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27/06/2017 | FRANCE | N°15/01452

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre c, 27 juin 2017, 15/01452


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre C



ARRET DU 27 JUIN 2017



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01452







Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 JANVIER 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 12/02639







APPELANTES :



Madame [K] [R] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1946 à

[Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée

par Me Arnaud LAURENT de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Jean-Claude ATTALI de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat p...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 27 JUIN 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/01452

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 JANVIER 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 12/02639

APPELANTES :

Madame [K] [R] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1946 à

[Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Jean-Claude ATTALI de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Madame [S] [R]

née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Jean-Claude ATTALI de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEE :

SA LA TOURRE PLAGE prise en la personne de son président du conseil d'administration

[Adresse 4]

[Adresse 5]

représentée par Me Valéry-Pierre BREUIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant, et assistée de Me Olivier PEISSE, avocat au barreau de TOULON, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Avril 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 10 MAI 2017, en audience publique, Madame Chantal RODIER, conseillère ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Chantal RODIER, Conseillère

Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER

Le délibéré mis à disposition au 20 juin 2017 a été prorogé au 27 juin 2017.

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SA La Tourre Plage exploite un camping [Localité 2] » sur la commune de [Localité 3], pour une surface totale de 115 231 m² correspondant à 22 parcelles de terrain appartenant à 9 bailleurs différents.

Le présent litige concerne la fixation du prix du bail renouvelé pour les parcelles AW[Cadastre 1] et AW[Cadastre 2] appartenant aux consorts [R].

Le bail initial dont s'agit a été consenti pour une durée de 30 ans, selon acte du 9 février 1979, par Monsieur [S] [R] à Monsieur et Madame [M] [I] pour ces deux parcelles :

- l'une initialement cadastrée section B n° [Cadastre 3] est devenue la parcelle AW [Cadastre 2], pour une contenance d'un hectare 66 ares et 25 centiares,

- l'autre initialement cadastrée section B n° [Cadastre 4], est devenue la parcelle AW [Cadastre 1] pour une contenance de 73 ares et 65 centiares.

Par actes du 15 octobre 1979 et 27 mars 1980, les époux [I] ont cédé le bail à la SARL La Tourre Plage, laquelle s'est transformée en une SA le 29 août 1998.

Madame [K] [R] épouse [F] et Madame [S] [R] épouse [M] sont venues aux droits de Monsieur [S] [R].

Le bail venant à son terme le 31 janvier 2009, les bailleresses ont notifié la fin de bail à la locataire par acte extrajudiciaire du

30 juillet 2008 pour le 31 janvier 2009. Par acte du 4 juin 2009, elles lui délivraient une sommation de déguerpir.

En réponse et par acte du 23 novembre 2009, la SA La Tourre Plage leur adressaient une demande de renouvellement du bail commercial.

Par jugement du 28 février 2012, aujourd'hui définitif, le tribunal de grande instance a :

- jugé que :

* le bail conclu le 9 février 1979 ne peut être qualifié d'emphytéotique,

* Mesdames [R] sont mal fondées en leur demande d'expulsion se fondant sur la qualité sans droit ni titre de la SA La Tourre Plage,

* le bail, portant sur une activité commerciale exercée par un commerçant, constitue un bail commercial,

- par référence à l'acte du 23 novembre 2009, constaté que le bail a été renouvelé à compter du 23 novembre 2009 dans les mêmes conditions que le bail du 1er février 1969, (sic, en réalité 1979), sous réserve cependant du montant du loyer,

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire,

- dit que la totalité des dépens sera supportée par Mesdames [K] et [S] [R],

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Après notification du mémoire préalable et par acte d'huissier en date du 6 juillet 2012, Mesdames [K] [R] épouse [F] et [S] [R] épouse [M] ont fait délivrer assignation à la SA La Tourre Plage devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Perpignan aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, la fixation du prix du loyer à la somme annuelle de 48 000 € hors-taxes et hors charges par an, à compter du renouvellement, avec le versement des intérêts capitalisés, ainsi que sa condamnation au paiement des dépens et d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Subsidiairement, elle sollicitait une mesure d'expertise avec fixation d'un loyer provisionnel annuel de

35 000 €.

Par jugement contradictoire en date du 10 janvier 2013, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Perpignan a :

- rejeté les fins de non recevoir tirées de la prescription,

- sur la valeur locative, ordonné une mesure d'expertise, selon mission précisée en son dispositif.

L'expert [S] a déposé son rapport le 30 mai 2014 mais l'a complété par un rapport définitif le 4 juillet 2014, pour répondre aux dires des parties.

Les parties ont échangé leurs mémoires.

Par jugement contradictoire en date du 19 janvier 2015, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Perpignan, au visa du jugement du 10 janvier 2013 et du rapport d'expertise, a :

- Fixé à la somme de 569,29 € HT et HC le montant du loyer annuel concernant la parcelle cadastrée section AW [Cadastre 1], louée par Mesdames [K] et [S] [R] à la SA La Tourre Plage

- Fixé à la somme de 13 799,70 € HT et HC le montant du loyer annuel concernant la parcelle cadastrée section AW [Cadastre 2] louée par Mesdames [K] et [S] [R] à la SA La Tourre Plage,

- Rejeté tous autres demandes plus amples ou contraires,

- Prononcé l'exécution provisoire du jugement,

- Condamné Mesdames [K] et [S] [R] aux dépens de l'instance,

- Débouté la SA La Tourre Plage de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit n'y avoir lieu à distraction des dépens.

APPEL

Mesdames [K] et [S] [R] ont relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 24 février 2015.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 avril 2017.

*****

Vu les dernières conclusions de Mesdames [K] et [S] [R] en date du 19 septembre 2015, auxquelles il est expressément référé pour plus ample et complet exposé des motifs et du dispositif, et demandant à la cour, au visa des articles

L. 145-33 et suivants, R. 145-3 et R. 145-8 du code de commerce, de l'article 145 du code de procédure civile, du bail signé le

9 février 1979, du rapport établi par le cabinet [B] en date du 16 septembre 2015 et de la jurisprudence, d'infirmer le jugement du juge des loyers commerciaux en date du

19 janvier 2015 et de :

À titre principal,

Constater les erreurs matérielles présentes dans le rapport d'expertise déposé par l'expert judiciaire dans le cadre de la première instance,

Juger que :

- ce rapport n'est pas de nature à établir la valeur locative des lieux loués à la date de renouvellement du bail du

23 novembre 2009,

- les aménagements effectués par le preneur constituent des modifications substantielles des lieux loués ou en tout état de cause des améliorations prises en charge de manière indirecte par le bailleur,

En conséquence,

Juger que ces modifications substantielles des lieux loués ou ses améliorations prises en charge de manière indirecte par le bailleur se doivent de participer à la fixation de la valeur locative fixée à la date de renouvellement du bail, soit le 23 novembre 2009,

Fixer la valeur locative de la parcelle AW 22 à la somme annuelle de 28 606 € HT, telle qu'établie par le rapport du cabinet [B],

Fixer la valeur locative de la parcelle AW [Cadastre 1] à la somme annuelle de 569,29 € HT, telle qu'établie par le rapport du cabinet [B],

À titre subsidiaire,

Désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec pour mission de :

- visiter et décrire les locaux loués, prendre connaissance des documents de la cause, recueillir contradictoirement les explications des parties et de tous sachants ;

- donner tous les éléments utiles permettant de déterminer la valeur locative des locaux à la date du renouvellement soit le

23 novembre 2009, et à cet effet notamment :

* décrire l'état général d'entretien de vétusté des locaux ;

* se faire remettre l'ensemble des pièces et documents nécessaires à la bonne exécution de sa mission ;

* dresser un bordereau des documents communiqués ;

* dire à quel usage ils sont utilisés et par qui ;

* rechercher les charges imposées à chacune des parties ;

* pondérer les surfaces en fonction de leur affectation ;

* rechercher l'importance des locaux annexes et des dépendances ;

* rechercher la nature et l'état des équipements mis à la disposition du preneur ;

* donner tout élément technique sur la date et l'importance des aménagements réalisés par le preneur ;

* donner à la juridiction les éléments de nature à établir si ces aménagements constituent des modifications substantielles des locaux loués ou s'il s'agit d'améliorations ;

* donner à la juridiction les éléments de nature à établir si ces aménagements ont été financés directement ou indirectement par le bailleur ;

* donner son avis technique sur l'incidence de l'emplacement du point de vue de l'exercice des activités commerciales ;

* s'expliquer techniquement, dans le cadre de ces chefs de mission, sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillis après leur avoir fait part de sa note de synthèse ou pré-rapport ;

En tout état de cause,

Condamner la société La Tourre Plage à la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

La condamner aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.

*****

Vu les dernières conclusions de la SA La Tourre Plage en date du 17 juillet 2015, auxquelles il est expressément référé pour plus ample et complet exposé des motifs et du dispositif, et demandant à la cour de :

Réformer le jugement rendu le 19 janvier 2015,

Écarter des débats la pièce n° [Cadastre 1] communiquée par les consorts [R] : rapport du cabinet [B] ;

Rejeter toutes les prétentions formulées par les consorts [R] ;

Juger le prix de la valeur locative de la parcelle AW [Cadastre 1] sur la commune de [Localité 3] à la somme de 294,50 € par an ;

Juger le prix de la valeur locative de la parcelle AW 22 sur la commune de [Localité 3] à la somme de 6 899,85 € par an ;

Condamner les consorts [R] à lui payer la somme de 4 500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

*****

SUR CE

Il est constant que le bail initial conclu le 9 février 1979 pour une durée de 30 ans a reçu, par une décision judiciaire du 28 février 2012 devenue définitive, constatation de sa qualification commerciale et de sa soumission au statut des baux commerciaux, et par conséquent de son renouvellement pour une durée de 9 ans à compter du 23 novembre 2009.

Au regard de la durée initiale du premier bail et de sa poursuite au delà de son terme jusqu'au 23 novembre 2009 le déplafonnement du loyer est de droit, par application des dispositions du dernier alinéa de l'article L.145-34 du code de commerce. Dès lors, l'ensemble des questions débattues devant la cour ne sont envisagées que dans l'unique objectif de détermination de la valeur locative de chacune des parcelles, laquelle doit être appréciée en se plaçant à la date de renouvellement.

Le premier juge, s'est positionné exclusivement dans une approche fondée sur les dispositions des articles L. 145-33 et R. 145-3 et suivants du code de commerce, en méconnaissance de celles dérogatoires de l'article R. 145-10 du même code. Du fait qu'il a considéré que les travaux réalisés en cours de bail ne constituaient que de simples améliorations ne pouvant impacter la valeur locative du terrain dans le cas d'un premier renouvellement du

bail, les parties, dans leurs écritures respectives, font de très longs développements sur la question des travaux réalisés au cours du bail expiré sur la parcelle AW 22.

Il ne pourra pas être fait l'économie d'y répondre, dans la mesure où le preneur prétend que cette question conditionne la possibilité pour le bailleur de se fonder sur les dispositions de l'article

R. 145-10 du code de commerce et demander application de la méthode dite hôtelière, appliquée aux campings.

S'agissant de la parcelle AW[Cadastre 1], qui ne fait l'objet d'aucune construction et ne peut être exploitée, on verra que quelle que soit la méthode utilisée, sa valeur locative sera en réalité assez symbolique.

Sur la demande de l'intimée d'écarter la pièce [Cadastre 1] de l'appelante, soit le rapport privé de Monsieur [W] du cabinet [B].

Les bailleresses appelantes n'étant pas satisfaites des conclusions du rapport d'expertise judiciaire sur lequel s'est appuyé le premier juge pour fixer le loyer, ont souhaité, pour en faire la critique et apporter une autre analyse, mandater le cabinet d'expertise [B].

Dans ses conclusions du 17 juillet 2015, l'intimée demande d'écarter le rapport du cabinet [B], aux motifs :

- qu'il a été réalisé sans contradictoire et en pénétrant dans les lieux du camping les tropiques à la Tourre Plage en application d'une ordonnance du président du tribunal de grande instance de Perpignan obtenue sur requête des consorts [R] ;

- que toutefois La SA Tourre Plage, ne pouvant accepter une intrusion dans ces lieux hors tout contexte procédural et au contradictoire des parties, a obtenu la rétractation de cette ordonnance.

A l'appui de cette demande, elle produit en sa pièce 3 l'ordonnance de référé du 1er juillet 2015, rétractant celle du 27 avril 2015 qui avait autorisé l'expert [W] du cabinet d'expertise [B] à entrer dans les lieux donnés à bail.

Cependant, à la suite de cette ordonnance de rétractation, l'expert [W] a modifié son premier rapport, pour en extirper les photos prises à l'intérieur des lieux qui échappaient au contradictoire.

C'est ainsi qu'il a rendu à ses mandantes un second rapport, daté celui-ci du 16 septembre 2015, précisant page 2 : «  cette mission a été réalisée sans tenir compte de la visite des lieux, conformément à l'ordonnance de référé du 1er juillet 2015 rendu

par le tribunal de grande instance de Perpignan. Nous avons seulement décrit les lieux depuis l'extérieur de l'enceinte du bien expertisé et à partir des photos aériennes. »

Les appelantes ont produit ce nouveau rapport de Monsieur [W] du cabinet [B] en leur pièce [Cadastre 1], en lieu et place du précédent rapport et pour la première fois avec leurs conclusions du 17 septembre 2015 dont le bordereau précise : « pièce [Cadastre 1] (nouvelle) : rapport d'expertise établie par le cabinet [B] du 16 septembre 2015 »

Il s'agit donc d'une étude sur pièces, utilisant les données fournies par l'intimée à l'expert judiciaire et notamment les baux afférents aux autres parcelles qu'elle exploite transmis à l'expert [S] dans son dire n°1 en date du 9 septembre 2013.

Or, force est de constater que, depuis les dernières conclusions des appelantes du 17 septembre 2015, portant production de cette nouvelle pièce essentielle, l'intimée n'a pas jugé utile d'y répondre alors même qu'elle a disposé pour cela d'un délai de 7 mois jusqu'à la clôture.

Si cette nouvelle pièce - sur laquelle les appelantes fondent en grande partie l'argumentation développée dans leurs dernières conclusions - n'appelle aucune observation de sa part, il y a tout lieu de penser qu'implicitement l'intimée reconnaît la pertinence de l'analyse de Monsieur [W] qui y est faite et qu'elle n'a aucune critique utile à formuler sur son contenu.

Dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'écarter cette pièce nouvelle qui est dans le débat depuis de nombreux mois, l'expert [W] ne fondant son analyse que sur des éléments connus des parties ou disponibles sur internet et, pour l'essentiel, précédemment communiqués à l'expert judiciaire.

Les appelantes étaient tout à fait légitimes à produire, à l'appui de leurs moyens, une analyse portant une critique constructive du rapport d'expertise judiciaire pour demander une contre-expertise.

Or, en réalité, il s'avère que cette analyse est suffisamment exhaustive pour que la cour estime pouvoir se passer d'une nouvelle expertise judiciaire, laquelle n'est demandée qu'au subsidiaire par les appelantes tandis que l'intimée l'estime inutile, selon l'ultime phrase des motifs de ses écritures indiquant en page 7 « qu'il n'y a nul besoin à une nouvelle expertise judiciaire ».

Dès lors, il n'y a pas lieu de désigner un nouvel expert judiciaire, ce qui n'aurait pour effet que de retarder l'issue du litige et d'accroître les frais à la charge de la partie perdante.

Sur les critiques du rapport d'expertise judiciaire :

En page 6 et 7 de son rapport, Monsieur [W] procède à une analyse critique du rapport d'expertise judiciaire [S], laquelle ne porte en définitive que sur le calcul de la valeur locative de la parcelle AW [Cadastre 2], puisque s'agissant de la valeur locative de la parcelle AW [Cadastre 1], il la valide in fine dans ses conclusions en indiquant : « la valeur retenue par l'expert judiciaire pour la parcelle AW[Cadastre 1] semble cohérente »

- Il relève tout d'abord une erreur manifeste en ce que la réindexation des baux comparables a permis à l'expert d'établir une valeur locative du camping au jour de l'expertise en juillet 2014 et non à la date de renouvellement.

Or comme indiqué plus haut, la valeur locative doit être déterminée en fonction des éléments contemporains de la date de renouvellement, et non selon ceux de la date de l'expertise. La cour ne peut que souscrire à cette critique, une telle erreur ne permettant pas d'entériner l'évaluation de l'expert judiciaire.

- Monsieur [W] reproche ensuite à l'expert [S] d'avoir procédé à une comparaison de la valeur locative à partir du seul prix global du mètre carré de terrain, sans aucune référence à des valeurs locatives de locaux comparables à ce qu'il indique devoir évaluer, dans la mesure où il n'applique des coefficients de pondération qu'aux différents espaces et bâtiments des parcelles litigieuses, alors qu'une pondération similaire aurait dû être appliquée en toute logique aux locaux utilisés à titre de comparaison.

La cour observe à cet égard que cette question des coefficients de pondération n'est pas neutre puisque, par exemple un coefficient de 0,[Cadastre 1] va diviser le prix du mètre carré par 2 alors qu'un coefficient de 2 va au contraire le multiplier par 2.

Cette question est d'autant plus importante s'agissant de la parcelle AW 22, dans la mesure où à l'inverse des autres parcelles constituant le camping, elle est essentiellement bâtie de locaux, lesquels sont utiles à l'ensemble du camping.

Monsieur [W] souligne à ce sujet que l'expert judiciaire ne s'est pas fait remettre l'historique des constructions et les différents permis de construire. Toutefois la cour observe et ne peut que déplorer le choix du preneur d'une stratégie de rétention d'informations, plutôt que celui d'une attitude de transparence et de loyauté contractuelle propre à établir le plus finement possible le juste prix entre les parties.

Or, l'expert ne dispose d'aucun moyen pour sanctionner le comportement d'une partie de rétention d'informations, de sorte que c'est alors à la juridiction qui appartient d'en tirer toutes conséquences dans son appréciation.

Si l'évaluation du prix se doit d'être la plus objective et la moins approximative possible, celui qui procède à des rétentions d'informations et s'abstient volontairement de contribuer au débat ou de contrer des analyses ne peut venir se plaindre ensuite d'une erreur d'appréciation en sa défaveur.

Monsieur [W] observe encore que certains locaux sont exploités par un tiers pour une activité de boulangerie, épicerie et articles de plage, ce qui devrait conduire à leur évaluation comme locaux commerciaux en tant que tels, ce qui n'est pas abordé dans le rapport de l'expert.

On ignore si ces locaux à l'époque de la date de renouvellement du bail faisaient l'objet d'une sous-location saisonnière ou d'une location-gérance.

Agissant en vertu d'une ordonnance sur requête rendue le

[Cadastre 1] juin 2015 par le président du tribunal de grande instance de Perpignan, il a été établi par la SCP d'huissiers [A] et [G] un constat en date du 16 juin 2015 indiquant les termes duquel :

- lui ont été remis copies des baux de location-gérance saisonniers en dates des 15 mars 2013 et 15 mars 2014 pour l'exploitation d'un commerce de vente de pain et bazar de plage, au sein des bâtiments situés dans la parcelle AW 22

- a été constaté la présence d'un commerce de vente de pizzas dont une partie est située sur la parcelle cadastrée AW [Cadastre 2], commerce tenu par la SA la Tourre Plage.

Or, l'expert judiciaire ne tire aucune conséquence de la présence de ces commerces et de l'apport financier qu'ils génèrent pour le preneur.

Enfin et surtout, Monsieur [W], citant explicitement la jurisprudence de la cour, rappelle qu'en matière de détermination de la valeur locative de camping, du fait de leur monovalence et de leur caractère spécifique, il est d'usage d'utiliser exclusivement la méthode dite hôtelière appliquée aux campings. Il indique : « A ce propos, nous ne comprenons pas la position de l'expert qui, bien qu'évoquant cette méthode, ne procède à aucun calcul en prétextant qu'il conviendrait que le preneur lui adresse ses bilans détaillés. Pourtant, la méthode hôtelière se base essentiellement sur le chiffre d'affaires théorique de l'exploitant et elle ne doit nullement tenir compte du chiffre d'affaire réel de celui-ci. Ces documents sont parfaitement inutiles pour déterminer la valeur locative. À tout le moins, il permet d'apprécier ensuite la qualité d'un exploitant par rapport à la moyenne du secteur. »

Sur l'évaluation de la parcelle AW [Cadastre 1] :

Tenant compte du dire du preneur du 26 mars 2014, l'expert judiciaire a procédé en page 16 de son rapport complémentaire par estimation directe de la parcelle AW [Cadastre 1], dont la localisation est non-attenante au terrain de camping et non-exploitable puisque inscrite en zone NDL du poste de la commune.

En effet :

- selon une attestation délivrée le 6 septembre 2013, annexée au rapport d'expertise judiciaire, le maire de la commune de [Localité 3] atteste que la parcelle cadastrée AW n° [Cadastre 1] appartenant à Monsieur [R] est située en zone NDL du POS.

- Cette zone est définie en page 91 du plan d'occupation des sols de cette commune comme suit : le secteur NDL correspond aux parties du territoire présentant un intérêt paysager floristique et faunistique, situé proche du littoral et où il conviendra de mettre en 'uvre les mesures de protection, de mise en valeur et de gestion pouvant autoriser sous conditions une ouverture au public maîtrisée quantitativement et qualitativement sur l'espace et dans le temps et orienté vers la découverte de la nature. En tout état de cause, ce secteur doit respecter les dispositions des articles

R. 146-1 et R. 146-2 du code de l'urbanisme.

L'expert judiciaire constate donc en page 10 de son rapport qu'aucune exploitation en terrain de loisirs à vocation de camping n'est autorisée sur cette parcelle, laquelle en outre n'est attenante à aucune parcelle exploitée par la SA La Tourre Plage.

L'intérêt de cette parcelle consiste donc seulement à offrir à la vue des campeurs un environnement naturel préservé à proximité du camping.

Se fondant sur l'arrêté préfectoral n° 2013-274-0005, fixant les montants maximal et minimal des fermages en fonction des catégories de terres agricoles, pour les terres de 4e catégorie, telle que la parcelle AW[Cadastre 1] est classée, comme devant se situer entre 15 € et 43 € l'hectare mensuel, l'expert judiciaire a retenu une valeur locative mensuelle de 29 € l'hectare, correspondant à la valeur moyenne de ces terres.

Au regard d'une surface de 16 359 mètres carrés, l'expert propose un prix du loyer annuel de la parcelle AW[Cadastre 1] 2 569,29 € selon le calcul suivant : 1,6359 hectare X 29 X 12.

Ce calcul, qui n'est pas sérieusement critiquable, a été retenu par le premier juge et se trouve également validé par Monsieur [W].

Les appelantes demandent d'ailleurs la confirmation du jugement sur ce point.

Seule l'intimée demande la fixation du prix du loyer à un montant inférieur - tout en indiquant que ce mode de calcul constitue la seule méthode à retenir ' en se fondant sur le prix minimum de

15 € de l'hectare de l'arrêté préfectoral.

Le prix médian paraît être le juste prix, étant observé qu'il n'est nullement prétendu que l'administration fiscale ait fixé en 2009 des prix minimum et maximum différents de ceux ressortant de l'arrêté de 2013 auquel l'expert se réfère.

Il serait possible d'obtenir une évaluation du prix équivalente selon une autre méthode, que ce soit la méthode par comparaison ou la méthode hôtelière adaptée aux camping : en effet, dans ces deux hypothèses, la surface de la parcelle serait alors pondérée par l'application d'un coefficient correspondant au peu d'utilité qu'elle représente pour le commerce. Toutefois, les parties comme les experts s'accordant sur la cohérence du prix obtenu par l'évaluation directe au regard de la spécificité de cette parcelle non bâtie et située en secteur NDL, il n'apparaît pas indispensable de le démontrer par des calculs.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

Sur l'évaluation de la parcelle AW 22 :

Sur le sort des travaux réalisés :

Le preneur prétend que :

- la méthode d'évaluation du prix des loyers des locaux dits monovalents ne pouvait s'appliquer en l'espèce puisque cette méthodologie, à la lecture de l'article R. 145-10 du code de commerce, ne s'adresse qu'à des locaux construits.

- qu'en l'espèce, les locaux ont été loués en 1979 nus de toute construction.

- que c'est seulement au moment du renouvellement du bail en 2009 que ces locaux sont loués pour la première fois construits.

- que cette méthode, dont il faudra débattre pour son application effective au cas d'espèce ne pourra éventuellement s'appliquer qu'au prochain renouvellement du bail.

Cependant, le bail stipule que « tous les aménagements, installations et améliorations, divers apportés par le preneur à la parcelle pendant la durée du bail, demeureront la propriété du bailleur à la fin du bail à quelque date et pour quelque raison pour cause qu'elle advienne, sans que ceux-ci aient à verser une indemnité quelconque au preneur. »

En application de cette clause d'accession, les constructions édifiées au cours du bail échu sont devenues la propriété des bailleresses depuis le 23 novembre 2009.

Le premier juge a considéré à tort que l'ensemble des constructions réalisées ne pouvait être que des améliorations non financées par le bailleur, alors qu'elles constituent en réalité des modifications notables des caractéristiques de la chose louée.

Il ressort des dispositions de l'article R 145-3 du code de commerce que si les travaux reçoivent la nature de travaux ayant modifié les caractéristiques substantielles des lieux loués le bailleur peut en tirer bénéfice lors du premier renouvellement qui suit.

Or le preneur a fait effectuer des travaux dès les premières années du bail pour transformer le terrain nu en une exploitation commerciale de camping par la construction de bâtiments destinés à l'accueil du public et de diverses commodités.

Il s'agit donc d'une modification de la structure-même des lieux loués et non de simples améliorations : la parcelle AW 22 est devenue essentiellement bâtie et comprend les éléments suivants : bâtiment d'accueil, de réception, locaux à usage d'épicerie boulangerie, laverie, pizzeria, réserve, distributeur automatique de billets de banque, ainsi qu'un espace de spa, hammam et jacuzzi, une zone de stockage de mobilehomes, des logements de fonction.

En toute hypothèse, l'analyse du bail initial démontre, au regard du loyer annuel fixé de 38 839 Fr., que le loyer des trois premières années a été fixé à un montant anormalement bas soit :

- 6500 Fr. l'hectare pour l'année 1979,

- 8500 Fr. l'hectare pour l'année1980

- et 13 000 Fr. l'hectare pour l'année 1981.

Ces abattements ou réduction de loyers, accordés initialement par le bailleur, constituent une contrepartie qui s'analyse en une prise en charge indirecte du financement des travaux structurels comme ceux d'amélioration au sens des dispositions de l'article R 145'8 du code de commerce.

Par la suite alors que le bail signé en février 1979 stipulait une révision des loyers en fonction des variations subies par les tarifs préfectoraux fixant le montant des redevances perçues au titre du camping pour les terrains classés 2 étoiles, le preneur a bénéficié de révisions des loyers très avantageuses, puisque le camping est classé 4 étoiles mais que la révision du loyer est demeurée - au cours des 30 années - référée aux redevances des campings 2 étoiles.

Enfin, la durée de 30 ans du premier bail constitue une autre forme de participation indirecte du bailleur aux travaux structurels et d'améliorations. En effet, en consentant d'emblée un bail pour une durée aussi longue, le bailleur renonçait par là-même à obtenir plus précocement le déplafonnement du loyer alors qu'il aurait pu s'en prévaloir dans le cadre d'un bail classique :

- soit à l'issue d'un bail de 9 ans, à charge pour lui de démontrer une modification notable d'un des éléments de l'article L. 145-33 du code de commerce,

- soit à l'issue d'une période de 12 ans, en application du dernier alinéa de l'article L.145-34 du même code.

Dès lors, le fait de consentir un bail commercial de longue durée suffit à établir que le loyer a été maintenu anormalement bas au profit du preneur, ce qui constitue une participation indirecte du bailleur aux travaux d'amélioration pendant toute la durée du bail initial.

Il est encore observé que les parties avaient clairement fait le choix d'établir un bail à construction puisque le preneur comptait y édifier des bâtiments sur les parcelles.

Après cette durée de 30 ans, le preneur ne peut donc plus se prévaloir du fait que les terrains étaient nus à l'origine, d'autant qu'ils avaient dès l'origine vocation à être construits pour la création d'un camping. Et ils ont été précisément construits pour cette seule utilisation.

Dès lors l'édification des bâtiments en début de bail et la participation indirecte du bailleur à plusieurs égards au financement des travaux de construction puis d'amélioration justifient que ce dernier puisse se prévaloir de locaux construits pour cette seule utilisation, et demander en conséquence l'application des dispositions de l'article R. 145-10 du code de commerce.

Sur le caractère monovalent du bail et la méthode d'évaluation du prix du bail :

Aux termes des dispositions de l'article R. 145-10 du code de commerce le prix du bail des locaux construits en vue d'une seule utilisation peut, par dérogation aux articles L. 145-33 et R. 145-3 et suivants, être déterminé selon les usages observés dans la branche considérée.

Lorsque le caractère monovalent du bail est reconnu, le loyer échappe au plafonnement dès le premier renouvellement du bail après une période de 9 ans, sans nécessité de se référer aux critères des dispositions des articles L. 145-33 et suivants et R. 145-3 et suivants du code de commerce.

En l'espèce, s'agissant d'un bail de plus de 12 ans puisque, de façon dérogatoire au statut des baux commerciaux, il avait été initialement consenti pour une période de 30 ans, le principe du déplafonnement est en toute hypothèse acquis.

L'intérêt de caractériser le bail en fonction d'une activité unique est ici de déterminer la méthode à utiliser par l'expert pour donner un avis sur la fixation du prix du loyer du bail renouvelé.

Il est constant que le montant du loyer des locaux commerciaux tient compte de l'utilisation commerciale qui en est faite et du rapport économique que peut en tirer le locataire.

L'activité de camping est reconnue comme spécifique. Par ailleurs, si un terrain nu peut trouver plusieurs utilisations, dès lors que des aménagements ont été réalisés pour équiper en eau et en électricité les emplacements des tentes, caravanes camping-cars et

mobile homes, et pour fournir un ensemble de services d'hygiène, de restauration, de commerces et de loisirs sur place, la transformation du camping existant en une autre activité rendrait ces coûteux investissements au moins en partie inutiles.

Le caractère monovalent du bail s'évince encore du fait que cette activité de camping obéit à des normes touristiques. L'attribution d'un nombre d'étoiles aux campings, de la même façon qu'aux hôtels, démontre l'existence d'une classification selon un ensemble de critères, qui font référence pour la clientèle comme pour l'établissement à des tarifs de location d'emplacements, de mobile homes et bengalows.

L'agrément apporté par des équipements de loisirs et d'alimentation fait partie des critères de prestations permettant de déterminer la catégorie du camping selon les étoiles allouées.

C'est précisément parce qu'il existe dans la branche professionnelle des critères touristiques de comparaison et des catégories, à partir de la situation des lieux et des prestations offertes, que l'évaluation du prix du loyer selon les usages observés dans la branche considérée est la méthode la plus pertinente et que les dispositions précitées de l'article R. 145-10 du code de commerce doivent trouver application s'agissant de campings.

L'expert désigné, s'il peut bien évidemment confronter les résultats obtenus par plusieurs méthodes, se doit donc en la matière d'utiliser principalement la méthode dite hôtelière, mais telle qu'appliquée aux campings.

C'est bien ce qu'a recherché le rapport [W] du Cabinet [B], tandis que l'expert judiciaire avait éludé cette méthode aux motifs que le preneur ne lui fournissait pas les bilans comptables.

Il est vrai que le preneur a adopté une stratégie de rétention d'informations notamment sur sa gestion, et a par ailleurs fourni à l'expert des baux de comparaison qui lui sont favorables, l'engageant à aller dans cette seule voie.

L'expert judiciaire - qui avait reçu une mission générale classique et non une mission spécifique adaptée aux campings - a tenté comme il a pu de répondre aux questions posées avec les seules données fournies par les parties. Or, son approche par comparaison s'est avérée d'autant moins pertinente qu'elle est en l'espèce essentiellement documentée par des références fournies par le preneur.

Aux termes des alinéas 3 et 4 de l'article R. 145-30 du code de commerce, si des divergences portent sur des points de fait qui ne peuvent être tranchés sans recourir à une expertise, le juge désigne un expert dont la mission porte sur les éléments de fait permettant l'appréciation des critères définis, selon le cas, aux articles R. 145-3 à R. 145-7, L. 145-34, R. 145-9, R. 145-10 ou R. 145-11, et sur les questions complémentaires qui lui sont soumises par le juge. Toutefois, si le juge estime devoir limiter la mission de l'expert à la recherche de l'incidence de certains éléments seulement, il indique ceux sur lesquels elle porte.

Si l'on ne peut que regretter que le jugement du 10 janvier 2013 n'ait pas d'emblée, en application des dispositions des articles R. 145-30 et R. 145-10 du code de commerce, réduit le périmètre de la mission de l'expert, le rapport [W] démontre que l'expert judiciaire aurait néanmoins pu - de la même façon qu'il l'a lui-même fait - se passer des bilans comptables détaillés pour calculer le chiffre d'affaires théorique de l'ensemble du camping à partir des différents tarifs selon les périodes d'ouverture, du nombre d'emplacements et du taux d'occupation moyen des camping dans le département l'année de renouvellement du bail.

En toute logique, le camping constituant une activité économique spécifique doit donc se voir appliqué un prix du loyer au mètre carré pour l'ensemble, calculé à partir du chiffre d'affaires théorique et du taux d'effort, selon la méthode dite hôtelière appliquée aux campings, ainsi que Monsieur [W] y procède en pages 18 à 21 de son rapport.

Dans un second temps, l'évaluation de chacune des parcelles peut se faire en considération du pourcentage qu'elles représentent relativement à la surface totale des terrains loués au preneur pour l'exploitation du camping, en affectant d'un coefficient de pondération représentant l'importance et l'utilité commerciale des différents espaces et bâtiments. C'est ce à quoi Monsieur [W] s'est employé en page 21 de son rapport.

Monsieur [W] a bien distingué, pour le calcul du chiffre d'affaires théorique, des sous-totaux partiels se référants aux différents tarifs, selon les trois périodes tarifaires, pour un emplacement standard, puis appliqué aux 450 emplacements existants, et en prenant en compte, pour chacune de ces périodes, le taux d'occupation moyen des camping relevé dans le département, soit :

- 129 jours de basse saison (du 4 avril au 4 juillet et du 29 août au 4 octobre) avec un taux d'occupation moyen de 25,70 %

- 50 jours de haute saison (du 4 juillet au 22 août) avec un taux d'occupation moyen de 80 %

- 8 jours de moyenne saison (du 22 août au 29 août) avec un taux d'occupation moyen de 78,70 %.

À partir des tarifs de l'année 2014, il obtient un chiffre d'affaires théorique TTC de 1 346 171,85 €, soit un chiffre d'affaires hors-taxes de 1 223 791,59 €.

Il justifie le taux d'effort de 15 % appliqué au chiffre d'affaires HT en retenant qu'en l'espèce les prestations hôtelières sont plus limitées que celles d'un hôtel d'une résidence de service de classement identique (4 étoiles).

La valeur locative annuelle de l'ensemble immobilier, soit le chiffre d'affaires théorique pondéré du taux d'effort, s'établit donc la somme de 183 568,88 € (=1 223 791,59 X 0,15)

Pour calculer la valeur locative de la parcelle AW 22, Monsieur [W] retient que :

- sur la surface totale de 115 231 m² correspondant aux 22 parcelles de terrain composant le camping, la surface exploitée ne concerne que 94 725 m² en zone INAC, excluant ainsi du calcul les parcelles non exploitées pour être situées en zone NDL, telle la parcelle précitée AW [Cadastre 1].

- La parcelle AW 22 avec une surface de 7263 m² représente 7,67 % de la surface exploitée du camping (94 725 m²).

- La valeur locative brute de la surface de la parcelle AW 22 s'établit donc, selon ce calcul, à 14 079,73 €.

- on retiendra le coefficient de pondération de 2, proposé par l'expert judiciaire [S] et approuvé par Monsieur [W] pour calculer le prix du loyer après pondération de surface de cette parcelle, en relevant que la parcelle litigieuse est essentiellement bâtie et qu'elle supporte une grande partie des édifices vitaux du camping, situés à l'entrée du camping et permettant sa desserte.

- Monsieur [W] propose en conséquence, selon cette méthode, la fixation du loyer annuel de la parcelle AW 22 à la somme de 28 159,46 € (14 079,73 € x 2).

Monsieur [W] s'est donné la peine d'évaluer la valeur locative saisonnière des bâtiments de la parcelle (2 logements de fonction un mobile home sédentarisé pour le gardien, un bâtiment administratif, un mobilehome sédentarisé pour le coiffeur, des commerces, des ateliers, des sanitaires, un distributeur automatique) totalisées à la somme de 31 482 €.

Constatant que la valeur locative des bâtiments s'avère être supérieure au loyer proposé de l'ensemble de la parcelle, il s'interroge sur le point de savoir si les batiments des commerces ne devraient pas être évalués distinctement en tant que tels. Implicitement, il suggère que le loyer annuel proposé de 28 159,46 € pourrait à cet égard être majoré.

Pour vérifier la pertinence de son analyse, Monsieur [W] la confronte à la méthode dite de comparaison.

Retenant notamment la comparaison avec un autre camping des années 70, dont le loyer annuel était d'environ 3 € du mètre carré en 2009, pour une parcelle qui ne supporte que l'accueil et l'entrée du camping, sans boutique ni logement, Monsieur [W] estime que la valeur locative annuelle du m² de la parcelle à AW[Cadastre 2] devrait être de 4 €/m², soit un loyer annuel de 29 052 €.

En définitive, Monsieur [W] propose de fixer le loyer de la parcelle à AW[Cadastre 2] à la moyenne des sommes obtenues par les deux méthodes (méthode hôtelière appliquée aux campings et méthode de comparaison), soit 28 606 € HT.

C'est ce montant qui est demandé par les bailleresses.

Le preneur, qui n'a pas jugé utile de répondre aux dernières conclusions des appelantes fondées sur le second rapport de Monsieur [W], n'apporte donc aucune critique de cette méthode et des calculs proposés.

Toutefois, la cour observe que l'expert privé [W] reconnaît lui-même qu'il n'a pas eu accès aux tarifs de l'année 2009, de sorte qu'il a dû procéder à ses calculs selon la méthode hôtelière avec ceux de l'année 2014.

Il y a tout lieu de penser que les tarifs ont dû légèrement augmenter entre les années 2009 et 2014, ce qui devrait faire ressortir un chiffre d'affaires théorique inférieur à celui calculé pour l'année 2014, et par conséquent une valeur locative légèrement moindre de celle avancée par les bailleresses.

Faute pour le preneur de produire les pièces utiles qui permettraient à la cour de calculer le plus exactement possible le montant du loyer, la cour ne peut ici procéder que par approximation et se contentera, pour se placer à la date de renouvellement du bail, d'arrondir à la baisse le montant du loyer annuel proposé.

Infirmant le jugement sur ce point, le loyer de la parcelle AW 22 sera fixé, à compter du 23 novembre 2009, date de renouvellement du bail, à la somme annuelle de 28 000 €.

En conséquence, le jugement sera infirmé sur les dépens.

L'intimée qui succombe en définitive en ses prétentions supportera les entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire, et sera condamnée à verser la somme de [Cadastre 1] 000 € aux appelantes, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Vu les dispositions de l'article R.145-10 du code de commerce,

Vu le rapport d'expertise et les pièces produites,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement sur :

- la fixation à la somme de 569,29 € HT et HC le montant du loyer annuel concernant la parcelle cadastrée section AW [Cadastre 1], louée par Mesdames [K] et [S] [R] à la SA La Tourre Plage,

- le rejet de la demande du preneur au titre de ses frais irrépétibles,

L'INFIRME pour le surplus,

Et statuant à nouveau de ces chefs infirmés,

- Fixe à la somme de 28 000 € HT et HC le montant du loyer annuel dû à compter du 23 novembre 2009, pour la parcelle cadastrée section AW [Cadastre 2] louée par Mesdames [K] et [S] [R] à la SA La Tourre Plage,

- Rejette toutes autres demandes,

- Condamne la SA La Tourre Plage, à payer à Mesdames [K] et [S] [R] la somme de 5 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SA La Tourre Plage aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

LA GREFFIERELE PRESIDENT

MM/CR


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 15/01452
Date de la décision : 27/06/2017

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°15/01452 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-06-27;15.01452 ?
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