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08/04/2010 | FRANCE | N°09/01989

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Ct0706, 08 avril 2010, 09/01989


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET DU 08 / 04 / 2010

DOSSIER 09 / 01989 GN / BR

prononcé publiquement le Jeudi huit avril deux mille dix, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Monsieur RAJBAUT, en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.

et assisté du greffier : Mademoiselle ROUGY
qui ont signé le présent arrêt
en présence du ministère public près la Cour d'Appel
sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de MONTPELLIER du 05 OC

TOBRE 2009

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur RAJBA...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3ème CHAMBRE CORRECTIONNELLE

ARRET DU 08 / 04 / 2010

DOSSIER 09 / 01989 GN / BR

prononcé publiquement le Jeudi huit avril deux mille dix, par la troisième Chambre des appels correctionnels, par Monsieur RAJBAUT, en application des dispositions de l'article 485 dernier alinéa du code de procédure pénale.

et assisté du greffier : Mademoiselle ROUGY
qui ont signé le présent arrêt
en présence du ministère public près la Cour d'Appel
sur appel d'un jugement du tribunal de grande instance de MONTPELLIER du 05 OCTOBRE 2009

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré : Président : Monsieur RAJBAUT

Conseillers : Madame BRESDIN Monsieur ANDRIEUX

présents lors des débats :

Ministère public : Monsieur DEVILLE
Greffier : Mademoiselle VALERO

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

PREVENUS
Z... Gérard Georges Né le 17 mai 1953 à ENGHIEN LES BAINS (95), fils de Z... Robert et de A... Yvette, gérant, de nationalité française, demeurant... Libre Prévenu, intimé Comparant Assisté de Maître TANASESCU Michaël

Z... Yann Né le 27 septembre 1976 à ENGHIEN LES BAINS (95), fils de Z... Gérard et de C... Marie Thérèse, gérant, de nationalité française, demeurant ... Libre Prévenu, intimé Comparant Assisté de Maître TANASESCU Michaël

LE MINISTERE PUBLIC, appelant

PARTIE CIVILE
PÔLE EMPLOI LANGUEDOC ROUSSILLON, 600 ROUTE DE VAUGUIERES CS 40027-34000 MONTPELLIER Partie civile, appelant Représenté par Maître PIERRONNET François Xavier, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituant Maître SCP CHATEL CLERMONT BRUN, avocat au barreau de MONTPELLIER

RAPPEL DE LA PROCEDURE :
Par jugement contradictoire du 5 octobre 2009 le Tribunal correctionnel de MONTPELLIER a :
Sur l'action publique : prononcé la relaxe de Z... Gérard Georges et Z... Yann :
* pour avoir à Lunel (34), entre 2002 et le 22 mai 2007, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, exercé à but lucratif une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou accompli un acte de commerce, en l'espèce gérant de la SARL Z... ET FILS, employé M. Gérard D... et omis intentionnellement de remettre un bulletin de paie lors du paiement de la rémunération et omis intentionnellement de procéder à la déclaration préalable à l'embauche,
infraction prévue par les articles L. 8224-1, L. 8221-1 AL. 1 1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5 du Code du travail et réprimée par les articles L. 8224-1, L. 8224-3, L. 8224-4 du Code du travail
Sur l'action civile : le Tribunal a reçu PÔLE EMPLOI Languedoc-Roussillon en sa constitution de partie civile et l'a débouté de ses demandes.

APPELS :

Le Ministère Public a régulièrement interjeté appel principal de ce jugement le 6 octobre 2009.
PÔLE EMPLOI Languedoc-Roussillon, partie civile, a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration au Greffe en date du 16 octobre 2009.

DEROULEMENT DES DEBATS :

A l'appel de la cause à l'audience publique du 11 MARS 2010 Monsieur le Président a constaté l'identité des prévenus, puis a fait le rapport prescrit par l'article 513 du code de procédure pénale.
PÔLE EMPLOI Languedoc-Roussillon, partie civile, régulièrement cité à personne habilitée le 20 janvier 2010 est représenté par son avocat.
M. Gérard Z..., régulièrement cité à sa personne le 29 janvier 2010 est présent, assisté de son avocat.
M. Yann Z..., régulièrement cité à sa personne le 29 janvier 2010 est présent, assisté de son avocat.
Maître PIERRONNET, avocat de la partie civile, a été entendu en sa plaidoirie.
La SCP CHATEL pour la partie civile dépose des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d'audience et jointes au dossier.
Le Ministère Public a été entendu en ses réquisitions.
Maître TANASESCU Michaël pour les prévenus est entendu en sa plaidoirie. Il dépose des conclusions, lesquelles ont été visées par le président et la greffière, mentionnées par cette dernière aux notes d'audience et jointes au dossier.
Les prévenus ont eu la parole en dernier.
A l'issue des débats, la Cour a mis l'affaire en délibéré et Monsieur le Président a averti les parties que l'arrêt serait prononcé à l'audience publique du 08 AVRIL 2010.

FAITS :

Le 11 octobre 2007 le Parquet de MONTPELLIER était saisi par l'URSSAF de Montpellier-Lodève du procès-verbal de travail illégal établi le 6 août 2007 par un de ses inspecteurs à l'encontre de MM Gérard et Yann Z..., co-gérants de la SARL Z... ET FILS, spécialisée dans la pose de revêtements de sol.
Il ressortait de ce procès-verbal que dans le cadre d'un contrôle effectué le 22 mai 2007 sur un chantier de rénovation d'un magasin à Gonfreville-L'Orcher (Seine-Maritime), les inspecteurs de l'URSSAF de Seine-Maritime-Le Havre constataient la présence de deux personnes occupées à poser un parquet : M. Gérard D... se présentant comme artisan à Périgny (Charente-Maritime), sous-traitant de la SARL Z... ET FILS, et M. Franck E..., salarié de la SARL Z... ET FILS.
Il apparaissait cependant pour l'administration que M. Gérard D... était radié du répertoire des métiers de Charente-Maritime depuis 1999 et qu'il travaillait depuis au moins 2002 sous la subordination juridique et économique de la SARL Z... ET FILS, travaillant exclusivement et à temps complet pour cette société, acceptant les lieux de chantier qui lui étaient imposés, recevant des consignes générales pour réaliser les travaux, encadrant et formant les salariés de cette société qui travaillaient avec lui, bénéficiant de remboursements de frais de déplacement dans les mêmes conditions que les salariés de cette société et étant rémunéré à l'heure avec des majorations les Dimanche et jours fériés et non pas sur une base forfaitaire contractuelle avec des factures mensuelles.
L'administration estimait que de ce fait M. Gérard D... aurait dû être déclaré comme salarié à l'URSSAF et recevoir des bulletins de paie tous les mois, en outre aucune déclaration préalable à l'embauche n'avait été effectuée.
Entendu, M. Gérard Z... indique avoir pris M. Gérard D... comme sous-traitant depuis 2002, ignorant qu'il était radié du répertoire des métiers, confirme qu'il travaillait pratiquement à temps complet pour sa société et qu'il n'y avait pas de contrat de sous-traitance, s'agissant de petits chantiers.
Pour sa part M. Yann Z... confirme ces déclarations, précisant que M. Gérard D... ne recevait pas de feuilles de paie et était payé par chèque sur facture.
Sollicitée pour avis, la Direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de l'Hérault estimait, le 12 mars 2008, que MM Gérard et Yann Z... avaient eu recours de façon illégale aux services de M. Gérard D..., commettant le délit de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié.
Entendu, M. Gérard D... déclare avoir été artisan Charente-Maritime et avoir été radié d'office en 1999 pour non paiement des cotisations, ce qu'il ignorait, possédant toujours sa carte d'artisan. Il a travaillé pour la SARL Z... ET FILS depuis 2002 sans contrat de sous-traitance : il avait toute liberté pour exécuter le chantier qui lui était donné en respectant les délais, il était rémunéré en fin de chantier sur la base d'un taux horaire de 19, 06 € HT, les frais d'hôtel et de restauration étant réglés sur présentation des factures. Il indique qu'il fonctionnait comme un salarié de la société et assurait l'encadrement des salariés de cette société.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

PÔLE EMPLOI Languedoc-Roussillon, partie civile, a déposé le 11 mars 2010 des conclusions au terme desquelles il demande à la Cour de déclarer MM Gérard et Yann Z... coupables des infractions qui leur sont reprochées, d'accueillir sa constitution de partie civile et de les condamner solidairement à lui payer la somme de 12. 026 € à titre de dommages et intérêts et celle de 1. 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
La partie civile fait valoir que les conditions du contrat de sous-traitance ne sont pas satisfaites en l'espèce et que M. Gérard D... ne peut être présumé travailleur indépendant, son statut ne pouvant être celui d'un sous-traitant mais celui d'un salarié. Elle précise que son préjudice résulte de l'absence de cotisation pour le financement du régime d'allocation chômage calculé sur la base d'un taux de 6, 55 % et d'une masse salariale de 183. 612 € pour les trois dernières années.
Le Ministère Public fait valoir qu'il y a un faisceau d'indices établissant l'existence d'une fausse sous-traitance et requiert l'infirmation du jugement attaqué afin de retenir la culpabilité des prévenus et de les condamner à une peine de 2. 000 € d'amende chacun.
MM Gérard et Yann Z... ont déposé le 11 mars 2010 des conclusions au terme desquelles ils demandent à la Cour de confirmer le jugement de relaxe intervenu en faisant valoir que M. Gérard D... est toujours inscrit comme commerçant au registre du commerce et des sociétés de LA ROCHELLE, qu'il existe une présomption légale de non salariat, qu'il n'est pas rapporté la preuve de l'existence d'un lien de subordination juridique entre la SARL Z... ET FILS et M. Gérard D..., qu'il n'est pas démontré que celui-ci avait pour seul client cette société, que le contrat de sous-traitance privé n'a pas à être établi par écrit et que le montant de la rémunération était largement supérieur au coût horaire brut d'un salarié.

SUR QUOI

Attendu qu'il sera statué contradictoirement à l'encontre de toutes les parties présentes ou régulièrement représentées ;
Attendu que les appels sont réguliers pour avoir été interjetés dans les formes et délais légaux ;
Sur l'action publique
Attendu qu'il résulte des éléments du dossier et des débats que si M. Gérard D... a été radié en 1999 du répertoire des métiers de la chambre de métiers de Charente-Maritime, en revanche il est toujours, à ce jour, inscrit comme commerçant au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de La Rochelle sous le même numéro Siret (323. 290. 551. 00031) pour la même activité de pose de revêtements sols et murs, carrelage, peinture bâtiment, en exploitation directe comme en fait foi l'extrait Kbis produit par les prévenus ;
Attendu que de ce fait M. Gérard D... est présumé être commerçant, travailleur indépendant en application des dispositions de l'article L 123-7 du code de commerce selon lequel l'immatriculation d'une personne physique au registre du commerce et des sociétés emporte présomption de la qualité de commerçant sauf preuve contraire et de l'article R 241-2 du code de la sécurité sociale selon lequel est considéré comme travailleur indépendant toute personne relevant du groupe des professions industrielles et commerciales ;
Attendu dès lors qu'il appartient à l'accusation de renverser cette présomption de non salariat en rapportant la preuve contraire de l'existence d'un contrat de travail entre M. Gérard D... et la SARL Z... ET FILS ;
Attendu que le critère distinctif du contrat de travail est l'existence d'un lien de subordination juridique entre le travailleur et la personne pour laquelle il travaille, lequel ne saurait être déterminé par la seule faiblesse ou la dépendance économique du travailleur ;
Attendu que le lien de subordination est caractérisé par la maîtrise de l'organisation et de l'exécution du travail (pouvoir de l'employeur de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné) ;
Attendu qu'en l'espèce le procès-verbal de l'URSSAF de Montpellier-Lodève se contente de relever que M. Gérard D... travaillerait exclusivement pour la SARL Z... ET FILS (ce qui au demeurant n'a pas été vérifié par les enquêteurs) et se considérerait comme faisant partie de cette société, nommant M. Gérard Z... comme " son patron " sans pour autant caractériser un quelconque lien de subordination juridique, qu'ainsi il n'est pas rapporté la preuve de ce que le service était organisé par la SARL Z... ET FILS, que M. Gérard D... avait des contraintes horaires et effectuait son travail sous la surveillance des prévenus ;
Attendu qu'en l'absence de directive ou de consignes, il apparaît donc que M. Gérard D... n'était pas soumis à un lien de subordination à l'égard de la SARL Z... ET FILS et des prévenus et qu'ainsi la preuve de l'existence d'un contrat de travail n'est pas rapportée par l'accusation ;
Attendu que de ce fait et en l'absence de toute relation salariée entre M. Gérard D... et la SARL Z... ET FILS il ne saurait être reproché aux prévenus de ne pas avoir procédé à la déclaration préalable à l'embauche de M. Gérard D... ni de ne pas lui avoir remis de bulletins de paie ;
Attendu que le jugement déféré, qui a relaxé les prévenus et les a renvoyés des fins de la poursuite, sera donc confirmé ;
Sur l'action civile
Attendu que du fait de cette relaxe, c'est à juste titre que les premiers juges, s'ils ont reçu PÔLE EMPLOI Languedoc-Roussillon en sa constitution de partie civile, l'ont débouté de ses demandes ; que le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions en ce qui concerne l'action civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière correctionnelle, après en avoir délibéré conformément à la loi.
EN LA FORME
Reçoit les appels.
AU FOND
Sur l'action publique :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué en ce qu'il a relaxé et renvoyé des fins de la poursuite M. Gérard Z... et M. Yann Z....
Sur l'action civile :
Confirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué sur l'action civile.
Le tout conformément aux articles visés au jugement et au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du code de procédure pénale.
Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique les jours, mois et an susdits ; le présent arrêt a été signé par le Président et le greffier présents lors de son prononcé.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Ct0706
Numéro d'arrêt : 09/01989
Date de la décision : 08/04/2010

Analyses

TRAVAIL - Travail clandestin - Eléments constitutifs - Constatations nécessaires - /JDF

Selon l'article L 123-7 du code de commerce, l'immatriculation d'une personne physique au registre du commerce et des sociétés emporte présomption de la qualité de commerçant sauf preuve contraire et selon l'article R 241-2 du code de la sécurité sociale est considéré comme travailleur indépendant toute personne relevant du groupe des professions industrielles et commerciales. Dès lors il appartient à l'accusation poursuivant des faits de travail clandestin de renverser cette présomption de non salariat en rapportant la preuve contraire de l'existence d'un contrat de travail. Le critère distinctif du contrat de travail est l'existence d'un lien de subordination juridique entre le travailleur et la personne pour laquelle il travaille, lequel ne saurait être déterminé par la seule faiblesse ou la dépendance économique du travailleur. Le lien de subordination est caractérisé par la maîtrise de l'organisation et de l'exécution du travail (pouvoir de l'employeur de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné)


Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Montpellier, 05 octobre 2009


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2010-04-08;09.01989 ?
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