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24/06/2024 | FRANCE | N°22/01197

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 3, 24 juin 2024, 22/01197


Arrêt n° 24/00309



24 Juin 2024

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N° RG 22/01197 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FXP4

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Pole social du TJ de METZ

13 Avril 2022

20/01161

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale





ARRÊT DU



vingt quatre Juin deux mille vingt quatre







APPELANTE :



Société [6]

[Adresse 2]

L-16

1 LUXEMBOURG

Représentée par Me François MAUUARY, avocat au barreau de METZ

substitué par Me CABOCEL , avocat au barreau de METZ



INTIMÉE :



URSSAF DE LORRAINE

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me François BATTL...

Arrêt n° 24/00309

24 Juin 2024

---------------

N° RG 22/01197 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FXP4

------------------

Pole social du TJ de METZ

13 Avril 2022

20/01161

------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale

ARRÊT DU

vingt quatre Juin deux mille vingt quatre

APPELANTE :

Société [6]

[Adresse 2]

L-161 LUXEMBOURG

Représentée par Me François MAUUARY, avocat au barreau de METZ

substitué par Me CABOCEL , avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

URSSAF DE LORRAINE

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me François BATTLE, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne FABERT, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre

Mme Carole PAUTREL, Conseillère

Mme Anne FABERT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement après prorogation au 27.05.2024

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 12 janvier 2017, l'URSSAF Lorraine a fait signifier par acte d'huissier transformé en procès-verbal de recherches infructueuses, à la société [5], devenue la société de droit luxembourgeois [6], une contrainte n° 899663 en date du 10 janvier 2017 établie pour un montant total de 22 818 euros.

La société [6] vient aux droits de la société [5], radiée du registre français du commerce et des sociétés le 31 décembre 2012 ; son siège social se situe désormais au Luxembourg sous la dénomination [6].

Dix-neuf autres contraintes, établies entre le 2 février 2011 et le 4 juillet 2012, ont été décernées à l'encontre de la société [5], devenue [6].

L'ensemble des sommes dues au titre de ces différentes contraintes ont fait l'objet d'une sommation de payer signifiée le 26 janvier 2018.

Selon requête déposée au greffe le 8 octobre 2020, la société [6], venant aux droits de la société [5], a saisi le Pôle social du tribunal judiciaire de Metz d'une opposition à la contrainte du 10 janvier 2017.

A l'audience de plaidoirie du Pôle social du Tribunal judiciaire (de Metz), l'URSSAF a relevé qu'un précédent jugement avait été rendu le 18 décembre 2020 (réf. RG 19/695) dans un litige l'opposant à la société [6], dans lequel une partie de la saisine en litige a été vidée.

Par jugement prononcé le 13 avril 2022, le Pôle social du tribunal judiciaire de Metz a statué de la façon suivante :

Déclare irrecevable l'opposition formée par la société [6] à l'encontre de la contrainte n°899663 du 10 janvier 2017 décernée en recouvrement de la somme de 22 818 euros ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur le fond ;

Condamne la société [6] aux dépens ;

Condamne la société [6] à verser à l'URSSAF de Lorraine la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que la décision est exécutoire à titre provisoire.

La société [6] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée au greffe par voie électronique le 12 mai 2022.

Par des écritures datées du 10 août 2023 soutenues oralement à l'audience de plaidoirie par son conseil, la société [6] demande à la cour de :

Infirmer le jugement du Pôle social du tribunal judiciaire de Metz du 13 avril 2022 en ce qu'il a :

. déclaré irrecevable l'opposition formée par la société [6] à l'encontre de la contrainte n°899663 du 10 janvier 2017 décernée en recouvrement de la somme de 22 818 euros ;

. dit n'y avoir lieu à statuer sur le fond ;

. condamné la société [6] aux dépens ;

. condamné la société [6] à verser à l'URSSAF de Lorraine la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

. dit que la décision est exécutoire à titre provisoire ;

Statuant à nouveau,

Dire et juger nulles et de nul effet la contrainte du 10 janvier 2017 et sa signification du 12 janvier 2017 ;

Prononcer l'annulation de la contrainte du 10 janvier 2017 ;

Débouter l'URSSAF de Lorraine de toutes ses demandes ;

Condamner l'URSSAF de Lorraine à payer à la société [6] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner l'URSSAF de Lorraine aux entiers frais et dépens.

Aux termes d'écritures datées du 20 septembre 2023 et soutenues oralement par son conseil à l'audience de plaidoirie, l'URSSAF Lorraine demande à la cour de :

Débouter la société [6] de son appel ;

Le dire mal fondé ;

En conséquence,

Confirmer la décision entreprise ;

En tous les cas,

Dire et juger que la contrainte en cause a été délivrée à bon droit ;

En conséquence,

Confirmer la contrainte n° 0000899663 dans son intégralité, soit 22 818 euros en chefs de redressements, cotisations et majorations ;

Au surplus,

Condamner la société [6] aux entiers frais et dépens, ce compris les frais de signification afférents à la contrainte susvisée ;

Débouter la société [6] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société [6] à payer à l'URSSAF Lorraine la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il est expressément renvoyé aux écritures des parties et à la décision déférée.

Sur ce,

SUR LA RECEVABILITE DE L'OPPOSITION A CONTRAINTE

L'URSSAF de Lorraine demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'opposition formée par la société [6] à l'encontre de la contrainte n°899663 du 10 janvier 2017, la contrainte litigieuse ayant été signifiée par voie d'huissier en France par procès-verbal de recherches infructueuses le 12 janvier 2017, puis au Luxembourg par sommation datée du 26 janvier 2018, de sorte qu'en formant opposition le 8 octobre 2020 la société [6] n'a pas respecté le délai de 15 jours prévu à peine d'irrecevabilité.

La société [6] indique que la sommation du 26 janvier 2018 est dénuée de tout effet par rapport à la contrainte n°899663 objet du présent litige, dans la mesure où elle n'était pas accompagnée d'une copie de la contrainte, et où elle ne précisait pas le délai dans lequel l'opposition devait être formée, ni les formes requises pour saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale compétent pour statuer sur ce recours. La société [6] ajoute que la signification de la contrainte a été faite le 12 janvier 2017 à son ancienne adresse en France, par procès-verbal de recherches infructueuses, mais que l'huissier n'a pas procédé aux diligences suffisantes pour trouver sa nouvelle adresse au Luxembourg, qui était accessible par tous sur le RCS depuis le 30 novembre 2012.

La société [6] conclut ainsi à ce que ce défaut de diligences suffisantes de l'huissier instrumentaire lui a causé un grief en ce qu'elle n'a pas pu exercer son recours, de sorte que la signification de la contrainte du 12 janvier 2017 doit être annulée, et que son opposition doit être déclarée recevable.

**************

Aux termes de l'article R 133-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification, le directeur de l'organisme créancier peut décerner la contrainte mentionnée à l'article L 244-9 ou celle mentionnée à l'article L 161-1-5. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

A peine de nullité, l'acte d'huissier ou la lettre recommandée mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l'opposition doit être formée, l'adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine ('). Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la signification. L'opposition doit être motivée et une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe (').

En l'espèce, il ressort en effet des pièces produites aux débats que la contrainte litigieuse a été signifiée le 12 janvier 2017, par procès-verbal de recherches infructueuses établi par Me [H], huissier de justice à [Localité 3], à la SARL [5], à l'ancienne adresse de la société ([Adresse 1]), mais que la signification à personne s'est avérée impossible, les diligences effectuées n'ayant pas permis de trouver le destinataire de l'acte conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile.

Or, il est constant que le siège social de la société, devenue société [6], a été transféré au [Adresse 2], information qui figurait sur la contrainte litigieuse datée du 10 janvier 2017, dont l'huissier était en possession, de sorte que ses diligences (interrogation du RCS / consultation de l'annuaire électronique) doivent être considérées comme insuffisantes.

La société [6] n'ayant pas pu se voir signifier la contrainte et former un recours contre celle-ci, il convient de constater qu'elle a subi un grief, de sorte que la signification de la contrainte intervenue le 12 janvier 2017 n'était donc pas valable, et ne pouvait pas faire courir le délai d'opposition à contrainte de 15 jours.

S'agissant de la sommation de payer signifiée par voie d'huissier le 26 janvier 2018 à l'adresse luxembourgeoise de la société [6], portant sur différentes sommes réclamées par l'URSSAF à la société [6] dont celle visée par la contrainte litigieuse, il convient de constater qu'elle ne vaut pas notification ou signification de la contrainte du 10 janvier 2017 dans la mesure où elle ne précise pas le délai dans lequel l'opposition doit être formée, l'adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.

En revanche, dans le cadre de l'instance engagée entre les mêmes parties devant le Pôle social du tribunal judiciaire de Metz ayant donné lieu au prononcé d'un jugement le 18 décembre 2020, concernant une contestation d'une « contrainte » globale délivrée par l'URSSAF le 18 janvier 2019, comprenant l'ensemble des sommes restant dues par la société [6] dont celles visées par la contrainte du 10 janvier 2017, il convient de constater que l'URSSAF a notifié à la société [6], par l'intermédiaire de son conseil, un bordereau de pièces contenant notamment la contrainte litigieuse du 10 janvier 2017 et l'acte de signification du 12 janvier 2017.

La contrainte du 10 janvier 2017 précisant les montants réclamés, mais aussi le délai dans lequel l'opposition doit être formée (15 jours), l'adresse du tribunal compétent ([Adresse 7]) - et les formes requises pour sa saisine (obligation de motivation), il convient de constater que la notification de cette pièce, comprise dans le bordereau de pièces communiqué le 3 février 2020, vaut notification de la contrainte à la société [6] qui en a été destinataire.

Cette notification de pièces, datée du 3 février 2020, a donc valablement fait courir le délai d'opposition à compter de cette date, de sorte que l'opposition formée par la société [6] le 8 octobre 2020, soit postérieurement à l'échéance du délai de 15 jours commençant le 4 février 2020, a été formée hors délai et doit être déclarée irrecevable.

Le jugement entrepris doit donc être confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'opposition formée par la société [6] à l'encontre de la contrainte n°899663 du 10 janvier 2017 décernée en recouvrement de la somme de 22 818 euros et qu'il a dit n'y avoir lieu à statuer sur le fond.

SUR LES FRAIS D'HUISSIER

L'article R 133-6 du code de la sécurité sociale prévoit que « les frais de signification de la contrainte faite dans les conditions prévues à l'article R 133-3, ainsi que de tous actes de procédure nécessaires à son exécution, sont à la charge du débiteur, sauf lorsque l'opposition a été jugée fondée ».

L'opposition à contrainte formée par la société [6] étant irrecevable, les frais de signification de la contrainte resteront à la charge de cette dernière.

SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE ET LES DEPENS

Compte tenu de l'issue du litige, il y a lieu de confirmer la condamnation de la société [6] à verser à l'URSSAF de Lorraine la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, sans qu'il n'y ait lieu à accorder une somme supplémentaire à ce titre à hauteur d'appel.

La société [6] étant la partie perdante à l'instance, elle doit être condamnée aux dépens d'appel, ceux de première instance étant confirmés.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement entrepris rendu le 13 avril 2022 par le Pôle social du Tribunal judiciaire de Metz,

DEBOUTE l'URSSAF de Lorraine de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,

CONDAMNE la société de droit luxembourgeois [6] aux dépens d'appel.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 3
Numéro d'arrêt : 22/01197
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;22.01197 ?
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