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11/04/2013 | FRANCE | N°11/03328

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0126, 11 avril 2013, 11/03328


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1e Chambre Section AO1
ARRÊT DU 11 AVRIL 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03328

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 AVRIL 2011 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 09/ 1077

APPELANT :
Monsieur Francis X... né le 18 Janvier 1952 à LECTOURE (32700) de nationalité française...... 09250 LUZENAC représenté par la SCP Eric NEGRE, Marie Camille PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER

INTIME :
ETAT FRANCAIS représenté par Madame l'AGENT JUDICIAIRE du TRESOR domicili

ée es qualité en ses bureaux sis Bâtiment Condorcet-Teledoc 331-6 rue Louise Weiss 75703 PARIS CED...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1e Chambre Section AO1
ARRÊT DU 11 AVRIL 2013
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 03328

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 AVRIL 2011 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN No RG 09/ 1077

APPELANT :
Monsieur Francis X... né le 18 Janvier 1952 à LECTOURE (32700) de nationalité française...... 09250 LUZENAC représenté par la SCP Eric NEGRE, Marie Camille PEPRATX NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER

INTIME :
ETAT FRANCAIS représenté par Madame l'AGENT JUDICIAIRE du TRESOR domiciliée es qualité en ses bureaux sis Bâtiment Condorcet-Teledoc 331-6 rue Louise Weiss 75703 PARIS CEDEX 13 représenté par Me Elsa VILLEMEUR, avocat substituant la SCP DENEL, GUILLEMAIN, RIEU, DE CROZALS, TREZEGUET, avocats au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE de CLOTURE du 29 JANVIER 2013

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le MARDI 19 FEVRIER 2013 à 8H45 en audience publique, Madame Sylvie CASTANIÉ, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Madame Anne BESSON, Président de Chambre Monsieur Luc SARRAZIN, Conseiller Madame Sylvie CASTANIÉ, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Marie-Françoise COMTE

LE MINISTERE PUBLIC :
L'affaire a été communiquée au ministère public le 4 avril 2012, qui a fait connaître son avis.

ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Madame Anne BESSON, Président de Chambre, et par Marie-Françoise COMTE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS-PROCÉDURE-MOYENS et PRÉTENTIONS des PARTIES :
Francis X... assigne, selon acte du 9 mars 2009, devant le Tribunal de grande instance de PERPIGNAN pour obtenir réparation des préjudices subis par lui du fait d'un dysfonctionnement des services de la justice, au visa des articles 6, 1 et 13 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et de l'article L. 141-1 du Code de l'Organisation Judiciaire.
Par jugement en date du 28 avril 2011, cette juridiction :
constate la prescription des demandes relatives à l'immeuble de SAINT-CYPRIEN et aux vols,
se déclare incompétente pour statuer sur les questions relatives à la carte d'invalidité et à la procédure URBAIN,
rejette l'ensemble des autres demandes indemnitaires,
condamne Francis X... à payer une amende civile de 1 000 €,
ordonne la communication du jugement au service chargé du recouvrement de l'amende civile,
condamne Francis X... à verser à l'État français, représenté par l'agent judiciaire du Trésor, la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamne Francis X... aux dépens de l'instance.

Francis X... relève appel de ce jugement selon déclaration au greffe déposée le 10 mai 2011.

Dans ses dernières écritures reçues par le RPVA le 22 janvier 2013, Francis X... conclut à l'infirmation du jugement entrepris. Il demande que soient constatées, à titre principal, l'inapplicabilité de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, relatif à la prescription et, subsidiairement, l'interruption de la prescription et l'existence d'une force majeure. Toutes ces demandes portant sur des faits survenus à partir de 2006 sont recevables. Il doit être jugé que l'État français est responsable des dysfonctionnements du système judiciaire et qu'il doit réparer l'intégralité de ses préjudices évalués à hauteur de 2 631 471 €. L'État français représenté par l'agent judiciaire du Trésor, doit, en outre, être condamné à lui payer la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Dans ses dernières écritures reçues par le RPVA le 21 janvier 2013, l'État français conclut à la confirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions et à la condamnation de Francis X... à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est en date du 29 janvier 2013.

S U R C E :

Sur la RECEVABILITÉ :
Selon l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, « sont prescrites au profit de l'État, des départements et des communes sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans, à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. ».
Ce texte qui fait référence à une créance détenue sur l'État est sans application tant qu'un juge ne s'est pas prononcé sur la responsabilité de l'État et sur l'octroi d'une indemnité réparatrice à la charge de celui-ci.
La fin de non-recevoir tirée par l'État français de la prescription de l'action doit en conséquence être écartée.

Sur le FOND :
L'article L. 141-1 du Code de l'Organisation Judiciaire dispose que l'État est tenu de réparer les dommages causés par le fonctionnement défectueux du service de la justice. Sauf dispositions particulières, cette responsabilité n'est engagée que par une faute lourde ou par un déni de justice.
Selon L. 141-3 du même code, il y a un déni de justice lorsque les juges refusent de répondre aux requêtes ou ils négligent de juger les affaires en état et en tour d'être jugées.
La faute lourde s'entend de toute déficience caractérisée par un fait ou une série de faits traduisant une inaptitude du service public de la justice à remplir la mission dont il est investi, alors que le déni de justice englobe dans sa définition tout manquement de l'État à son devoir de protection juridictionnel de l'individu.
Francis X... expose qu'il a déposé des plaintes auprès de la gendarmerie de SAINT CYPRIEN (Pyrénées-Orientales) pour des vols et un abus de confiance qui, soit n'ont pas été enregistrées, soit ont été classées sans suite.
Les pièces du dossier établissent que ces dépôts de plainte ont bien été enregistrés par les services compétents courant 1994 et 1995, contrairement aux affirmations de l'appelant et qu'ils ont été classés sans suite.
Francis X... a par ailleurs adressé une lettre au Parquet de PERPIGNAN le 28 février 2006, également classée sans suite.
L'action en responsabilité fondée sur l'article L. 141-1 précité ne saurait avoir pour effet de remettre en cause le principe de l'opportunité des poursuites appartenant au Parquet.

Francis X... n'est pas, par ailleurs, fondé à se prévaloir du non-traitement par la justice de plaintes pour violences volontaires et abus de confiance, alors que ces faits ont donné lieu à des décisions de condamnation prononcées à son profit.
S'agissant de la saisine de la Commission d'indemnisation des victimes d'infraction, il est établi que le Tribunal de Police de PERPIGNAN a, par jugement du 2 février 1998, condamné Marie-Thérèse A... du chef de violences volontaires ayant entraîné une incapacité de travail inférieure à huit jours, à une peine d'amende et l'a, en outre, condamnée à payer à Francis X..., partie civile, la somme de 3 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 1 000 F en application de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
La Commission d'indemnisation des victimes d'infraction, saisie par Francis X..., a, par décision du 11 juillet 2005, ordonné une mesure d'expertise médicale et a, par la suite, suivant décision du 11 juin 2007, constaté que l'intéressé ne répondait pas aux convocations de l'expert et l'a en conséquence débouté de ses demandes.
Francis X... échoue ainsi dans la démonstration d'un manquement du service public de la justice de ce chef.
Le grief articulé par Francis X..., s'agissant de l'attribution d'une carte d'invalidité et de pertes financières subies en raison de l'empêchement de création d'une officine de pharmacie par un tiers auquel il avait avancé des sommes d'argent met en cause le fonctionnement d'Administrations et de la justice administrative, de sorte que les juridictions de l'ordre judiciaire, saisies sur le fondement des articles l. 141-1 et L. 141-3 du Code de l'Organisation Judiciaire sont incompétentes pour connaître des manquements allégués, au profit des juridictions administratives.
Francis X... se plaint, en outre, de ne pouvoir contester la saisie pratiquée sur sa pension de retraite car il ne détient pas le jugement ayant autorisé cette mesure.

Il doit être observé que Francis X... dont les griefs, à cet égard, sont vagues et imprécis, ne caractérise pas une faute lourde ou un déni de justice de la part des services judiciaires étrangers au fait qu'il ne soit pas détenteur de la décision à l'origine de la saisie.
Rien ne permet, par ailleurs, à Francis X... d'affirmer que des pièces concernant le dossier B..., ouvert dans le cabinet d'un juge d'instruction du Tribunal de PERPIGNAN, ont disparu.
Il n'est pas démontré que la mutation du magistrat en charge de cette affaire ait retardé l'avancement du dossier qui a eu lieu dans des délais dont la durée n'est pas anormale, s'agissant d'une instruction pour abus de confiance ouverte contre une personne en fuite.
Francis X... se plaint également du non-remboursement de ses frais de déplacement exposés en sa qualité de témoin dans deux affaires d'instruction.
Ces faits de paiements tardifs ou d'absence de paiement, à supposer établis, ne sauraient caractériser une faute lourde ou un déni de justice.
Francis X... ne démontre pas, enfin, qu'il a informé les autorités judiciaires françaises de son changement d'adresse.
Il n'est pas établi, en toute hypothèse, que cette circonstance ait eu pour effet de retarder le traitement de ses procédures ou de certaines d'entre elles.
En l'absence de démonstration d'une faute lourde ou d'un déni de justice commis par le service public de la justice, les demandes indemnitaires formées par Francis X... en réparation de ses préjudices matériels, de son préjudice moral et de la perte de chance de s'installer en Polynésie française doivent être rejetées.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé dans ses dispositions de ce chef.
Francis X... qui succombe dans ses prétentions, doit être débouté de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné sur ce fondement à payer à l'État français, représenté par l'agent judiciaire du Trésor, la somme de 2 000 €.

P A R C E S M O T I F S :
LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a constaté la prescription des demandes de Francis X... relatives à l'immeuble de SAINT CYPRIEN (Pyrénées-Orientales) et aux vols et statuant à nouveau de ce chef :
Rejette la fin de non-recevoir tirée par l'État français, représenté par l'agent judiciaire du Trésor, de la prescription de l'action en application de l'article 1 de la loi du 31 décembre 1968,
Déboute Francis X... de ses demandes jugées à tort prescrites,
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses autres dispositions, et y ajoutant :
Déboute Francis X... de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile et le condamne, sur ce fondement, à payer à l'État français représenté par l'agent judiciaire du Trésor public, la somme de 2 000 €,
Condamne Francis X... aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0126
Numéro d'arrêt : 11/03328
Date de la décision : 11/04/2013

Analyses

Selon l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, « sont prescrites au profit de l'État, des départements et des communes sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans, à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Ce texte, faisant référence à une créance détenue sur l'État, est sans application tant qu'un juge ne s'est pas prononcé sur la responsabilité de l'État et sur l'octroi d'une indemnité réparatrice à la charge de celui-ci. Ainsi, doit être écartée la fin de non-recevoir tirée par l'État français de la prescription de l'action en application de l'article 1 de la loi du 31 décembre 1968.


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Perpignan, 28 avril 2011


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2013-04-11;11.03328 ?
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