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27/10/2010 | FRANCE | N°10/00377

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 4o chambre sociale, 27 octobre 2010, 10/00377


DV/ RBN COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 27 Octobre 2010

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00377

ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 NOVEMBRE 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER No RGF 09/ 237

APPELANTE :

SARL EGEA prise en la personne de son représentant légal ZI du Salaison 905 Avenue des Bigos 34740 VENDARGUES Représentant : Me François. ESCARGUEL (avocat au barreau de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Mademoiselle Agnès X...... 34400 SATURARGUES Représentant : Me

Jeanne. FOURNIER (avocat au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le ...

DV/ RBN COUR D'APPEL DE MONTPELLIER 4o chambre sociale

ARRÊT DU 27 Octobre 2010

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00377

ARRÊT no
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 NOVEMBRE 2009 CONSEIL DE PRUD'HOMMES DE MONTPELLIER No RGF 09/ 237

APPELANTE :

SARL EGEA prise en la personne de son représentant légal ZI du Salaison 905 Avenue des Bigos 34740 VENDARGUES Représentant : Me François. ESCARGUEL (avocat au barreau de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Mademoiselle Agnès X...... 34400 SATURARGUES Représentant : Me Jeanne. FOURNIER (avocat au barreau de MONTPELLIER)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 SEPTEMBRE 2010, en audience publique, Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre Monsieur Philippe DE GUARDIA, Vice-Président placé Monsieur Bernard BETOUS, Vice-Président placé

qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Dominique VALLIER

ARRÊT :

- Contradictoire.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de Procédure civile ;
- signé par Monsieur Pierre D'HERVE, Président de Chambre, et par Madame Dominique VALLIER, Adjointe administrative f. f. de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* **

FAITS ET PROCEDURE
Mademoiselle Agnès X...a été embauchée par la SARL EGEA selon contrat à durée déterminée du 29 août 2008 conclu pour surcroît d'activité, sur la période du 28 août 2008 au 28 février 2009, comme chauffeur routier international coefficient 150M.
Suite à un arrêt de travail, elle a été déclarée apte à la reprise du travail le 31 décembre 2008, mais elle soutient que lorsqu'elle s'est présentée le 2 janvier 2009, aucun véhicule n'était disponible pour elle et aucun travail n'a pu lui être donné.
Par courrier du 2 janvier 2009 Mademoiselle X...indique alors à son employeur qu'elle se tient à sa disposition pour exécuter son travail, mais la SARL EGEA lui répond le 6 janvier 2009 dans les termes suivants : « concernant votre reprise du travail et en consultation avec l'inspection du travail des transports, nous vous informons qu'à compter de ce jour, un local sera mis à votre disposition le matin de 8 h30 à 12 h. L'après-midi, nous vous accordons un temps libre rémunéré pour satisfaire à votre recherche d'emploi ».

Mademoiselle X...manifeste son étonnement de ne pas se voir confier de travail alors qu'elle a été déclarée apte à la reprise de son emploi par le médecin du travail et dans ce contexte, elle indique à son employeur qu'elle considère son contrat de travail comme rompu et que cette rupture est imputable à la SARL EGEA, selon courrier recommandé avec accusé de réception du 21 janvier 2009 rédigé dans ces termes : « Malgré mes demandes et mes différents courriers, vous refusez toujours de me donner du travail et me demandez de rester sans rien faire, assise dans un bureau. J'estime que ces mesures sont purement vexatoires. Aux termes de votre courrier en date du 8 janvier 2009, vous feignez toujours d'ignorer les deux avis d'aptitude rendus et m'indiquez que vous n'avez pas de travail à me donner. Vous refusez ainsi de me confier le travail pour lequel j'ai été engagée et ne respectez pas les dispositions contractuelles qui nous lient. Bien plus, vous m'avez indiqué que mon salaire habituel, qui comprenait des heures supplémentaires et des frais de déplacement, ne me serait pas réglé. J'estime qu'en ne respectant pas les termes de mon contrat, en refusant de tenir compte de l'avis d'aptitude rendu par le médecin du travail et en m'imposant de rester dans un bureau sans rien faire, vous avez gravement manqué à vos obligations découlant du contrat de travail ».

Par la suite, Mademoiselle X...a saisi, au mois de février 2009, le Conseil des prud'hommes de Montpellier pour obtenir la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, un rappel de salaire, un remboursement des frais de déplacement ainsi que des dommages intérêts pour licenciement sans ceuse réelle et sérieuse et préjudice moral.
Par jugement en date du 26 novembre 2009, le Conseil des prud'hommes a condamné la société EGEA à lui délivrer les documents sociaux rectifiés et à lui payer les sommes suivantes :-1. 322 € au titre de l'indemnité de requalification,-3. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-380 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,-38 € au titre des congés payés afférents au préavis,-93, 84 € au titre des heures de nuit,-801, 86 € au titre des heures injustement déduites.

Par lettre recommandée du 13 janvier 2010, la société EGEA a régulièrement interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 21 décembre 2009.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La société EGEA demande à la Cour de réformer le jugement entrepris et de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission.
En conséquence, elle sollicite le débouté de Mademoiselle X...de toutes ses demandes et sa condamnation à lui verser la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
A l'appui de son appel, elle soutient essentiellement que :- le contrat a été conclu pour accroissement temporaire d'activité, ce surcroît étant lié, outre la démission de deux salariés, à l'augmentation du chiffre d'affaires sur les mois de novembre et décembre 2008 ;- elle a choisi de tenir compte des dispositions du médecin du travail et donc de maintenir le contrat et la rémunération jusqu'à la fin du contrat, dès lors qu'elle n'avait pas de lignes disponibles en courte distance, ce qui ne peut être un manquement suffisamment grave pour justifier la prise d'acte ;

L'intimée demande à la Cour de confirmer le jugement déféré sur la requalification du contrat et le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité de préavis, les heures de nuit et les heures injustement déduites mais sa réformation sur le quantum des sommes alloués.
En conséquence, elle sollicite les sommes suivantes :-1. 709, 77 € à titre d'indemnité de requalification,-12. 000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,-2. 000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct,-1. 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,- la condamnation sous astreinte de 100 € par jour de retard à la remise du certificat de travail, de l'attestation ASSEDIC et des bulletins de salaire de novembre 2008 à janvier 2009 rectifiés.

Elle fait notamment valoir que le motif de recours au CDD est erroné car la société n'a pas connu d'accroissement d'activité à cete période. Elle en veut pour preuve que l'employeur lui imposait un congé sans solde de trois semaines, un mois et demi seulement après son embauche.
Mademoiselle X... soutient en outre que l'employeur a méconnu l'avis du médecin du travail en ne lui attribuant pas de travail et qu'il a même usé de man œ uvres vexatoires à son égard en lui imposant de rester des heures sans rien faire dans un bureau.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la requalification du contrat de travail
Il résulte des dispositions de l'article L. 1245-1 du Code du travail qu'est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions des articles L. 1242-1 à L. 1242-4 du Code du travail.
En l'espèce, la société EGEA, qui se prévaut d'un accroissement temporaire d'activité comme motif du recours au contrat de travail à durée déterminée, ne rapporte pas la preuve d'un tel motif à la date de conclusion du contrat.
Bien au contraire, il apparaît que Mademoiselle X...a été embauchée en raison des démissions de deux salariés intervenues respectivement le 29 août 2008, soit le jour même de l'embauche de l'intimée, et le 31 septembre suivant.
Par ailleurs, le fait que l'employeur ait imposé à sa salariée un congé sans solde de 15 jours environ, six semaines seulement après son embauche est incompatible avec l'accroissement temporaire d'activité prétendu.
Enfin, l'appelante verse au débat un tableau de son chiffre d'affaires facturé des exercices 2007, 2008 et 2009 permettant de constater qu'en août 2008, soit le mois de l'embauche de Mademoiselle X..., seules 75 factures étaient émises, ce qui constitue un des chiffres les plus faibles des trois derniers exercices.
Au vu de ces seuls éléments, l'accroissement temporaire d'activité n'est pas établi et il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a requalifié le contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée.
En application des dispositions de l'article L. 1245-2, alinéa 2 du Code du travail, il y a lieu de condamner l'appelante à payer à l'intimée une indemnité équivalente à un mois de salaire brut, soit la somme de 1. 709, 77 €, et non comme retenu par les premiers juges, celle de 1. 322 €.
2. Sur la rupture du contrat de travail
Il est de principe que lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient soit, dans le cas contraire, d'une démission.
En l'espèce, il résulte des courriers échangés entre les parties que la société EGEA n'a tenu aucun compte de l'avis d'aptitude à la reprise du médecin du travail, en lui refusant d'exercer son travail.
L'employeur se devait de réaffecter la salariée à son poste de chauffeur routier international, dès lors que l'avis du médecin ne posait aucune restriction quant à la reprise du travail.
Il s'ensuit que la société EGEA est à l'origine de la rupture du contrat de travail de Mademoiselle X..., qui s'analyse comme un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Dès lors, l'intimée a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois, en application de l'article L. 1235-3, alinéa 2 du Code du travail.
Il s'ensuit que le jugement déféré doit être réformé en ce qu'il n'a alloué à la salariée qu'une somme de 3. 000 € à ce titre et il convient de lui substituer celle de 10. 258, 62 €, correspondant à six mois de salaire brut.
En revanche, l'intimée ne rappporte pas la preuve d'un préjudice distinct, autre que celui causé par la rupture de son contrat de travail. En conséquence, elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts supplémentaires.
Les condamnations prononcées sur l'indemnité de préavis et congés payés sur préavis, sur les heures de nuit et sur celles injustement déduites doivent être confirmées, comme le sollicite par ailleurs l'intimée.
Enfin, il y a lieu de fixer une astreinte de 100 € par jour de retard pour la délivrance des documents sociaux et des bulletins de salaire.
3. Sur les dépens et l'article 700 du Code de procédure civile
Eu égard à la solution apportée au règlement du présent litige, les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge de la société EGEA, laquelle devra en outre verser, au titre des frais non compris dans les dépens que l'intimée a pu exposer tant en première instance qu'en cause d'appel, la somme de 1. 200 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR
Confirme le jugement déféré, sauf sur le quantum des sommes allouées à Mademoiselle Agnès X...au titre de l'indemnité de requalification et des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a omis de prononcer une astreinte pour la délivrance des documents de fin de contrat ;
Statuant à nouveau sur ces points :
Condamne la SARL EGEA à payer à Mademoiselle X...la somme de 1. 709, 77 € à titre d'indemnité de requalification et celle de 10. 258, 62 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamne la SARL EGEA à remettre le certificat de travail rectifié de Mademoiselle X..., l'attestation ASSEDIC modifiée et les bulletins de salaire de novembre 2008 à janvier 2009, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 30ème jour de la notification du présent arrêt et ce, dans un délai de trois mois ;
Condamne la société EGEA aux dépens de première instance et d'appel, et à payer à Mademoiselle X...la somme de 1. 200 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 4o chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10/00377
Date de la décision : 27/10/2010
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2010-10-27;10.00377 ?
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