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08/09/2004 | FRANCE | N°04/00375

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre sociale, 08 septembre 2004, 04/00375


R.G : 04/00375 Conseil de prud'hommes perpignan 09 février 2004 Agriculture X... C/ ME CLEMENT MANDATAIRE LIQUIDATATEUR DE LA SARL MALAFOSSE ET FILS AGS (CGEA-TOULOUSE) COUR D'APPEL DE MONTPELLIER CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2004 FAITS ET PROCEDURE

M. Y... X... a été engagé par la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS à compter du 20 septembre 1999 en qualité de conducteur d'engins dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération mensuelle brute de 12.200,11 F (1.859,89 Euros) ensuite portée à 12.568,53 F (1.916,06 Euros) puis à 12.85

5,83 F (1.959,86 Euros).

Par lettre recommandée avec avis de récep...

R.G : 04/00375 Conseil de prud'hommes perpignan 09 février 2004 Agriculture X... C/ ME CLEMENT MANDATAIRE LIQUIDATATEUR DE LA SARL MALAFOSSE ET FILS AGS (CGEA-TOULOUSE) COUR D'APPEL DE MONTPELLIER CHAMBRE SOCIALE ARRET DU 08 SEPTEMBRE 2004 FAITS ET PROCEDURE

M. Y... X... a été engagé par la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS à compter du 20 septembre 1999 en qualité de conducteur d'engins dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération mensuelle brute de 12.200,11 F (1.859,89 Euros) ensuite portée à 12.568,53 F (1.916,06 Euros) puis à 12.855,83 F (1.959,86 Euros).

Par lettre recommandée avec avis de réception du 2 octobre 2001, la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS lui a notifié son licenciement dans les termes suivants : Par lettre recommandée en date du 13 septembre 2001, nous vous avons fait savoir que nous envisagions votre licenciement et nous vous avons convoqué pour le lundi 24 septembre 2001 afin de vous indiquer nos motifs, vous ne vous êtes pas présenté tout comme le 12 septembre 2001 où nous vous avions convoqué afin de parler avec vous, de vive voix de votre comportement dans l'exercice de votre fonction et des changements que vous comptiez apporter à votre façon de travailler. Nous nous voyons dans l'obligation de résilier votre contrat de travail compte tenu des faits dont vous vous êtes rendu coupable dans le cadre de votre travail de conducteur d'engins : 1) Utilisation inadéquate et dangereuse des engins dont vous avez la charge, notamment : - défaut de conduite du bulldozer : utilisation de la 2ème vitesse à mauvais escient ; malgré nos consignes l'interdisant car pouvant détériorer le convertisseur. 2) Refus d'obtempérer aux ordres de l'employeur, nous obligeant : - à faire constater par huissier le manque d'entretien sur le bulldozer, malgré les directives : plusieurs graisseurs étaient couramment bouchés, cet engin, fort onéreux est dans un état déplorable. 3) Le

manque de soin que vous apportez aux voitures mises à votre disposition, est caractéristique de la désinvolture avec laquelle vous travaillez. - Vous avez roulé, sciemment avec le témoin de chauffe allumé sur le C15 diesel 7986 ST 66 de Saint-André à Saint-Féliu, alors que dans ce cas la consigne est : ''arrêt immédiat''. Conséquence : véhicule en panne, joint de culasse à remplacer (voir facture). - Nous remarquons également sur ce véhicule (depuis le 10/06/2001) une usure prématurée des pneumatiques et des plaquettes de frein. 4) Utilisation abusive et sans autorisation du téléphone mis à votre disposition pour votre travail, à des fins personnelles (1042 appels personnels en 172 jours ouvrables). Ces faits constituent des fautes graves qui justifient la rupture de votre contrat à la première présentation de la présente lettre sans préavis et sans indemnité de licenciement.

Contestant la légitimité de cette rupture et estimant n'avoir pas été rempli de ses droits au titre de l'exécution de son contrat de travail, M. X... a, le 21 novembre 2001, saisi le Conseil de Prud'hommes de Perpignan qui, après mise en cause des organes de la procédure collective de la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS mise en redressement judiciaire par jugement du 2 juillet 2003 ainsi que de l'A.G.S., a, le 9 février 2004, ainsi statué : Dit et juge que le licenciement pour faute grave est requalifié en cause réelle et sérieuse. Constate que la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS s'est rendue coupable de travail dissimulé. Fixe la créance de M. X... Y... au redressement judiciaire de la S.A.R.L. MALAFOSSE aux sommes suivantes : - 953,18 Euros à titre de complément de salaire sur préavis ; - 95,31 Euros à titre de congés payés sur préavis ; - 392,05 Euros brut à titre d'indemnité de licenciement ; - 1.554,13 Euros brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires ; - 155,41 Euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur les heures

supplémentaires. Déboute M. X... Y... de ses autres demandes. Condamen la S.A.R.L. MALAFOSSE à remettre les documents demandés rectifiés.

M. X... a relevé appel de cette décision.

Par jugement du 12 mai 2004, le tribunal de commerce de Perpignan a prononcé la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS, Maître CLEMENT étant désigné en qualité de liquidateur. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions écrites réitérées oralement à l'audience, M. X... demande que sa créance soit fixée aux sommes suivantes : - 1.916 Euros à titre de dommages-intérêts pour procédure irrégulière ; - 25.000 Euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; - 13.530 Euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ; - 953,18 Euros à titre de complément de salaire sur préavis ; - 95,32 Euros à titre de congés payés sur préavis ; - 392,05 Euros brut à titre d'indemnité de licenciement ; - 273,33 Euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur le rappel de salaire ; - 360,62 Euros brut à titre d'indemnité de congés payés ; - 1.554,13 Euros brut à ttire de rappel de salaire sur les heures supplémentaires ; - 155,41 Euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur les heures supplémentaires ; - 2.994,10 Euros à titre d'indemnité de repas, avec garantie de l'A.G.S.

En réplique, Maître SAMSON sollicite sa mise hors de cause, sa mission ayant pris fin avec le jugement de liquidation judiciaire ; Maître CLEMENT, intervenant en sa qualité de liquidateur, forme appel incident et sollicite à titre principal le débouté de M. X... de l'intégralité de ses demandes et à titre subsidiaire, que les demandes de M. X... soient réduites à la somme de 1.959,86 Euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse et ce uniquement dans l'hypothèse où la demande d'indemnité pour travail dissimulé serait rejetée. Il déclare s'en remettre à justice sur l'indemnité de licenciement et sur les heures supplémentaires et dans l'hypothèse où il serait fait droit à cette dernière demande, demande que M. X... soit débouté de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure irrégulière et licenciement abusif, complément de préavis et indemnité de licenciement, l'indemnité pour travail dissimulé ne pouvant se cumuler avec les autres indemnités de rupture.

L'A.G.S., par observations orales à l'audience, s'en remet aux écritures développées par Maître CLEMENT. SUR CE, LA COUR

Attendu qu'il y a lieu de mettre hors de cause Maître SAMSON et de recevoir Maître CLEMENT en son intervention en sa qualité de liquidateur de la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS.

Sur la légitimité du licenciement

Attendu que la faute grave s'entend d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié constituant un manquement à ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible la poursuite du contrat de travail, même pendant la durée du préavis ; qu'il appartient à l'employeur d'en rapporter la preuve.

Attendu qu'en l'espèce, le grief tiré d'une utilisation inadéquate et dangereuse des engins n'est établi par aucune pièce.

Qu'en ce qui concerne le refus d'obtempérer aux ordres de l'employeur concernant l'entretien du matériel, aucune pièce ne permet de retenir que les graisseurs du bulldozer étaient couramment bouchés et que ledit bulldozer était dans un état déplorable du fait du salarié ; que si le constat d'huissier établi le 11 septembre 2001 fait ressortir que lors du nettoyage du filtre équipant l'engin sur lequel

M. X... était en train de travailler, une importante poussière s'est dégagée, rien ne permet de retenir que pour autant, ledit filtre avait fait l'objet d'un défaut d'entretien de la part de M. X... alors surtout qu'il n'est pas établi que l'ordre lui en avait été donné ni que cela rentrait dans ses attributions.

Attendu que s'agissant du troisième grief tiré d'un manque de soin apporté aux voitures mises à la disposition de M. X..., la S.A.R.L. MALAFOSSE se borne à produire aux débats la facture de réparation afférente au véhicule C15 diesel ; qu'il n'est nullement établi que cette réparation soit la conséquence d'un comportement fautif de M. X...

Attendu enfin que l'utilisation abusive et sans autorisation du téléphone à des fins personnelles ne saurait légitimer le licenciement dans la mesure où, à supposer que les appels aient été passés à des fins personnelles, l'employeur a reçu les relevés détaillés qu'il produit aux débats et que ces relevés débutent en octobre 2000 ; qu'ainsi, outre que rien ne permet de justifier que le téléphone portable utilisé l'ait été par M. X..., force est de constater que l'employeur n'a, pendant toute cette période allant d'octobre 2000 à septembre 2001, jamais rappelé à l'ordre son salarié ni formulé la moindre interdiction.

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le licenciement de M. X... ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse ; que le jugement mérite réformation de ce chef mais confirmation en ce qui concerne les sommes allouées au titre du complément de salaire sur préavis et congés payés afférents, ainsi qu'au titre de l'indemnité de licenciement.

Sur la régularité de la procédure de licenciement

Attendu que lorsque, ainsi que c'est le cas en l'espèce, l'entreprise ne dispose pas d'institutions représentatives du personnel, la lettre

de convocation à l'entretien préalable doit mentionner la faculté pour le salarié de se faire assister par un conseiller de son choix, inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département et préciser l'adresse de l'inspection du travail et de la mairie où cette liste est tenue à la disposition des salariés ; que l'omission d'une de ces adresses constitue une irrégularité de procédure.

Attendu qu'en l'espèce, la lettre de convocation à l'entretien préalable ne mentionne que l'adresse de la direction départementale du travail à l'exclusion de la mairie ; que la procédure de licenciement ne peut dès lors, par réformation du jugement déféré, qu'être déclarée irrégulière.

Sur les heures supplémentaires et congés payés afférents

Attendu que la demande formulée à ce titre n'est pas utilement contestée par la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS ; qu'il y a lieu à confirmation du jugement déféré de ce chef.

Sur l'indemnisation de la rupture

Attendu que l'infraction de travail dissimulé a été reconnue par jugement définitif du tribunal correctionnel du 23 juin 2003.

Attendu dès lors que M. X... peut prétendre à l'indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire prévue par l'article L. 324-11-1 du Code du travail ; que cette indemnité ne se cumule cependant pas avec les autres indemnités auxquelles le salarié peut également prétendre au titre de la rupture de son contrat de travail, seule l'indemnité la plus favorable devant être accordée au salarié.

Et attendu qu'en l'espèce, la Cour estime, eu égard aux éléments de la cause, que M. X... ne peut prétendre, à titre de réparation de son préjudice résultant tant du caractère illégitime qu'irrégulier de son licenciement, à une indemnisation supérieure à six mois de salaire.

Que la créance de M. X... au titre de la rupture de son contrat de

travail sera donc fixée sur la base de sa rémunération mensuelle brute des six derniers mois incluant les heures supplémentaires, soit la somme de 13.530 Euros, sans qu'il y ait lieu de déduire la somme de 300 Euros allouée par le tribunal correctionnel, celle-ci ne l'ayant pas été au titre de la rupture du contrat de travail.

Sur les indemnités de repas

Attendu que M. X... se borne à affirmer, sans en justifier et sans autre précision, qu'il était amené à effectuer des travaux loin de son domicile et qu'il était ainsi contraint à prendre ses repas à l'extérieur.

Qu'en cet état, le jugement l'ayant débouté de sa demande de ce chef sera confirmé.

Sur le rappel de salaire et congés payés afférents

Attendu que, pour la période du 1er au 12 septembre 2001, M. X... a été payé sur la base d'un taux horaire de 62,165 F alors qu'en juillet et août 2001, il l'a été sur la base d'un taux horaire de 76,070 F.

Qu'il est ainsi fondé en sa demande portant sur la différence, soit la somme brute de 273,37 Euros, outre 27,33 Euros bruts au titre des congés payés afférents.

Sur l'indemnité de congés payés

Attendu que l'employeur a réglé à M. X..., postérieurement à la rupture, une somme brute de 11.935,68 F au titre des 23,5 jours de congés payés qu'il lui restait à prendre.

Que sur la base de son salaire brut de 12.855,83 F, il ne peut prétendre à reliquat, le décompte qu'il a établi étant erroné comme établi sur la base d'un salaire journalier et non mensuel.

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement l'ayant débouté de sa demande de chef.

Sur la garantie de l'A.G.S.

Attendu que la garantie de l'A.G.S. s'applique à l'ensemble des sommes allouées à M. X...

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

En la forme, reçoit l'appel principal de M. Y... X... et l'appel de Maître CLEMENT, es-qualités de liquidateur de la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS.

Met hors de cause Maître SAMSON.

Au fond, réforme le jugement déféré et statuant à nouveau sur l'ensemble des demandes de M. X...,

Fixe la créance de M. Y... X... dans la procédure collective de la S.A.R.L. MALAFOSSE ET FILS aux sommes suivantes qui seront inscrites sur l'état des créances déposé au greffe du Tribunal de commerce conformément aux dispositions de l'article L. 621-129 du Code du commerce : - 1.554,13 Euros bruts au titre des heures supplémentaires ; - 155,41 Euros bruts au titre des congés payés sur heures supplémentaires ; - 13.530 Euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat de travail ; - 953,18 Euros bruts à titre de complément de salaire sur préavis ; - 95,31 Euros bruts au titre des congés payés sur préavis ; - 392,05 Euros à titre d'indemnité de licenciement ; - 273,37 Euros bruts à titre de rappel de salaire ; - 27,33 Euros bruts au titre des congés payés sur rappel de salaire.

Dit que ces sommes entrent dans le champ d'application de la garantie de l'A.G.S.

Déboute M. X... de ses demandes plus amples ou contraires.

Dit que le présent arrêt est opposable à l'A.G.S.

Dit que les dépens éventuels seront liquidés en frais privilégiés de la procédure collective.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04/00375
Date de la décision : 08/09/2004
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Faute grave - Preuve

Les griefs tirés d'une utilisation inadéquate et dangereuse des engins, d'un refus d'obtempérer aux ordres de l'employeur concernant l'entretien du matériel pour lequel un constat d'huissier fait état d'importantes poussières à l'ouverture du filtre, et d'un manque de soins apporté aux voitures mises à la disposition du salarié ne peuvent constituer une faute grave car leur imputabilité au salarié n'est pas établie. De même, l'utilisation abusive et sans autorisation du téléphone à des fins personnelles ne peut fonder le licenciement dans la mesure où les relevés produits n'établissent pas que l'utilisation en ait été faite par le salarié, et où pendant toute la durée d'utilisation reprochée il n'a pas été rappelé à l'ordre et ne lui a pas été formulée la moindre interdiction


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2004-09-08;04.00375 ?
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