'article 815–2 du Code civil le droit de propriété indivis comporte notamment celui d'engager une action, sans le concours des coindivisaires, aux fins d'obtenir une indemnité compensatrice pour réparer le préjudice consécutif à l'impossibilité de mettre éventuellement en œoeuvre une rétrocession de la parcelle expropriée pour cause d'utilité publique.

L'action introduite par Paulin X... est donc parfaitement recevable et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le fond :

Aux termes des articles L 12–6 et R 12–6 du code de l'expropriation, si les immeubles expropriés n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue, l'ancien propriétaire peut demander soit la rétrocession ,soit une indemnité compensatrice afin de réparer le préjudice consécutif à l'impossibilité de mettre en oeœuvre cette rétrocession. Ainsi l'expropriant qui décide de ne pas donner au terrain la destination prévue doit en informer l'ancien propriétaire afin qu'il exerce sa faculté d'option.

Ainsi Paulin X... indique n'avoir jamais été informé par la commune qui, après avoir construit le restaurant scolaire projeté, a édifié un centre de loisirs et a permis à la communauté de communes de bâtir une salle polyvalente et sportive, destinations non prévues par l'arrêté d'utilité publique.

Il n'est pas contesté que le restaurant scolaire a été construit en 1994, soit dans les cinq ans de l'arrêté d'utilité publique en date du 7 août 1992.

La commune ne conteste pas non plus avoir édifié un centre de loisirs et permis à la communauté de communes de créer une salle de sports sur la parcelle expropriée érigée en réserve foncière communale.

Dans son premier article l'arrêté du préfet en date du 7 août 1992 déclare d'utilité publique le projet de construction d'un restaurant scolaire sur le territoire de la commune.
Le restaurant scolaire construit par l'intimée est donc conforme à cet arrêté.

La conformité de la réalisation effectuée avec l'objectif poursuivi par la déclaration d'utilité publique doit s'apprécier au regard de l'ensemble de la parcelle expropriée et l'affectation partielle de ce bien à sa destination suffit à faire échec au droit de rétrocession partiel sur la partie du bien non utilisée. En effet dès lors que l'objectif prévu à la déclaration d'utilité publique a bien été respecté, l'expropriant peut disposer librement des délaissés inutiles sans avoir à purger préalablement le droit de préférence des anciens propriétaires.

Mais, en outre, l'arrêté du 7 août 1992, dans son article deux, autorise la commune à acquérir soit à l'amiable, soit par voie d'expropriation, les immeubles dont l'acquisition est nécessaire à la réalisation de l'opération envisagée « telle qu'elle résulte des plans annexés ».

Le plan de situation annexé à l'arrêté mentionne le restaurant scolaire à créer ainsi qu'une réserve foncière communale sur la parcelle à exproprier.

Le dossier présenté à la préfecture et ayant permis l'ouverture d'une enquête préalable à la déclaration d'utilité publique comprenait ce plan de situation et une notice explicative annexée à la délibération du conseil municipal du 13 décembre 1991.
Cette notice précisait que la procédure d'expropriation était induite « essentiellement » (et donc pas exclusivement) par la nécessité d'acquérir l'immeuble pour la construction de bâtiments scolaires.
Le rapport du commissaire enquêteur mentionne que ce dossier de déclaration d'utilité publique a été mis à la disposition du public et que les propriétaires à exproprier, prévenus par lettre recommandée, n'ont fait aucune observation.

Paulin X... était donc parfaitement informé de la destination de la parcelle à exproprier et le préfet a autorisé la commune à faire son acquisition pour la réalisation de l'opération envisagée
« telle qu'elle résulte des plans annexés », intégrant la réserve foncière communale.

Une réserve foncière communale, aux termes des articles L221–1 et L300–1 du code de l'urbanisme a pour but l'acquisition de terrains dans des secteurs où l'affectation des sols et le programme d'utilisation ne sont pas encore définis avec précision et permet de constituer une sauvegarde afin d'éviter de ne pas compromettre l'usage ultérieur envisagé par la collectivité publique. Elle permet donc de préserver des terrains destinés à recevoir une opération d'aménagement par un contrôle de l'occupation des sols.

En l'espèce l'arrêté d'utilité publique ne visait pas que le projet de construction de restaurant scolaire mais également la création d'une réserve foncière communale mentionnée sur le plan de situation annexé à cet arrêté et mis à la disposition du public dans le cadre de l'enquête effectuée par le commissaire enquêteur.
La commune a donc respecté la destination de la parcelle expropriée puisqu'après la construction du restaurant scolaire elle a utilisé la réserve foncière communale pour bâtir un centre de loisirs ainsi qu'une salle de sports par l'intermédiaire de la communauté de communes.

Pour tous ces motifs Paulin X... n'est pas fondé à invoquer les dispositions des articles L 12–6 et R 12–6 du code de l'expropriation et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de ses demandes.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Condamne Paulin X... à payer la commune de [...] la somme de 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le condamne aux dépens de l'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT
BD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0694
Numéro d'arrêt : 14/05280
Date de la décision : 05/10/2017

Analyses

Aux termes des articles L 12¿6 et R 12¿6 du code de l'expropriation, si les immeubles expropriés n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue par la déclaration d'utilité publique, l'ancien propriétaire peut demander soit la rétrocession, soit une indemnité compensatrice afin de réparer le préjudice consécutif à l'impossibilité de mettre en ¿uvre cette rétrocession. Lorsque l'arrêté d'utilité publique visait non seulement un projet de construction de restaurant scolaire mais également la création d'une réserve foncière communale mentionnée sur le plan de situation annexé à cet arrêté et mis à la disposition du public, la commune a respecté la destination de la parcelle expropriée en construisant le restaurant scolaire et en utilisant ensuite la réserve foncière pour bâtir un centre de loisirs ainsi qu'une salle de sports par l'intermédiaire de la communauté de communes.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 17 juin 2014


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2017-10-05;14.05280 ?
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