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21/12/2011 | FRANCE | N°11/00032

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4o chambre sociale, 21 décembre 2011, 11/00032


SD/ RBI
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale
ARRET DU 21 DECEMBRE 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00032
Arrêt no :
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 DECEMBRE 2010- TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE PYRENEES ORIENTALES-No RG 20801030

APPELANT :
Monsieur Bernard X... ... 66000 PERPIGNAN Représentant : Me Jean-pierre JOUGLA (avoué à la Cour)

INTIMEE :
CARSAT SUD-EST 35, rue George 13386 MARSEILLE CEDEX 20 Représentant : Me CASTAN substituant Me Françoise AURAN-VISTE (avocat au b

arreau de BEZIERS)

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 NOVEMBRE 2011, en audie...

SD/ RBI
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
4o chambre sociale
ARRET DU 21 DECEMBRE 2011

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 00032
Arrêt no :
Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 DECEMBRE 2010- TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE PYRENEES ORIENTALES-No RG 20801030

APPELANT :
Monsieur Bernard X... ... 66000 PERPIGNAN Représentant : Me Jean-pierre JOUGLA (avoué à la Cour)

INTIMEE :
CARSAT SUD-EST 35, rue George 13386 MARSEILLE CEDEX 20 Représentant : Me CASTAN substituant Me Françoise AURAN-VISTE (avocat au barreau de BEZIERS)

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 17 NOVEMBRE 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre Monsieur Robert BELLETTI, Conseiller Madame Gisèle BRESDIN, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier

ARRET :
- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre, et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* ** EXPOSE DU LITIGE
Monsieur Bernard X... né le 21 juin 1936 à Sétif (Algérie), rapatrié de ce pays en 1964, est titulaire d'une pension personnelle depuis le 1er juillet 1996.
Le 29 septembre 1995 il a déposé, au titre de la loi no 85-1274 du 04 décembre 1985 portant amélioration des retraites des rapatriés, une demande de rachat de cotisations au titre de l'assurance vieillesse pour les périodes d'octobre à décembre 1959, janvier à décembre 1960, janvier à septembre 1961, et juillet à décembre 1963.
Une notification d'admission au rachat lui a été adressée le 24 septembre 1997 mentionnant le montant total du rachat égal à 50 353, 00 Francs, et une date de forclusion fixée au 24 septembre 2001 en application de l'article R. 742-39 du code de la sécurité sociale.
Par courrier daté du 31 octobre 2001, la CRAM Sud-Est a avisé Monsieur X... que la totalité de la dette (50 353, 00 Frs) n'ayant pas été réglée avant le 24 septembre 2001 son dossier était annulé.
Il a été répondu à cette lettre, par Monsieur X..., le 30 novembre 2001 lequel ne contestant pas l'absence de règlement a demandé, en se prévalant de la loi de 1985, que l'intégralité du rachat de ses cotisations soit pris en charge par l'Etat, sollicitant en outre qu'aux périodes précédemment citées soient rajoutées celles d'octobre 1961, novembre 1961 à avril 1963, mai à juillet 1963, et janvier à mai 1964.
Contestant la mesure du 31 octobre 2001, Monsieur X... a saisi le 17 décembre 2001 la commission de recours amiable qui par décision motivée du 21 mars 2002 a rejeté, comme mal fondée, sa réclamation ; l'intéressé s'étant gardé de la contester devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.
Le 30 novembre 2003 Monsieur X... a rempli une nouvelle demande de validation de périodes de salariat au titre de l'assurance vieillesse, qui a été reçue par la Caisse le 08 décembre 2003.
Cette demande formulée dans le cadre de la loi no64-1330 du 26 décembre 1964 sur la prise en charge et revalorisation de droits et avantages sociaux consentis à des Français ayant résidé en Algérie porte sur les périodes de janvier à septembre 1957, juillet à septembre 1958, juillet à septembre 1959, octobre 1959 à octobre 1961, novembre 1961 à avril 1963, et mai à décembre 1963.
Les périodes couvrant les années 1957 à 1961 ont été validées à titre gratuit donnant lieu à une révision des droits de Monsieur X... à effet du 1er janvier 2004 ; pour les périodes postérieures à l'indépendance de l'Algérie Monsieur X... a bénéficié d'une admission à rachat à titre onéreux.
A réception de la notification de révision datée du 06 février 2008, Monsieur X... a saisi le 11 février 2008 la commission de recours amiable en sollicitant la révision de son avantage depuis le 1er juillet 1996, date d'entrée en jouissance de sa pension.
La commission a rejeté le 19 juin 2008 sa demande, considérant que la date du 1er janvier 2004 avait été justement retenue dès lors que Monsieur X... avait déposé le 08 décembre 2003 sa seconde demande de validation des périodes de salariat exercées en Algérie.
Monsieur X... a contesté cette décision devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pyrénées-Orientales le 11 septembre 2008, qui par jugement rendu le 03 décembre 2010 l'a débouté de sa demande au motif qu'il n'avait pas au 1er juillet 1996, date à laquelle il était titulaire d'une pension personnelle, formulé de demande de rachat, celle-ci n'ayant été faite que le 30 novembre 2003.
Appelant du jugement Monsieur X... fait valoir qu'il a bien formé une demande de prise en compte de sa période d'activité salariale en Algérie dès la constitution de son dossier de retraite le 29 septembre 1995.
Il soutient que l'article 7 de la loi du 04 décembre 1985, lequel dispose qu'aucun délai n'est opposable à la présentation des demandes de validation des périodes d'activité en Algérie tant en application de la loi de 1964 que de celle de 1985, déroge aux dispositions générales de l'article R. 742-28 du code de la sécurité sociale.
Ce faisant il considère que la date d'effet de la révision du montant de sa pension après rachat de périodes de salariat doit être fixée au 1er juillet 1996, d'autant qu'il assure que la Caisse a failli à son obligation d'information et se trouve être à l'origine des retards et atermoiements que le traitement de son dossier a connus.
Il conclut à l'infirmation du jugement déféré, à la recevabilité de son recours, demande qu'il soit dit que la date d'effet pour la révision de ses droits à la retraite est fixée au 1er juillet 1996, et la CRAM Sud-Est condamnée à lui verser les arriérés.

La CARSAT du Sud-Est (ex CRAM) soutient in limine litis que Monsieur X... s'est pourvu devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, en contestation de la décision du 19 juin 2008, au-delà du délai de deux mois ;
Sur le fond elle ne discute pas que la première demande de rachat a bien été souscrite le 29 septembre 1995, admise le 24 septembre 1997, mais annulée le 24 septembre 2001 à raison " de la négligence de Monsieur X... qui n'a pas soldé son premier rachat dans le délai de quatre ans imparti par les textes ".
Elle conclut à la confirmation du jugement déféré et à la condamnation de Monsieur X... à lui payer la somme de 1500, 00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives, la Cour se réfère aux conclusions notifiées par les parties, auxquelles elles ont expressément déclaré se rapporter lors des débats.
SUR QUOI
Sur la forclusion
Pas plus qu'en première instance, la Caisse n'est à même de communiquer en appel le justificatif de La Poste permettant d'établir que la décision de la commission de recours amiable aurait été notifiée à Monsieur X... le 24 juin 2008, tel que soutenu.
La Cour confirmera le tribunal des affaires de sécurité sociale en ce qu'il a déclaré recevable le recours introduit par ce dernier le 11 septembre 2008.
Sur la demande de Monsieur X...
Il convient d'opérer une distinction entre les textes de 1964 et 1965 d'une part, et la loi de 1985 d'autre part.
- La loi de 1964 :
Les textes spécifiques relatifs aux rapatriés d'Algérie (loi no 64-1330 de 1964 et son décret d'application no 656-742 de 1965) concernent la validation gratuite ou onéreuse de cotisations en vertu de l'affiliation, à posteriori, au régime général de la sécurité sociale Française d'assurance vieillesse pour les périodes d'activité antérieures à l'indépendance de l'Algérie, soit avant le 1er juillet 1962 selon l'article 1 de la loi de 1964.
L'article 2 du décret d'application de 1965, en vigueur et applicable à la cause, dispose que " les périodes ainsi validées ouvrent droit, dans les conditions prévues au livre III, titre II, chapitre V et VI, du code de la sécurité sociale aux avantages de vieillesse prévus par les chapitres V et VI précités ".
L'ancien code de la sécurité sociale de 1956, pris en ses articles 331 à 359 qui fixent notamment la liquidation de la retraite à 60 ans (art. 331, 343 et 345) est ainsi applicable pour la période antérieure au 1er juillet 1962.
Dès lors les articles R. 742-28 et R. 742-39 de l'actuel code de la sécurité sociale, relatifs à l'assurance volontaire et créés postérieurement (par le décret no 85-1353 du 17 décembre 1985), ne peuvent trouver application en l'espèce.
- La loi de 1985 :
La loi no 85-1274 du 04 décembre 1985 prévoit que " les personnes visées à l'article 1er... bénéficient, en ce qui concerne le risque vieillesse, des dispositions de la loi no 65-555 du 10 juillet 1965 accordant aux Français exerçant ou ayant exercé à l'étranger une activité professionnelle salariée, ou non salariée, la faculté d'accession au régime volontaire vieillesse, sans que les délais prévus aux articles 3 et 7 de cette loi leur soient applicables " (art. 2 al. 1er).
La loi de 1985 institue donc un cas spécifique d'assurance volontaire dérogatoire et plus favorable, qui s'applique spécifiquement aux rapatriés des anciennes colonies Françaises ; alors que la loi de 1965 établit un régime général d'assurance volontaire pour tous travailleurs salariés ou assimilés, avec soumission de ces derniers aux délais, fixés par décret.
En conséquence pour les périodes postérieures au 1er juillet 1962 s'applique en l'espèce la loi de 1985 selon laquelle le rapatrié (dans le cas présent d'Algérie) est soumis au régime de l'assurance volontaire tel qu'établit par la loi de 1965, exception faite de l'application des délais prévus par les articles 3 et 7 de cette même loi.
Le législateur ayant ainsi visiblement entendu instituer un régime dérogatoire plus favorable pour les rapatriés eu égard à leur situation particulière.
- Rapatriés d'Algérie :
Le régime applicable conduit donc à distinguer, pour les rapatriés d'Algérie, deux périodes :
- la période d'activités et d'affiliation à un régime Algérien antérieure au 1er juillet 1962 : c'est le régime de base de l'assurance vieillesse qui s'applique, tel qu'institué par le code de la sécurité sociale de 1956 qui exclut l'application des articles R. 742-28 et R. 742-39 du code de la sécurité sociale postérieurs et relatifs à l'assurance volontaire.
- la période d'activités postérieure au 1er juillet 1962 : c'est le régime spécial de l'assurance volontaire vieillesse institué par la loi de 1985 qui s'applique, ce qui exclut les délais de droit commun de l'assurance volontaire vieillesse.

- Situation de Monsieur X... :
Rappel fait que l'article 7 de la loi de 1985 dispose qu'" aucun délai n'est opposable à la présentation des demandes de validation des périodes " prévues dans le cadre de l'article 1er de la loi du 26 décembre 1964 et dans celui du régime institué par ses propres articles 4 et 5 (de la loi de 1985) ; que de même aucun délai n'est opposable à la présentation " des demandes de rachat de cotisations " portant sur les périodes visées, par l'article 5 de la loi de 1985 et qui sont celles postérieures au 1er juillet 1962.
Il en résulte que les régimes de 1964 et 1985 non codifiés sont des régimes spéciaux, qui dérogent en tant que tels au droit commun de l'assurance volontaire vieillesse.
Qu'ils excluent à ce titre l'application des délais du code de la sécurité sociale visés par la CARSAT pour annuler la décision de rachat (art. R. 742-39) ou limiter la date d'effet du rachat à la date de sa demande (art. R. 742-28), et ce en application de l'adage " la loi spéciale déroge à la loi générale ".
L'application successive des deux régimes conduit ainsi à prendre en compte dans chacun d'eux la date du 1er juillet 1996 pour liquider les droits de Monsieur X... ; en conséquence la Cour infirmera le tribunal des affaires de sécurité sociale qui l'a débouté de ses demandes.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort après en avoir délibéré,
En la forme reçoit l'appel de Monsieur Bernard X...,
Au fond,
Confirme le jugement déféré uniquement en ce qu'il déclare recevable le recours de Monsieur X...,
L'infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Fixe au 1er juillet 1996 la date d'effet de la révision du montant de la pension servie à Monsieur X... après rachat de périodes de salariat,
Dit la CARSAT du Sud-Est tenue de servir à Monsieur X... une pension de vieillesse pleine à compter du 1er juillet 1996,
Condamne la CARSAT du Sud-Est à régler à Monsieur X... la totalité des arriérés qui lui sont dûs,
Dispense l'appelant du droit fixe prévu par l'article R144-10 alinéa 2.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4o chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11/00032
Date de la décision : 21/12/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Analyses

POURVOI W1214396 CARSAT


Références :

ARRET du 14 mars 2013, Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 14 mars 2013, 12-14.396, Inédit

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2011-12-21;11.00032 ?
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