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03/09/2015 | FRANCE | N°12/05353

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1o chambre section ao1, 03 septembre 2015, 12/05353


Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section AO1
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2015
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05353
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 JUIN 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER No RG 10/ 02301

APPELANTE :
Compagnie d'assurances SMABTP prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège social 114, Avenue Emile Zola 75015 PARIS représentée par Me Sophie ORTAL de la SCP CASCIO, CASCIO ORTAL, DOMMEE, MARC, avocat a

u barreau de MONTPELLIER substitué par Me Armand CASCIO, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME...

Grosse + copie délivrées le à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section AO1
ARRÊT DU 3 SEPTEMBRE 2015
Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05353
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 JUIN 2012 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER No RG 10/ 02301

APPELANTE :
Compagnie d'assurances SMABTP prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités audit siège social 114, Avenue Emile Zola 75015 PARIS représentée par Me Sophie ORTAL de la SCP CASCIO, CASCIO ORTAL, DOMMEE, MARC, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Armand CASCIO, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur Laurent X...né le 15 Juin 1973 à AMBILLY (Haute-Savoie) de nationalité française ...34570 SAUSSAN représenté par Me Alain COHEN BOULAKIA de la SELARL JURIPOLE SELARL, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Michel THEVENIN, avocat

Madame Hélène Y...épouse X...née le 2 Juin 1972 à PARIS (75011) (75) de nationalité française ...34570 SAUSSAN représenté par Me Alain COHEN BOULAKIA de la SELARL JURIPOLE SELARL, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Michel THEVENIN, avocat

SAS MIALANES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège 1, rue de la Garenne ZI 34740 VENDARGUES représentée par Me Marie Camille PEPRATX NEGRE de la SCP Eric NEGRE, Marie Camille PEPRATX NEGRE, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER, assistée de Me Ardoine CLAUZEL, avocat plaidant au barreau de la Lozère

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 26 Mai 2015

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le MARDI 16 JUIN 2015 à 8H45 en audience publique, Madame Anne BESSON, Présidente ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Madame Anne BESSON, Présidente de Chambre Madame Caroline CHICLET, Conseillère Madame Brigitte DEVILLE, Conseillère qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Marie-Françoise COMTE

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE,
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ; le délibéré initialement prévu au 8 juillet 2015 ayant été prorogé au 3 septembre 2015 ;

- signé par Madame Caroline CHICLET, Conseiller, et par Marie-Françoise COMTE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***

FAITS ET PROCEDURE

Par acte authentique du 18 janvier 2008, les époux A... ont vendu aux époux X...une maison d'habitation à Saussan ayant fait l'objet d'une déclaration d'achèvement de travaux le 24 janvier 1999 et d'un certificat de conformité le 8 février 2001. Le 18 mars 2008, les époux X...ont fait une déclaration de sinistre à la compagnie AXA assureur du constructeur pour des fissures profondes sur les poutrelles composant le plancher hourdi de la maison ; Les poutrelles avaient été fournies au constructeur par la société Mialanes.

Les époux X...ont assigné le 14 avril 2010 la SAS Mialanes et son assureur la SMABTP en indemnisation sur la base d'une expertise ordonnée sur l'assignation en référé du 10 avril 2008 et dont le rapport a été déposé au mois d'août 2009.
Par jugement du 4 juin 2012 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Montpellier a, au vu des articles 1792-4 et 1794-4-1 du code civil :
- condamné la SAS Mialanes et la compagnie SMABTP à payer solidairement aux époux X...la somme de 23 148, 01 ¿ avec intérêts au taux légal à compter de ce jour et une somme de 2 000 ¿ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté du surplus.

La SMABTP a régulièrement interjeté appel le 10 juillet 2012.
Vu les conclusions du 19 septembre 2014 de la SMABTP,
Vu les conclusions du 29 avril 2013 des époux X...,
Vu les conclusions du 24 mai 2015 de la SAS Mialanes,
Vu l'ordonnance de clôture du 26 mai 2015.

M O T I V A T I O N

Les époux X...ont fondé leur demande en principal sur l'article 1792-4 du code civil et au subsidiaire sur la responsabilité contractuelle de droit commun.

Sur la prescription décennale

La SAS Mialanes oppose la prescription décennale. Les poutrelles ont été vendues en 1998 par la société Mialanes et mise en ¿ uvre sur la villa en 1998 ; les travaux de construction ont été achevés le 24 janvier 1999, date de la déclaration d'achèvement des travaux avec prise de possession par le maître d'ouvrage en novembre 1999.

Les époux X...ont interrompu la prescription décennale par leur assignation en référé-expertise le 28 avril 2008 délivrée à la société Mialanes ; ils l'ont régulièrement assignée au fond le 14 avril 2010. La prescription décennale pour l'application de l'article 1792-4 du code civil, fondement de la demande des époux X...à l'encontre de la société Mialanes, n'est donc pas acquise.

Sur les conditions de l'article 1792-4 du code civil Contrairement à ce que soutient vainement la société Mialanes, il n'y a nulle obligation de mettre en cause l'entrepreneur pour rechercher la responsabilité du fabricant, car les époux X..., maîtres d'ouvrage, disposent d'une action directe à l'encontre du fabricant des poutrelles incriminées.

L'expert a constaté que cinq poutrelles sous la cuisine et la poutrelle sous le séjour présentent des fractures de semelles dans le sens longitudinal au droit des fers filants inférieurs, le béton d'enrobage s'étant détaché des aciers qui sont visibles par endroits, que ces désordres apparus en 2003 sont importants et évolutifs et qu'ils compromettent à terme la solidité d'une partie du plancher de l'habitation, mais que les désordres n'affectent pas l'habitabilité de la maison ; Il conclut que la cause des désordres est un enrobage insuffisant des aciers filants des poutrelles, qui se corrodent, il s'agit d'une non-conformité de l'enrobage au CTP Planchers et donc aux règles de l'art imputable à la SAS Mialanes qui a confectionné les poutrelles autour des aciers fournis par une entreprise tierce.

Il résulte des conclusions techniques de l'expert, qui ne font l'objet d'aucune critique, que le fabricant des poutrelles, la société Mialanes, est seul concerné par ce désordre en raison de la mauvaise fabrication des poutrelles.
La présomption de responsabilité de l'article 1792-4 du code civil s'applique à un élément d'équipement conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance et qui a été mis en ¿ uvre sans modification et conformément aux règles édictées par le fabricant. Les poutrelles fabriquées par la société Mialanes sont proposées sur catalogues, et référencées en fonction de leur épaisseur et de leur longueur et sont vendues par différents fabricants dont la société Mialanes ; elles n'ont donc pas été fabriquées pour répondre en l'état aux nécessités spécifiques du chantier de la maison des époux A... et sont des matériaux indifférenciés pouvant être utilisés pour des locaux autres.

La société Mialanes n'a pas établi de plan de pose comme le soutiennent vainement les époux X..., puisque le document versé intitulé « projet de plan » daté du 19 mars 1998 émane non pas de la société Mialanes mais de la société ACOR, qui a fourni les aciers, et il n'a pas été utilisé par Monsieur B..., entrepreneur qui a réalisé le chantier des époux A..., ainsi que celui-ci l'a déclaré en cours d'expertise.
Le seul découpage aux mesures demandées à la société Mialanes ne suffit pas pour qualifier les poutrelles d'EPERS en l'absence de toute spécification originale du produit lui-même.
Dans ces conditions, les poutrelles ne satisfont pas à la condition de spécificité pour répondre à un usage précis et déterminé sur la maison des époux A... et elles ne relèvent pas de l'article 1792-4-2 du code civil et la responsabilité de la société Mialanes, fabricant, ne peut être retenue sur ce fondement. Les époux X...seront donc déboutés de leur demande principale par infirmation du jugement.

Sur la responsabilité contractuelle

Les époux X...recherchent subsidiairement la responsabilité contractuelle de droit commun de la SAS Mialanes, fabricant, fondée sur la non-conformité des poutrelles livrées.
La société Mialanes ne peut se prévaloir de la prescription de l'article L 110-4 du code de commerce qui, fondée sur une présomption de paiement, ne concerne que les actions en paiement.
Le défaut de fabrication des poutrelles les rendant impropres à leur destination constitue le vice caché défini à l'article 1641 du code civil, qui est donc l'unique fondement possible de l'action formée contre le fabricant, la société Mialanes. L'action en responsabilité contractuelle de l'article 1147 du code civil est donc irrecevable.

L'action en garantie des vices cachés devait donc être intentée dans le délai de l'article 1648 du code civil, soit dans le délai de deux ans de la découverte du vice.

Il résulte de l'expertise que les époux A... se sont aperçus des fissurations des poutrelles en 2003 lors d'une visite dans le vide sanitaire, ils ont fait constater les fissures par Monsieur B...leur entrepreneur, qui a estimé que les fissures ne nécessitaient pas de mesures particulières.
La garantie des vices cachés a donc été actionnée tardivement par les époux X...qui ont assigné en référé-expertise la société Mialanes le 18 avril 2008. L'action en garantie des vices cachés est donc prescrite.

P A R CES M O T I F S

La cour,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que les poutrelles livrées en 1998 sur le chantier de la maison A... ne sont pas des EPERS au sens de l'article 1792-4 du code civil,
Déboute les époux X...de leur demande principale fondée sur l'article 1792-4 du code civil,
Juge que l'action en responsabilité contractuelle des époux X...s'analyse en une action en garantie pour vice caché de l'article 1641 du code civil,
Déclare prescrite cette action en garantie des vices cachés,
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne les époux X...en tous les dépens, qui comprendront les frais d'expertise, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE, P/ LA PRESIDENTE,
AB


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1o chambre section ao1
Numéro d'arrêt : 12/05353
Date de la décision : 03/09/2015

Analyses

1º La présomption de responsabilité de l'article 1792-4 du code civil s'applique à un élément d'équipement conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l'avance et qui a été mis en ¿uvre sans modification et conformément aux règles édictées par le fabricant. Ne satisfont pas à la condition de spécificité des poutrelles proposées sur catalogues, référencées en fonction de leur épaisseur et de leur longueur et vendues par différents fabricants. En effet, elles n'ont pas été fabriquées pour répondre en l'état aux nécessités spécifiques du chantier sur lequel elles ont été posées et sont des matériaux indifférenciés pouvant être utilisés pour des locaux autres. Le seul découpage aux mesures demandées au fabricant ne suffit pas pour les qualifier d'EPERS en l'absence de toute spécification originale du produit lui-même. 2º Le défaut de fabrication des poutrelles les rendant impropres à leur destination constitue le vice caché défini à l'article 1641 du code civil, qui est donc l'unique fondement possible de l'action formée contre le fabricant. L'action en responsabilité contractuelle de l'article 1147 du code civil est donc irrecevable.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 04 juin 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2015-09-03;12.05353 ?
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