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04/05/2017 | FRANCE | N°14/02250

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre a, 04 mai 2017, 14/02250


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre A



ARRET DU 04 MAI 2017



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/02250







Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 FEVRIER 2014

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 11/00520







APPELANTS :





Monsieur [E] [Z]

né le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1

]

[Localité 2]

représenté par Me François Régis VERNHET , avocat au barreau de MONTPELLIER



Madame [D] [R] épouse [Z]

née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre A

ARRET DU 04 MAI 2017

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/02250

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 FEVRIER 2014

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 11/00520

APPELANTS :

Monsieur [E] [Z]

né le [Date naissance 4] 1952 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me François Régis VERNHET , avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [D] [R] épouse [Z]

née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me François Régis VERNHET , avocat au barreau de MONTPELLIER

SA MAAF ASSURANCES (et intimée)

RCS NIORT B 542 073 580, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités [H]

[Localité 7]

représentée par Me BEAUREGARD de la SCP CALAUDI BEAUREGARD MOLINIER TRIBOUL MAILLET, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SA SMABTP

prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualité au siège social

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par la SCP AUCHE- HEDOU AUCHE, avocat au barreau de MONTPELLIER, postulant

et par Me Gilles BIVER de la SCP CABEE BIVER LAREDJ SPANGHERO, avocat au barreau de CARCASSONNE, plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 07 Février 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 FEVRIER 2017, en audience publique, Madame Brigitte DEVILLE Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Elisabeth RAMON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président, et par Madame Elisabeth RAMON greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**********

FAITS ET PROCEDURE

Les époux [Z] ont acquis un terrain sur la commune de [Localité 9](11) sur lequel ils ont fait édifier une maison d'habitation par l'entreprise Casanova Frères assurée auprès de la société MAAF.

Les travaux ont été réceptionnés le 31 octobre 1989 mais dès le mois de juin 1990 les époux [Z] ont constaté l'apparition de fissures.

La société MAAF a missionné son expert et des travaux ont été réalisés en 1992 et 1993.

Les travaux de reprise en sous- 'uvre ont été effectués par la société Sud injections assurée auprès de la SMA BTP et réceptionnés le 24 juin 1993.

En raison de l'apparition de nouvelles fissures la société MAAF a indemnisé les époux [Z] au mois de novembre 1996 afin qu'ils procèdent à de nouveaux travaux de réparation.

De nouveaux désordres sont encore apparus ayant pour origine la sécheresse et ont été pris en charge par la société GAN, assurance multirisque habitation, au titre de l'assurance catastrophe naturelle.

Mais les époux [Z] soutiennent que les désordres localisés à l'intérieur de la maison n'ont pas été réparés.

Enfin, le 6 décembre 2007, la SMA BTP, assureur de la société Sud injections, a accepté de prendre en charge les travaux concernant les fissures et l'affaissement du dallage extérieur mais a refusé de financer l'affaissement du dallage intérieur lié selon elle aux racines des arbres plantés par les époux [Z].

Par exploit du 10 mars 2011 les époux [Z] ont assigné devant le tribunal de Grande instance de Narbonne la société MAAF et la SMA BTP en paiement de la somme de 347'926,08 € correspondant au coût des travaux de démolition et de reconstruction de leur maison et en indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement du 6 février 2014 ce tribunal a :

'déclaré irrecevable comme prescrite l'action dirigée contre la SMA BTP

'rejeté l'exception de prescription soulevée par la MAAF

'dit que les désordres listés par l'expert [W] sont en partie imputables à l'entreprise Casanova assurée par la MAAF et sont de nature, par leur ampleur et leur caractère évolutif, à porter atteinte à la destination de l'ouvrage

'condamné en conséquence la MAAF, après partage d'imputabilité, à payer aux époux [Z] la somme de 156'567 €TTC au titre des frais de réfection de leur immeuble

'condamné la MAAF à payer aux époux [Z] la somme de 10'000 €au titre de l'indemnisation de leur trouble de jouissance

'débouté les époux [Z] de leur demande au titre d'un préjudice moral

'condamné la MAAF à payer aux époux [Z] la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

'ordonné l'exécution provisoire à hauteur de la somme de 156'567€

'condamné la MAAF aux dépens en ce compris les frais d'expertise.

La société MAAF a relevé appel de cette décision le 24 mars 2014.

Les époux [Z] ont, quant à eux, relevé appel le 1er avril 2014.

Le conseiller de la mise en état a rendu une ordonnance de jonction le 8 février 2017.

Vu les conclusions de la société MAAF remises au greffe le 2 août 2016 dans l'instance répertoriée sous le numéro 14/2250 et remises le 5 août 2014 dans celle portant le numéro 14/2472,

Vu les conclusions des époux [Z] remises au greffe le 23 juillet 2014 dans l'instance répertoriée sous le numéro 14/2250 et remises le 9 décembre 2016 dans celle portant le numéro 14/2472,

Vu les conclusions de la SMA BTP remises au greffe le 3 janvier 2017 dans les deux procédures,

Vu l'ordonnance de clôture du 7 février 2017,

MOTIFS

Sur la prescription de l'action à l'encontre de la société MAAF :

La société MAAF, en sa qualité d'assureur responsabilité décennale de l'entrepreneur Casanova, soulève la prescription de l'action directe diligentée à son égard par les époux [Z].

Elle déclare en effet que depuis sa dernière indemnisation des travaux de réparation en date du 6 novembre 1996, aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu jusqu'à l'assignation en référé du 8 juin 2009 et qu'en conséquence l'action au fond introduite par exploit du 10 mars 2011 est irrecevable comme prescrite.

Il est constant que la dernière indemnisation des époux [Z] par la société MAAF est intervenue le 6 novembre 1996 par la transmission d'un chèque de 11'613,48 francs destiné à financer des travaux de réparation des désordres affectant leur immeuble.

Au mois de mai 1999 les époux [Z] ont formulé de nouvelles réclamations auprès de la société MAAF qui a missionné son expert, [X] [K], dans le cadre d'une expertise amiable en précisant, dans un courrier du 27 mai, que cette désignation était faite « sous toutes réserves de garantie et de responsabilité ».

Des courriers ont ensuite été échangés aux termes desquels la société MAAF indiquait aux époux [Z] que son expert faisait toutes diligences pour « faire le point » sur le dossier afin de lui permettre de prendre position.

Le 9 août 2002 la société MAAF précisait que l'expert de l'assureur multirisque habitation avait envisagé plusieurs origines possibles des aggravations dénoncées par les époux [Z] et notamment la sécheresse au regard de l'arrêté de catastrophe naturelle du 29 décembre 2000. Dans ce courrier la société MAAF précisait qu'elle n'avait pas arrêté de conclusions définitives alors même que l'expert de l'assurance multirisque habitation devait organiser une nouvelle expertise.

En 2006 la SMA BTP, assureur de la société Sud injections, missionnait à son tour [M] [B], son expert.

C'est à la demande de ce dernier qu'une étude géotechnique a été réalisée au mois de septembre 2006.

Il résulte de tous ces éléments que la société MAAF a missionné son expert dans le cadre d'une expertise amiable et que des réunions sur les lieux se sont aussi poursuivies à l'initiative de la société d'assurance multirisque habitation puis de la SMA BTP, assureur de la société Sud injections.

La société MAAF qui a diligenté son expert sous toutes réserves de garantie et de responsabilité, a toujours indiqué, dans les divers courriers adressés aux époux [Z], qu'elle attendait les conclusions de son propre expert pour prendre position.

Or, dans le cadre d'une action directe de la victime, le fait pour l'assureur de mandater un expert ne constitue pas de sa part une reconnaissance de responsabilité de son assuré.

L'assistance à une expertise ou la proposition d'en organiser une ne sont pas des actes interruptifs de la prescription.

En effet une telle désignation ne vaut pas reconnaissance de la réalité du sinistre, de la responsabilité de l' assuré, et de l'acquisition de la garantie puisqu'une expertise amiable ne préjuge pas de la décision finale de l'assureur.

Un tel acte ne caractérise pas une reconnaissance certaine et non équivoque de la garantie et n'interrompt donc pas la prescription décennale.

Ainsi, depuis le 6 novembre 1996, aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu jusqu'à l'assignation en référé du 8 juin 2009 signifiée après l'expiration de la garantie décennale.

C'est à tort que les époux [Z] invoquent l'interruption de la prescription biennale de l'article L 114'1 du code des assurances puisque le délai de prescription de l'action directe de la victime est celui de l'action en responsabilité à l'encontre de l'assuré.

Ainsi les causes d'interruption de la prescription édictée par l'article

L 114'2 du même code ne concernent que la prescription biennale inapplicable à l'action directe de la victime.

En conséquence l'action des époux [Z] à l'encontre de la société MAAF doit être déclarée irrecevable comme prescrite et le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la responsabilité délictuelle de la société MAAF :

Les époux [Z] soutiennent que la société MAAF a commis une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle en adoptant un comportement déloyal, laissant volontairement expirer le délai de prescription.

Ce délai expirait le 6 novembre 2006.

Or, dans un courrier en date du 2 octobre 2007 adressé à l'expert de la

SMA BTP, les époux [Z] indiquaient que, lors d'une réunion du 27 mai 2005, l'expert [K] avait précisé que les dégradations « hors sécheresse » n'étaient pas du ressort de la société MAAF qui renvoyait la responsabilité de la totalité des réparations à la SMA BTP.

Ainsi dès le mois de mai 2005 les époux [Z] avaient connaissance du refus de prise en charge par la société MAAF des nouveaux désordres et pouvaient, avant l'expiration de la garantie décennale, l'assigner en référé ou au fond.

D'ailleurs, à compter du mois de mai 2005, les époux [Z] n'ont adressé des courriers qu'à la SMA BTP et à Monsieur [B] son expert. Ils n'ont repris contact avec la société MAAF qu'en 2008 lorsque la SMA BTP n'a pas pris en charge la réparation de tous les désordres.

En toute hypothèse, ils ont été négligents vis-à-vis de la société MAAF s'ils souhaitaient la mettre en cause puisque rien ne les empêchait de diligenter à son égard en temps utile des procédures judiciaires afin d'interrompre le délai décennal puisque les opérations d'expertises amiables perduraient depuis 1999 sans aucune reconnaissance de responsabilité et de garantie de la part des différentes sociétés d'assurances.

La société MAAF n'a donc pas eu de comportement déloyal vis-à-vis des époux [Z] puisque son refus de garantie était clair depuis 2005, avant l'expiration du délai de garantie décennale, leur laissant tout loisir d'intenter une procédure judiciaire.

Enfin l'absence de communication par la société MAAF à l'expert judiciaire de certains documents est sans incidence tenant la prescription à son égard de l'action directe fondée sur la responsabilité décennale de son assuré.

En conséquence, la demande des époux [Z] fondée sur la responsabilité délictuelle de la société MAAF doit être rejetée.

Sur la prescription de l'action à l'encontre de la SMA BTP :

Par des motifs que la cour adopte le premier juge a déclaré irrecevable comme prescrite l'action directe des époux [Z] à l'encontre de la société SMA BTP, assureur de la société Sud injections.

En effet les travaux de reprise en sous 'uvre réalisés par la société Sud injections ont été réceptionnés le 24 juin 1993 et ce n'est que le 8 juin 2009 que les époux [Z] ont assigné la société SMA BTP en référé afin de demander une expertise pour constater l'apparition de nouveaux désordres.

Les époux [Z] soutiennent que cette société d'assurance a renoncé à invoquer la prescription de la garantie décennale dans son courrier en date du 6 décembre 2007.

Or dans ce courrier la SMA BTP précise que la fissure du pignon Est traduit un défaut d'exécution des micros pieux réalisés par son assuré mais qu'en revanche l'affaissement du dallage intérieur résulte d'une cause extérieure exonératoire de cette responsabilité.

Elle se déclare donc disposée à renoncer au moyen tiré de la prescription, dans un cadre strictement amiable, et intervenir dans la prise en charge des frais de réparation de ce dommage.

Elle précise qu'en revanche, dans la mesure où une cause étrangère est à l'évidence génératrice de l'affaissement constaté sur le dallage intérieur, elle ne saurait être tenue à la réparation de ce second dommage.

Les époux [Z], par courrier du 11 décembre 2007 ,ont donné leur accord sur la solution proposée par la SMA BTP.

En conséquence cette société d'assurance, dans des termes clairs et dépourvus de toute ambiguïté, a limité sa renonciation au moyen tiré de la prescription de la garantie décennale seulement en ce qui concerne le dommage affectant le pignon Est de l'immeuble.

La prescription de la garantie décennale est donc acquise pour les autres désordres puisqu'aucun acte interruptif de cette prescription n'est intervenu entre le 24 juin 1993 et le 24 juin 2003 ni aucune renonciation à invoquer cette prescription.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action dirigée contre la SMA BTP.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare irrecevable comme prescrite l'action directe des époux [Z] à l'encontre de la société MAAF.

Déboute les époux [Z] de leur action en responsabilité délictuelle à l'encontre de la société MAAF.

Condamne les époux [Z], au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la société MAAF et à la société SMA BTP la somme de 2000 € chacune pour les frais engagés tant en première instance qu'en cause d'appel.

Condamne les époux [Z] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

BD


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre a
Numéro d'arrêt : 14/02250
Date de la décision : 04/05/2017

Références :

Cour d'appel de Montpellier A1, arrêt n°14/02250 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-04;14.02250 ?
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