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05/07/2024 | FRANCE | N°24/00526

France | France, Cour d'appel de Metz, Rétention administrative, 05 juillet 2024, 24/00526


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024





Nous, Géraldine GRILLON, conseillère, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sarah PETIT, greffière ;



Dans l'affaire N° RG 24/00526 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GGCI opposant :



M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE



Et

M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE



À



M. [M] [P]

né le 08 août 1998 à [Loc

alité 1] (GUINEE)

de nationalité GUINEENNE

Actuellement en rétention administrative.



Vu la décision de M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE prononçant l'obligation de ...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024

Nous, Géraldine GRILLON, conseillère, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sarah PETIT, greffière ;

Dans l'affaire N° RG 24/00526 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GGCI opposant :

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE

Et

M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE

À

M. [M] [P]

né le 08 août 1998 à [Localité 1] (GUINEE)

de nationalité GUINEENNE

Actuellement en rétention administrative.

Vu la décision de M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE prononçant l'obligation de quitter le territoire français et prononçant le placement en rétention de l'intéressé pour une durée n'excédant pas 48 heures ;

Vu la requête de M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE saisissant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz tendant à la prolongation du maintien de l'intéressé dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de quinze jours ;

Vu l'ordonnance rendue le 04 juillet 2024 à 9h32 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz ordonnant la remise en liberté de M. [M] [P] ;

Vu l'appel de Me RANNOU de la SELARL Centaure du barreau de Paris représentant M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE interjeté par courriel du 04 juillet 2024 à 14h41 contre l'ordonnance ayant remis M. [M] [P] en liberté ;

Vu l'appel avec demande d'effet suspensif formé le 04 juillet 2024 à 14h15 par M. le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Metz;

Vu l'ordonnance du 04 juillet 2024 à 17h15 conférant l'effet suspensif à l'appel du procureur de la République et ordonnant le maintien de M. [M] [P] à disposition de la Justice ;

Vu l'avis adressé à M. le procureur général de la date et l'heure de l'audience ;

A l'audience publique de ce jour, à 14 H 30, en visioconférence se sont présentés :

- Mme Lucile BANCAREL, substitut général, qui a présenté ses observations au soutien de l'appel du procureur de la République, présente lors du prononcé de la décision

- Me Dominique MEYER, avocate au barreau de Metz substituant la SELARL Centaure avocats du barreau de Paris, représentant M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE qui a présenté ses observations et a sollicité l'infirmation de la décision présente lors du prononcé de la décision

- M. [M] [P], intimé, assisté de Me Saïda BOUDHANE, présente lors du prononcé de la décision ;

SUR CE,

Il convient d'ordonner la jonction des procéduresN° RG 24/00524 et N°RG 24/00526 sous le numéro RG 24/00526.

Sur la prolongation de la mesure de rétention :

Au soutien de leurs appels, le Ministère public et M. Le préfet de la Meurthe et Moselle font valoir que l'intéressé représente une menace à l'ordre public pour de nombreux vols et conduites sans permis, faits répétés à de nombreuses reprises et susceptibles d'être commis de nouveau ; que c'est à tort que l'intéressé voudrait limiter le prononcé d'une quatrième prolongation à l'hypothèse d'un trouble qui aurait eu lieu dans les 15 jours précédents alors qu'une telle prolongation ne se fonde pas sur un trouble donné et intervenu dans le passé mais sur la menace que représente l'intéressé pour l'avenir et qui se déduit de l'ensemble de ses actes ; que cette menace constitue un état constant et justifie la 4e prolongation indépendamment du moment où elle a commencé ; que les travaux parlementaires ne révèlent aucune volonté de distinguer le régime entre 3ème et 4ème prolongations ; que la formulation de l'article L742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est issue d'un amendement du gouvernement adopté pour la première fois par le sénat le 30 octobre 2023 et qui avait pour objectif que le juge tienne particulièrement compte de comportements menaçant l'ordre public susceptibles de révéler un risque de soustraction à la procédure d'éloignement à chaque fois qu'il est saisi aux fins de prolongation de la rétention selon les débats parlementaires ; que le ministre de l'intérieur a présenté dans un discours l'introduction de la menace à l'ordre public dans les articles sur le placement en rétention et les prolongations comme une forme de politique tournée contre la délinquance ; qu'à aucun moment, il n'apparait que le législateur aurait voulu permettre de façon générale la rétention et la 3e prolongation de rétention de personnes représentant une menace à l'ordre public, mais aurait voulu limiter la 4e prolongation au cas très particulier de personnes représentant une menace seulement lors de l'exécution d'une troisième prolongation de rétention ; qu'il s'en déduit donc que le dernier alinéa de l'article L 741-5 qui prévoit une quatrième prolongation en cas de survenance dans les 15 derniers jours d'une des hypothèses de troisième prolongation, dont la menace à l'ordre public, ne s'analyse pas comme commandant l'apparition d'un trouble ou d'une menace durant les 15 jours précédents mais plutôt comme imposant que cette menace persiste toujours dans ces mêmes 15 jours ; que l'intéressé représente bien une menace à l'ordre public puisqu'il a commis plusieurs faits de violences aggravées et a été condamné pour ce motif, ainsi que pour des faits de détention d'arme.

M. [M] [P] demande la confirmation de la décision entreprise. Il fait valoir que la rédaction de l'article L. 742.5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa nouvelle rédaction, exige que la menace à l'ordre public survienne dans les 15 derniers jours, et qu'aucune condition de cet article n'est remplie en l'espèce pour permettre une quatrième prolongation. L'interprétation telle que voulue par les appelants reviendrait à automatiser la rétention dès qu'une menace à l'ordre public est constatée.

*****

Selon l'article L 742.5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.

Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre vingt-dix jours.

Le recours par le législateur à la notion d'exception pour autoriser une 4ème prolongation, oblige à faire une interprétation stricte de la loi.

En l'espèce, dans le délai de 15 jours au cours de la 3ème prolongation, M. [P] n'a pas fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ; il n'a pas non plus présenté dans ce délai, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement une demande de protection contre l'éloignement ou une demande d'asile ; de même, dans ce délai de 15 jours au cours de la 3ème prolongation, n'est pas survenue la circonstance d'une urgence absolue ou d'une menace pour l'ordre public ; en effet, au cours de cette seconde prolongation expressément qualifiée d'exceptionnelle par la loi et devant se conformer en conséquence à des critères précisément visés par le texte, il n'est pas démontré que M. [P] a adopté un comportement pouvant caractériser une menace à l'ordre public ou qu'une urgence absolue s'est manifestée ; il n'est pas fait état d'un quelconque incident en rétention ni d'une attitude susceptible de constituer une infraction apparus dans le délai de quinze jours de la 3ème prolongation.

En conséquence, il convient de confirmer l'ordonnance entreprise qui a rejeté la demande de quatrième prolongation.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

ORDONNONS la jonction des procédures N° RG 24/00524 et N°RG 24/00526 sous le numéro RG 24/00526.

DÉCLARONS recevable les appels de M. le préfet de la Meurthe et Moselle et de M. le procureur de la République de Metz à l'encontre de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz du 4 juillet 2024 à 9h32 ayant remis en liberté M. [M] [P].

CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Metz le 04 juillet 2024 à 9h32 qui a rejeté la requête du préfet et qui a remis en liberté M. [M] [P].

PRECISONS à M. [M] [P] qu'il reste soumis à une obligation de quitter le territoire français.

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance

Disons n'y avoir lieu à dépens.

Prononcée publiquement à Metz, le 05 juillet 2024 à 14h50.

La greffière, La conseillère,

N° RG 24/00526 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GGCI

M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE contre M. [M] [P]

Ordonnnance notifiée le 05 Juillet 2024 par courriel, par le greffe de la chambre des libertés de la cour d'appel à :

- M. LE PREFET DE LA MEURTHE ET MOSELLE et son conseil, M. [M] [P] et son représentant, au cra de Metz, au jld de Metz, au procureur général de la cour d'appel de Metz


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00526
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;24.00526 ?
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