Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1ère Chambre A
ARRET DU 08 DECEMBRE 2016
Numéro d'inscription au répertoire général : 13/02983
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 JUILLET 2012
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG 09/05158
APPELANTE :
SCI LA PRAIRIE,
immatriculée au RCS de Narbonne sous le N° D 491 273 058, représentée par son gérant en exercice domicilié ès-qualités audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 1]
représentée par Me Bruno BLANQUER de la SCP BLANQUER/GIRARD/CROIZIER/CHARPY, avocat au barreau de NARBONNE, avocat postulant et plaidant
INTIMES :
Monsieur [Y] [W] [U] [S]
né le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Alexandre SALVIGNOL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
et assisté de Maître Guilhem FABRE de la SCP ANDRE - ANDRE ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
Madame [G] [I] [Q] épouse [S]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Alexandre SALVIGNOL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant
et assistée de Maître Guilhem FABRE de la SCP ANDRE - ANDRE ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 27 Septembre 2016
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le MARDI 18 OCTOBRE 2016 à 08 h 45, en audience publique, Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre
Madame Caroline CHICLET, Conseiller
Madame Brigitte DEVILLE, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Marie-José TEYSSIER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre, et par Madame Marie-José TEYSSIER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
****
FAITS ET PROCEDURE :
Suivant acte sous-seing privé du 15 juin 2006 Monsieur [Y] [S] a consenti à la SCI la prairie, société en formation, pour une durée expirant le 16 octobre 2007 à 16 heures, une promesse unilatérale de vente d'une parcelle de terre située sur la commune [Localité 4] (66), lieu-dit [Localité 5], cadastrée A [Cadastre 1], sous la condition suspensive d'obtention par le bénéficiaire d'un permis de construire au plus tard le 15 juin 2007.
Les parties ont convenu de fixer le montant de l'indemnité d'immobilisation à la somme de 30'000 € séquestrée entre les mains du notaire.
À défaut d'avoir obtenu la restitution de cette somme après mise en demeure par courrier recommandé du 8 janvier 2009, la SCI la prairie a assigné, devant le tribunal de Grande instance de Perpignan, les époux [S], sur le fondement de l'article 1134 du Code civil, afin d'obtenir restitution de la somme de 30'000 € ainsi que le paiement de dommages-intérêts.
Par jugement du 10 juillet 2012 ce tribunal a :
'débouté la SCI la prairie de sa demande tendant à la restitution de la somme de 30'000 € versée à titre d'indemnité d'immobilisation et consignée entre les mains de Maître [O], notaire associé à [Localité 6]
'débouté la SCI la prairie de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive
'dit que la somme de 30'000 € consignée entre les mains de Maître [O] sera versée à Monsieur [S] à titre d'indemnité d'immobilisation
'débouté les époux [S] du surplus de leurs demandes reconventionnelles
'condamné la SCI la prairie à payer aux époux [S] la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens
'ordonné l'exécution provisoire.
La SCI la prairie a relevé appel de cette décision le 17 avril 2013.
Vu les conclusions de l'appelante remises au greffe le 12 février 2016,
Vu les conclusions des époux [S] remises au greffe le 22 septembre 2016,
Vu l'ordonnance de clôture du 27 septembre 2016,
Vu les conclusions d'incident de la SCI la prairie remises au greffe le 26 septembre 2016 et les conclusions en réponse des époux [S] remises au greffe le 27 septembre 2016,
MOTIFS :
Lors de l'audience de plaidoirie la SCI la prairie s'est désistée de son incident.
Il convient de lui en donner acte.
La SCI la prairie, bénéficiaire de la promesse unilatérale de vente, a déposé la demande de permis de construire le 26 septembre 2006, soit avant le délai contractuel du 1er octobre 2006 ainsi qu'il résulte du récépissé délivré par la commune [Localité 4].
La transmission de ce récépissé au promettant ne constituait pas, aux termes de la promesse unilatérale de vente, une obligation dont le défaut entraînait la réalisation de la condition suspensive.
Cette promesse a été consentie sous la condition suspensive d'obtention par le bénéficiaire, au plus tard le 15 juin 2007, d'un permis de construire valant division sur l'assiette de la parcelle vendue lui permettant de réaliser un groupe d'habitations.
Le premier juge, par des motifs pertinents que la cour approuve, a constaté que la SCI la prairie avait tout mis en 'uvre pour obtenir le permis dans le délai convenu, que le permis n'a pas été obtenu avant le délai contractuel du 15 juin 2007, que cependant la SCI a clairement manifesté son intention de poursuivre la réalisation de son projet immobilier et que les parties ont eu la volonté de maintenir leurs relations renonçant ainsi tacitement au délai initialement prévu.
En effet l'instruction de la demande de permis de construire déposée le 26 septembre 2006 a subi des retards non imputables à la SCI la prairie puisque la commune lui indiquait le 11 janvier 2007 que cette demande ne pourrait recevoir un avis favorable tant que le plan local d'urbanisme n'était pas approuvé et le 14 mai 2007 que la validité de ce plan devrait être connue dans le courant du mois de juin.
Le notaire de la SCI a tenu informé de ces difficultés le notaire de Monsieur [S] par courrier du 15 janvier 2007.
Le plan local d'urbanisme a été approuvé le 1er juin 2007 et la SCI la prairie a dû déposer des pièces complémentaires le 24 septembre 2007, manifestant ainsi sans équivoque son intention de poursuivre la réalisation de son projet immobilier.
Par ailleurs elle n'a exigé la restitution de l'indemnité d'immobilisation que par courrier recommandé du 8 janvier 2009, après la réception du permis le 9 janvier 2008 et sa tentative d'obtenir des propriétaires des parcelles voisines une servitude d'écoulement des eaux pluviales, démontrant ainsi qu'elle n'avait pas l'intention de se prévaloir de l'absence de réalisation de la condition suspensive dès le délai contractuel du 15 juin 2007.
De son côté Monsieur [S], demeuré taisant, a tacitement accepté la prorogation, sans terme fixe, du délai de validité de la promesse unilatérale de vente.
En l'absence de délai pour lever l'option l'engagement de Monsieur [S] sous condition suspensive devait subsister jusqu'à la réalisation ou la défaillance de cette condition.
Le permis de construire a été accordé le 9 janvier 2008 mais avec l'obligation d'amener les eaux pluviales à la sortie du bassin de rétention jusqu'à un ruisseau distant de 50 m afin de limiter la concentration des eaux vers le village.
Cette prescription entraînait le passage des canalisations sur deux parcelles voisines et obligeait la SCI à obtenir la création de servitudes ainsi que le démontre le plan de situation versé aux débats.
Cependant les deux propriétaires concernés ont refusé cette autorisation interdisant à la SCI la prairie de se conformer aux conditions prescrites par l'autorité administrative et en conséquence de réaliser son projet immobilier.
Or la condition suspensive consistait en l'obtention d'un permis de construire permettant au bénéficiaire de réaliser un groupe d'habitations.
L'impossibilité pour la SCI de se conformer aux prescriptions de l'autorisation de construire délivrée par la commune ne lui permet pas la réalisation de ce groupe d'habitations.
En l'absence d'un permis de construire permettant la réalisation du projet contractuellement défini, la condition suspensive n'est pas réputée accomplie déliant ainsi le promettant de son engagement.
Monsieur [S], seule partie engagée par l'acte du 15 juin 2006, est donc mal fondé à poursuivre l'exécution forcée de la vente en premier lieu parce que la condition suspensive est défaillie et en second lieu parce que le bénéficiaire, n'ayant aucune obligation d'acquérir le bien, n'a pas levé l'option permettant la réalisation de la promesse.
Aux termes de cette promesse l'indemnité d'immobilisation d'un montant de 30'000 € devait être restituée au bénéficiaire dans le cas où la non réalisation de la vente résultait de la défaillance d'une condition suspensive.
Tel est le cas en l'espèce et en conséquence la somme de 30'000 €
consignée en la comptabilité de Me [O], notaire à Millas, doit être restituée à la SCI la prairie.
La demande de dommages-intérêts des époux [S] au titre d'une perte de chance de vendre leur bien au même prix doit être écartée à défaut de démonstration d'une attitude fautive du bénéficiaire de la promesse puisque la condition suspensive est défaillie et qu'il n'avait aucune obligation d'acquérir le bien.
Depuis la mise en demeure du 8 janvier 2009 les époux [S] s'opposent abusivement à la restitution de l'indemnité d'immobilisation alors qu'après avoir consenti à la poursuite des relations contractuelles au-delà du terme de la promesse, ils ont constaté l'impossibilité pour le bénéficiaire de réaliser son projet immobilier et n'ont pas été destinataires de la part de la SCI de la levée d'option.
Ils ont ainsi privé la SCI de la disposition de cette somme et des intérêts que son placement aurait pu procurer et l'ont obligée à engager et poursuivre une longue procédure judiciaire pour faire valoir ses droits.
En conséquence ils doivent être condamnés à payer à la SCI la prairie la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau,
Donne acte à la SCI la prairie de son désistement de l'incident notifié le 26 septembre 2016.
Déboute les époux [S] de leurs demandes.
Dit que la condition suspensive relative à l'obtention d'un permis de construire permettant la réalisation d'un groupe d'habitations n'est pas accomplie.
En conséquence ordonne la restitution à la SCI la prairie de l'indemnité d'immobilisation d'un montant de 30'000 €, actuellement consignée en l'étude de Me [O], notaire à Millas.
Condamne les époux [S] à payer à la SCI la prairie la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts.
Condamne les époux [S] à payer à la SCI la prairie la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés tant en première instance qu'en cause d'appel.
Condamne les époux [S] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
BD