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03/07/2024 | FRANCE | N°21/02455

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 03 juillet 2024, 21/02455


Arrêt n° 24/00278



03 juillet 2024

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N° RG 21/02455 -

N° Portalis DBVS-V-B7F-FTAH

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

07 septembre 2021

F 20/00161

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



Trois juillet deux mille vingt quatre







APPELANTE :

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SAS JACOB prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Cyrille GUENIOT, avocat au barreau de NANCY







INTIMÉ :



M. [R] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté...

Arrêt n° 24/00278

03 juillet 2024

---------------------

N° RG 21/02455 -

N° Portalis DBVS-V-B7F-FTAH

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

07 septembre 2021

F 20/00161

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Trois juillet deux mille vingt quatre

APPELANTE :

SAS JACOB prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Cyrille GUENIOT, avocat au barreau de NANCY

INTIMÉ :

M. [R] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Yassin BOUAZIZ de la SELARL HAYA AVOCATS, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 septembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE, en présence de Mme [K] [M], greffière stagiaire

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement contradictoire du 7 septembre 2021 de la formation paritaire de la section encadrement du conseil de prud'hommes de Forbach qui a statué dans les termes suivants :

' Déclare la demande de Monsieur [R] [U] recevable et bien fondée ;

En conséquence,

Condamne la SAS Jacob à verser à Monsieur [R] [U] la somme de 17 416 € au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence pour la période du 20 juin 2020 au 31 décembre 2020 ;

Condamne la SAS Jacob à verser une indemnité forfaitaire mensuelle brute de 2 750 € sur justification par Monsieur [U] du droit à l'indemnité de non-concurrence pour la période du 1er janvier 2021 au 19 juin 2021 ;

Condamne la SAS Jacob à verser à Monsieur [U] la somme de 1 741,60 € à titre d'indemnités de congés payés sur la contrepartie financière de la clause de non-concurrence;

Condamne la SAS Jacob au paiement d'une somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute la SAS Jacob de sa demande de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres frais et dépens.'

Vu la déclaration d'appel interjeté par voie électronique le 5 octobre 2021 par la société Jacob ;

Vu les dernières conclusions déposées par voie électronique le 30 juin 2022 par la société Jacob qui requiert la cour :

- d'infirmer le jugement, en ce qu'il a déclaré la demande de M. [U] recevable et bien fondée, en ce qu'il l'a condamnée à payer à M. [U] la somme de 17 416 euros à titre de contrepartie financière de la clause de non-concurrence pour la période du 20 juin 2020 au 31 décembre 2020, en ce qu'il l'a condamnée à verser une indemnité mensuelle brute de 2 750 euros sur justification par M. [U] du droit à l'indemnité de non-concurrence pour la période du 1er janvier 2021 au 19 juin 2021 et en ce qu'il l'a condamnée à verser à M. [U] la somme de 1 741,60 euros à titre d'indemnité de congés payés sur la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, en ce qu'il l'a condamnée au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande à hauteur de 3 000 euros sur le fondement de ce même article et en ce qu'il a laissé à chaque partie la charge de ses propres frais et dépens ;

statuant à nouveau,

- de débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes ;

- de condamner M. [U] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions déposées par voie électronique le 30 mars 2022 par M. [U] qui sollicite que la cour :

- rejette l'appel ;

- confirme le jugement, sauf en ce qu'il lui a laissé la charge de ses propres 'frais et dépens' ;

- condamne la 'SAS [U]' à lui payer la somme de 32 907,67 euros brut à titre de contrepartie financière à la cause de non-concurrence et la somme de 3 290,76 euros brut à titre de congés payés y afférents ;

- condamne la société Jacob au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture du 5 juillet 2023 ;

Vu les autres pièces de la procédure et celles produites par les parties ;

M. [R] [U] a été embauché à durée indéterminée à compter du 26 février 2018 par la SAS Jacob, en qualité de cadre dirigeant, directeur de site, moyennant un salaire annuel de 65 000 euros brut, outre une prime annuelle d'objectif.

Les parties ont stipulé à l'article 16 du contrat de travail relatif à l'obligation de non-concurrence :

''(...) Ladite interdiction est limitée à une période de 12 mois et couvre le territoire français métropolitain.

En considération de la clause de non-concurrence stipulée ci-dessus, une fois que le Contrat de Travail sera effectivement terminé et pendant la période de ladite interdiction de concurrence, le Salarié percevra une indemnité mensuelle spéciale, correspondant à cinquante pour cent (50 %) de sa rémunération mensuelle brute de base.

Cependant, la Société pourra libérer Monsieur [R] [U] de son obligation de non-concurrence et ainsi se libérer du paiement de l'indemnité stipulée ci-dessus. La Société a la possibilité de renoncer à l'obligation de non-concurrence dans un délai de 15 jours suivant la notification de la rupture du Contrat de Travail par lettre recommandée avec accusé de réception, ou à tout moment pendant l'exécution du Contrat de Travail'.

La convention collective des services de l'automobile était applicable à la relation de travail.

Par courrier du 20 mai 2020 remis le même jour à son employeur, M. [U] a présenté sa démission avec effet au 20 août 2020 seulement, en raison du délai de préavis de trois mois.

Par lettre du 10 juin 2020 adressée à la société Jacob, le salarié a pris acte du maintien de la clause de non-concurrence, n'ayant pas reçu de courrier 'dans un délai de 15 jours après réception de ma démission comme le stipule mon contrat de travail'.

Par courrier du 22 juin 2020, la société Jacob, après avoir relevé que M. [U] avait effectué le 18 juin 2020 son 'dernier jour en présentiel sur site', a 'confirm(é) lever cette clause de non-concurrence' ajoutant qu'aucune contrepartie financière n'était ainsi due.

Estimant que la société Jacob n'avait pas valablement renoncé à la clause de non-concurrence, M. [U] a saisi, le 3 septembre 2020, la juridiction prud'homale.

Sur la renonciation à la clause de non-concurrence

En cas de rupture du contrat de travail avec dispense d'exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l'obligation de non-concurrence, la date d'exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celle du départ effectif de l'entreprise.

Il en résulte que l'employeur qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires. (jurisprudence : Cour de cassation, ch. soc., 13 mars 2013 pourvoi n° 11-21.150 et 21 janvier 2015 pourvoi n° 13-24.471).

En l'espèce, il n'est pas contesté que :

- M. [U] a été dispensé de l'exécution du préavis ;

- le dernier jour de travail effectif de l'intimé remonte au 18 juin 2020, comme cela ressort du courrier du 22 juin 2020 de l'employeur qui relève que 'Votre dernier jour en présentiel sur site (a) été le 18 juin 2020" ;

- l'employeur a manifesté sa volonté de lever la clause de non-concurrence dans ce même courrier du 22 juin 2020.

Il ressort de cette chronologie que la société Jacob a entendu renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence quelques jours après le départ effectif de M. [U] de l'entreprise, la société Jacob indiquant d'ailleurs dans sa lettre du 22 juin 2020 'Nous attendions votre départ effectif de la Société pour (...) lever' la clause, ce qui était en réalité trop tardif.

La société Jacob se prévaut de la situation d'urgence sanitaire qui existait alors et de l'article 2 de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, à savoir:

'Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. (...)

Le présent article n'est pas applicable aux délais de réflexion, de rétractation ou de renonciation prévus par la loi ou le règlement, ni aux délais prévus pour le remboursement des sommes d'argent en cas d'exercice de ces droits.'

En l'espèce, le premier alinéa de l'article 2 précité n'est pas applicable, puisqu'il ne mentionne pas la renonciation dans la liste qu'il détaille.

En tout état de cause, il n'autorise pas à repousser une date limite déterminée non par l'expiration d'un délai pour agir, mais par la survenance d'un événement précis, comme c'est le cas du dernier jour de travail effectif d'un salarié démissionnaire dispensé de préavis.

En conséquence, la renonciation par la société Jacob est intervenue hors délai, peu important les stipulations du contrat de travail à ce sujet et l'interprétation de celles-ci par les parties.

Sur la contrepartie financière

L'employeur qui renonce à la clause hors délai reste tenu au paiement, du moins pendant la période pendant laquelle le salarié a respecté la clause.

En l'espèce, la société Jacob expose qu'il n'est justifié du respect de la clause de non-concurrence que sur la période allant du 30 juin 2020 au 31 décembre 2020 et qu'il appartiendra à la cour de s'en assurer pour la période du 1er janvier 2021 au 19 juin 2021.

M. [U] justifie qu'il a retrouvé un emploi à compter du 15 février 2021 au Grand-Duché du Luxembourg (sa pièce n° 7) donc hors du territoire français métropolitain mentionné dans la clause litigieuse, de sorte qu'il n'y a pas eu violation par le salarié de son obligation de non-concurrence.

En conséquence, la société Jacob est condamnée à payer à M. [U] la somme de 32 907,67 euros brut à titre de contrepartie financière pour une durée d'un an à compter du 19 juin 2020, ainsi que la somme de 3 290,76 euros brut de congés payés y afférents, le jugement étant infirmé sur ces montants.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement est confirmé en ce qui concerne ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile, mais infirmé s'agissant des dépens de première instance.

La société Jacob est déboutée de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, mais condamnée à payer à M. [U] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés par celui-ci en cause d'appel.

La société Jacob est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, en application de l'article 696 du même code

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement, sauf en ses dispositions relatives au montant de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence et aux congés payés y afférents, ainsi que sur les dépens de première instance ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la SAS Jacob à payer à M. [R] [U] les sommes suivantes :

- 32 907,67 euros brut à titre de contrepartie financière due pour une durée d'un an à compter du 19 juin 2020 ;

- 3 290,76 euros brut au titre des congés payés y afférents ;

- 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par M. [R] [U] en cause d'appel ;

Rejette la demande présentée par la SAS Jacob sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS Jacob aux dépens de première instance et d'appel.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 21/02455
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;21.02455 ?
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