COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2o chambre
ARRET DU 04 DECEMBRE 2007
Numéro d'inscription au répertoire général : 06 / 05685
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 MARS 2006 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE RODEZ No RG 04 / 040
APPELANTE :
SARL S. A. D. A. C. T., prise en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité au siège social ZI de Jarlard Impasse Lebon 81000 ALBI représentée par la SCP TOUZERY-COTTALORDA, avoués à la Cour assistée de Me CULOZ de la SCP PALAZY-BRU et associés, avocats au barreau d'ALBI
INTIMES :
Maître Monique Y...... 81200 MAZAMET représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP FABRE-GUEUGNOT-SAVARY, avocats au barreau de PARIS
Madame Anne Marie Thérèse A... veuve B... prise en sa qualité d'héritière de M. André B..., décédé... 81200 AUSSILLON représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP FABRE-GUEUGNOT-SAVARY, avocats au barreau de PARIS
Monsieur Michel André Pierre B... pris en sa qualité d'héritier de M. André B..., décédé...... 13100 AIX EN PROVENCE représenté par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP FABRE-GUEUGNOT-SAVARY, avocats au barreau de PARIS
Monsieur Didier Claude B... pris en sa qualité d'héritier de M. André B..., décédé...... 93230 ROMAINVILLE représenté par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP FABRE-GUEUGNOT-SAVARY, avocats au barreau de PARIS
Mademoiselle Nathalie Jacqueline Véronique B... prise en sa qualité d'héritière de M. André B..., décédé... 81200 MAZAMET représentée par la SCP DIVISIA-SENMARTIN, avoués à la Cour assistée de la SCP FABRE-GUEUGNOT-SAVARY, avocats au barreau de PARIS
ORDONNANCE DE CLOTURE DU 31 Octobre 2007
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 NOVEMBRE 2007, en audience publique, Mr Guy SCHMITT ayant fait le rapport prescrit par l'article 785 du Nouveau Code de Procédure Civile, devant la Cour composée de :
M. Guy SCHMITT, Président Madame Annie PLANTARD, Conseiller M. Hervé CHASSERY, Conseiller qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Melle Colette ROBIN
ARRET :
-contradictoire.
-prononcé publiquement par M. Guy SCHMITT, Président.
-signé par M. Guy SCHMITT, Président, et par Melle Colette ROBIN, Greffier présent lors du prononcé.
La société Sadact a fait l'objet d'un jugement d'ouverture de redressement judiciaire, par le tribunal de commerce d'Albi, le 1er décembre 1987, puis d'un plan de continuation, arrêté par jugement du 5 avril 1988, d'une durée de 9 ans et 6 mois, le passif devant être remboursé au minimum, par versements provisionnels de 10 000 francs, pendant les 5 premières années, et de 6 000 francs, les années suivantes. Maître B..., a été désigné commissaire à l'exécution du plan, avec pour mission de vérifier les résultats annuels réalisés et réviser les versements provisionnels au vu des résultats, et assister la société débitrice dans l'accomplissement des actes nécessaires à la mise en oeuvre du plan.
Maître B..., le commissaire à l'exécution du plan est décédé le 1er mars 1997, et sa fille, maître Monique B..., épouse Y..., a été désignée administrateur provisoire de l'étude, par ordonnance du tribunal de grande instance de Castres, avec pour mission, d'assurer provisoirement la gestion du cabinet de maître André B..., décédé.
Maître Y..., ayant constaté l'existence d'un arriéré de dividendes d'un montant de 220 000 francs, a sollicité la résolution du plan. Le tribunal de commerce l'a déboutée de sa demande, au motif qu'elle était irrecevable à la présenter, en raison de l'expiration du plan, depuis le 5 octobre 1997, et de la fin de sa mission, et mal fondée en l'absence de preuve du défaut de paiement des échéances du plan. Le 5 octobre 2001, elle a déposé la reddition de ses comptes.
La société Sadact a demandé à maître Y..., de lui communiquer, les demandes des créanciers en paiement de leur dividende, et par ordonnance du 28 avril 2003, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Albi, a donné acte à maître Y..., qu'elle ne détenait pas de pièces relatives à des demandes en paiement des créanciers.
Par acte du 28 novembre 2003, la société Sadact a assigné Monique Y..., en responsabilité pour avoir procédé à la répartition de dividendes, en l'absence de demande formée par les créanciers, et en paiement de la somme de 112 830,27 euros, à titre de dommages intérêts, correspondant au montant des sommes indûment réparties aux créanciers. Par acte des 25 mars et 29 mars 2005, la société Sadact a mis en cause les héritiers de feu maître B..., Anne-Marie A... veuve B..., Michel B..., Didier B..., et Nathalie B....
Par jugement du 24 mars 2006, le tribunal de grande instance de Rodez a débouté la société Sadact de sa demande dirigée contre maître Y..., en dommages intérêts du fait des paiements effectués aux créanciers, ainsi que de celle dirigée contre Anne Marie A... veuve B..., Michel B..., Didier B..., Nathalie B..., et Monique Y..., pris en leur qualité d'héritiers de maître B..., au motif que celui-ci avait été mandaté pour prendre toutes les garanties nécessaires pour assurer la finalité du plan, et n'a pu commettre aucune faute alors, que la société Sadact lui a elle même remis les fonds. Il a condamné Maître Y... à payer à la société Sadact, la somme de 5 000 euros, à titre de dommages intérêts, pour préjudice moral, pour avoir engagé 3 années après l'expiration du plan, une action en liquidation judiciaire, alors même qu'elle n'avait pas été mandatée par le tribunal, en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ainsi que celle de 800 euros, au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
La société Sadact a relevé appel le 18 août 2006, de ce jugement, dont elle a demandé l'infirmation pour entendre condamner in solidum, les consorts Y...-B... à lui payer la somme de 112 830,27 euros, représentant le montant des sommes indument réparties aux créanciers, avec intérêts légaux à compter du 5 octobre 1997, et application de l'article 1154 du code civil, outre celle de 6 000 euros, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi que la condamnation de Monique Y..., à lui payer la somme de 15 000 euros, en réparation du préjudice moral subi.
Elle soutient que maître B..., et maître Y...ont commis une faute en procédant à la répartition des sommes versées par elle, au titre des dividendes, en l'absence de demande des créanciers, alors que le paiement était quérable, sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985, dans sa version antérieure à la loi du 10 juin 1994, et ont violé leur mandat.
Maître Y... et les consorts B... ont conclu à la confirmation, faisant valoir que la demande constitue en réalité une contestation de la reddition des comptes déposée le 3 octobre 2001, faite hors du délai légal de 8 jours, et est irrecevable ; que ni maître B..., ni maître Y... n'ont commis de faute, qu'en tout état de cause, la société Sadact n'a subi aucun préjudice du fait du paiement des créanciers, qu'elle a réglés en partie elle même, ni du fait de la demande de maître Y...en résolution du plan ; que subsidiairement, la demande formée au titre des intérêts à compter du 5 octobre 1997, et de leur capitalisation doit être rejetée. Ils demandent la condamnation de la société Sadact, à leur payer la somme de 5000 euros à titre de dommages intérêts pour procédure abusive, et celle de 3 000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
SUR QUOI
Attendu que si la reddition des comptes a pu raviver une sérieuse contrariété de la part de la société Sadact, il n'en demeure pas moins que l'action est une action en responsabilité, fondée sur une faute et un préjudice, et qu'elle doit être traitée comme telle, en la forme et au fond, et non comme une contestation de la reddition des comptes.
Attendu que la décision déférée doit être confirmée en ses dispositions relatives à la responsabilité de maître Y..., quant à la répartition des dividendes, fondées sur des motifs que la cour adopte. En effet, c'est avec juste raison que le premier juge a retenu qu'en l'absence de preuve de répartition des dividendes par maître Y..., au cours de la période du 7 mars 1997, date de sa désignation en qualité d'administrateur provisoire de l'étude de son père, au 5 octobre 1997, date de l'expiration du plan, ainsi que postérieurement, alors que la société Sadact reconnaît avoir cessé de verser les dividendes à compter du mois d'avril 2001.
Attendu concernant la faute reprochée à maître B..., que le paiement des dividendes était effectivement quérables sous l'empire de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure à la loi du 25 juin 1994. Néanmoins, la violation de cette disposition ne constitue pas en elle même une faute, alors que d'une part, la société Sadact a réglé elle même, directement des créanciers, d'autre part, qu'elle a versé volontairement entre les mains du commissaire à l'exécution du plan, maître B..., le montant des sommes provisionnelles prévues au plan. Elle a fait ainsi ressortir sa volonté de payer les créanciers, et d'exécuter son obligation résultant du plan. Le commissaire à l'exécution du plan n'a pas commis de faute en répartissant les fonds qu'elle lui avait adressés, même en l'absence de demande des créanciers, et qui étaient destinés à être distribués, alors, ainsi que les premiers juges l'ont relevé, son comportement trouvait son origine, dans la mission confiée par le tribunal, d'assister la débitrice dans la mise en oeuvre du plan, et de prendre toutes garanties pour en assurer la finalité. En outre, le règlement de sommes dues indiscutablement, ne peut pas être constitutif d'un préjudice, sauf à admettre l'extinction de l'obligation d'exécuter ses engagements nés du plan, par le seul fait du défaut de réclamation des créanciers auprès du commissaire à l'exécution du plan, dont la mission est de contrôler son exécution.
Attendu sur le préjudice moral, que la société Sadact, invoque le fait de maître Y..., qui s'est prévalu d'un mandat judiciaire et de la qualité de commissaire à l'exécution du plan, qu'elle n'a jamais eue, puisqu'elle a été seulement désigné administrateur provisoire de l'étude de maître B..., qui ne lui conférait pas celle d'exercer les mandats judiciaires, de soutenir qu'elle n'avait pu honorer des demandes de règlement par des créanciers, après avoir dissimulé l'inexistence de ces demandes, d'avoir exercé une action en ouverture de liquidation judiciaire,3 années après la date d'expiration du plan.
Attendu que la société Sadact n'a pas subi de préjudice moral, du fait de la prétention de maître Y..., à invoquer la qualité de commissaire à l'exécution du plan. Elle ne pouvait ignorer, ou en tout cas pouvait facilement s'informer sur ce point, à la suite du décès de maître B..., étant souligné que maître Y... n'était pas totalement sans titre, puisqu'elle était administrateur provisoire de l'étude de son père, chargée de sa gestion. Le fait de l'exercice d'une action en résolution du plan et liquidation judiciaire, faute d'avoir exécuté le plan, ne constitue pas un acte susceptible de revêtir le caractère d'une faute, sachant que l'exercice d'une action, en dehors de tout abus, de volonté de nuire, ou d'erreur grossière, relève d'un droit qui n'est pas sanctionnable, fut-elle irrecevable pour défaut de qualité. La décision des premiers juges qui a alloué la somme de 5 000 euros, à ce titre, doit être réformée.
Attendu que la société Sadact, qui succombe, doit supporter la charge de frais exposés par les intimés, et non compris dans les dépens, à hauteur de 1 500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Réforme le jugement déféré, du chef de la disposition allouant une somme aux consorts B..., au titre du préjudice moral.
Statuant à nouveau,
Déboute les consorts B... de leur demande en réparation d'un préjudice moral
Confirme pour le surplus.
Condamne la société Sadact à payer aux intimés la somme de 1 500 euros, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Condamne la même aux dépens, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.