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24/05/2011 | FRANCE | N°10/07307

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre civile 2, 24 mai 2011, 10/07307


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2o chambre
ARRET DU 24 MAI 2011
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 07307
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 JUIN 2010 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 2009/ 20961

APPELANTS :
Monsieur Gilles X... né le 16 Septembre 1945 à ST CLEMENT DE REGNAT (63310)... 34000 MONTPELLIER représenté par la SCP TOUZERY COTTALORDA, avoués à la Cour assisté de Me Michel GOURON, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame Suzanne Y... épouse X... née le 03 Juin 1947 à GOURIN (56110) de nationalité França

ise... 34000 MONTPELLIER représentée par la SCP TOUZERY COTTALORDA, avoués à la Cour assistée d...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2o chambre
ARRET DU 24 MAI 2011
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 07307
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 JUIN 2010 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 2009/ 20961

APPELANTS :
Monsieur Gilles X... né le 16 Septembre 1945 à ST CLEMENT DE REGNAT (63310)... 34000 MONTPELLIER représenté par la SCP TOUZERY COTTALORDA, avoués à la Cour assisté de Me Michel GOURON, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame Suzanne Y... épouse X... née le 03 Juin 1947 à GOURIN (56110) de nationalité Française... 34000 MONTPELLIER représentée par la SCP TOUZERY COTTALORDA, avoués à la Cour assistée de Me Michel GOURON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :
Maître Christine Z..., agissant en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société JMJH, nommée à ces fonctions suivant jugement du 28. 04. 2009,... 34000 MONTPELLIER représenté par la SCP DIVISIA SENMARTIN, avoués à la Cour assisté de Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 18 Avril 2011

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 AVRIL 2011, en audience publique, Madame Brigitte OLIVE, Conseiller, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Daniel BACHASSON, Président Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Conseiller Madame Brigitte OLIVE, Conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

Ministère public :

L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Daniel BACHASSON, Président, et par Madame Sylvie SABATON, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS et PROCEDURE – MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES
Par acte sous seing privé du 23 mars 2007, les époux X...-Y... ont donné en location-gérance à la SARL JMJH un fonds de commerce de restaurant, plats à emporter et café, situé à Palavas les Flots (34).
Par acte sous seing privé du 15 février 2008, les parties ont résilié, avant terme, cette location-gérance.
Dans cet acte, il est précisé que : « Nonobstant la difficulté née de la solidarité avec les dettes contractées par la SARL JMJH, les consorts X... préfèrent résilier le contrat, étant établi qu'un candidat acquéreur du fonds de commerce leur propose un prix qu'ils jugent satisfaisant : en découle l'intérêt des bailleurs de libérer le fonds de commerce de tout bail qui pourrait le grever, de sorte à récupérer la jouissance de l'entreprise, sans délai ni procès, ni acte supplémentaire (…) La solidarité rappelée ci avant pour les dettes va trouver à s'appliquer. Les salariés n'ont pas été payés, l'établissement étant fermé depuis le mois de novembre 2007. Les salariés du fonds ont été licenciés pour motif économique, le 1er février 2008. Les bailleurs reconnaissent avoir été informés des dispositions contenues à l'article L 122-12 et notamment, la solidarité dans le paiement des salaires et accessoires de salaires auxquels ils s'exposent, à raison des défauts de leur preneur depuis novembre 2007 ; l'obligation de reprendre les salariés qui formuleraient une demande de réembauche (…), l'obligation de prendre à sa charge les conséquences qui pourraient résulter de l'éventuelle nullité des licenciements opérés pour motif économique, l'article L 122-12 pourrait emporter la nullité des licenciements opérés, ses dispositions étant d'ordre public. Le bailleur déclare vouloir néanmoins résilier le contrat de location-gérance et faire son affaire des litiges à propos des contrats de travail, les conséquences résultant de la loi. »
La société JMJH a été déclarée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Montpellier le 28 avril 2008.
Mme Z... a été désignée liquidateur.
Invoquant la clause susvisée et le paiement par le biais du CGEA/ AGS des salaires et indemnités à hauteur de la somme de 39 894, 73 euros, Mme Z..., ès qualités, a fait assigner les époux X.../ Y..., par acte d'huissier du 24 décembre 2009, devant le tribunal de commerce de Montpellier, afin d'obtenir leur condamnation au paiement de cette somme.
Par jugement du 28 juin 2010, le tribunal a fait droit à cette demande, avec exécution provisoire et a alloué sur le fondemenent de l'article 700 du code de procédure civile une somme de 1 000 euros à Mme Z..., ès qualités.
* * * *

Les époux X... ont régulièrement interjeté appel de ce jugement, en vue de son infirmation, demandant à la cour de débouter Mme Z..., ès qualités, de ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 1 794 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils soutiennent essentiellement que :
- la clause contenue dans l'acte de résiliation a pour seul but de rappeler aux bailleurs que les salariés seraient en droit de réclamer le paiement des salaires et accessoires impayés par le locataire-gérant et leur obligation de reprendre et poursuivre les contrats de travail avec les salariés le souhaitant, en application de l'article L. 122-12 du code du travail ;
- Mme Z... n'est pas salariée de l'entreprise et n'est pas concernée par ce texte, la solidarité légale ne profitant qu'aux salariés ;
- le premier juge a donc dénaturé la convention du 15 février 2008 ;
- l'article L. 144-7 du code de commerce dispose que le loueur de fonds est solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à l'occasion de l'exploitation du fonds ;
- or, la dette du CGEA n'est pas une dette contractée par le locataire-gérant, ce qui exclut la solidarité visée par ce texte ;
- Mme Z... n'a rien réglé aux salariés, la somme de 5 959 euros ayant été avancée par la caisse Unedic-CGEA, qui est seule habilitée à en poursuivre le paiement selon l'adage « nul ne plaide par procureur » ;
- le solde de 33 935 euros correspond à des cotisations URSSAF qui ne sont pas des salaires, au sens de l'article L. 122-12 du code du travail ;
- en tout état de cause, l'article L. 144-7 du code de commerce ne peut pas être invoqué dans la mesure où seules les dettes contractées dans un délai de 6 mois à compter de la publication de la location-gérance sont concernées ; or, en l'espèce, les dettes salariales concernent la période de novembre 2007 à février 2008, et la location-gérance a été publiée le 1er janvier 2007.
* * * *

Mme Z..., ès qualités, a conclu à la confirmation du jugement et à l'allocation de la somme de 2 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle réplique en substance :
- son action n'a pas pour fondement l'article L. 144-7 du code de commerce mais l'acte de résiliation dans lequel les époux X... ont déclaré faire leur affaire des litiges relatifs aux contrats de travail ;
- l'expiration du délai de 6 mois est donc inopérant d'autant que l'acte de résiliation prévoit une solidarité dans le paiement des salaires et accessoires, à raison des carences du locataire-gérant, à compter de novembre 2007 ;
- la clause dont s'agit n'est pas un rappel des dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail mais un engagement des bailleurs à payer les salaires et accessoires dus ;
- elle a effectué le paiement aux salariés au moyen des fonds avancés par le fonds de garantie, ce qui lui permet d'agir contre les époux X... pour recouvrer les sommes dues à la procédure collective ;
- la somme réclamée qui a bien été réglée par le CGEA, comme en atteste l'état des créances, est une dette de salaires, étant précisé que les cotisations URSSAF se sont élevées à la somme de 135 772 euros.

C'est en cet état que la procédure a été clôturée par ordonnance du 18 avril 2011.

MOTIFS DE LA DECISION

Si la convention de résiliation amiable de la location-gérance stipule que « le bailleur fait son affaire des litiges à propos des contrats de travail », il n'en demeure pas moins que cet engagement s'inscrit dans le paragraphe qui rappelle les obligations découlant de l'application de l'article L. 122-12 du code du travail (devenu L. 1224-1 et L. 1224-2).
En effet, et dans la mesure où la société JMJH avait cessé toute exploitation depuis novembre 2007 et avait licencié les 6 salariés de l'entreprise pour motif économique, le 1er février 2008, soit 15 jours avant la cessation de la location-gérance, les époux X..., en leur qualité de propriétaires du fonds de commerce, souhaitant vendre ledit fonds, ont pris acte des risques engendrés par l'application des dispositions légales susvisées, tenant notamment à des litiges avec les anciens salariés de l'entreprise, qui pourraient résulter du non-paiement des salaires depuis novembre 2007, de la contestation de la validité des licenciements économiques ou des demandes au titre de la priorité de réembauche.
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 622-20 et L. 641-4 du code de commerce, dans leur rédaction applicable en la cause, que le liquidateur ne peut agir qu'au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers et non dans l'intérêt personnel d'un créancier ou d'un groupe de créanciers.
Il s'ensuit que Mme Z..., ès qualités, n'est pas recevable à exercer à l'encontre des époux X... une action résultant de l'éventuelle application de l'article L. 1224-1 du code du travail, telle que rappelée dans l'acte de résiliation de la location-gérance, instituée dans le seul intérêt des salariés du locataire gérant, lesquels ont été subrogés par l'AGS/ CGEA, qui a fait l'avance des salaires et indemnités dus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, bénéficiant du superprivilège prévu à l'article L. 3223-8- 1oet 3o du code du travail ou du privilège prévu à l'article L. 641-13- III du code de commerce (cf. tableau des créances garanties établi par la délégation AGS/ CGEA, pièce no3 du bordereau de l'intimée).
Mme Z... n'est donc pas recevable à agir contre les époux X... en remboursement des salaires et indemnités avancés par l'AGS/ CGEA.
Le jugement sera donc infirmé en toutes ses dispositions.
Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme Z..., ès qualités, supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement entrepris ;
Et statuant à nouveau,
Dit que Mme Z..., en sa qualité de liquidateur de la société JMJH, n'est pas recevable à agir contre les époux X...-Y... ;
Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme Z..., ès qualités, aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT

B. O


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10/07307
Date de la décision : 24/05/2011
Type d'affaire : Civile

Analyses

Le liquidateur judiciaire - qui ne peut agir que dans l'intérêt collectif des créanciers et non dans l'intérêt personnel d'un seul d'entre eux ou d'un groupe d'entre eux - n'est pas recevable à excercer à l'encontre d'un bailleur une action résultant de l'article 1244-1 du code du travail, telle que rappelée dans le contrat de location-gérance, instituée dans le seul intérêt des salariés du locataire-gérant, lesquels ont été subrogés par l'AGS qui a fait l'avance des salaires et indemnités dus antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du locataire-gérant.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2011-05-24;10.07307 ?
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