Arrêt n° 24/00377
23 Juillet 2024
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N° RG 22/01290 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FXWA
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Pole social du TJ de METZ
29 Avril 2022
17/01420
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ
CHAMBRE SOCIALE
Section 3 - Sécurité Sociale
ARRÊT DU
vingt trois Juillet deux mille vingt quatre
APPELANT:
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représenté par Me Sabrina BONHOMME, avocat au barreau de METZ
INTIMÉS :
L'AGENT JUDICIAIRE DE l' ETAT (AJE)
Ministères économiques et financiers Direction des affaires juridiques
[Adresse 11]
[Adresse 11]
[Localité 6]
Représenté par Me Frédéric BEAUPRE, avocat au barreau de METZ
substitué par Me CABOCEL , avocat au barreau de METZ
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Mme [M], munie d'un pouvoir général
Monsieur [E] [T]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représenté par l'association [8], prise en la personne de Mme [D] [V], salariée de l'association munie d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne FABERT, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre
Mme Carole PAUTREL, Conseillère
Mme Anne FABERT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
M. [E] [T], né le 31 octobre 1946, a travaillé pour le compte des [10] ([10]) devenues l'établissement public [9] ([9]) et ce du 4 septembre 1961 au 6 janvier 1966, puis du 9 mai 1967 au 30 septembre 1995.
Par formulaire 22 octobre 2013, M. [T] a déclaré à la Caisse Autonome Nationale de la Sécurité Sociale dans les Mines - l'Assurance Maladie des Mines (CANSSM) une pathologie au titre du tableau n°30B des maladies professionnelles, transmettant avec ladite demande de reconnaissance un certificat médical initial du docteur [U] du 2 octobre 2013.
Par décision du 13 septembre 2016, la Caisse a pris en charge la maladie de M. [T] au titre du tableau n°30B des maladies professionnelles, relatif aux affections consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante.
Le 14 décembre 2016, la Caisse a notifié à M. [T] un taux d'incapacité permanente partielle de 5%, lui laissant le choix entre le versement d'une indemnité en capital de 1 948,44 euros ou d'une rente annuelle de 1 767,37 euros à la date du 3 octobre 2013. M. [T] a opté pour la rente optionnelle.
En parallèle, M. [T] a saisi le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (FIVA) d'une demande d'indemnisation et a accepté l'offre du FIVA d'un montant de 14 600 euros se décomposant comme suit :
13 400 euros en réparation de son préjudice moral,
200 euros en réparation de son préjudice physique,
1 000 euros en réparation de son préjudice d'agrément.
Après échec de la tentative de conciliation introduite devant l'Assurance Maladie des Mines, M. [T] a, par courrier expédié le 15 septembre 2017, saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de la Moselle (devenu Pôle social du tribunal de grande instance de Metz le 1er janvier 2019, puis Pôle social du tribunal judiciaire de Metz au 1er janvier 2020) d'une action visant à reconnaître de la faute inexcusable de son ancien employeur dans la survenance de sa maladie professionnelle et de bénéficier des conséquences indemnitaires en découlant.
Il convient de préciser que l'établissement public [9] a été définitivement liquidé le 31 décembre 2017, ses droits et obligations étant transférés à l'État, représenté par l'Agent Judiciaire de l'État (AJE).
Par ailleurs, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle (CPAM ou Caisse) qui agit pour le compte de la Caisse Autonome Nationale de la Sécurité Sociale dans les Mines (CANSSM) depuis le 1er juillet 2015, a été mise en cause.
Le FIVA est intervenu volontairement à l'instance.
Par jugement du 29 avril 2022, le Pôle social du tribunal judiciaire de Metz a :
déclaré le jugement commun à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle agissant pour le compte de la Caisse Autonome Nationale de la Sécurité Sociale dans les Mines,
déclaré recevable le recours de M. [T],
déclaré le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante recevable en ses demandes,
dit que la maladie professionnelle déclarée par M. [T] et inscrite au tableau n°30B des maladies professionnelles est due à la faute inexcusable de son employeur, l'AJE venant aux droits de l'établissement [9], anciennement [10],
ordonné la majoration à son maximum de l'indemnité en capital allouée à M. [T] dans les conditions prévues à l'article L.452-2 alinéa 3 du code de la sécurité sociale,
dit que cette majoration suivra l'évolution de son taux d'incapacité permanente en cas d'aggravation de son état de santé et qu'en cas de décès résultant des conséquences de sa maladie professionnelle, le principe de la majoration de l'indemnité restera acquis pour le calcul de la rente du conjoint survivant,
dit que cette majoration sera versée par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie à M. [T],
fixé l'indemnisation du préjudice des souffrances physiques de M. [T] à la somme de 200 euros,
dit que cette somme sera versée par la CPAM de Moselle au FIVA,
débouté le Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante de ses demandes formées au titre des préjudices moral et d'agrément,
rappelé que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie est fondée à exercer son action récursoire contre l'AJE,
condamné l'AJE à rembourser à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle l'ensemble des sommes, en principal et intérêts, qu'elle sera tenue d'avancer sur le fondement des articles L.452-1 à L.452-3 du code de la sécurité sociale au titre de la pathologie professionnelle de M. [T] inscrite au tableau n°30B,
condamné l'AJE aux entiers frais et dépens de la procédure,
condamné l'AJE à verser à M. [T] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
condamné l'AJE à verser au Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Le FIVA a, par déclaration remise au greffe le 11 mai 2022, interjeté appel partiel de cette décision qui lui avait été notifiée par LRAR datée du 4 mai 2022 et dont l'accusé de réception ne figure pas au dossier de première instance, en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes formulées au titre des préjudices moral et d'agrément.
Par conclusions datées du 7 décembre 2022, soutenues oralement à l'audience de plaidoirie par son conseil, le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], demande à la cour de :
déclarer le FIVA recevable et bien fondé en son appel,
Y faisant droit,
infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante présentées au titre des souffrances morales et du préjudice d'agrément de M. [T],
Et, statuant à nouveau sur ce point,
fixer l'indemnisation des préjudices personnels de M. [T] comme suit :
souffrances morales : 13 400 euros,
préjudice d'agrément : 1 000 euros,
Total : 14 400 euros,
dire que la CPAM de Moselle, agissant pour la CANSSM, devra verser cette somme au FIVA, créancier subrogé, en application de l'article L.452-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale,
Y ajoutant,
condamner l'Agent Judiciaire de l'Etat en tant que repreneur du contentieux de l'ancien EPIC [9] à payer au FIVA une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner la partie succombante aux dépens, en application des articles 695 et suivants du code de procédure civile.
Par conclusions datées du 3 janvier 2024, soutenues oralement à l'audience de plaidoirie par son conseil, l'AJE demande à la cour de :
A TITRE PRINCIPAL :
infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Metz du 29 avril 2022 en ce qu'il a reconnu la faute inexcusable de l'AJE dans la survenance de la maladie professionnelle n°30B de M. [T],
infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Metz du 29 avril 2022 en ce qu'il a condamné l'AJE à rembourser à la CPAM/CANSSM l'ensemble des sommes allouées par elles à M. [T],
confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Metz du 29 avril 2022 en ce qu'il a débouté le FIVA de ses demandes d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément et du préjudice pour souffrances morales de M. [T],
A TITRE SUBSIDIAIRE :
réduire à de plus justes proportions les demandes indemnitaires du FIVA,
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
rejeter l'action récursoire de la Caisse au titre des sommes versées pour la majoration de la rente,
rejeter les demandes formulées au titre de l'article 700 du CPC,
dire n'y avoir lieu à dépens.
Par conclusions datées du 10 juillet 2023, soutenues oralement à l'audience de plaidoirie par son représentant, M. [T] demande à la cour de :
confirmer le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Metz rendu le 29 avril 2022 en ce qu'il a dit et jugé que la maladie professionnelle de M. [T], inscrite au tableau n°30B, était due à la faute inexcusable de son employeur, [9], représenté par l'Agent Judiciaire de l'Etat,
statuer ce que de droit quant aux demandes du FIVA,
débouter l'Agent Judiciaire de l'Etat de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
condamner l'Agent Judiciaire de l'Etat à payer à M. [T] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du CPC,
condamner l'ANGDM aux entiers frais et dépens.
Par conclusions datées du 9 janvier 2023, soutenues oralement à l'audience de plaidoirie par son représentant, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) de Moselle intervenant pour le compte de la CANSSM demande à la cour de :
donner acte à la Caisse qu'elle s'en remet à la sagesse de la cour en ce qui concerne la faute inexcusable reprochée à l'AJE,
Le cas échéant :
donner acte à la Caisse qu'elle s'en remet à la cour en ce qui concerne la fixation du montant de la majoration de l'indemnité en capital réclamée par le FIVA,
en tout état de cause, de fixer la majoration de l'indemnité en capital dans la limite de 1 948,44 euros,
constater que la Caisse ne s'oppose pas à ce que le principe de la majoration de l'indemnité en capital reste acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant, en cas de décès de M. [T], consécutivement à sa maladie professionnelle,
prendre acte que la Caisse ne s'oppose pas à ce que la majoration de l'indemnité en capital suive l'évolution du taux d'incapacité permanente partielle de M. [T],
donner acte à la Caisse qu'elle s'en remet à la cour en ce qui concerne la fixation du montant des préjudices extrapatrimoniaux de M. [T],
le cas échéant, de rejeter toute éventuelle demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle n°30B de M. [T],
en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, de condamner l'AJE à rembourser à la CPAM de Moselle l'ensemble des sommes en principal et intérêts, que cet organisme sera tenu d'avancer sur le fondement des articles L.452-1 à L.452-3 du code de la sécurité sociale au titre de la pathologie professionnelle de M. [T] inscrite au tableau n°30B.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il est expressément renvoyé aux écritures des parties et à la décision entreprise.
SUR CE
SUR L'EXPOSITION PROFESSIONNELLE AU RISQUE :
M. [T] sollicite la confirmation du jugement entrepris. Il expose qu'au regard de son parcours professionnel, il a nécessairement été exposé aux poussières d'amiante et précise que son exposition est confirmée par les témoignages produits.
Le FIVA soutient les arguments de M. [T] et considère que l'exposition de ce dernier à l'inhalation des poussières d'amiante est incontestable.
L'AJE sollicite l'infirmation du jugement querellé et conteste l'exposition de M. [T] au risque du tableau n°30B en soulignant que ce dernier n'a pas exécuté les travaux visés par ledit tableau. Il critique les attestations produites par M. [T], notamment quant à la qualité de collègues de travail directs et en ce qu'elles sont générales et stéréotypées, présentant des similitudes entre elles.
La Caisse s'en remet à l'appréciation de la cour.
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Aux termes de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions désignées dans ce tableau. Pour renverser cette présomption, il appartient à l'employeur de démontrer que la maladie est due à une cause totalement étrangère au travail.
Le tableau n°30B désigne les plaques pleurales confirmées par un examen tomodensitométrique comme maladie provoquée par l'inhalation de poussières d'amiante. Ce tableau prévoit un délai de prise en charge de 40 ans et une liste indicative des principaux travaux susceptibles de provoquer cette affection.
En l'espèce, il n'est pas contesté que la maladie dont se trouve atteint M. [T] répond aux conditions médicales du tableau n°30B. Seule est discutée l'exposition professionnelle du salarié au risque d'inhalation de poussières d'amiante.
Il convient de rappeler que les plaques pleurales sont une maladie caractéristique de l'inhalation de poussières d'amiante, et que la liste des travaux prévue au tableau 30B des maladies professionnelles est simplement indicative des travaux susceptibles d'entraîner les affections consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante, de sorte que ce tableau n'impose pas que le salarié ait directement manipulé des produits amiantés, seul important le fait qu'il ait effectué des travaux l'ayant conduit à inhaler habituellement des poussières d'amiante.
Il ressort du relevé de périodes et d'emplois établi par l'Agence Nationale de Garantie des Droits des Mineurs (pièce n°1 de l'AJE) que M. [T] a travaillé au sein des [10], devenues les [9] du 4 septembre 1961 au 6 janvier 1966, puis du 9 mai 1967 au 30 septembre 1995.
Durant ces périodes, il a occupé les postes suivants, principalement au fond :
du 04/09/1961 au 30/11/1962 : trieur (jour),
du 01/12/1962 au 31/05/1965 : apprenti-mineur (fond),
du 01/06/1965 au 06/01/1966 : bowetteur galerie horizontale (fond),
du 09/05/1967 au 31/07/1976 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/08/1976 au 30/09/1976 : équipeur déséquipeur galerie (fond),
du 01/10/1976 au 30/11/1977 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/12/1977 au 28/02/1978 : raucheur (fond),
du 01/03/1978 au 30/04/1978 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/05/1978 au 30/09/1979 : chef de compagnie traçage charbon (fond),
du 01/10/1979 au 29/02/1980 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/03/1980 au 28/02/1981 : chef de compagnie traçage charbon (fond),
du 01/03/1981 au 31/05/1981 : rabasseneur (fond),
du 01/06/1981 au 31/12/1982 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/01/1983 au 31/03/1983 : conducteur machine abattage (fond),
du 01/04/1983 au 30/11/1983 : piqueur traçage charbon (fond),
du 01/12/1983 au 31/07/1984 : transporteur et aide installateur taille (fond),
du 01/08/1984 au 30/09/1985 : piqueur instructeur (fond),
du 01/10/1985 au 31/12/1986 : élargisseur galerie chef de poste (fond),
du 01/01/1987 au 31/03/1987 : installateur traçage et voies (fond),
du 01/04/1987 au 31/08/1995 : élargisseur de galerie chef de poste (fond).
M. [T] produit les témoignages établis par d'anciens collègues de travail, à savoir Mrs [B] [P], [J] [G] et [A] [H] (pièces n°6 à 8 de l'ADEVAT-AMP). L'AJE entend remettre en cause les témoignages au motif qu'ils ne permettent pas d'établir un lien de travail direct entre les témoins et M. [T] et qu'en tout état de cause, les attestations sont stéréotypées et imprécises et ne permettent pas d'établir l'exposition du salarié au risque d'inhalation de poussières d'amiante.
Contrairement aux critiques formulées par l'AJE, il apparaît que les témoignages produits aux débats ne sont pas stéréotypés, dès lors que les attestations sont distinctes et comportent des passages qui leur sont propres.
La cour relève que les témoins allèguent avoir travaillé avec M. [T], ce qui est confirmé par leurs relevés de carrière respectifs (pièces n°6A, 7A et 8A de la victime), l'AJE ne fournissant aucun élément susceptible de remettre en cause cette qualité de collègue de travail direct.
M. [P] déclare que M. [T] a été exposé à l'amiante, alors que les machines d'abattage utilisées au fond étaient équipées d'amiante, comme d'autres éléments tels que les treuils, et les marteaux piqueurs. Il précise que lorsque les électriciens travaillaient sur les coffrets ou les transformateurs, ils soufflaient l'intérieur desdits coffrets, ce qui dispersait des poussières aux alentours.
M. [G] explique que M. [T] et lui-même étaient exposés à l'amiante tous les jours puisqu'ils utilisaient des équipements et matériels amiantés.
M. [H] confirme que M. [T] utilisait des machines et véhicules équipés d'amiante, à savoir les treuils, les scrapeurs, les marteaux piqueurs, les marteaux perforateurs, et souligne que les véhicules libéraient beaucoup de poussières alors que leurs freins et embrayages étaient amiantés. Il indique que M. [T] procédait également au retrait et à la remise en place des joints en amiante sur les conduites.
Les attestations produites aux débats sont suffisamment précises et circonstanciées pour que la cour retienne leur force probante, l'AJE n'apportant aucun élément permettant de contester leur bien-fondé, ou de remettre en cause la sincérité des auteurs et la réalité des tâches décrites par ces derniers.
Il résulte des éléments produits par l'AJE, et notamment de l'Etude [W] (pièce spéciale n°5 de l'AJE), que des poussières fines contenant de l'amiante étaient déposées sur les carters de freins des chargeurs transporteurs et qu'une pollution par des fibres d'amiante était localisée dans le carter du système de freinage des treuils monorail, étant relevé que, si l'étude conclut in fine à une pollution par fibres d'amiante « négligeable », les tests ainsi pratiqués dans cette étude n'ont pas été réalisés en conditions réelles dans un chantier de fond mais en laboratoire, une seule machine étant testée à la fois en position statique.
L'AJE reconnaît également dans ses écritures que « il est vrai que l'opération nécessitait des freinages ; néanmoins, l'analyse réalisée par le Service Sécurité Générale montre que même dans des conditions sévères lors du raccourcissement de la chaîne la libération de fibres au voisinage des convoyeurs blindés était infinitésimale » (page 11 des écritures de l'AJE).
Il est indéniable que M. [T] a travaillé aux côtés des convoyeurs blindés alors qu'il occupait certains postes dans les chantiers du fond, particulièrement lorsqu'il opérait en qualité de conducteur de machine d'abattage.
Il apparaît ainsi constant que la friction des organes de freins des différentes installations et machines utilisées au fond de la mine à la période d'emploi de M. [T] ont été de nature à exposer habituellement l'intéressé à l'inhalation de poussières d'amiante durant ses nombreuses années d'activité au fond, et ce dans un contexte de confinement résultant de la configuration de la mine.
Les éléments présentés par l'AJE, qui concluent à une pollution minime au regard de l'inhalation de poussières d'amiante pour certains matériels ne sauraient écarter la présomption d'imputabilité qui découle de l'établissement de l'exposition habituelle à l'inhalation de poussières d'amiante, indépendamment de la question de la nocivité, le tableau n°30 ne fixant pas de seuil d'exposition à l'agent nocif.
Dans ces conditions, il doit être admis que M. [T] a été exposé de façon habituelle au risque d'inhalation des poussières d'amiante durant sa carrière aux [10].
Dès lors, la présomption d'imputabilité de la maladie au travail trouve à s'appliquer, et l'AJE n'apportant pas la preuve contraire que le travail n'a joué aucun rôle dans le développement de la maladie, le caractère professionnel de la pathologie dont se trouve atteint M. [T] est établi à l'égard de l'établissement public [9] auquel l'AJE est substitué. Le jugement est confirmé.
SUR LA FAUTE INEXCUSABLE DE L'EMPLOYEUR :
M. [T] fait valoir que compte tenu de l'inscription des affections respiratoires liées à l'amiante dans un tableau des maladies professionnelles à partir de 1945, des connaissances scientifiques raisonnablement accessibles à l'époque, de la réglementation applicable relative à la protection contre les poussières et de l'importance de l'organisation et de l'activité de cet employeur, celui-ci aurait dû avoir conscience du danger auquel il exposait son salarié. Il ajoute que ni l'information, ni les moyens nécessaires à sa protection n'ont été mis en 'uvre par [9].
Le FIVA soutient les arguments de M. [T].
L'AJE, outre la contestation de l'exposition au risque d'inhalation de poussières d'amiante, soutient que les [10] ne pouvaient avoir conscience avant 1996 du risque et qu'elles ont mis en 'uvre tous les moyens nécessaires pour protéger les salariés des risques connus à chacune des époques de l'exploitation, avec les données connues et les mesures de protection qui existaient ; qu'elles ont parfaitement satisfait à leur obligation de prévention et de sécurité et qu'aucun défaut d'information ne peut leur être reproché. Il ajoute que très tôt les Houillères se sont préoccupées des masques et de leur efficacité et ont 'uvré contre l'empoussièrement par la mise en place et l'amélioration constante des systèmes d'arrosage, d'abattage des poussières, d'aérage et de capotage.
Il critique les attestations produites, estimant que les nombreuses pièces générales produites par ses soins viennent contredire les affirmations du salarié et de ses témoins.
La Caisse s'en remet à l'appréciation de la cour concernant l'établissement de la faute inexcusable.
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En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés dans l'entreprise.
Les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail mettent par ailleurs à la charge de l'employeur une obligation légale de sécurité et de protection de la santé du travailleur.
Dans le cadre de son obligation générale de sécurité, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant des actions de prévention des risques professionnels, des actions d'information et de formation et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
La preuve de la faute inexcusable de l'employeur incombe à la victime. La faute inexcusable doit s'apprécier en fonction de la législation en vigueur et des connaissances scientifiques connues ou susceptibles de l'avoir été par l'employeur aux périodes d'exposition au risque du salarié.
Sur la conscience du danger par l'employeur :
S'agissant de la conscience du risque, c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le Pôle social du tribunal judiciaire de Metz a retenu que l'employeur a eu ou aurait dû avoir conscience du danger auquel son salarié était exposé.
Sur les mesures prises par l'employeur pour préserver le salarié :
S'agissant des mesures de protection mises en 'uvre, une réglementation en matière de protection contre l'empoussiérage a existé très tôt et a connu une évolution particulière à partir de 1951, date du décret n°51-508 du 04 mai 1951 portant règlement général sur l'exploitation des mines dont l'article 314 énonce : « Des mesures sont prises pour protéger les ouvriers contre les poussières dont l'inhalation est dangereuse ». Également, une instruction du 15 décembre 1975 relative aux mesures de prévention médicales dans les mines de houille a introduit la notion de pneumoconiose autre que la silicose, et a préconisé des mesures de prévention telles que des mesures d'empoussiérage, de classement des chantiers empoussiérés, de détermination de l'aptitude des travailleurs aux différents chantiers et de leur affectation dans les chantiers empoussiérés.
M. [P] expose que les masques dont ils disposaient « ne servaient pratiquement à rien », et qu'ils n'avaient pas été informés des effets nocifs des poussières d'amiante.
M. [G] déclare qu'ils ne savaient pas que les poussières d'amiante étaient dangereuses et qu'il fallait s'en protéger. Il ajoute que la conduite et l'entretien des équipements amiantés se faisaient sans précaution particulière, ni consigne de sécurité, et que les masques « déjà peu utilisés pour les poussières de charbon ou de pierre » n'étaient pas utilisés pour l'amiante puisque le risque n'était pas connu.
M. [H] précise que les véhicules équipés de freins et d'embrayages amiantés dispersaient beaucoup de poussières et que les travaux sur les équipements amiantés s'effectuaient sans protection respiratoire efficace puisque lui-même et M. [T] n'avaient aucune consigne orale ou écrite les informant des dangers de l'amiante pour la santé.
Les témoins confirment que M. [T] et eux-mêmes ne disposaient pas de protections individuelles respiratoires efficaces contre les poussières d'amiante et qu'ils n'ont jamais été informés par l'employeur sur les dangers liés à l'inhalation de poussières d'amiante, ce dernier n'ayant pas mis en place de consignes concernant le port du masque en cas d'intervention sur des équipements amiantés. Il est constant que les mineurs ne pouvaient se protéger efficacement d'un danger contre lequel ils n'avaient pas été mis en garde et pour lequel l'employeur n'avait pas mis en place de consignes.
Les témoignages de Mrs [P] et [H] mettent en évidence l'inefficacité des systèmes d'aération et d'abattage des poussières évoqués par l'AJE, puisqu'ils évoquent respectivement le dégagement de poussières lors de l'utilisation de machines amiantées, ainsi que le fait que les véhicules libéraient une quantité importante de poussières dans l'air.
Ces témoignages ne sont pas utilement contestés par l'AJE, lequel ne verse au dossier aucun élément de nature à remettre utilement en cause la sincérité des auteurs des témoignages et le caractère authentique des faits relatés.
Ainsi les témoins confirment que M. [T] et eux-mêmes ne disposaient pas de protections individuelles et collectives efficaces et obligatoires contre les poussières d'amiante et qu'ils n'ont jamais été informés par l'employeur sur les dangers liés à l'inhalation de poussières d'amiante.
Il sera relevé en outre que l'AJE ne peut sans contradiction prétendre que les [10], puis les [9], ne pouvaient pas avoir conscience du danger lié au risque amiante avant 1996, et en même temps affirmer qu'ils ont pris les mesures nécessaires pour protéger M. [T] contre ce risque.
Par ailleurs, l'examen des pièces générales produites par l'AJE établit que la lutte contre les poussières avait manifestement pour objectif essentiel la lutte contre la silicose.
Enfin, quant aux dispositifs de prévention médicale mis en avant par l'AJE, il apparaît nécessaire de rappeler que si ces dispositifs permettaient de détecter une éventuelle pathologie et d'en éviter potentiellement l'aggravation, ils n'avaient aucunement pour vocation de prévenir l'apparition des maladies. En outre, il n'est pas établi que M. [T] en aurait personnellement bénéficié.
En l'état de l'ensemble de ces constatations, il doit donc être retenu que les [9], qui avaient conscience du danger auquel M. [T] était exposé, n'ont pas pris les mesures de protection individuelle nécessaires pour l'en préserver et ont ainsi commis une faute inexcusable à son égard.
Il s'ensuit que la maladie professionnelle inscrite au tableau n°30B dont est atteint M. [T] doit être déclarée due à la faute inexcusable de [9], le jugement du 29 avril 2022 étant donc confirmé.
SUR LES CONSEQUENCES FINANCIERES DE LA FAUTE INEXCUSABLE
Sur la majoration de l'indemnité en capital
Aux termes de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, la victime a le droit à une indemnisation complémentaire.
Aux termes de l'article L.452-2, alinéas 1, 2 et 6, du code de la sécurité sociale, « dans le cas mentionné à l'article précédent [faute inexcusable de l'employeur], la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités qui leur sont dues en vertu du présent livre. Lorsqu'une indemnité en capital a été attribuée à la victime, le montant de la majoration ne peut dépasser le montant de ladite indemnité [...] La majoration est payée par la caisse, qui en récupère le capital représentatif auprès de l'employeur dans des conditions déterminées par décret ».
L'article R.452-2 du même code ajoute que « Lorsqu'une indemnité en capital attribuée en application de l'article L. 434-1 a été remplacée par une rente, dans les conditions de l'article R. 434-4, le montant de la majoration due en cas de faute inexcusable de l'employeur est calculé conformément au deuxième alinéa de l'article L. 452-2 ».
En l'espèce, compte tenu du taux d'incapacité permanente partielle qui lui a été reconnu (5%), M. [T] a opté pour la rente optionnelle d'un montant annuel de 1 779,75 euros à la date du 3 octobre 2013.
Aucune discussion n'existe à hauteur de cour concernant la majoration de l'indemnité allouée à M. [T] par conséquent, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné la majoration de l'indemnité octroyée à M. [T]. Cette majoration suivra l'évolution du taux d'incapacité permanente partielle de M. [T], et le principe de cette majoration restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant en cas de décès de M. [T], consécutivement à sa maladie professionnelle.
Cette majoration sera versée par la Caisse directement à M. [T].
Sur les préjudices personnels de M. [E] [T]
Il résulte de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale qu'« indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. [...] La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur ».
sur les souffrances physiques et morales
Le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], sollicite l'indemnisation des souffrances morales subies par ce dernier à hauteur de 13 400 euros. Il fait valoir que le préjudice moral est caractérisé par la spécificité de la situation des victimes de l'amiante, amenées à constater le développement de la maladie et son évolution. S'agissant du préjudice pour les souffrances physiques dont il demande la confirmation du jugement, le FIVA ajoute que les plaques pleurales entraînent des souffrances physiques.
L'AJE sollicite le rejet des demandes présentées par le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], en indiquant que ce dernier ne peut se prévaloir de l'existence de préjudices, physique et moral, antérieurs à la date de consolidation, dans la mesure où cette dernière coïncide avec la date du certificat médical initial, ceci d'autant qu'il ne produit aucun élément pour en justifier. L'AJE ajoute qu'il appartient à la victime qui se prévaut de souffrances physiques et morales postérieures à la date de consolidation d'en justifier.
La Caisse s'en rapporte à la sagesse de la cour.
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Il résulte de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale que se trouvent indemnisées à ce titre l'ensemble des souffrances physiques et morales éprouvées depuis l'accident ou l'événement qui lui est assimilé.
En considération du caractère forfaitaire de la rente au regard de son mode de calcul tenant compte du salaire de référence et du taux d'incapacité permanente défini à l'article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, la Cour de cassation juge désormais, par un revirement de jurisprudence, que la rente versée par la Caisse à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle ne répare pas le déficit fonctionnel permanent (Cour de cassation, Assemblée plénière du 20 janvier 2023, pourvoi n° 21-23947)
En l'espèce, la victime, en application de l'article L.434-1 du code de la sécurité sociale, s'est vue attribuer une indemnité en capital, son taux d'incapacité permanente partielle étant inférieur à 10%. Il y a lieu d'admettre, eu égard à son mode de calcul, son montant étant déterminé par un barème forfaitaire fixé par décret en fonction du taux d'incapacité permanente, que cette indemnité ne répare pas davantage le déficit fonctionnel permanent.
Dès lors, le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], est recevable en sa demande d'indemnisation des souffrances physiques et morales subies par la victime sous réserve qu'elles soient caractérisées.
S'agissant des souffrances physiques, le FIVA produit des pièces médicales (compte-rendu de scanner thoracique, explorations fonctionnelles respiratoires) (pièces n°10 à 12 du FIVA), lesquelles ne permettent pas d'imputer des souffrances physiques à la maladie professionnelle dont M. [T] est atteint.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a octroyé une somme de 200 euros au FIVA en réparation des souffrances physiques de M. [T] et la demande formée à ce titre par le FIVA rejetée.
S'agissant du préjudice moral, M. [T] était âgé de 66 ans lorsqu'il a appris qu'il était atteint de plaques pleurales. L'anxiété indissociablement liée au fait de se savoir atteint d'une maladie irréversible due à l'amiante, dont bon nombre de ses anciens collègues sont atteints parfois de formes plus graves ou sont décédés, et aux craintes de son évolution péjorative à plus ou moins brève échéance, sera réparée par l'allocation d'une somme de 11 000 euros de dommages-intérêts eu égard à la nature de la pathologie en cause et à l'âge de M. [T] au moment de son diagnostic.
sur le préjudice d'agrément
L'indemnisation de ce poste de préjudice suppose qu'il soit justifié de la pratique régulière par la victime, antérieurement à sa maladie professionnelle, d'une activité spécifique sportive ou de loisir qu'il lui est désormais impossible de pratiquer.
En l'espèce, le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], sollicite l'octroi d'une indemnité de
1 000 euros en réparation de son préjudice d'agrément, caractérisé par les désagréments subis par la victime dans ses activités de loisirs pour tout effort physique impliquant une mobilisation de sa capacité respiratoire.
L'AJE s'oppose à l'indemnisation du préjudice d'agrément en indiquant que le FIVA, subrogé dans les droits de M. [T], ne produit pas d'éléments susceptibles de justifier d'un tel préjudice.
La Caisse s'en rapport à la sagesse de la cour.
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En l'espèce, force est de constater que le FIVA ne rapporte pas la preuve de la pratique régulière par M. [T] antérieurement à sa maladie professionnelle d'une activité spécifique sportive ou de loisir, quelle qu'elle soit.
La demande présentée par le FIVA au titre du préjudice d'agrément sera ainsi rejetée.
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C'est en définitive la somme de 11 000 euros que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Moselle, agissant pour le compte de la CANSSM, devra verser au FIVA, créancier subrogé, au titre du préjudice moral subi par M. [T].
SUR L'ACTION RECURSOIRE DE LA CAISSE
Aux termes de l'article L.452-3-1 du Code de la Sécurité Sociale, applicable aux actions en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur introduites devant les Tribunaux des affaires de sécurité sociale à compter du 1er janvier 2013, que « quelles que soient les conditions d'information de l'employeur par la caisse au cours de la procédure d'admission du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie, la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur par une décision de justice passée en force de chose jugée emporte l'obligation pour celui-ci de s'acquitter des sommes dont il est redevable à raison des articles L.452-1 à L.452-3 du même code ».
En outre, les articles L.452-2, alinéa 6, et D.452-1 du Code de la Sécurité Sociale, applicables aux décisions juridictionnelles relatives aux majorations de rentes et d'indemnités en capital rendues après le 1er avril 2013, prévoient en outre que le capital représentatif des dépenses engagées par la caisse au titre de la majoration est, en cas de faute inexcusable, récupéré dans les mêmes conditions et en même temps que les sommes allouées au titre de la réparation des préjudices mentionnés à l'article L.452-3.
Cette obligation incombant à l'employeur de s'acquitter des sommes versées par la Caisse prévue par les articles ci-dessus mentionnés n'est pas soumise à la moindre condition, de sorte que l'AJE s'oppose vainement à cette action récursoire de la Caisse au titre de la majoration de l'indemnité en capital versée sous forme de rente, au motif pris de l'absence de préjudice professionnel du fait du départ à la retraite de M. [T].
Dès lors, la CPAM de Moselle, agissant pour le compte de la CANSSM, est fondée à exercer son action récursoire à l'encontre de l'AJE.
Par conséquent, l'AJE doit être condamné à rembourser à la CPAM de Moselle, les sommes qu'elle sera tenue d'avancer au titre de la majoration de l'indemnité en capital versée sous forme de rente, ainsi que des préjudices extrapatrimoniaux subis par M. [T].
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
L'issue du litige conduit la Cour à condamner l'AJE à payer au FIVA, qui est en droit comme tout justiciable de solliciter que son adversaire qui succombe supporte les frais irrépétibles qu'il a exposés la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'AJE sera condamné à verser à M. [T] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a condamné l'AJE à verser 1 000 euros à M. [T], et 800 euros au FIVA, sur base des dispositions de l'article susvisé, ainsi qu'aux seuls dépens de première instance engagés à compter du 1er janvier 2019.
L'AJE qui succombe sera également condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
CONFIRME le jugement entrepris du 29 avril 2022 du Pôle social du tribunal judiciaire de Metz, sauf en ce qu'il a :
fixé l'indemnisation du préjudice de souffrances physiques de M. [E] [T] à la somme de 200 euros,
débouté le FIVA, subrogé dans les droits de M. [E] [T], de ses demandes formulées au titre des souffrances morales,
condamné l'AJE aux dépens de la procédure,
Statuant à nouveau sur les points infirmés, et y ajoutant,
FIXE l'indemnité en réparation du préjudice moral de M. [E] [T] à la somme de 11 000 euros (onze mille euros), et DIT que cette somme, qui portera intérêt au taux légal à compter de la présente décision, devra être versée au Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante (FIVA), créancier subrogé dans les droits de M. [E] [T], par la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Moselle, agissant pour le compte de la CANSSM ' l'Assurance Maladie des Mines, et si besoin l'y CONDAMNE,
DEBOUTE le FIVA, subrogé dans les droits de M. [E] [T] de ses demandes au titre des souffrances physiques,
CONDAMNE l'Agent judiciaire de l'Etat (AJE) à rembourser à la CPAM de Moselle, agissant pour le compte de la CANSSM ' l'Assurance Maladie des Mines, les sommes, en principal et intérêts, qu'elle aura versées à M. [E] [T] au titre de la majoration de l'indemnité en capital versée sous forme de rente et des préjudices extrapatrimoniaux de la victime, sur le fondement des articles L.452-1 à L.452-3 du code de la sécurité sociale,
CONDAMNE l'AJE à payer à M. [E] [T], la somme de 2 500 euros (deux mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE l'AJE à payer au FIVA la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE l'AJE aux dépens d'appel et à ceux de première instance engagés à compter du 1er janvier 2019.
La Greffière, Le Président,