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08/11/2016 | FRANCE | N°14/04848

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1ère chambre c, 08 novembre 2016, 14/04848


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère Chambre C



ARRET DU 08 NOVEMBRE 2016



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04848







Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 AVRIL 2014

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 12/03696







APPELANTE :



S.A. THALACAP inscrite au RCS de Montpellier sous le numéro 387 675 507 prise en la personne de son représentant légal domic

ilié ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Nicolas JO...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 08 NOVEMBRE 2016

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/04848

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 AVRIL 2014

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 12/03696

APPELANTE :

S.A. THALACAP inscrite au RCS de Montpellier sous le numéro 387 675 507 prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SCHEUER, VERNHET ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Nicolas JONQUET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEE :

EURL LESAB prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Thierry BERGER de la SCP COSTE, BERGER, DAUDE, VALLET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Thierry CHIRON, avocat au barreau de DIJON, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 29 Août 2016 révoquée avant l'ouverture des débats par une NOUVELLE ORDONNANCE DE CLOTURE DU 19 Septembre 2016.

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 SEPTEMBRE 2016, en audience publique, Monsieur Philippe GAILLARD, président, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Madame Chantal RODIER, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

La SNC Thalabanyuls du groupe Symbiose a fait construire en 1990 un complexe de thalassothérapie à [Localité 3], comportant une résidence hôtelière, dont les appartements ont été commercialisés pour des investissements aux fins de défiscalisation.

Les acquéreurs des appartements ont consenti à la SA Thalacap un mandat de gestion le 27 novembre 1991 qui pouvait être transformé à l'issue d'un délai de cinq ans en bail commercial.

Ils ont signé le 7 février 1998 un deuxième mandat qui prévoit que le mandataire SA Thalacap pourrait opérer la transformation en bail commercial en levant l'option par l'envoi d'un courrier recommandé avec accusé de réception.

La SA Thalacap a levé l'option.

Saisi par l'un des propriétaires, la SARL Lesab le tribunal de commerce de Montpellier a par jugement du 2 juin 2010 notamment :

annulé le mandat de gestion conclu le 7 février 1998 ;

condamné la SA Thalacap à payer des sommes au titre des frais du mandat de gestion et de l'indemnité d'occupation, et de sa quote-part dans les résultats de la SEP regroupant les mandats de gestion de l'ensemble des investisseurs, dont le gérant est la SA Thalacap, sur la base du dépôt le 12 avril 2005 du rapport d'une expertise ordonnée par un jugement du 15 janvier 2003 ;

ordonné la restitution des clefs et fixé une indemnité d'occupation future ;

prononcé la révocation du premier mandat de gestion du 27 novembre 1991 aux torts de la SA Thalacap.

Par un arrêt du 5 juin 2012, la cour d'appel de Montpellier a notamment :

réformé le jugement seulement quant au montant de la condamnation au titre de la privation d'une quote-part de résultat, et à l'annulation du contrat du 7 février 1998 ;

constaté qu'à compter du 1er décembre 2002 la SA Thalacap est titulaire sur les locaux de la SARL Lesab d'un bail commercial pour un prix de loyer annuel conforme à l'évaluation du rapport d'expertise déposé le 12 avril 2005 (2672 € HT en début de bail), et fixé selon l'évaluation du même expert le prix de la quote-part indivise du fonds due à la SARL Lesab (1104 €).

Par acte du 17 août 2012, la SARL Lesab a fait délivrer à la SA Thalacap un commandement de payer les loyers depuis décembre 2002 visant la clause résolutoire.

Par acte du 14 septembre 2012, la SA Thalacap a assigné la SARL Lesab aux fins de nullité du commandement au motif qu'aucun bail commercial écrit avec une clause résolutoire n'a été régularisé, et qu'elle ne doit aucun loyer jusqu'au 5 juin 2012.

Un arrêt de cassation partielle du 4 février 2014 a annulé l'arrêt de la cour d'appel, seulement en ce qu'il a fixé le loyer annuel du bail depuis le 1er décembre 2002 et fixé le prix de la quote-part indivise due à la SARL Lesab, et a renvoyé l'affaire et les parties devant la même cour autrement composée.

La Cour de Cassation a considéré que la cour d'appel avait à tort fixé le loyer et le prix de cession des quotes-parts du fonds de commerce en fonction, non pas de l'excédent brut d'exploitation de la résidence comme stipulé au contrat, mais de celui réalisé sur les seules parts gérées par la SA Thalacap.

Le jugement rendu le 24 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Perpignan énonce dans son dispositif :

Juge que la SA Thalacap, en l'état de l'arrêt de cassation partielle, bénéficie d'un bail commercial depuis le 1er décembre 2002, et ne se trouve pas dès lors occupante sans droit ni titre.

Juge que la SA Thalacap ne peut invoquer l'autorité de la chose jugée par application du principe de la concentration des moyens pour s'opposer à son obligation de paiement de loyers.

Juge que le commandement de payer pouvait dès lors se fonder sur une créance de loyers résultant de la décision de la cour d'appel de Montpellier qui a autorité de la chose jugée et qui a reconnu l'existence d'un bail commercial à compter du 1er décembre 2002.

Juge cependant que le commandement, outre qu'il sollicite le paiement de loyers dont le montant n'est pas encore fixé, ne repose sur aucune clause résolutoire.

Déboute la SARL Lesab de ses demandes en paiement d'une indemnité d'occupation, et sur le cas échéant un sursis à statuer sur la résiliation.

Rejette la demande de la SA Thalacap en dommages-intérêts pour procédure abusive.

Condamne la SARL Lesab aux dépens.

Le jugement expose que la cassation partielle strictement limitée à la fixation du loyer annuel du bail liant les parties depuis le 1er décembre 2002, et du prix de la quote-part indivise due à la SARL Lesab, laisse une pleine autorité de la chose jugée par l'arrêt du 5 juin 2012 au rejet de la demande d'annulation du mandat de gestion du 7 février 1998, et à la constatation que la SA Thalacap est titulaire sur les locaux de la SARL Lesab d'un bail commercial.

Rappelant que le principe de l'autorité de la chose jugée affiné par la définition jurisprudentielle du principe de concentration des moyens implique la constatation d'une identité de droit avec la chose antérieurement jugée, le jugement constate que la cour d'appel n'était pas saisie par la prétention de la SAR Lesab en résiliation du bail pour défaut de paiement de loyers d'une demande de condamnation au paiement des loyers, alors que les indemnités d'occupation allouées par le jugement du tribunal de commerce du 2 juin 2010 avaient pour fondement la nullité du second mandat de gestion infirmée par l'arrêt du 5 juin 2012, de sorte que la SA Thalacap n'est pas fondée à invoquer l'autorité de la chose jugée pour s'opposer à une demande de paiement de loyers.

Le jugement déduit de l'absence de mise en 'uvre contractuelle d'un bail commercial écrit le défaut de clause résolutoire pouvant fonder la résolution de plein droit du contrat de bail, de sorte qu'en l'absence de résiliation il ne peut y avoir d'indemnité d'occupation.

La SA Thalacap a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 27 juin 2014.

La clôture d'abord prononcée par ordonnance du 29 août 2016 a été révoquée et prononcée à nouveau par ordonnance du 19 septembre 2016.

Les dernières écritures pour la SA Thalacap ont été déposées le 31 août 2016.

Les dernières écritures pour la SARL Lesab ont été déposées le 30 août 2016.

Le dispositif des écritures de la SA Thalacap énonce :

Déclarer recevables les conclusions de la SA Thalacap signifiées le 26 août 2016.

Déclarer régulière la communication de la pièce n°5 s'agissant d'une pièce connue de l'intimée qui a déjà été produite dans plusieurs instances opposant les mêmes parties.

Dans l'hypothèse où ses conclusions du 26 août seraient rejetées, rejeter également celles de l'intimée du 11 juillet 2016.

Réformer le jugement en ce qu'il a jugé que la SA Thalacap ne pouvait valablement invoquer l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel du 5 juin 2012 pour s'opposer au paiement des loyers, et en ce qu'il a rejeté la demande de nullité du commandement de payer visant la clause résolutoire.

Prononcer la nullité du commandement, après avoir constaté qu'aucun bail commercial écrit n'a été régularisé et qu'il n'existe aucune clause résolutoire.

Dire que la SA Thalacap ne doit aucun loyer jusqu'au 5 juin 2012.

Condamner l'intimée au paiement de la somme de 10 000 € de dommages-intérêts.

Dire que les demandes incidentes sont irrecevables, en ce que la résiliation du bail ne peut être prononcée pour défaut de paiement de loyers dont le montant n'est pas fixé, et que le fonds a bien fait l'objet d'une inscription au registre du greffe du tribunal de commerce.

Si la cour devait statuer sur les effets du congé, dire que le preneur a droit au bénéfice d'une indemnité d'éviction, condamner le bailleur au paiement d'une provision à concurrence de 150 000 €, ordonner une expertise judiciaire pour l'évaluation complète de l'indemnité.

Condamner l'intimée au paiement de la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

La SA Thalacap oppose au jugement qui rejette l'autorité de la chose jugée pour écarter la prétention au paiement des loyers que l'arrêt du 5 juin 2012 a définitivement rejeté cette prétention en relevant que le manquement du locataire à son obligation de payer le loyer n'apparaît pas suffisamment caractérisé, dès lors que la SARL Lesab a immédiatement après la notification de la levée d'option contestée l'existence du bail et n'a adressée à la SA Thalacap aucune mise en demeure, et en relevant que le principe de concentration des moyens n'autorise pas la SARL Lesab à réclamer au titre des loyers des sommes dont elle a été déboutée au titre d'indemnité d'occupation.

Il s'agit de la même cause de litige, seul le moyen diffère : loyer ou indemnité d'occupation.

Elle expose que l'arrêt de cette cour rendu le 28 janvier 2016 sur renvoi de la Cour de Cassation a jugé nouvelle et donc irrecevable :

la demande de paiement de loyers, alors qu'en première instance la SARL Lesab réclamait uniquement des indemnités d'occupation, et qu'il convient de retenir la même réponse, et qu'en tout état de cause la demande est atteinte par la prescription quinquennale,

la demande de validation du congé délivré le 28 mars 2014, et donc de la résiliation du bail et des indemnités d'occupation subséquentes,

la demande subsidiaire de résiliation judiciaire pour défaut de paiement des loyers après le commandement du 17 août 2012.

Elle indique que le fonds a fait l'objet d'une immatriculation au registre du commerce, et qu'il bénéficie de plein droit du statut des baux commerciaux et du droit au renouvellement du bail du fait de la mise en location-gérance depuis 2011.

Le dispositif de la SARL Lesab énonce :

Rejeter des débats la pièce n°5 de l'appelante ainsi que les conclusions notifiées le 26 août 2016.

Confirmer le jugement déféré, sauf en ce qu'il a débouté la SARL Lesab de la demande en paiement d'une indemnité d'occupation pour occupation sans droit ni titre, et en sursis à statuer sur la résiliation, et condamné la SARL Lesab aux dépens.

Fixer le montant des loyers dus par la SA Thalacap à la somme de 24 208,09 € HT augmentée de la TVA applicable pour la période du 1er décembre 2002 au 31 décembre 2013, de 2143,25 € HT augmentée de la TVA applicable pour la période du 1er janvier au 30 septembre 2014, date d'effet du congé signifié le 28 mars 2014.

En conséquence, condamner la SA Thalacap à payer la somme de 30 869,33 € TTC au titre du solde des loyers indexés pour la période du 1er décembre 2002 au 30 septembre 2014.

Dire que les condamnations au paiement des loyers antérieurs au commandement du 17 août 2012 porteront intérêt au taux légal à compter de cette date.

Dire que les intérêts seront capitalisés conformément à l'article 1154 du code de procédure civile.

Condamner la SA Thalacap à payer la somme de 704,85 € TTC au titre du prix de sa quote-part de fonds de commerce, augmenté des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Constater que la SA Thalacap est occupante sans droit ni titre depuis le 30 septembre 2014, date d'effet du congé délivré le 28 mars 2014, ordonner son expulsion et celle de tous occupants au besoin avec le concours de la force publique.

Fixer à la somme de 342,92 € TTC le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle à compter du 30 septembre 2014 jusqu'à libération effective des lieux par la remise des clefs.

Dans l'hypothèse où le congé serait jugé dépourvu d'effet, condamner la SA Thalacap à payer la somme mensuelle de 285,76 € TTC au titre des loyers indexés pour la période postérieure au 30 septembre 2014 jusqu'au prononcé de la résiliation du bail, et prononcer la résiliation aux torts de la SA Thalacap à compter de l'arrêt.

Dans tous les cas, ordonner l'expulsion sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la signification à partie de l'arrêt.

Fixer la même indemnité d'occupation jusqu'à la remise des clefs.

Condamner la SA Thalacap à payer une indemnité de 8500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La condamner aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et du congé, et les frais de signification et d'exécution de l'arrêt.

La SARL Lesab expose que le jugement du tribunal de commerce du 2 juin 2010 avait condamné la SA Thalacap à payer au titre d'indemnité d'occupation une somme de 15 639,80 € HT pour la période 1998 à 2002, et une somme de 29 841,03 € HT pour la période de 2003 au 31 mai 2009, et après cette date sur la base de la valeur locative retenue par l'expert judiciaire sur la base annuelle de 2672 HT.

L'arrêt de la cour d'appel du 5 juin 2012 a seulement transformé la qualification d'indemnité d'occupation en loyers.

La SARL Lesab a donc fait délivrer le 17 août 2012 un commandement visant la clause résolutoire contenue dans le projet de bail pour le paiement d'une somme de 36 073,66 € TTC arrêtée au 31 juillet 2012.

Elle se rapporte aux motifs pertinents du jugement du 24 avril 2014 qui a justement écarté l'autorité de la chose jugée sur une demande de paiement de loyers, et la cour de renvoi dans son arrêt du 28 janvier 2016 a considéré que les demandes en paiement de loyers constituaient des demandes nouvelles.

Elle fait observer que la SA Thalacap à elle-même reconnue devoir des loyers en demandant d'en fixer le prix avec une indexation conforme à l'indice du coût de la construction, sauf à se voir opposer sa propre contradiction (principe de l'estoppel).

Le jugement a justement considéré que l'absence de clause résolutoire modifiait seulement les effets du commandement sans pour autant affecter sa validité, de sorte que la condamnation de la SARL Lesab aux dépens de l'instance était inadéquate.

La SARL Lesab fonde sa créance de loyers et au titre de la quote-part indivise de fonds de commerce sur les montants fixés par l'arrêt définitif de la cour d'appel du 28 janvier 2016.

Le congé délivré à la SA Thalacap le 28 mars 2014 lui conteste le bénéfice du statut des baux commerciaux, alors que l'immatriculation produite ne mentionne pas l'établissement secondaire à [Localité 3] et qu'il ne lui a pas été notifié la location-gérance invoquée, mais se fonde également sur un motif grave et légitime de non-renouvellement résultant du défaut de paiement des loyers.

L'absence de paiement de loyers depuis maintenant environ 15 ans constitue par ailleurs un motif grave et suffisant d'un refus de renouvellement sans indemnité d'éviction si le bail commercial devait être retenu.

MOTIFS

Sur l'incident de procédure

L'intimée demande à la cour de rejeter des débats la pièce n°5 de l'appelante et ses conclusions notifiées le 26 août 2016, au motif d'une communication tardive en violation avec le principe du contradictoire au regard d'une première clôture des débats à la date du 29 août 2016.

La partie intimée invoque la violation du contradictoire sur le seul motif de la communication le 26 août 2016 d'une pièce nouvelle pourtant datée du 7 octobre 2014.

La pièce litigieuse consiste en un extrait de l'immatriculation au registre du commerce de la société appelante, et sa situation au répertoire sirène.

La cour observe que ces documents sont à la disposition publique de toute consultation sur les sites d'accès au greffe du tribunal de commerce, et particulièrement pour des sociétés dont le litige porte sur les renseignements de ces documents.

La cour observe également que ces documents répondent à une argumentation de l'intimée sur la délégation du bénéfice du statut des baux commerciaux, et que les parties argumentent respectivement sur cet objet du litige.

La cour constate en conséquence que cette communication même tardive n'a pas modifiée le débat dans une proportion de nature à porter atteinte au principe du contradictoire, et déboute l'intimée de sa demande de rejet de la pièce et des conclusions auxquelles elle est annexée.

Sur la chose jugée

La cour d'appel de Montpellier a rendu entre les mêmes parties le 28 janvier 2016 sur le renvoi de la Cour de Cassation un arrêt apportant nécessairement une autorité définitive de la chose jugée.

L'arrêt de cassation partielle du 4 février 2014 conduit à affecter à l'arrêt du 5 juin 2012 objet du pourvoi d'une autorité partielle de la chose jugée dans ses dispositions distinctes de la cassation prononcée.

La cour constate dans son arrêt du 28 janvier 2016 qu'elle n'est saisie par le renvoi que des actions en fixation du montant du loyer annuel du bail commercial, et de la quote-part revenant au propriétaire au titre du fonds de commerce par application de la clause du mandat de gestion du 7 février 1998 dont l'arrêt du 5 juin 2012 a rejeté la demande d'annulation.

L'arrêt du 28 janvier 2016 :

constate que les parties sont liées par un bail commercial à compter du 1er décembre 2002, dont le loyer annuel hors taxes s'élevait en début de bail à la somme de 2028,29 € et lors de son renouvellement le 1er décembre 2011 à la somme de 2857,67 € ;

fixe le prix de la quote-part indivise du fonds de commerce due par la SA Thalacap à la SARL Lesab à la somme hors taxes de 589,34 € évaluée au 1er décembre 2002.

L'arrêt du 5 juin 2012 objet de la cassation partielle conserve donc l'autorité de la chose jugée pour ses dispositions suivantes :

réforme le jugement du 2 juin 2010 quant à l'annulation du contrat conclu en février 1998 ;

constate l'extinction de la créance indemnitaire de la SARL Lesab relative à la gestion de l'exercice clos le 31 décembre 1992, dit que le quitus donné pour les exercices de 1993 à 1995 a pour effet de décharger la SA Thalacap de toute responsabilité dans l'accomplissement de sa mission, et condamne en conséquence la SA Thalacap à payer à la SARL Lesab 3579,32 € en réparation du préjudice lié à la quote-part de résultats dont elle a été privée du fait des fautes de gestion de son mandataire au titre des années 1996 et 1997.

Il en résulte que la cour confirme le jugement déféré dans cette instance d'appel du 24 avril 2014 en ce qu'il dit que la SA Thalacap bénéficiant d'un bail commercial depuis le 1er décembre 2002 n'est pas occupante sans droit ni titre.

Le jugement rejette ensuite par des motifs pertinents la prétention de la SA Thalacap d'opposer le principe de concentration des moyens à son obligation de paiement des loyers réclamés dans le commandement de payer du 17 août 2012 visant la clause résolutoire du bail, alors que les indemnités d'occupation allouées par le jugement du 2 juin 2010 avaient pour fondement la nullité du contrat de mandat de gestion de février 1998 infirmée par l'arrêt du 5 juin 2012, et que le bailleur n'avait pas réclamé en appel de condamnation au paiement des loyers.

Il en déduit à juste titre que le commandement de payer pouvait se fonder sur une créance de loyers résultant de l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 5 juin 2012 qui reconnaît l'existence d'un bail commercial à compter du 1er décembre 2002.

Sur la résiliation du bail

Dans le dispositif de ses dernières écritures, la SARL Lesab sollicite en premier lieu de constater la situation sans droit ni titre de l'occupant depuis le 30 septembre 2014, date d'effet du congé délivré le 28 mars 2014, puis à titre subsidiaire de prononcer la résiliation du bail aux torts de la SA Thalacap.

Il en résulte que la demande de la SA Thalacap de prononcer la nullité du commandement du 17 août 2012 n'a pas d'objet utile alors que le bailleur ne se prévaut aujourd'hui d'aucun effet de ce commandement sur la validité du bail.

La cour observe au surplus que la mention dans le commandement d'une clause résolutoire d'un bail qui n'a pas fait l'objet d'une formalisation écrite, et celle de loyers impayés dont le montant fixé par l'arrêt du 5 juin 2012 a été remis en cause par l'arrêt de cassation partielle, peuvent avoir pour conséquence de le priver d'effet sans pour autant fonder la nullité de l'acte.

Par acte du 28 mars 2014, la SARL Lesab a fait délivrer à son locataire la SA Thalacap un congé à l'échéance du 30 septembre 2014, au motif principal qu'elle dénie à la SA Thalacap le bénéfice du statut des baux commerciaux en ce que l'établissement à [Localité 3] ne figure pas sur l'extrait K bis, à titre subsidiaire sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction en raison du motif grave et légitime de l'absence de paiement des loyers depuis le 1er décembre 2002 malgré un commandement du 17 août 2012 resté sans effet.

Sur le premier motif, l'autorité de la chose jugée par l'arrêt définitif du 28 janvier 2016 que la SA Thalacap bénéficie d'un bail commercial à compter du 1er décembre 2002 ne permet plus de remettre en cause le bénéfice du statut des baux commerciaux.

Sur le motif subsidiaire, la cour doit faire l'appréciation du motif grave et légitime invoqué.

La cour observe que le bailleur fonde sur le même motif du défaut prolongé le paiement des loyers la demande de validation du congé à l'échéance du 30 septembre 2014, et sa demande subsidiaire de prononcer la résiliation du bail à la date de l'arrêt.

Les motifs confirmés du jugement déféré pour écarter l'argumentation de concentration des moyens pour échapper à l'obligation de paiement des loyers résultant d'un bail commercial bénéficiant aujourd'hui de l'autorité de la chose jugée conduisent à écarter également l'argumentation d'une demande nouvelle en appel.

La cour retient à ce titre les motifs pertinents du premier juge qui rejette la demande de sursis à statuer sur la résiliation, relevant qu'elle n'était pas expressément sollicitée en ce qu'elle dépendait pour aboutir de la fixation définitive du loyer par l'arrêt à venir de la cour d'appel de Montpellier sur renvoi de la Cour de Cassation.

Le jugement a d'ailleurs retenu la même incertitude sur le montant exact des loyers pour rejeter les effets utiles du commandement de payer du 17 août 2012.

Le montant du loyer a été définitivement fixé par l'arrêt de la cour de renvoi du 28 janvier 2016.

Si l'arrêt du 5 juin 2012 a pu rejeter une demande subsidiaire de résiliation du bail commercial pour défaut de paiement des loyers au motif que le bailleur avait contesté l'existence même du bail en refusant de signer l'acte le matérialisant, et qu'aucune mise en demeure de payer les loyers dus depuis le 1er décembre 2002 n'avait été adressé au locataire, il termine son motif en retenant que « le manquement du locataire à son obligation de payer le loyer n'apparaît donc pas, en l'état, suffisamment caractérisé ».

L'évolution de l'état du litige depuis l'arrêt du 5 juin 2012 permet à la cour d'observer que le locataire qui revendique le bénéfice du bail commercial depuis la première instance judiciaire devant le tribunal de commerce de Montpellier, et qui a obtenu ce bénéfice consacré à compter du 1er décembre 2002 par l'arrêt du 5 juin 2012, n'a exécuté le paiement que d'une faible partie de son obligation résultant de l'application contractuelle du bénéfice du bail commercial revendiqué et obtenu.

Le jugement déféré du 24 avril 2014 a justement retenu que le commandement de payer délivré le 17 août 2012 pouvait se fonder à défaut d'une clause résolutoire, et en présence d'un aléa judiciaire alors non résolu sur le montant exact du loyer, au moins sur le principe d'une créance de loyers qui résultait directement de la décision de la cour d'appel de Montpellier qui a reconnu l'existence du bail commercial.

L'acte délivré le 28 mars 2014 a pu fonder en conséquence un congé du locataire sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction sur la qualification de motif grave et légitime du non-paiement des loyers depuis le bénéfice d'un bail commercial le 1er décembre 2002, en application des dispositions de l'article L 145-17 du code de commerce.

La cour observe que le locataire dont le dispositif des dernières écritures ne conteste son obligation de paiement des loyers qu'antérieurement au 5 juin 2012 n'a pas davantage effectué un quelconque versement à ce titre après l'un ou l'autre des actes délivrés aussi bien le 17 août 2012 que le 28 mars 2014.

La résiliation du bail doit être constatée effective à la date d'effet du congé le 30 septembre 2014.

Sur les autres prétentions

La SARL Lesab fait une application exacte et non critiquée du montant fixé par l'arrêt du 28 janvier 2016 pour établir un calcul récapitulatif des loyers du 1er décembre 2002 au 30 septembre 2014, pour la somme totale de 32 029,85 €, dont elle déduit le montant acquitté de 1160,53 € pour fonder sa prétention au paiement d'une somme de 30 869,33 € TTC.

Cette prétention n'est pas contestable au regard de l'autorité de la chose jugée par les décisions définitives des arrêts rendus, celui du 5 juin 2012 en ce qu'il constate que la SA Thalacap est titulaire d'un bail commercial à compter du 1er décembre 2002, celui du 28 janvier 2016 en ce qu'il fixe le montant du loyer.

La condamnation portera intérêts au taux légal, avec le bénéfice de la capitalisation des intérêts échus pour une année entière, à compter du présent arrêt, y compris pour les montants des loyers antérieurs au commandement du 17 août 2012 privé d'effet par l'aléa judiciaire sur le montant.

La condamnation de la SA Thalacap au paiement du prix de la quote-part du fonds de commerce pour 704,85 € TTC, avec les intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, résulte également de l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 28 janvier 2016.

L'indemnité d'occupation jusqu'à libération des lieux sera fixée un montant mensuel de 285,76 € TTC.

Le prononcé d'une mesure d'astreinte pour la libération des lieux n'apparaît pas actuellement opportune.

La mention dans le dispositif de la SARL Lesab d'infirmer le débouté de sa demande en paiement d'une indemnité d'occupation, et en sursis à statuer sur la résiliation, est inopérante en ce que ces demandes ne sont pas réitérées en appel.

Il n'est pas inéquitable dans le contexte du litige de laisser à la charge des parties les frais non remboursables engagés en appel.

La SA Thalacap supportera la charge des dépens de l'appel.

Ils comprendront le coût de la signification du congé, mais pas celui du commandement de payer du 17 août 2012 délivré en application d'une clause résolutoire qui n'existait pas.

La cour n'infirme pas la condamnation aux dépens de première instance de la SARL Lesab, alors que le premier juge avait à juste titre pu rejeter la contestation de l'existence d'un bail commercial en application de l'arrêt de cassation partielle, et la demande en paiement de sommes sur le fondement d'un commandement privé d'effet.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Déboute la SARL Lesab de sa demande de rejet de la pièce n°5 produite par la SA Thalacap et des conclusions auxquelles elle est annexée ;

Confirme le jugement rendu le 24 avril 2014 par le tribunal de grande instance de Perpignan dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant en considération de l'évolution du litige :

Déboute la SA Thalacap de sa demande de prononcer la nullité du commandement du 17 août 2012 ;

Constate la résiliation du bail commercial à la date du 30 septembre 2014 ;

Ordonne l'expulsion de la SA Thalacap et de tout occupant de son chef dans le mois de la notification de cette décision, au besoin avec le concours de la force publique ;

Condamne la SA Thalacap à payer à la SARL Lesab :

au titre des loyers échus au 30 septembre 2014 la somme de 30 869,33 € TTC, avec les intérêts au taux légal à compter de cette décision, avec le bénéfice de la capitalisation des intérêts échus pour une année entière ;

au titre du prix de la quote-part indivise du fonds de commerce 704,85 € TTC, avec les intérêts au taux légal à compter de cette décision ;

une indemnité d'occupation jusqu'à libération effective des lieux pour un montant mensuel de 285,76 € TTC.

Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Thalacap aux dépens de l'appel, qui comprennent le coût du congé délivré par acte du 28 mars 2014.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

PG


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1ère chambre c
Numéro d'arrêt : 14/04848
Date de la décision : 08/11/2016

Références :

Cour d'appel de Montpellier 1D, arrêt n°14/04848 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-08;14.04848 ?
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