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01/03/2016 | FRANCE | N°15/05718

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section as, 01 mars 2016, 15/05718


Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section AS
ARRET DU 16 NOVEMBRE 2015
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 05718
Décision déférée à la Cour : Décision du 02 JUILLET 2015 CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DES PYRENEES ORIENTALES

DEMANDEUR AU RECOURS :

Madame Audrey France Marie-Laure Y...X.........66000 PERPIGNAN comparante, assistée de Maître PECHEVIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

EN PRESENCE DE :
LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DES PYRENEES ORIENTALES Palais de Justice CS 4001

7 66029 PERPIGNAN CEDEX représenté par Monsieur le bâtonnier BOXO, avocat au barreau des PYRENEES ORI...

Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1o Chambre Section AS
ARRET DU 16 NOVEMBRE 2015
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 05718
Décision déférée à la Cour : Décision du 02 JUILLET 2015 CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DES PYRENEES ORIENTALES

DEMANDEUR AU RECOURS :

Madame Audrey France Marie-Laure Y...X.........66000 PERPIGNAN comparante, assistée de Maître PECHEVIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

EN PRESENCE DE :
LE CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS DES PYRENEES ORIENTALES Palais de Justice CS 40017 66029 PERPIGNAN CEDEX représenté par Monsieur le bâtonnier BOXO, avocat au barreau des PYRENEES ORIENTALES

MINISTERE PUBLIC 1 Rue Foch 34000 MONTPELLIER représenté par Monsieur Pierre DENIER, avocat général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, Président de chambre Madame Corinne DESJARDINS, Conseillère Madame Caroline CHICLET, Conseillère Madame Brigitte DEVILLE, Conseillère Monsieur Thierry JOUVE, Conseiller

qui en ont délibéré.
L'affaire a été débattue en audience publique, le 12 octobre 2015, Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile,
GREFFIER :
Monsieur Dominique SANTONJA, greffier lors des débats
MINISTÈRE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public représenté lors des débats par Monsieur Pierre DENIER, avocat général.
ARRET :
- contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Yves BLANC-SYLVESTRE, président de chambre, et par Monsieur Dominique SANTONJA, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
DEBATS :
En audience publique, le 12 octobre 2015, les parties ayant donné leur accord.
L'affaire a été mise en délibéré au 16 novembre 2015.
Par courrier en date du 8 juin 2015 Madame Y...X...a demandé son inscription au barreau des Pyrénées Orientales en invoquant le bénéfice des dispositions de l'article 98 6ième du décret 91-1197 du 27/ 11/ 91 souhaitant bénéficier de la dispense de la formation théorique et pratique du CAPA ;
Elle indique que par arrêté en date du 11 septembre 2014 le conseil de l'Ordre a rejeté sa demande présentée au mois de juin 2014 et que la cour d'appel de Montpellier dans un arrêt en date du 2 mars 2015 a indiqué que la demande était prématurée de 7 mois ;
Elle indique que dans sa décision de rejet du 11 septembre 2014 le conseil de l'Ordre avait retenu que depuis l'obtention de son diplôme le 12 juin 2006 elle avait été employée en qualité de juriste à compter du mois de janvier 2009 soit pendant une durée inférieure à 6 ans ; que de juin 2006 à février 2007 elle a été employée comme employée de bureau et de mars 2007 à décembre 2008 en qualité de secrétaire juridique ; qu'elle ne peut donc justifier d'une pratique professionnelle en qualité de juriste pour la période allant du mois de juin 2006 au mois de décembre 2008 ;
Elle indique qu'à ce jour elle a exercé les fonctions de juriste à plein temps du mois de janvier 2009 au mois de juin 2015 soit pendant 6 ans et 6 mois ; qu'elle a aussi exercé les fonctions de secrétaire juridique du mois de juin 2007 au mois de décembre 2008 soit pendant une durée de 1 an et 6 mois ;
Elle indique qu'ensuite de sa demande en date du 8 juin 2015 le conseil de l'ordre des Pyrénées Orientales a pris un arrêté en date du 2 juillet 2015 rejetant sa demande, arrêté régulièrement notifié et dont elle a relevé appel par lettre en date du 17 juillet 2015 ;
Dans le cadre de ses écritures en date du 21 septembre 2015 régulièrement portées à la connaissance de Madame Y...X..., l'Ordre des avocats du barreau des Pyrénées Orientales demande à la cour de débouter Madame Y...X...en ses demandes et de confirmer l'arrêté en date du 2 juillet 2015 ;
Le ministère public, dans le cadre de ses écritures en date du 22 septembre 2015, demande à la cour de confirmer la décision entreprise
Dans le cadre de ses écritures en date du 1er octobre 2015 Madame Y...X...demande à la cour de faire droit à sa demande ;
La cour rappelle que la demande de Madame Y...X...est faite sur la base des dispositions de l'article 98 6o du décret du 27 novembre 1991 qui dispense de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes salariés d'un avocat, d'une association ou d'un cabinet d'avocats, d'un office d'avoué ou d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle en cette qualité postérieurement à l'obtention du titre ou du diplôme mentionné au 2o de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1971 ; que l'article 1 précité prévoit l'obtention au moins d'une maîtrise en droit ou de titre ou diplômes reconnus comme équivalents ;
Il n'est pas contesté par les parties que Madame Y...X...a obtenu le diplôme de MASTER 1 de droit économique et relations d'affaires au mois de juin 2006 et qu'il convient de rechercher si elle remplit les conditions de huit ans au mois d'exercice professionnel de la profession de juriste à compter de cette date et ce jusqu'au jour de sa demande soit le 5 juin 2015 ;
Il n'est pas contesté non plus que Mme Y...X...a exercé la fonction de juriste au sein du cabinet d'avocat B...et ASSOCIES depuis le 1er janvier 2009 ainsi qu'en atteste ses bulletins de salaire ; cette fonction et l'exercice de cette fonction n'est pas remis en cause par le conseil de l'ordre des Pyrénées Orientales ; cependant et à ce jour au regard de ce seul emploi Madame Y...X...ne remplit pas les conditions de huit ans d'exercice ;
Il convient donc de rechercher si entre le mois de juillet 2006 et le 31 décembre 2008 Mme Y...X...a exercé des fonctions de juriste de nature à être prise en compte au titre des huit ans exigés par le décret de 1991 ;
Madame Y...X...indique avoir été salarié de manière continue dans le cabinet d'avocat B...depuis cette date et avoir exercé des fonctions effectives de juriste alors même que la qualification du poste occupé mentionnée sur son bulletin de salaire ne reprend la réalité de la fonction occupée puisqu'il y est mentionné la qualité de secrétaire juridique ;
Le conseil de l'ordre, tant dans sa décision de rejet que dans ses écritures développées devant la cour indique : " il résulte de l'examen des contrats de travail et des bulletins de salaire que Madame Y...X...a exercé à temps très partiel de 10 heures puis de 15 heures par semaine comme employée de bureau du 1er août 2006 au 1er février 2007 ; le travail à raison de 10 ou 15 heures par semaines ne permet pas d'acquérir la pratique professionnelle requise, condition de dispense de la formation et du certificat d'aptitude ;
Il est constant aussi que par avenant en date du 1er juin 2007 Madame Y...X...a occupé un emploi à temps plein en qualité de secrétaire juridique ;
Le conseil de l'ordre fait soutenir que les pièces communiquées par Madame Y...X...ne sauraient remettre en cause les pièces établies par l'employeur qui n'ont pas fait l'objet de contestation de la part de la salariée ; que les attestations remises par les cabinets d'expertise comptable ne peuvent pas justifier de la qualité juridique du travail accompli car il s'agit d'un professionnel du chiffre et non pas du droit ; qu'il en va de même pour les clients du cabinet ;

La cour rappelle qu'en droit la demanderesse doit rapporter la preuve que les fonctions qu'elle a exercée s'analyse bien en celles d'un assistant juriste qualifié pour des taches d'analyse et de conception ainsi que pour la résolution de problèmes juridiques complexes ; que la preuve de l'effectivité de ces fonctions peut être rapportée par tous moyens en ce y compris par l'attestation des avocats qui ont employé la demanderesse ;

La cour constate qu'il résulte de l'attestation de Maître A..., membre associé et gérant de la SCP d'avocat B...et ASSOCIES que Madame Y...X...a occupé les fonctions de juriste en droit des affaires dans leur cabinet depuis le mois de juillet 2005 ; qu'à compter de cette date elle a eu en charge des dossiers dont elle a assuré la gestion globale ; que dans le cadre de ses fonctions elle est assistée par plusieurs collaborateurs qui travaillent sous son contrôle ;
La cour constate aussi qu'il résulte de l'attestation de Maître B...qu'il a été demandé à Madame Y...X...d'effectuer depuis le mois de juillet 2005 une activité de nature conceptuelle dans la gestion des dossiers avec une autonomie intellectuelle et cela indépendamment de toute considération de coefficient ou de qualification inscrits sur ses bulletins de salaire, sur son contrat de travail et sur les avenants y afférents ; qu'il résulte aussi de l'attestation de Mo C...qu'il a collaboré avec Madame Y...X...au sein du cabinet sur de nombreux dossiers et qu'elle st une technicienne du droit de très bon niveau dans le cadre de l'établissement d'actes et de suivi de dossiers ; qu'elle a toujours été en contact direct avec des clients pour les dossiers qui lui ont été confiés ; que Maître D... certifie qu'au regard des dossiers confiés et des taches effectuées Madame Y...X...exerce bien la fonction de juriste depuis 2006 ;
La cour constate que la réalité des taches décrites par les avocats cités est confirmée par les attestations des clients dont Madame Y...X...avait la charge au sein du cabinet B...; que contrairement à ce que soutenu par le conseil de l'ordre des Pyrénées Orientales la qualité d'expert comptable ou de " simples clients " d'un cabinet d'avocat n'enlève rien à la sincérité de ce témoignage et à la réalité des faits constatés et attestés dans le document remis à Mme Y...X...pour décrire la nature et la qualité professionnelle des rapports existants entre eux dans le cadre des taches effectuées ;
La cour dira aussi que le conseil de l'ordre des Pyrénées Orientales ne peut tirer argument de la seule qualification juridique portée sur les bulletins de salaire de Madame Y...X...et sur le fait qu'elle n'ait jamais contesté devant une juridiction cette " fausse qualification " alors même que seule Madame Y...X...peut éventuellement arguer de ce fait et qu'ensuite il est démontré par les pièces produites par Madame Y...X...qu'elle a effectivement et réellement occupé les fonctions de juriste au sein de la SCP B...et ASSOCIES à compter du 1er juin 2007 à temps plein ; que par suite et au jour de sa demande en date du 5 juin 2015 elle remplissait bien la condition d'exercice pendant une durée de 8 ans de la fonction de juriste au sein d'un cabinet d'avocat ;
Par voie de conséquence la cour infirmera la décision du conseil de l'ordre des avocats des Pyrénées Orientales et ordonne à ce conseil de procéder à l'inscription de Madame Y...X...en qualité d'avocat au tableau du barreau des Pyrénées Orientales ;
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort,
Reçoit Madame Y...X...en son appel et le déclare régulier en la forme,
Au fond,
Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
Dit que Madame Y...X...remplit bien les conditions de huit années d'exercice de la fonction de juriste au sein d'un cabinet d'avocat ;
Dit Madame Y...X...bien fondée en sa demande d'inscription en qualité d'avocat au tableau du barreau des Pyrénées Orientales à charge pour elle de satisfaire à l'examen de déontologie et de réglementation professionnelle en application de l'article 98-1 du décret du 27 novembre 1991 ;
Ordonne à l'Ordre des avocats du barreau des Pyrénées Orientales de procéder à cette inscription.

LE GREFFIERLE PRESIDENT DE CHAMBRE

Dominique SANTONJA Yves BLANC-SYLVESTRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section as
Numéro d'arrêt : 15/05718
Date de la décision : 01/03/2016

Analyses

La « pratique professionnelle » d'au moins huit ans requise par l'article 88 6º du décret du 27 novembre 1991, qui dispense de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes salariés d'un avocat ou d'un cabinet d'avocats, s'entend de fonctions effectives d'assistant juriste qualifié pour des tâches d'analyse et de conception et pour la résolution de problème juridiques complexes, et ce indépendamment de toute considération de coefficient ou de qualification inscrite sur ses bulletins de salaire et sur son contrat de travail. Le demandeur peut en rapporter la preuve par tous moyens, y compris les attestations des avocats qui l'ont employé. Ainsi, justifie remplir cette condition la salariée d'un cabinet d'avocats qui, nonobstant la mention sur son contrat de travail d'un emploi en qualité de secrétaire juridique, justifie par les attestations de plusieurs associés, collaborateurs, expert comptable et clients de ce cabinet que pendant au moins 8 ans elle a eu en charge de nombreux dossiers dont elle a assuré la conception et la gestion globale en toute autonomie intellectuelle, qu'il s'agissait d'une technicienne du droit de très haut niveau dans le cadre de l'établissement d'actes et du suivi des dossiers, qu'elle a toujours été en contact direct avec les clients et était assistée par plusieurs collaborateurs qui travaillaient sous son contrôle et qu'elle a effectivement occupé pendant une durée de 8 ans les fonctions de juriste dans ce cabinet d'avocats.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2016-03-01;15.05718 ?
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