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25/01/2012 | FRANCE | N°10/08228

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4o chambre sociale, 25 janvier 2012, 10/08228


Jonction avec le numéro 10/ 8734

BR/ YR

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale
ARRÊT DU 25 Janvier 2012

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 08228
ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : sur arrêt COUR D'APPEL DE TOULOUSE DU 22 avril 2009- Arrêt du 28 SEPTEMBRE 2010 COUR DE CASSATION-No RG1728 f-d

APPELANT :
Monsieur Jacques X... ... 09200 SAINT GIRONS Représentant : la SCP SABATTE-L'HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEES :
SARL AMBULANCES COUSERANNAISES, prise en la personne de son représenta

nt légal 4 Route de Toulouse 09190 SAINT LIZIER Représentant : Me Jean NEU (avocat au barreau de PARIS)

CO...

Jonction avec le numéro 10/ 8734

BR/ YR

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale
ARRÊT DU 25 Janvier 2012

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 08228
ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : sur arrêt COUR D'APPEL DE TOULOUSE DU 22 avril 2009- Arrêt du 28 SEPTEMBRE 2010 COUR DE CASSATION-No RG1728 f-d

APPELANT :
Monsieur Jacques X... ... 09200 SAINT GIRONS Représentant : la SCP SABATTE-L'HOTE (avocats au barreau de TOULOUSE)

INTIMEES :
SARL AMBULANCES COUSERANNAISES, prise en la personne de son représentant légal 4 Route de Toulouse 09190 SAINT LIZIER Représentant : Me Jean NEU (avocat au barreau de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 945-1 du Code de Procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 DECEMBRE 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre et Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller, chargés d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller Madame Françoise CARRACHA, Conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Brigitte ROGER ARRÊT :
- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Yves ROLLAND, Président de chambre, et par Mme Brigitte ROGER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* **
EXPOSE DU LITIGE

M. Jacques X... était embauché le 19 septembre 2000 par la SARL Ambulances couserannaises (la société) en qualité de chauffeur ambulancier dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel qui prenait fin en novembre 2003 à la suite de sa démission.
Il était ré-embauché le 12 juin 2004 en qualité de « chauffeur ambulancier-groupe 9- coefficient 140 V » dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel stipulant sur la durée hebdomadaire de travail qu'elle était fixée à " 20, 30 heures/ semaine soit 88 heures par mois sachant que le temps plein de l'entreprise est de 35 heures par semaine " et sur la répartition des horaires :
" La répartition des horaires est la suivante (une semaine de 20 h et l'autre de 24h) :
- Lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi (1 semaine sur 2) : 08h00- 12h00.
À la demande de l'employeur, le salarié pourra être amené à effectuer des heures complémentaires dans la limite de 10 % de 88 heures par mois soit 8, 8 heures par semaine.
Les horaires de travail peuvent être modifiés suivant le travail la veille pour le lendemain. (...)
Les horaires du présent contrat ne pourront être modifiés que dans les circonstances suivantes (...)
Les horaires seront donc :
- Lundi, mardi, mercredi, vendredi, samedi (1 semaine sur 2) : 14 h00-18 h00 ".
Par lettre recommandée avec AR du 2 avril 2005, M. X... s'adressait à son employeur en ces termes : " Je soussigné demande mon licenciement de l'emploi de chauffeur que j'occupe dans votre entreprise. Je demande la mise en congé des jours légaux soit 17 jours qui tiendront lieu de préavis et ce à compter du lundi 4 avril 2005 (…) Je me réserve le droit d'informer l'inspection du travail sur les agissements suivants (…) ".
La société lui ayant répondu qu'il ne lui était " pas possible de (vous) licencier à votre demande, n'ayant à ce jour rien à vous reprocher au point de vue travail ", il répondait le 13 avril ".../... vous signalez mon absence injustifiée depuis le 2 avril, date à laquelle j'ai réclamé un solde de congés annuels. Jusqu'à ce jour aucun courrier n'en aura contesté le droit, la présente ne précise pas non plus. Soucieux de quitter l'entreprise pour les motifs que vous connaissez, je me réserve de les justifier auprès de votre inspecteur du travail et réitère de ce fait ma demande de licenciement.../... ".
Convoqué le 2 mai à un entretien préalable, M. X... était licencié par LR AR du 13 mai 2005 pour faute grave en raison de ses « absences non justifiées pendant 3 semaines-courriers incohérents ».
Par requête reçue au greffe le 24/ 10/ 2005, M. X... saisissait le conseil de prud'hommes de Foix qui, par jugement du 17 janvier 2008, jugeait que le courrier du 2 avril 2005 ne s'analysait pas en une prise d'acte de la rupture et ordonnait la réouverture des débats sur les autres demandes.
Ce jugement était infirmé par un arrêt rendu par la cour d'appel de Toulouse le 22 avril 2009, lui-même cassé " dans toutes ses dispositions " par un arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 28 septembre 2010 au visa des articles 1315 du code civil, L. 3123-14 du code du travail et 12. 4 de l'accord-cadre relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire.
Par déclarations reçues au greffe de la cour d'appel respectivement les 18 octobre 2010 (no RG 10/ 08228) et 4 novembre 2010 (no RG 10/ 8734), M. X... d'une part, la société d'autre part, saisissaient la cour d'appel de ce siège désignée comme cour de renvoi.
M. X... soutient que le courrier du 2 avril 2005 s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail laquelle doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison des manquements de l'employeur en matière de respect des horaires de travail et de paiement des heures complémentaires, qu'il était en permanence à la disposition de son employeur, que les deux contrats successifs doivent être requalifiés à temps complets et conclut à la réformation du jugement du conseil de prud'hommes et à la condamnation de la société à lui payer :
• 531, 23 € d'indemnité compensatrice de préavis outre 53, 12 € au titre des congés payés afférents à ce préavis ;
• 14 677, 64 € de dommages-intérêts pour licenciement abusif représentant 12 mois de salaire ; • 29 147, 84 € de rappel de salaires pour l'ensemble de la période contractuelle outre 2914, 78 € de congés payés à ce titre ; • 611, 78 € représentants 17 jours de congés payés non rémunérés et la journée du 1er avril 2005 ; • 7338, 74 € d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ; • 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société fait valoir qu'en demandant son licenciement le salarié n'a pas pris acte de la rupture, qu'il n'a plus mis les pieds dans l'entreprise depuis le 1 avril 2005 ce qui justifiait son licenciement pour absences injustifiées, qu'il n'a jamais été dans son intention de modifier l'horaire de travail du jour au lendemain mais qu'elle se devait de tenir compte dans la répartition de l'horaire de travail des particularismes liés à la fonction d'ambulancier, que l'intéressé n'était pas à sa disposition permanente et a quitté l'entreprise pour des raisons personnelles, qu'il a toujours été payé de ce qui lui était du dans les termes du contrat et conclut au débouté des demandes et à la condamnation de l'appelant à lui payer 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère au jugement du conseil de prud'hommes et aux conclusions écrites auxquelles elles se sont expressément rapportées lors des débats.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la rupture.

La " prise d'acte " est un mode autonome de rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié qui emporte la cessation immédiate et définitive de toute relation de travail.
En demandant par deux courriers envoyés à 11 jours d'intervalle à être licencié, le délai séparant les demandes devant être pris en compte au titre des " congés payés ", M. X... n'a à aucun moment pris l'initiative de rompre unilatéralement le contrat de travail ; quand bien même il aurait eu des griefs à l'encontre de son employeur qui auraient pu justifier cette initiative.
Les demandes liées à la rupture du contrat de travail doivent en conséquence être rejetées, le salarié ne contestant pas les motifs du licenciement qui lui a été notifié le 2 mai 2005.
Sur l'horaire de travail.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié au regard notamment des dispositions des articles D. 3171-2 et D. 3171-8 du dit code.
Il résulte des dispositions de l'article L 3123-14 du code du travail que le contrat à temps partiel doit mentionner, outre la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
L'existence d'un contrat écrit mentionnant la répartition de l'horaire de travail entre les jours de la semaine ne permet pas au salarié de se prévaloir d'une présomption de travail à temps complet.
Pour autant il est en droit de prouver que d'une part cette répartition n'était pas respectée, que d'autre part il était placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et était tenu de se tenir en permanence à la disposition de l'employeur.
S'agissant du second contrat travail, qui est le seul sur les conditions d'exécution duquel M. X... s'explique même si sa demande en rappel de salaires porte sur l'ensemble de la période travaillée, il résulte de ses termes mêmes que :
- la durée de travail hebdomadaire annoncée (20, 30h) ne correspond pas à l'horaire prévu par la répartition (1 semaine de 20 h et 1 semaine de 24h en alternance) ;
- si l'horaire théorique est fixé le matin (8h- 12h), l'employeur peut le modifier " la veille pour le lendemain " de telle façon qu'il passe l'après-midi (14h- 18h) ;
- le salarié pourra être amené à effectuer 8, 8 h complémentaires par semaine.
Il s'en déduit que le salarié, bien qu'embauché à mi-temps, était dans l'incapacité de connaître à l'avance son horaire de travail effectif et devait donc se tenir en permanence à la disposition de la société sans pouvoir travailler pour un autre employeur.
Du reste la lecture des " feuilles de route " régulièrement communiquées confirme cette variabilité de l'horaire de travail qui changeait d'un jour sur l'autre et pouvait être soit le matin, soit l'après-midi, soit à la mi-journée.
La requalification à temps complet du contrat pour la période du 12 juin 2004 au 1er avril 2005 est donc justifiée et il y a lieu de faire droit à la demande de rappel de salaires correspondante soit 4635, 22 € outre 463, 52 € au titre des congés payés, en brut.
Le surplus de la demande en rappel de salaires n'est pas justifié et doit en conséquence être rejeté, étant précisé que M. X... ne peut à la fois prétendre à une indemnité compensatrice de congés payés et au paiement des jours de congés qu'il s'est octroyé d'office.

Sur le travail dissimulé.

Il résulte des dispositions de l'article L8223-1 du code du travail qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours dans les conditions de l'article L8221-3 (travail dissimulé par dissimulation d'activité) ou en commettant les faits prévus à l'article L8221-5 (travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié) a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié (L8221-5) le fait pour tout employeur, soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10 relative à la déclaration préalable à l'embauche, soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2 relative à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie, soit de ne pas accomplir auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales les déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci.
Le rapprochement entre les feuilles de route régulièrement communiquées et les bulletins de salaire démontrent que si pendant l'exécution du 1er contrat de travail rompu à l'initiative du salarié en novembre 2003 l'employeur réglait les heures complémentaires sous forme de « primes exceptionnelles », il en allait différemment pour le 2ième contrat de travail rompu par le licenciement du 13 mai 2005.
En effet les fiches de paies éditées pendant la période du 12 juin 2004 au 1er avril 2005 font apparaître les heures complémentaires effectuées, de telle sorte que le salarié ne peut prétendre qu'il y eut dissimulation d'activité.
Il y a donc lieu de rejeter la demande présentée de ce chef.

PAR CES MOTIFS
La cour statuant dans les dossiers no 10/ 8228 et 10/ 8/ 1734 ;
Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Foix statuant en formation de départage le 17 janvier 2008 en ce qu'il a jugé que le salarié n'avait pas pris acte de la rupture du contrat de travail et rejeté toutes les demandes présentées de ce chef ;
Y ajoutant ;
Requalifie en contrat de travail à temps complet le contrat de travail à temps partiel signé entre les parties le 12 juin 2004 ;
Condamne la SARL Ambulances couserannaise à payer à M. X... 5098, 74 € de rappel de salaires, y compris l'incidence des congés payés, en brut, outre les intérêts au taux légal à compter du 27/ 10/ 2005, date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation valant demande en justice ;
Rejette les demandes en rappel de salaires au titre du premier contrat et du chef de travail dissimulé ;
Rejette les demandes principales et incidentes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4o chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/08228
Date de la décision : 25/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Analyses

pourvoi T1215957 DESCOUS


Références :

ARRET du 19 juin 2013, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 juin 2013, 12-15.957, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2012-01-25;10.08228 ?
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