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24/06/2024 | FRANCE | N°21/01901

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 3, 24 juin 2024, 21/01901


Arrêt n° 24/00312



24 Juin 2024

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N° RG 21/01901 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FRVK

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Tribunal Judiciaire de METZ- Pôle social



23 Juin 2021

19/690

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale





ARRÊT DU



vingt quatre Juin deux mille vingt quatre





APPELANTE :



L'URSSAF DE LORRAINE

[Ad

resse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me François BATTLE, avocat au barreau de METZ



INTIMÉE :



S.A.R.L. [6] FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par M. [P], muni d'un pouvoir spécial





COMPOSITION DE L...

Arrêt n° 24/00312

24 Juin 2024

---------------

N° RG 21/01901 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FRVK

------------------

Tribunal Judiciaire de METZ- Pôle social

23 Juin 2021

19/690

------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale

ARRÊT DU

vingt quatre Juin deux mille vingt quatre

APPELANTE :

L'URSSAF DE LORRAINE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me François BATTLE, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

S.A.R.L. [6] FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par M. [P], muni d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Carole PAUTREL, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre

Mme Carole PAUTREL, Conseillère

Mme Anne FABERT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

En 2018, la société [6] France (ci-après la société) a fait l'objet d'une vérification comptable pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017.

Dans sa lettre d'observations du 9 novembre 2018, l'inspecteur du recouvrement a retenu deux chefs de redressement représentant un rappel de cotisations et contributions sociales d'un montant total de 15.541 euros à savoir :

- Avantage en nature véhicule : 7.327 euros ;

- Frais professionnels non justifiés 8.216 euros.

Par courrier du 29 novembre 2018, la société [6] France a contesté les deux chefs de redressement.

Par lettre du 5 décembre 2018, l'inspecteur du recouvrement a maintenu le redressement.

Par courrier recommandé du 21 décembre 2018, la société a été mise en demeure par l'URSSAF de Lorraine de payer la somme de 16.991 euros au titre des cotisations et contributions sociales dues pour les années 2015, 2016 et 2017, y compris des majorations de retard.

La société a saisi la Commission de Recours Amiable près l'URSSAF de Lorraine par courrier du 15 janvier 2019.

En l'absence de réponse de la Commission de Recours Amiable près l'URSSAF Lorraine, la société [6] France a, par lettre recommandée expédiée le 30 avril 2019, saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Metz afin de contester la décision de rejet implicite de la Commission et de se voir annuler le redressement dont elle a été l'objet.

Par jugement du 23 juin 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Metz (anciennement tribunal de grande instance) a :

CONFIRME le redressement entrepris ;

DEBOUTE l'URSSAF de Lorraine de sa demande de paiement formée à titre reconventionnel et l'a invité à reprendre ses calculs sur le chef de redressement n°1 ;

CONDAMNE la société [6] France aux dépens ;

CONDAMNE la société [6] France à verser à l'URSSAF de Lorraine la somme de 800 (huit-cent) euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la décision.

Par acte déposé au greffe le 27 juillet 2021, l'URSSAF Lorraine a interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée par lettre recommandée réceptionnée le 2 juillet 2021.

L'affaire a été appelée à l'audience du 24 janvier 2023 et a fait l'objet d'un renvoi contradictoire à l'égard de l'ensemble des parties à l'audience du 19 juin 2023, l'URSSAF n'ayant pas conclu dans les délais impartis. Il était ordonné à la société intimée de conclure pour la fin du mois d'avril 2023 suite à la remise, lors de l'audience, des conclusions de l'URSSAF, avec une réplique possible de l'appelante avant la fin mai 2023.

Par courriel adressé au greffe le 19 avril 2023, la société [6] France sollicitait des précisions. Il n'était pas donné suite à son courrier.

Par écritures du 15 juin 2023 soutenues oralement par son conseil à l'audience de plaidoirie du 19 juin 2023, l'URSSAF Lorraine sollicite de la cour de :

- déclarer l'URSSAF Lorraine recevable et bien fondée en son appel,

En conséquence,

- confirmer la décision rendue le 23 juin 2021 par le Tribunal Judiciaire de Metz en toutes ses dispositions, à l'exception de celles où il a débouté l'URSSAF Lorraine de sa demande en paiement formulée à titre reconventionnel et l'a invité à reprendre ses calculs sur le chef de redressement n° 1,

Et statuant à nouveau

- dire et juger que le chef de redressement n°1 confirmé en son principe par les premiers juges a été établi à bon droit et en l'absence d'éléments probants, pour un montant en cotisations de 7.326,00 €,

- confirmer la décision de rejet implicite prise par la Commission de Recours Amiable de l'URSSAF Lorraine,

- faire droit à la demande reconventionnelle de l'URSSAF Lorraine en condamnant la SARL [6] France au paiement d'une somme totale de 16.991,00 €, majorations de retard décomptées provisoirement comprises et ce, sans préjudice des majorations de retard complémentaires à venir,

- condamner la SARL [6] France aux entiers frais et dépens,

- condamner, à hauteur d'appel, la SARL [6] France à payer à l'URSSAF Lorraine la somme de 1.500,00 € par application de l'article 700 du CPC.

A titre subsidiaire

- le cas échéant, réserver les droits de l'URSSAF Lorraine en l'invitant à établir un nouveau calcul de l'avantage en nature « véhicule », et ce seulement, après production par la société des documents probants sollicités par l'inspecteur du recouvrement.

A l'audience du 19 juin 2023, la société [6] France était non comparante.

Par arrêt du 23 octobre 2023, la cour d'appel de Metz ordonnait la réouverture des débats aux fins d'inviter la société [5] à conclure avant le 23 janvier 2024, et à notifier ses pièces et conclusions à l'appelante pour cette date. L'affaire était renvoyée au 16 avril 2024.

A l'audience de plaidoirie, l'URSSAF Lorraine s'en rapportait à ses conclusions du 15 juin 2023 soutenues oralement.

La société [6] France, par le biais de son représentant, indiquait ne pas contester le jugement, mais se disait être en attente des calculs corrigés au titre du chef de redressement n°1, et, à défaut, être prête à payer un montant de 15 441€ sans les majorations de retard. L'intimée se disait également opposée à la demande de l'URSSAF Lorraine sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il est expressément renvoyé aux écritures des parties et à la décision entreprise conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Il sera tout d'abord relevé par la cour que le chef de redressement n°2 n'étant pas discuté par les parties à hauteur d'appel, il ne sera pas étudié par la cour.

SUR LE CHEF DE REDRESSEMENT N°1 : l'avantage en nature « véhicule »

L'URSSAF Lorraine sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a validé le chef de redressement n°1 concernant l'avantage en nature « véhicule » mais a ordonné une reprise du calcul opéré dès lors que l'URSSAF n'avait pas évalué différemment ledit avantage selon que le véhicule était loué ou acheté. Elle fait valoir que ce faisant, les premiers juges ont opéré un renversement de la charge de la preuve, alors qu'il résultait des opérations de contrôle que la société [6] France n'avait pas fourni, malgré plusieurs demandes, les éléments nécessaires audit calcul.

La société [6] France fait valoir avoir transmis l'ensemble des éléments lors du contrôle.

*********************

En vertu de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, la déduction des frais professionnels de l'assiette de calcul des cotisations de sécurité sociale constitue une exception à la règle de l'assujettissement des sommes et avantages versés en contrepartie ou à l'occasion du travail. Ainsi, tout avantage en espèces ou nature versé en contrepartie ou à l'occasion du travail doit être soumis à cotisations.

Un avantage en nature est la contrepartie du travail prenant la forme d'une économie de frais pour le salarié à la charge de l'employeur.

Lorsque le salarié bénéficie d'un véhicule, il y a un avantage en nature si ce véhicule est mis à sa disposition de façon permanente pour sa vie privée et professionnelle.

L'article 3 de l'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature, dans sa rédaction applicable au présent litige, énonce que :

« Sous réserve des dispositions de l'article 5 ci-dessous, lorsque l'employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l'avantage en nature constitué par l'utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l'employeur, sur la base des dépenses réellement engagées ou sur la base d'un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d'achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule en location ou en location avec option d'achat, toutes taxes comprises.

Les dépenses réellement engagées sont évaluées comme suit :

- en cas de véhicule acheté, elles comprennent l'amortissement de l'achat du véhicule sur cinq ans, l'assurance et les frais d'entretien et, le cas échéant, les frais de carburant. Si le véhicule a plus de cinq ans, l'amortissement de l'achat du véhicule est de 10 % ;

- en cas de location ou de location avec option d'achat, elles comprennent le coût global annuel de la location, l'entretien et l'assurance du véhicule et, le cas échéant, les frais de carburant.

Les dépenses sur la base d'un forfait sont évaluées comme suit :

- en cas de véhicule acheté, l'évaluation est effectuée sur la base de 9 % du coût d'achat et lorsque le véhicule a plus de cinq ans sur la base de 6 % du coût d'achat. Lorsque l'employeur paie le carburant du véhicule, l'avantage est évalué suivant ces derniers pourcentages auxquels s'ajoute l'évaluation des dépenses du carburant à partir des frais réellement engagés ou suivant un forfait global de 12 % du coût d'achat du véhicule et de 9 % lorsque le véhicule a plus de cinq ans ;

- en cas de véhicule loué ou en location avec option d'achat, l'évaluation est effectuée sur la base de 30 % du coût global annuel comprenant la location, l'entretien et l'assurance du véhicule. Lorsque l'employeur paie le carburant du véhicule, l'avantage est évalué suivant ce dernier pourcentage auquel s'ajoute l'évaluation des dépenses de carburant à partir des frais réellement engagés ou suivant un forfait global de 40 % du coût global annuel comprenant la location, l'entretien, l'assurance du véhicule et le carburant ».

Il incombe ainsi à l'employeur de démontrer que l'avantage en nature « véhicule » qu'il octroie à ses salariés entre dans les prévisions dudit article et d'en produire les justificatifs précis.

Or, en l'espèce, il résulte des opérations de contrôle et des termes de la lettre d'observations du 6 novembre 2018 (pièce n°1 de l'appelante), non contestés par l'intimée, que, malgré plusieurs relances de l'URSSAF afin d'obtenir les éléments permettant d'évaluer pleinement cet avantage, la société [6] France n'a pas fourni l'ensemble des pièces nécessaires devant permettre un juste calcul.

Ainsi, alors que l'inspecteur a constaté que des véhicules de location étaient mis à disposition des salariés et que l'évaluation retenue par l'employeur ne tenait pas compte de leur part d'utilisation privée, la société [6] France a été sollicitée, à plusieurs reprises, pour fournir les éléments complémentaires nécessaires. Or, en l'absence de décomptes précis du kilométrage privé effectué par chaque salarié, de décomptes sur le kilométrage annuel parcouru par les véhicules concernés, et de fournitures des contrats de location, l'inspecteur a évalué un avantage en nature sur une base forfaitaire d'un véhicule en location.

Il résulte ainsi de ces constatations que l'URSSAF Lorraine a fait une juste application des textes susvisés, et que, en l'absence, y compris à hauteur d'appel, d'éléments de preuve complémentaires fournis par la société intimée, le montant de chef de redressement n°1 -Avantage en nature véhicule- doit être validé pour la somme de 7326€ telle que réclamée par l'appelante.

Le jugement est infirmé en ce sens.

SUR LES MAJORATIONS DE RETARD

La société [6] France sollicite que le montant du redressement soit fixé à la somme de 15441€, sans les majorations de retard.

Il résulte de l'article R.243-18 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable aux faits de l'espèce que les cotisations qui n'ont pas été versées aux dates limites d'exigibilité se voient appliquer une majoration de retard de 5%, outre une majoration de retard complémentaire.

La société ne peut donc être exonérée du paiement de ces majorations de retard, sauf à solliciter la remise des majorations auprès du directeur de l'URSSAF.

Il apparaît ainsi que la société [6] France doit être condamnée à payer à l'URSSAF Lorraine la somme de 15441€ en principal, outre la somme de 1450€ au titre des majorations de retard décomptées provisoirement, et ce sans préjudice des majorations de retard complémentaires.

SUR LES DEMANDES ANNEXES

L'issue du litige conduit la cour à condamner la société [6] France à payer à l'URSSAF Lorraine la somme de 800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimée est également condamnée aux dépens d'appel, ceux de première instance étant confirmés.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

INFIRME le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Metz en date du 23 juin 2021, en ce qu'il a débouté l'URSSAF de Lorraine de sa demande de paiement formée à titre reconventionnel et l'invite à reprendre ses calculs sur le chef de redressement n°1 de la lettre d'observations du 6 novembre 2018 ;

Statuant à nouveau,

VALIDE le chef de redressement n°1 de la lettre d'observations du 6 novembre 2018 à l'encontre de la société [6] France, relatif à l'avantage en nature « véhicule », pour un montant de 7.326€ (sept mille trois cent vingt-six euros) ;

CONDAMNE la société [6] à payer à l'URSSAF Lorraine, au titre des cotisations dues à l'issue de la lettre d'observations du 6 novembre 2018, la somme de 15.441€ (quinze mille quatre cent quarante et un euros) en principal, outre la somme de 1.450€ (mille quatre cent cinquante euros) au titre des majorations de retard décomptées provisoirement, et ce sans préjudice des majorations de retard complémentaires.

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

REJETTE la demande de la société [6] France quant à la remise des majorations de retard ;

Y ajoutant

CONDAMNE la société [6] France à payer à l'URSSAF Lorraine la somme de 800€ (huit cent euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;

CONDAMNE la société [6] France aux dépens d'appel.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 3
Numéro d'arrêt : 21/01901
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;21.01901 ?
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