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18/03/2008 | FRANCE | N°07/07802

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre civile 2, 18 mars 2008, 07/07802


COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre
ARRET DU 18 MARS 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/07802
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 NOVEMBRE 2007 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 07/12071

APPELANTE :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social, venant, en suite d'opérations de fusion, aux droits et obligations de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MIDIAvenue du MontpelliéretMaurin34970 LATTESre

présentée par la SCP JOUGLA - JOUGLA, avoués à la Courassistée de Me Pierre-Marie GRAPPI...

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2o chambre
ARRET DU 18 MARS 2008
Numéro d'inscription au répertoire général : 07/07802
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 NOVEMBRE 2007 TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER No RG 07/12071

APPELANTE :
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANGUEDOC, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social, venant, en suite d'opérations de fusion, aux droits et obligations de la CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU MIDIAvenue du MontpelliéretMaurin34970 LATTESreprésentée par la SCP JOUGLA - JOUGLA, avoués à la Courassistée de Me Pierre-Marie GRAPPIN, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :
Sarl IBIZA, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié ès qualités au siège social246 le Grand MailRésidence Le St Guilhem - Bât A34080 MONTPELLIERreprésentée par la SCP SALVIGNOL - GUILHEM, avoués à la Courassistée de Me Maxime BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 19 FEVRIER 2008, en audience publique, M. Guy SCHMITT, ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
M. Guy SCHMITT, PrésidentMadame Annie PLANTARD, ConseillerMme Noële-France DEBUISSY, Conseillerqui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Melle Colette ROBIN
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile ;
- signé par M. Guy SCHMITT, Président, et par Mlle Colette ROBIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La société Ibiza, créée en 1999, a ouvert un compte de dépôt à vue au Crédit Agricole, le 25 février 2004, ainsi qu'un compte service, n'accordant aucun découvert. Par la suite, un découvert sera autorisé à hauteur de la somme de 12 000 euros, à compter du 21 juin 2004. Au 15 janvier 2007, ce compte a présenté un solde débiteur d'un montant de 103 710,29 euros, avec un découvert autorisé, mentionné sur les relevés de compte, de 72 000 euros ; au 28 février de 2004 275,56 euros, avec un découvert autorisé, de 152 000 euros, et au 30 mars, de 221 727,62 euros, avec un découvert autorisé de 12 000 euros.
Par lettre du 10 mai 2007, le Crédit Agricole du Languedoc, relevant que le compte présentait ce jour là, un découvert s'élevant à 147 864,69 euros, alors qu'il n'était autorisé que pour la somme de 12 000 euros, a dénoncé le découvert tacite, en application de l'article 60 de la loi du 24 janvier 1984, et accordé un délai de 60 jours à la société Ibiza, pour régulariser.
Par lettre du 16 mai 2007, il a indiqué à la société Ibiza, qu'il avait réglé des titres de paiement, en l'absence de provision suffisante; que cela ne constituait pas une autorisation de découvert, et que le concours mis en place, ce jour, de 212 000 euros, demeure jusqu'à l'utilisation de la ligne Oseo.
Se plaignant que dès le 11 mai 2007, le crédit Agricole a refusé de payer des chèques, la société Ibiza a le 6 septembre 2007, assigné celui-ci, à jour fixe.
Par jugement du 28 novembre 2007, le tribunal de commerce de Montpellier, faisant droit à la demande, a condamné le crédit Agricole, à:
- lever l'interdiction bancaire notifiée à la société Ibiza, dés la signification du jugement, sous astreinte de 500 euros, par jour de retard, le tribunal se réservant le droit de la liquider.- procéder au paiement de tous les chèques émis et non régularisés, représentant la somme de 108 095,37 euros, par inscription au compte courant- rembourser à la société Ibiza, la somme de 14 960 euros, correspondant aux frais, taxes et timbres générés par les rejets de chèques.- à payer à la société Ibiza, la somme de 197 969 euros à titre de dommages intérêts , en réparation du préjudice subi du fait de la paralysie de l'entreprise, - ordonné l'exécution provisoire.- condamné la CRCAM du Languedoc, à payer à la société Ibiza, la somme de 4 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Caisse régionale du Crédit agricole Mutuel du Languedoc, a relevé appel de cette décision, le 30 novembre 2007, et conclu le 8 février 2008, à son infirmation, sollicitant le débouté de la société Ibiza, en l'absence de faute commise, et subsidiairement, le débouté de sa demande en réparation, en l'absence de préjudice; de condamner la société Ibiza à lui rembourser la somme de 98 890,65 euros, réglée par lui, au titre de l'exécution provisoire avec intérêts de droit à compter du 15 janvier 2008, date des conclusions, ainsi que celle de 1 euros, à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, et celle 8 000 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Ibiza concluant le 13 février 2008, a demandé à la cour de confirmer le jugement, et dire que le Crédit agricole a rompu abusivement les concours, dire nul et non avenu le rejet des chèques émis par elle, compte tenu des conventions de découvert, et l'accord du 16 mai 2007, le confirmer en ce qu'il a condamné la CRCAM à lever l'interdiction bancaire. Elle a relevé appel incident pour solliciter la condamnation de la banque à lui payer le montant de tous les frais, taxes et timbres générés par le rejet de tous les chèques, ainsi que celle de 2 772 euros, correspondant à quatre chèques régularisés le 6 février 2008, et également la somme de 600 000 euros, à titre de dommages intérêts , pour le préjudice subi, du fait de la paralysie de l'entreprise du fait de l'initiative unilatérale de la banque mettant en péril le devenir de la société ; enfin de lui allouer la somme de 8 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI

Pour caractériser la faute commise par la banque, la société Ibiza rappelle la chronologie des faits, à savoir, le 10 mai 2007, dénonciation du découvert tacite avec préavis de 60 jours, le 11 mai, rejet de chèques et notification d'une interdiction bancaire, le 16 mai, confirmation de son concours de 212 000 euros, à compter de ce jour là, rejet de chèques dès le 11 mai, et en déduit que la rupture abusive de crédit est évidente.

La banque, soulignant que le découvert autorisé était de 12 000 euros, fait valoir que la société Ibiza a augmenté son découvert depuis la dénonciation, que le rejet des chèques ne présente aucun caractère anormal, et qu'aucune avance de l'organisme de financement des marchés publics n'a été portée au compte.
Il convient de rappeler qu'après avoir accordé une autorisation de découvert de 12 000 euros, à compter du 21 juin 2004, par l'ouverture d'un nouveau compte de services, les relevés de compte du 15 janvier 2007, 28 février et 30 mars 2007, mentionnent que des découverts tacites ont été accordés respectivement pour les sommes de 72 000 euros, 152 000 euros et 12 000 euros. Selon la lettre de dénonciation du découvert, du 10 mai 2007, celui-ci s'élevait à 147 864,69 euros.
Le 16 mai, la banque adressait à la société Ibiza la lettre, qui est à l'origine du litige, selon laquelle, elle l'avisait du règlement de chèques, et que cette opération ne constituait pas une autorisation de découvert; que le concours, mis en place, à partir de ce jour, demeure, jusqu'à l'utilisation de la ligne Oseo qui lui a été accordée. Il en découle, que le découvert de 12 000 euros et sa dénonciation étaient maintenus, et qu'un concours, a été apporté, pour un montant de 212 000 euros, dans l'attente qu'Oseo, verse l'avance sur marchés. Oseo Financement est un organisme, qui finance des créances liées à des marchés passés avec l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements et entreprises publiques, des entreprises ou organisme assurant une mission de service public, faisant l'objet de contrats écrits, domiciliés chez Oseo financement, et cédés à son profit. Le 9 mai 2007, il a ouvert un compte "avance plus", à la société Ibiza, pour la période s'étendant du 7 mai 2007 au 6 novembre 2007, accordant une avance d'un montant de 200 000 euros, qui se réalise, sur présentation de bordereaux de cession de créances de demandes de paiement, accompagnées de tout justificatif.
Le 5 juillet 2007, la société Ibiza a adressé une lettre de réclamation à la banque, en contestant le rejet, à compter du 26 juin 2007, de chèques, pour une somme de 86 000 euros, alors que son découvert avait été ramené à 40 000 euros environ, et que la banque lui avait accordé un concours de 212 000 euros, le 16 mai 2007, demeurant en place jusqu'à l'utilisation de la ligne de crédit Oseo. A la date de l'assignation, le montant des chèques rejetés, invoqués, s'élevait, à 102 420,62 euros.
Invoquer la chronologie de ces faits, exposés dans leur matérialité, sans caractériser l'abus commis, est insuffisant. En effet, d'une part, la banque était en droit, en période de préavis, de refuser d'honorer des chèques dépassant le montant du découvert autorisé et dénoncé, d'autre part, elle était aussi en droit de veiller à ce que le concours apporté de 212 00 euros, soit respecté tant dans son montant que dans sa condition, qui était l'attente du crédit Oseo.
La société Ibiza, qui a la charge de la preuve, ne rapporte même pas celle du montant des soldes de son compte, aux dates concernées, en versant au débat, l'historique du compte pour la période du mois de mai, au mois de juillet, date à laquelle, elle se plaint du rejet de chèques. En tout cas elle reconnaît dans sa lettre du 5 juillet, que son compte était toujours débiteur de 40 000 euros, somme supérieure à 12 000 euros, montant du découvert autorisé. D'un autre côté, il est constant qu'aucune somme n'a été portée au crédit du compte, au titre de l'avance d' Oseo Financement, accordée le 9 mai 2007.
La société Ibiza est mal fondée à faire valoir que le déblocage de l'avance demandait des mois, alors que la vocation de cet organisme, est d'éviter les longues attentes de paiement par les co-contractants publics, exigés par le mode de paiement administratif, et qu'il suffisait de lui céder les créances, et de présenter les justificatifs de demande de paiement. Il est donc invraisemblable qu'aucune avance n'a été versée en l'espace de deux mois, alors qu'elle a saisi Oseo financement, pour faire face à ses difficultés de trésorerie, dues à l'absence de paiement des marchés publics, à la suite de la dénonciation du découvert.
De surcroît, elle ne justifie pas avoir mis en oeuvre le dispositif d'avance, en produisant les cessions qu'elle aurait pu consentir, ce qui aurait été une justification de ses dires, sur le défaut de versement immédiat des fonds. Pour appuyer le manque de crédibilité de ses dires, il est à noter que, selon la lettre d'Oseo, du 30 janvier 2008, le contrat n'a pas été renouvelé à la date du 6 novembre 2007, ce qui tend à démontrer que malgré ses besoins financiers, elle n'avait pas de contrats lui ouvrant droit à cette avance, et de plus, Oseo a reçu l'ordre de la société Ibiza, le 1er août 2007, de modifier la domiciliation des avances, faite initialement à la CRCAM du Languedoc, au profit d'un compte ouvert à la Société Générale, faisant ainsi peu de cas de son obligation de combler le découvert de son compte, ou, peut être de ne pas mettre à jour, son impossibilité de remplir les conditions pour obtenir l'avance.
La cour ne peut faire droit à la demande de la société Ibiza, faute de pouvoir apprécier si la banque a commis véritablement, un abus en refusant d'honorer les chèques, au delà du découvert , et en dépit de son engagement de concours jusqu'à l'utilisation de la ligne d'avance Oseo, accordée, mais pas mise en jeu par la société Ibiza.
La décision déférée qui a constaté que la banque a commis une faute en refusant de régler des chèques dans le délai de 60 jours du préavis, et dans la limite du découvert moyen de 194 086,71 euros, alors que ce découvert avait été réduit à 12 000 euros, et qu'en tout état de cause, elle était en droit de ne pas autoriser le dépassement du découvert pendant la période de préavis, doit être infirmée.

Il y a lieu de faire droit à la demande de la banque en restitution de la somme de 98 890,65 euros, qu'elle a versée au titre des chèques payés sur exécution provisoire.

L'équité ne commande pas de faire droit à la demande en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,
Infirme la décision déférée, et statuant à nouveau,
Déboute la société Ibiza de sa demande
Condamne la société Ibiza à payer à la Caisse régionale du Crédit Agricole Mutuel du Languedoc ( CRCAM), la somme de 98 890,65 euros, versée au titre de l'exécution provisoire, avec intérêts légaux, à compter du 15 janvier 2008, date de la demande formée par conclusions.
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Ibiza aux entiers dépens, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 07/07802
Date de la décision : 18/03/2008
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Montpellier, 28 novembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2008-03-18;07.07802 ?
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