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05/11/2013 | FRANCE | N°12/05168

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre, 05 novembre 2013, 12/05168


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre ARRET DU 05 NOVEMBRE 2013 Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05168

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 JUIN 2012 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 2012004023

APPELANT : Monsieur Abdelaziz X...... 34080 MONTPELLIER représenté par Me Pierre GUIGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2012/ 17578 du 27/ 11/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIME : Maître Christine Y..

. ès qualités de Mandataire Liquidateur de la SARL ESKA CONSTRUCTION ... 34000 MONTP...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre ARRET DU 05 NOVEMBRE 2013 Numéro d'inscription au répertoire général : 12/ 05168

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 JUIN 2012 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 2012004023

APPELANT : Monsieur Abdelaziz X...... 34080 MONTPELLIER représenté par Me Pierre GUIGUES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2012/ 17578 du 27/ 11/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIME : Maître Christine Y... ès qualités de Mandataire Liquidateur de la SARL ESKA CONSTRUCTION ... 34000 MONTPELLIER représentée par Me Morgane SALVIGNOL GUILHEM, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 10 Septembre 2013
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 OCTOBRE 2013, en chambre du conseil, Monsieur Daniel BACHASSON, président, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, président Monsieur Hervé CHASSERY, conseiller Monsieur Jean-Luc PROUZAT, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

Ministère public : L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.

ARRET :
- contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, président, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES La société à responsabilité limitée Eska Construction, au capital social de 7 500 euros, ayant son siège social à Montpellier et une activité de travaux de maçonnerie, a été constituée le 19 mai 2003. Sur déclaration de son état de cessation des paiements, elle a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 11 janvier 2010.

Selon exploit du 28 février 2012, Mme Y..., liquidateur judiciaire, a fait assigner M. X..., gérant de la société Eska Construction, ainsi que cette dernière, devant le tribunal de commerce de Montpellier en vue, à titre principal, de l'extension à sa personne de la liquidation judiciaire, et, à titre subsidiaire, de sa responsabilité pour insuffisance d'actif et de sa condamnation au paiement total ou partiel de celle-ci évaluée à 427 682, 86 euros. Par jugement contradictoire du 19 juin 2012, le tribunal a prononcé l'extension à M. X... de la procédure de liquidation judiciaire de la société Eska Construction et l'a également condamné au paiement de la totalité de l'insuffisance d'actif soit 427 682, 86 euros.

M. X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement en vue de son infirmation et du rejet des demandes. Il soutient que :- la confusion des patrimoines invoquée n'est pas établie puisque la pratique de chèques sans ordre encaissés par des tiers est légale, que le matériel n'a pas disparu, que sa rémunération était faible et que la comptabilité de l'entreprise pour l'exercice 2008 montre que son patrimoine personnel était distinct du patrimoine social,

- aucune faute de gestion ne peut lui être imputée.
* ** *

Mme Y..., ès qualités, a conclu à la confirmation du jugement entrepris. Elle fait valoir que :

- l'extension de la liquidation judiciaire de la société à M. X... est justifiée par la confusion de leurs patrimoines résultant de relations financières anormales (disparition du matériel, factures de complaisance, versements financiers sans contrepartie mis en évidence au cours d'un contrôle fiscal) et de la confusion de leurs comptes (absence de comptabilité probante),- ces mêmes faits emportent la responsabilité de M. X... pour insuffisance d'actif,- le passif déclaré s'élève à 429 004, 03 euros et l'actif, à 1 321, 17 euros.

* ***

Le ministère public a donné, le 2 avril 2013, son avis consistant à s'en rapporter à justice.
* ** *

C'est en cet état que la procédure a été clôturée par ordonnance du 10 septembre 2013.
MOTIFS DE LA DECISION Attendu que, dans son assignation introductive d'instance du 28 février 2012, le liquidateur judiciaire a saisi le tribunal de commerce, à titre principal, d'une demande d'extension de la liquidation judiciaire de la société Eska Construction à M. X..., et, à titre subsidiaire, d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif envers M. X... ; Que, le tribunal de commerce, en faisant droit aux deux demandes, principale et subsidiaire, a méconnu l'étendue de sa saisine et violé les dispositions des articles 4 et 5 du code de procédure civile, étant au demeurant observé que ces deux actions ont des fondements et des objets différents et ne peuvent se cumuler ; Que le liquidateur judiciaire, qui paraît oublier en cause d'appel ses prétentions initiales, ne peut donc solliciter la confirmation de la décision entreprise, qui a statué ultra petita ;

1/ Sur la demande d'extension de la liquidation judiciaire de la société Eska Construction à M. X... Attendu que cette demande est fondée sur la confusion des patrimoines des deux personnes résultant de l'imbrication de leurs comptes et de relations financières anormales ; Attendu que l'imbrication des comptes résulte d'un désordre rendant impossible la détermination des droits de chacune des personnes concernées ;

Que les relations financières anormales sont caractérisées par des transferts d'actifs ou de services rendus sans contrepartie ; Attendu que le liquidateur judiciaire invoque, au titre des relations financières anormales, la disparition du matériel de la société Eska Construction et l'existence de factures de complaisance ; Attendu que, concernant le matériel de l'entreprise, le véhicule de marque Iveco avait été vendu le 6 octobre 2009 à M. Z..., et l'outillage ¿ de faible valeur ¿ se trouve au domicile de M. A..., ainsi qu'il en a témoigné le 23 avril 2012 ; Qu'en tout état de cause, cette prétendue disparition ne démontre pas l'existence de relations financières anormales entre la société et son gérant ; Attendu que, concernant les factures de complaisance, il a été établi, à l'occasion de la vérification de comptabilité de la société Eska Construction diligentée par les services fiscaux de l'Hérault du 5 mars au 8 juillet 2009 et portant sur les exercices 2006 et 2007, que certains chèques ne mentionnaient pas comme bénéficiaires les artisans indiqués dans la comptabilité, mais d'autres tiers dont l'un des associés de la société, des salariés et M. X..., ainsi que des entreprises sous-traitantes (pp. 3, 5, 6, 7, 8 et 9 de la proposition de rectification suite à une vérification de comptabilité adressée le 9 juillet 2009 par la direction des services fiscaux à la société Eska Construction) ; Que si ces paiements ont partiellement bénéficié ¿ à concurrence de 10 442 euros en 2006 ¿ à l'appelant, l'intimée ne rapporte pas la preuve qu'ils constituent des transferts d'actifs ou de services rendus sans contrepartie ; Attendu que, concernant le grief d'imbrication des comptes, le liquidateur judiciaire se borne à invoquer l'absence de toute comptabilité probante pour les exercices 2008 et 2009 de la société Eska Construction ;

Que, toutefois, en l'absence d'autres éléments, il ne peut être déduit de ce défaut de comptabilité régulière une confusion des comptes de la société et de ceux de son dirigeant ; Attendu qu'ainsi, la preuve d'une confusion des patrimoines de la société Eska Construction et de M. X... n'étant pas rapportée, c'est par une fausse appréciation que le premier juge lui a étendu la liquidation judiciaire de la société ;

2/ Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif Attendu que le passif définitivement admis de la société Eska Construction s'élève à 429 004, 03 euros, alors que l'actif recouvré a été de 1 321, 17 euros ;

Que l'insuffisance d'actif de donc de 427 682, 86 euros ; Attendu qu'il ressort de la vérification de comptabilité susvisée que, d'une part, la comptabilité de la société Eska Construction n'est pas probante (p. 3) et, d'autre part, que la société a émis des factures de complaisance correspondant à des livraisons ou des prestations réellement effectuées mais par une personne autre que l'auteur des facture, ou des factures fictives qui ne correspondent pas à des livraisons ou des prestations réellement effectuées (p. 9) ; Attendu que l'absence de tenue d'une comptabilité régulière et la méconnaissance par le dirigeant de la société de ses obligations fiscales ayant entraîné un redressement de 304 674 euros pour l'exercice 2006 et de 235 927 euros pour l'exercice 2007, constituent des fautes de gestion au sens de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

Que ces fautes de gestion ont contribué à la totalité de l'insuffisance d'actif de la société en ce que la tenue d'une comptabilité régulière aurait permis à son dirigeant de connaître l'état de l'entreprise qu'il dirigeait et en ce que les fraudes réalisées par le biais de factures de complaisance ou de fausses factures ont entraîné des redressements fiscaux importants auxquels la société n'a pu faire face, ce qui a conduit son dirigeant à déclarer, le 8 janvier 2010, son état de cessation des paiements, suivi de l'ouverture, le 11 janvier 2010, d'une procédure de liquidation judiciaire sans période d'observation ; Attendu que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. X... à supporter la totalité de l'insuffisance d'actif de la société Eska Construction ; Attendu que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par M. X... ;

PAR CES MOTIFS, La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après débats en chambre du conseil, Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a étendu la liquidation judiciaire de la société Eska Construction à M. X.... Et, statuant à nouveau, Rejette la demande d'extension de la liquidation judiciaire.

Le confirme pour le surplus en ce qu'il a condamné M. X... à supporter l'intégralité de l'insuffisance d'actif de la société Eska Construction. Condamne M. X..., qui est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, aux dépens de première instance et d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 12/05168
Date de la décision : 05/11/2013

Analyses

En faisant droit aux deux demandes d'une assignation introductive d'instance, principale et subsidiaire, à fondements et objets différents, le tribunal de commerce a méconnu l'étendue de sa saisine, violé les dispositions des articles 4 et 5 du Code de procédure civile et statué ultra petita.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Montpellier, 19 juin 2012


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2013-11-05;12.05168 ?
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