La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/02/2001 | FRANCE | N°99/00895

France | France, Cour d'appel de Montpellier, Chambre sociale, 21 février 2001, 99/00895


FAITS - PROCÉDURE

Le 9 novembre 1998 L'EARL GROTTI-MESTRE a embauché M. X... en qualité d'ouvrier agricole dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée (CIE) devant prendre fin le 8 novembre 2000 pour un salaire brut mensuel de 7.183 Frs.

Le contrat a stipulé une période d'essai de trente jours.

Invoquant "la non-adéquation des contraintes de qualification techniques requises lors de l'embauche après mise à l'épreuve in situ" l'employeur a notifié à M. X... la rupture du contrat de travail par lettre du 21 décembre 1998.

Contestant ce

tte rupture et estimant avoir fait l'objet d'un licenciement abusif et irrégulier M. X....

FAITS - PROCÉDURE

Le 9 novembre 1998 L'EARL GROTTI-MESTRE a embauché M. X... en qualité d'ouvrier agricole dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée (CIE) devant prendre fin le 8 novembre 2000 pour un salaire brut mensuel de 7.183 Frs.

Le contrat a stipulé une période d'essai de trente jours.

Invoquant "la non-adéquation des contraintes de qualification techniques requises lors de l'embauche après mise à l'épreuve in situ" l'employeur a notifié à M. X... la rupture du contrat de travail par lettre du 21 décembre 1998.

Contestant cette rupture et estimant avoir fait l'objet d'un licenciement abusif et irrégulier M. X... a saisi le Conseil des Prud'hommes de NARBONNE lequel par jugement du 2 juin 1999 a retenu que la rupture était intervenue pendant la période d'essai et a débouté M. X... de ses demandes.

M. X... a interjeté appel.

MOYENS - PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. X... demande à la Cour de :

- infirmer le jugement,

- dire son licenciement abusif,

- condamner l'employeur à lui payer les sommes de :

[* 162.335,80 Frs au titre du licenciement abusif,

*] 7.183 Frs au titre de l'irrégularité de procédure,

- ordonner la remise sous astreinte de 500 Frs par jour de retard du certificat de travail et de l'attestation ASSEDIC.

- condamner l'employeur à lui payer la somme de 7.000 Frs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Il soutient que l'employeur a bien procédé à son licenciement comme cela résulte de mentions figurant sur l'attestation ASSEDIC ; qu'au jour de son licenciement la période d'essai était expirée et contrairement aux motifs des premiers juges la convention collective applicable ne prévoit pas que cette période se calcule sur la base des seuls jours ouvrés et travaillés ; que par conséquent il est fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L 122-3-8 du Code du Travail puisque le licenciement est intervenu en dehors des cas visés par ce texte ; qu'un préavis lui a d'ailleurs été payé ce qui est exclusif de la faute grave ; qu'au surplus la procédure de licenciement n'a pas été respectée.

L'EARL GROTTI MESTRE demande à la Cour de :

- confirmer le jugement,

- subsidiairement constater la faute grave et que le salarié ne subit aucun préjudice,

- condamner l'appelant à lui payer la somme de 9.000 Frs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir que la période d'essai de trente jours prévue au contrat de travail doit se calculer en jours ouvrés et

travaillés ; que la rupture est bien intervenue dans le délai ainsi

calculé ; que subsidiairement la faute grave peut être retenue.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La durée de la période d'essai est fixée librement par le contrat sans jamais dépasser la durée maximum légale.

L'article L 122-3-2 du Code du Travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée peut comporter une période d'essai et qu'à défaut d'usages ou de dispositions conventionnelles prévoyant des durées moindres cette période d'essai ne peut excéder une durée calculée à raison d'un jour par semaine dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue du contrat est en plus égale à six mois et d'un mois dans les autres cas.

Si la période d'essai prévue par l'article susvisé en jours se décompte en jours travaillés, en revanche celles prévues en semaines ou en mois de décomptent en semaines civiles ou mois calendaires.

Il résulte de la combinaison de ces règles que la durée de la période d'essai prévu par le contrat de travail à durée déterminée de deux ans conclu entre les parties au présent litige ne pouvait excéder un mois calendaire de sorte que le contrat ayant commencé le 9 novembre 1998 la période d'essai expirait au plus tard le 8 décembre 1998 au soir et que calculer la période d'essai de "trente jours" prévue au contrat en jours travaillés reviendrait à dépasser en réalité le maximum légal prévu par le texte susvisé. C'est d'ailleurs le délai d'un mois et non trente jours qui est prévu par la convention collective du 21 juillet 1998 pour la durée maximum de cette période. La lettre de rupture du 21 décembre 1998 est donc intervenue hors la période d'essai étant d'ailleurs constaté que cette lettre ne fait aucunement référence à la période d'essai.

L'article L 122-3-8 du Code du Travail n'autorise la rupture anticipée du contrat à durée déterminée qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'accord des parties lequel fait défaut en l'espèce. Le motif invoqué par l'employeur pour rompre le contrat ne constitue pas un cas de force majeure lequel n'est pas invoqué d'ailleurs.

Il ne constitue pas davantage une faute grave dès lors que cette qualification n'a pas été visée par l'employeur dans la lettre de rupture, que le préavis qui a été payé au salarié est incompatible avec la faute grave et que le motif retenu de la rupture est susceptible de constituer dans le meilleur des cas pour l'employeur une insuffisance professionnelle laquelle est exclusive de toute

faute et a fortiori de faute grave.

Il s'ensuit qu'en rompant le contrat de travail à durée déterminée après l'expiration de la période d'essai, de façon abusive et de surcroît sans mise en place de la procédure de licenciement, L'EARL GROTTI MESTRE doit être condamnée à payer à M. X... la somme de 165.000 Frs toutes causes de préjudice confondues.

Il y a lieu en outre d'ordonner la remise des documents légaux comme dit au dispositif.

L'équité ne commande pas d'allouer une indemnité au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

REOEOIT M. X... en son appel.

LE DÉCLARE fondé,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

DIT la rupture du contrat de travail à durée déterminée abusive et irrégulière,

CONDAMNE L'EARL GROTTI MESTRE à payer à M. X... la somme de 165.000 Frs toutes causes de préjudice confondues,

DIT que L'EARL GROTTI MESTRE devra remettre à M. X... dans les quinze jours de la notification du présent arrêt le certificat de travail et l'attestation ASSEDIC conformes et rectifiés et dit que passé ce délai elle y sera contrainte sous une astreinte de 100 Frs par jour de retard,

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE L'EARL GROTTI MESTRE aux dépens. LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 99/00895
Date de la décision : 21/02/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Période d'essai - Durée - Détermination.

La durée de la période d'essai est fixée librement par le contrat sans jamais dépasser la durée maximum légale. L'article L. 122-3-2 du Code du travail dispose que le contrat de travail à durée déterminée peut comporter une période d'essai et qu'à défaut d'usages ou de dispositions conventionnelles prévoyant des durées moindres cette période d'essai ne peut excéder une durée calculée à raison d'un jour par semaine dans la limite de deux semaines lorsque la durée initialement prévue du contrat est en plus égale à six mois et d'un mois dans les autres cas. Si la période d'essai prévue en jour par cet article se décompte en jours travaillés, en revanche celle prévue en semaines ou en mois se décompte en semaines civiles ou mois calendaires. Il résulte de la combinaison de ces règles que la durée de la période d'essai prévu par le contrat de travail à durée déterminée de deux ans conclu entre les parties au litige ne pouvait excéder un mois calendaire et que calculer la période d'essai de "trente jours" prévue au contrat en jours travaillés reviendrait à dépasser en réalité le maximum légal prévu par le texte susvisé

CONTRAT DE TRAVAIL - DUREE DETERMINEE - Rupture.

L'article L 122-3-8 du Code du travail n'autorise la rupture anticipée du contrat à durée déterminée qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'accord des parties lequel fait défaut en l'espèce. Il en résulte que La faute grave n'est pas constituée dès lors que cette qualification n'a pas été visée par l'employeur dans la lettre de rupture, que le préavis qui a été payé au salarié est incompatible avec la faute grave, et que le motif retenu de la rupture n'est susceptible de constituer qu'une insuffisance professionnelle laquelle est exclusive de toute faute et a fortiori de faute grave. Il s'ensuit que la rupture du contrat de travail à durée déterminée après l'expiration de la période d'essai est dans ce cas abusive


Références :

Articles L 122-3-2 et L 122-3-8 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2001-02-21;99.00895 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award