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07/03/2001 | FRANCE | N°0001223

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre sociale, 07 mars 2001, 0001223


FAITS ET PROCÉDURE

Philip X... a été engagé le 27 janvier 1999 par la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN en qualité de responsable de fabrication boulanger pâtissier, agent de maîtrise coefficient 200 avec un salaire mensuel brut de 9.000 Frs.

Le contrat définissait des objectifs, et prévoyait que leur non atteinte pouvait entraîner la rupture du contrat.

Une période d'essai de deux mois renouvelable était convenue et devait être suivie d'une période probatoire de huit mois, et pendant cette période, le contrat pouvait être rompu en respectant un préavis de d

eux mois.

En outre, pour ce qui concerne la rémunération, le contrat évoquait un...

FAITS ET PROCÉDURE

Philip X... a été engagé le 27 janvier 1999 par la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN en qualité de responsable de fabrication boulanger pâtissier, agent de maîtrise coefficient 200 avec un salaire mensuel brut de 9.000 Frs.

Le contrat définissait des objectifs, et prévoyait que leur non atteinte pouvait entraîner la rupture du contrat.

Une période d'essai de deux mois renouvelable était convenue et devait être suivie d'une période probatoire de huit mois, et pendant cette période, le contrat pouvait être rompu en respectant un préavis de deux mois.

En outre, pour ce qui concerne la rémunération, le contrat évoquait une convention de forfait, englobant les dépassements d'horaires.

Enfin, une clause de non concurrence interdisait au salarié, en cas de rupture du contrat pour quelle que cause que ce soit de s'intéresser, dans un rayon de 50 km au tour du point de vente à Saint Jean de Védas, directement ou indirectement en son nom ou par un tiers à toute entreprise de commerce boulangerie pâtisserie, chocolatier pendant une durée de trois ans.

Sans convocation à un entretien préalable, ni entretien préalable Philip X... a été licencié par lettre remise en main propre le 26 mai 1999 ainsi motivée :

"Conformément à notre contrat signé en janvier 1999, je vous notifie votre fin de période probatoire.

Nous avions convenu un délai de prévenance de deux mois, vous serez donc libre de tous engagement le 25 juillet 99 au soir.

Pour votre information personnelle, nous n'avons pas obtenu les résultats escomptés. Tant au niveau de la qualité des pains, que de la quantité."

Philip X... a alors saisi le Conseil des Prud'hommes de MONTPELLIER pour contester son licenciement et solliciter le paiement de diverses sommes, dommages-intérêts, heures supplémentaires et demander l'annulation de la clause de non concurrence.

Le Conseil des Prud'hommes de MONTPELLIER par jugement en date du 9 mai 2000 a :

- Dit que le licenciement de Monsieur X... Philip est sans cause réelle et sérieuse.

- Condamné la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Monsieur X... Philip les sommes suivantes :

- 74.000 Frs de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure,

- 9.000 Frs à titre d'indemnité de préavis,

- 900 Frs à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

- 12.714,50 Frs à titre d'indemnité d'heures supplémentaires,

- 1.872 Frs à titre d'indemnité de rappel de salaire des dimanches ; - 4.320 Frs à titre d'indemnité de rappel de salaire des jours fériés,

- 1.000 Frs à titre d'indemnité pour la gestion de juin et de juillet,

- 5.000 Frs au titre de l'indemnité de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Dit que la clause de non concurrence figurant au contrat de travail est abusive et de ce fait donc nulle et caduque,

- Débouté Monsieur X... Philip du surplus de ses demandes,

- Mis les éventuels dépens à la charge de la SARL Le Moulin de Saint Jean, prise en la personne de son représentant légal en exercice.

L'employeur a interjeté appel.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Les deux parties ont longuement et à plusieurs reprises conclu par écrit. En l'état de leurs dernières écritures judiciaires leurs positions s'établissent comme suit :

La SARL MOULIN DE SAINT JEAN soutient que le licenciement qu'elle a prononcé est fondé sur une cause réelle et sérieuse, résultant du motif explicite noté dans la lettre de licenciement. Elle reconnaît qu'elle n'a pas respecté la procédure de licenciement. En tout cas, elle entend que l'indemnisation soit limitée à la somme de 54.000 Frs en application des l'articles L 122-14, L 122-14-4 et L 122-14-5 du Code du Travail.

Sur les heures supplémentaires elle prétend que la convention de forfait prévue au contrat exclu tout paiement de ce chef, et à titre subsidiaire elle offre de payer une somme de 4.393,50 Frs.

Elle ne conteste pas devoir les sommes de 1.872 Frs et 4.320 Frs au titre du travail des jours fériés et dimanches, ni une indemnité de préavis de 2.078,52 Frs en faisant valoir qu'elle ne doit qu'une semaine de préavis.

Pour la prime de juin et juillet 1999, elle prétend qu'elle n'est pas due du fait que les objectifs n'ont pas été atteints.

Sur la clause de non concurrence l'employeur soutient qu'elle est valable.

Elle s'oppose enfin à l'application des dispositions de l'article L 324-11-1 du Code du Travail et aux réclamations relatives aux repos

compensateurs.

L'intimé pour sa part demande la confirmation du jugement frappé d'appel dans son principe.

Il soutient que le licenciement opéré sans respect de la procédure est sans cause réelle et sérieuse, en raison tant de la rédaction de la lettre de licenciement, que du fait que l'employeur ne lui a payé les heures supplémentaires.

A ce sujet, il observe que la simple lecture des bulletins de paie font apparaître qu'elles n'ont pas été payées, et il en demande le paiement sur la base de 22 heures par mois avec des repos compensateurs.

En outre il demande qu'il soit fait application de l'article L 324-11-1 du Code du Travail.

Enfin, il entend que la clause de non concurrence soit annulée.

En conséquence il demande :

- la confirmation du jugement et la condamnation de la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN à lui verser les sommes de :

- 74.000 Frs à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et non respect de la procédure,

- 54.000 Frs à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

- 9.000 Frs à titre d'indemnités de préavis,

- 900 Frs à titre d'indemnités de congés payés sur préavis,

- 12.714,50 Frs à titre d'indemnités d'heures supplémentaires,

- 1.271,45 Frs à titre d'indemnités compensatrice de congés payés sur l'indemnité de paiement des heures supplémentaires,

- 1.872,00 Frs à titre de rappel des salaires des dimanches,

- 4.320,00 Frs à titre d'indemnités de rappel des salaires des jours fériés,

- 1.000,00 Frs à titre d'indemnités pour la gestion du mois de juillet,

- 5.000,00 Frs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

En outre,

- Que soit accordé à Monsieur X... 9.000,00 Frs supplémentaires correspondant au second mois de préavis, tel que prévu par le contrat de travail,

- La constatation que la période d'essai de deux mois prévues par le contrat de travail est nulle, puisque la convention collective de la boulangerie-pâtisserie artisanale la limite à un mois (article 17),

- La condamnation de plus fort la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN à verser à Monsieur Philip X... la somme de 12.000,00 Frs à titre de repos compensateur,

- La condamnation de la SARL "LE MOULIN DE SAINT JEAN" à verser à Monsieur Philip X..., la somme de 20.000,00 Frs en contrepartie du préjudice subi par Monsieur X... en raison de la clause de non-concurrence, radicalement nulle,

- La condamnation à verser la somme de 12.000,00 Frs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- La condamnation aux dépens.

DISCUSSION - DÉCISION Sur le licenciement :

Attendu que les parties sont en accord sur le non respect de la procédure de licenciement ; que la lettre de licenciement, telle qu'elle est rédigée n'exprime pas un motif de licenciement inhérent à la personne du salarié ; mais une constatation du résultat de l'exploitation de l'entreprise ; qu'à défaut pour cette dernière d'avoir mis en oeuvre une mesure de licenciement pour motif économique établi, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que compte tenu de l'ancienneté relative du salarié, des circonstances de la rupture, de l'âge de Philip X... il y a lieu de confirmer le montant des dommages-intérêts alloués par les premiers juges ; Sur les heures supplémentaires :

Attendu que la convention de forfait pour être valide doit faire apparaître tous les éléments de nature à établir que la rémunération forfaitaire est au moins aussi avantageuse pour le salarié que le paiement qui lui serait fait des heures supplémentaires avec les majorations légales, et la prise de repos compensateurs ; que la référence dans le contrat à une convention de forfait sans autre précision rend cette convention sans portée ;

Attendu que les bulletins de paie faisant apparaître un horaire mensuel de 191 heures de travail, il sera fait droit à la demande tant en ce qui concerne les heures supplémentaires, que les repos compensateurs, que le salarié du fait de l'employeur n'a pas pu prendre, et qui sont indemnisés dans ce cas par des dommages- intérêts ;

Attendu que pour ce qui concerne le préavis, le contrat qui fait la loi des parties lorsqu'il est plus avantageux que la convention collective est particulièrement nébuleux, puisqu'il prévoit tant une période d'essai qui excède la durée conventionnelle, qu'une période probatoire ni légale ni conventionnelle, et envisage un préavis de deux mois qualifié délai de prévenance dans la lettre de licenciement ;

Qu'il y a lieu de considérer que si le délai de prévenance a été respecté, il ne constitue pas un délai congé au sens de la loi, et qu'en conséquence le contrat a pris fin le 22 juillet 1999 au soir, sans préavis ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement déféré sur ce point ; Sur le travail des dimanches et jours fériés :

Attendu que l'employeur est en accord avec le jugement déféré sur ce

chef de réclamations ; Sur l'indemnité de gestion de 1.000 Frs pour juillet : Attendu que le contrat prévoyait une prime de gestion en fonction de l'atteinte des objectifs prévus au OE 4 conditions de travail du contrat ; que les documents versés au dossier révèlent que les objectifs n'ont pas été atteints, qu'ainsi la prime n'est pas due ; Sur la clause de non concurrence :

Attendu que la validité d'une clause de non concurrence est subordonnée à une double conditions : elle doit être utile à l'entreprise et ne pas porter atteinte à la liberté du travail du salarié ;

Attendu que les éléments du dossier révèlent d'une part que la SARL LE MOULIN DE SAINT JEAN n'est pas détentrice et en tout cas ne le prétend, de secrets de fabrications, d'autre part que la qualification du salarié agent de maîtrise boulanger-pâtissier n'est pas unique, enfin que le périmètre d'interdiction et la durée de cette interdiction ont eu pour effet de priver le salarié de toute possibilité de recherche utile d'un nouveau travail, que la clause de non concurrence est nulle, et son application ayant entraîné un préjudice pour Philip X..., il convient de lui allouer à titre de dommages-intérêts la somme de 20.000 Frs ; Sur l'application de l'article L 324-11-1 du Code du Travail :

Attendu que l'article L 324-11-1 du Code du Travail dispose :

" Le salarié auquel un employeur a eu recours en violation des dispositions de l'article L 324-10 a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à "six mois" de salaire, à moins que l'application d'autres règles légales ou de stipulations conventionnelles ne conduise à une solution plus favorable.

"Dans des conditions définies par décret, le salarié obtient des agents de contrôle mentionnés à l'article L 324-12 les informations relatives à l'accomplissement par son employeur de la déclaration préalable à l'embauche le concernant. Dans le cas où cette formalité n'est pas accomplie par l'employeur, ces agents sont habilités à communiquer au salarié les informations relatives à son inscription sur le registre unique du personnel."

Que son application est subordonnée aux conditions de l'article L 324-10 OE 5 du Code du Travail ;

Qu'en l'espèce ces conditions ne sont pas réunies, et que la demande sera rejetée ; Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : Attendu qu'il est inéquitable de laisser à la charge de l'intimé les frais exposés pour sa défense et non compris dans les dépens ; dont le montant sera précisé au dispositif de la présente décision au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

En la forme, reçoit la SARL MOULIN DE SAINT JEAN en son appel et Philip X... en son appel incident,

Au fond, confirme la décision déférée, sauf en ses dispositions concernant la prime de gestion de juillet 1999,

- y ajoutant,

CONDAMNE la SARL MOULIN DE SAINT JEAN à payer à Philip X... la somme de 12.000 Frs (soit 1.829,39 Euros) à titre de dommages-intérêts pour les repos compensateurs, la somme de 20.000 Frs (soit 3.048,98 Euros) à titre de dommages-intérêts pour préjudice du à la clause de non concurrence,

DECLARE Philip X... mal fondé en ses autres demandes et l'en déboute,

CONDAMNE la SARL MOULIN DE SAINT JEAN à verser à Philip X... la somme de 8.000 Frs (soit 1.219,59 Euros) au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

LA CONDAMNE aux dépens. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 0001223
Date de la décision : 07/03/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Validité - Condition

La validité d'une clause de non-concurrence est subordonnée à une double conditions, elle doit, d'une part, être utile à l'entreprise, et d'autre part ne pas porter atteinte à la liberté du travail du salarié. Dès lors, est nulle une clause de non-concurrence lorsque l'employeur n'est pas détenteur, et en tout cas ne prétend pas l'être, de secrets de fabrications, que la qualification du salarié agent de maîtrise boulanger-pâtissier n'est pas unique, et qu'enfin le périmètre d'interdiction et la durée de cette interdiction ont eu pour effet de priver le salarié de toute possibilité de recherche utile d'un nouveau travail


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2001-03-07;0001223 ?
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