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25/03/2008 | FRANCE | N°06/07791

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre civile 1, 25 mars 2008, 06/07791


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section A2
ARRET DU 25 MARS 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/07791

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 OCTOBRE 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE No RG 03/218

APPELANTE :

S.C.I. TRIFA, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié ès qualités au siège socialFontanelle11360 VILLESEQUE DES CORBIERESreprésentée par la SCP GARRIGUE - GARRIGUE, avoués à la Courassistée de Me Delphine ADDE-SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
S.A. A

GF IART venant aux droits de ALLIANZ VIA ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal en exerc...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1o Chambre Section A2
ARRET DU 25 MARS 2008

Numéro d'inscription au répertoire général : 06/07791

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 OCTOBRE 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE No RG 03/218

APPELANTE :

S.C.I. TRIFA, prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié ès qualités au siège socialFontanelle11360 VILLESEQUE DES CORBIERESreprésentée par la SCP GARRIGUE - GARRIGUE, avoués à la Courassistée de Me Delphine ADDE-SOUBRA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
S.A. AGF IART venant aux droits de ALLIANZ VIA ASSURANCES, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social87 rue de Richelieu75002 PARISreprésentée par la SCP TOUZERY - COTTALORDA, avoués à la Courassistée de Me PECH DE LA CLAUSE, avocat au barreau de NARBONNE

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 21 Février 2008
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 26 FEVRIER 2008, en audience publique, Madame CASTANIE ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
Monsieur Christian TOULZA, PrésidentMadame Sylvie CASTANIE, ConseillerMonsieur Richard BOUGON, Conseillerqui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Monsieur Dominique SANTONJA
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Christian TOULZA, Président, et par Mme Monique AUSSILLOUS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * ** *

FAITS - PROCÉDURE - MOYENS et PRÉTENTIONS des PARTIES :
Par jugement en date du 19 octobre 2006, le Tribunal de Grande Instance de NARBONNE déboute la S.C.I. TRIFA de ses demandes formées à l'encontre de la Compagnie A.G.F. venant aux droits de la S.A. ALLIANZ et la condamne aux dépens de l'instance.

La S.C.I. TRIFA relève appel de ce jugement selon déclaration au greffe enregistrée le 7 décembre 2006.

Dans ses dernières écritures déposées le 4 avril 2007, la S.C.I. TRIFA conclut à l'infirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et à la condamnation de la Compagnie A.G.F. à lui payer, à titre de dommages et intérêts, la somme de 65 956, 09 € représentant le montant des intérêts de retard décomptés par la C.R.C.A.M. et celle de 16 007, 15 € du chef des préjudices imputables à l'entreprise SACAZE et ESTEVE seule, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 14 février 2003 et la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel. C'est à tort en effet que le premier Juge a requalifié l'exclusion de garantie prévue au contrat d'assurance et portant sur les dommages immatériels en une simple condition de garantie, échappant dès lors à l'application de l'article L 113-1 du Code des Assurances subordonnant la validité d'une exclusion de garantie à son caractère formel et limité.

Dans ses dernières écritures déposées le 3 janvier 2008, la Compagnie A.G.F. IART venant aux droits de la S.A. ALLIANZ conclut, au principal, à la confirmation du jugement entrepris, les prestations formulées par la S.C.I. TRIFA constituant un sinistre non garanti par la police et, y ajoutant, à la condamnation de la S.C.I. TRIFA au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. et aux entiers dépens. Elle demande subsidiairement qu'il soit jugé que la S.A.R.L. SACAZE et ESTEVE, son assurée, s'est rendue coupable de fraude à son égard et qu'elle est donc fondée, en application de l'article L 112-6 du Code des Assurances et du principe selon lequel la fraude corrompt tout, à opposer à la S.C.I. TRIFA une non-garantie pour fraude à ses droits. Elle conclut très subsidiairement, au rejet des demandes de la S.C.I. TRIFA du chef des intérêts de retard, au visa de l'article 1315 du code civil, à la réduction du préjudice lié au plancher d'accueil à la somme de 1 525 €, acte lui étant donné de ce qu'elle s'en rapporte sur le bien-fondé de la demande relative au lot électricité, évalué à la somme de 762, 25 €. Elle observe, si sa garantie était par impossible considérée comme acquise, qu'elle ne saurait excéder les stipulations du contrat limitées à 762 245, 09 € et que la franchise prévue à hauteur de 228, 67 € est opposable au tiers victime par application de l'article L 112-6 précité. Elle conclut enfin au paiement de la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C. et à la condamnation de la S.C.I. TRIFA aux dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture est en date du 21 février 2008.

SUR CE :

Il est nécessaire pour la bonne compréhension du litige, de rappeler les éléments suivants :

La S.C.I. TRIFA confie à la S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE, assurée auprès de la M.A.F., selon contrat du 17 février 1997, une mission complète concernant la transformation d'un bâtiment agricole en hôtel restaurant. Elle confie, selon un marché en date du 22 juillet 1997, à la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE, assurée auprès de la Compagnie ALLIANZ, l'exécution des lots terrassement, VRD, gros oeuvre, charpente et couverture. La C.R.C.A.M. consent à la S.C.I. TRIFA, aux termes d'un acte en date des 28 mars et 4 avril 1997, un prêt d'un montant de 2 270 000 F destiné à l'achat du bâtiment et au financement des travaux. Des difficultés liées à la nécessité de réaliser des travaux supplémentaires de reprise en sous-oeuvre due à une mauvaise appréciation des fondations de l'immeuble existant et aux plus-values en découlant, sont rapidement apparues en cours de chantier, provoquant la désignation au contradictoire de toutes les parties, à l'exception de la Compagnie ALLIANZ non assignée, d'un expert, selon ordonnance de référé du 12 février 1998.
Par jugement du 10 juin 1999, le Tribunal de Grande Instance de NARBONNE, statuant au vu de la première partie du rapport d'expertise, déclare la S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE et la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE responsables du préjudice subi par la

S.C.I. TRIFA dans les proportions de 70% pour l'architecte et de 30% pour l'entrepreneur, les condamne in solidum avec la M.A.F., assureur de l'architecte, à payer à la S.C.I. TRIFA la somme de 1 000 000 de francs à titre de provision et condamne enfin la Société ALLIANZ à relever et garantir la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE des condamnations prononcées à son encontre.

La Cour, statuant par arrêt du 7 janvier 2003, déclare irrégulière la saisine du Tribunal de Grande Instance par assignation délivrée contre la Société ALLIANZ, annule en conséquence le chef du jugement déféré condamnant la Société ALLIANZ à garantir la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE des condamnations prononcées à son encontre et, pour le surplus, réouvre les débats.
La Cour, statuant par arrêt du 20 mai 2003, entre autres dispositions :
fixe la créance de la S.C.I. TRIFA au passif respectif des S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE et SACAZE et ESTÈVE à la somme de 487 675, 11 €, au titre des préjudices techniques et financiers subis jusqu'au mois d'avril 2001, à 140 772, 94 € au titre du préjudice financier subi du mois de mai 2001 à ce jour, à 83 711, 82 € au titre des intérêts décomptés par la C.R.C.A.M., à 2 378, 81 € au titre des intérêts de retard, à 3 977, 85 € au titre du surcoût de l'assurance dommages ouvrage et enfin à 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du N.C.P.C.,
fixe à 93 694, 86 € la créance de la S.C.I. TRIFA au passif de la S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE,
fixe à 16 007, 15 € la créance de la S.C.I. TRIFA au passif de la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE au titre des préjudices imputables à celle-ci seule,
condamne la M.A.F. au paiement des sommes précitées figurant au passif respectif des S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE et SACAZE et ESTÈVE ainsi qu'au paiement de la somme de 93 694, 86 € au titre du préjudice imputable à la S.A.R.L. BARKA ARCHITECTURE seule.

C'est dans ces conditions que le Tribunal de Grande Instance de NARBONNE a statué par le jugement dont appel sur l'action directe exercée par la S.C.I. TRIFA contre la S.A. A.G.F. venant aux droits de la S.A. ALLIANZ, sur le fondement de l'article L 124-3 du Code des Assurances.

L'article 4-2-1 des Conventions Spéciales régissant le contrat d'assurance responsabilité civile conclu entre les parties dispose, en un paragraphe intitulé « Objet de la Garantie », que l'assureur accorde sa garantie lorsque la responsabilité civile de l'assuré est engagée en raison d'un sinistre relatif à des dommages corporels, matériels ou immatériels consécutifs causés à autrui.
La S.C.I. TRIFA poursuit à l'encontre de la Compagnie A.G.F. le paiement de la somme de 16 007, 15 €, se décomposant en deux postes :
15 244, 90 €, correspondant au préjudice dû à la position du plancher de l'accueil. L'expert indique que la hauteur sous plafond sous ce plancher n'est que de 1, 78 mètre, ce qui fait qu'il manque une zone de stockage pour le mobilier terrasse, et, après avoir indiqué qu'une partie de la sous-face du plancher reste exploitable, il précise que l'annexe à créer n'est qu'un simple local de stockage dont le prix peut être fixé à 100 000 F.
762, 25 €, correspondant au surcoût dû à la réfection du sol de la salle de restaurant, lié au fait que les gaines ont été abîmées par la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE qui ne le conteste pas.
La S.C.I. TRIFA sollicite également le paiement de la somme de 65 956, 09 € au titre des intérêts de retard décomptés par la C.R.C.A.M.
Le lexique figurant au début des Conventions Spéciales précitées définit le dommage matériel comme toute détérioration, destruction ou perte d'une chose ou substance et le dommage immatériel comme tout préjudice pécuniaire directement consécutif à un dommage corporel ou matériel garanti.
Ces éléments établissent que la somme de 16 007, 15 €, destinée à la reprise de désordres sous une forme ou une autre, correspond à des dommages matériels pour lesquels l'assureur doit sa garantie en application de l'article 4-2-1 précité.
La somme de 65 956, 09 € correspond, quant à elle, à un dommage immatériel pour lequel se pose la question de savoir s'il est directement consécutif ou pas à un dommage matériel garanti.
La défaillance de l'emprunteur dans le remboursement du prêt souscrit auprès du Crédit Agricole, génératrice des intérêts litigieux, trouve son origine dans le non-respect des délais de livraison de l'ouvrage. Ce retard du chantier est imputable, à la fois à la mauvaise appréciation des supports du bâtiment existant pour laquelle la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE a vu sa responsabilité retenue à 30% et à l'imprévoyance de celle-ci dans la gestion de son calendrier décrite avec précision par l'arrêt du 20 mai 2003.
Il ne peut dès lors être soutenu que le dommage immatériel constitué par les intérêts de retard est directement consécutif à un dommage matériel garanti au sens des définitions contractuelles ci-dessus rappelées.
Il n'y a pas lieu dès lors de s'interroger sur l'application de l'article L 113-1 du Code des Assurances, la non-garantie de l'assureur s'expliquant en effet par l'absence d'une des conditions de la garantie et non par la mise en oeuvre d'une exclusion de garantie.
Le moyen tiré par la Compagnie A.G.F. de l'opposabilité au tiers victime de la déchéance encourue par son assurée est inopérant. Il ne peut être déduit de la négligence et de la légèreté de la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE qui a en effet attendu le 24 mars 1999, veille de l'audience des plaidoiries fixée au 25 mars, pour appeler en intervention forcée la Compagnie ALLIANZ, qu'elle a délibérément agi en fraude de ses droits et dans le but de nuire à ses intérêts. La lecture du jugement du 10 juin 1999 révèle d'ailleurs que la S.A.R.L. SACAZE et ESTÈVE a conclu au sursis à statuer afin précisément de permettre à son assureur, assigné la veille de l'audience, d'organiser utilement sa défense.

Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de la S.C.I. TRIFA en paiement de la somme de 65 956, 09 € au titre des intérêts de retard et de condamner la Société A.G.F., par infirmation du jugement, à payer à la S.C.I. TRIFA la somme de 16 007, 15 € au titre des désordres affectant le plancher de l'accueil et le lot électricité, imputables à l'entreprise SACAZE et ESTÈVE, outre les intérêts à compter du présent arrêt.

Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties le montant des frais irrépétibles exposés en appel et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et après en avoir délibéré,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la S.C.I. TRIFA de sa demande en paiement de la somme de 16 007, 15 € et en ce qu'il l'a condamnée à l'intégralité des dépens.

Et statuant à nouveau de ces chefs :
CONDAMNE la Société A.G.F. à payer à la S.C.I. TRIFA la somme de 16 007, 15 € (seize mille sept euros quinze centimes) au titre des désordres affectant le plancher de l'accueil et le lot électricité, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
FAIT MASSE des dépens et DIT qu'ils seront supportés pour trois quarts par la S.C.I. TRIFA et pour un quart par la Société A.G.F.
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions,
Et Y AJOUTANT :
DÉBOUTE les parties de leur demande en application de l'article 700 du N.C.P.C.

FAIT MASSE des dépens d'appel et DIT qu'ils seront supportés pour trois quarts par la S.C.I. TRIFA et pour un quart par la Société A.G.F., avec droit de recouvrement direct au profit des avoués de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du N.C.P.C.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 06/07791
Date de la décision : 25/03/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Narbonne, 19 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2008-03-25;06.07791 ?
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