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29/05/2024 | FRANCE | N°22/00152

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 29 mai 2024, 22/00152


Arrêt n° 24/00185



29 mai 2024

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N° RG 22/00152 -

N° Portalis DBVS-V-B7G-FU7R

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

15 décembre 2021

F 21/00041

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



Vingt neuf mai deux mille vingt quatre







APPELANT :

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M. [W] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Yassin BOUAZIZ de la SELARL HAYA AVOCATS, avocat au barreau de METZ







INTIMÉE :



SAS UMICORE AUTOCAT FRANCE prise en la personne de son représentant légal
...

Arrêt n° 24/00185

29 mai 2024

---------------------

N° RG 22/00152 -

N° Portalis DBVS-V-B7G-FU7R

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

15 décembre 2021

F 21/00041

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Vingt neuf mai deux mille vingt quatre

APPELANT :

M. [W] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Yassin BOUAZIZ de la SELARL HAYA AVOCATS, avocat au barreau de METZ

INTIMÉE :

SAS UMICORE AUTOCAT FRANCE prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Sandrine ANDRET, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 septembre 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE, en présence de Mme Kely SOARES DE CARVALHO, greffière stagiaire

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Selon contrat de travail à durée déterminée et à temps complet, la SA Alliedsignal catalyseurs pour l'environnement a embauché pour la période du 8 janvier 1996 au 7 avril 1996 M. [W] [B], en qualité d'opérateur de fabrication.

Le contrat a été renouvelé jusqu'au 7 juillet 1996.

A compter du 8 juillet 1996, la relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée.

La convention collective de l'industrie du travail de la métallurgie de la Moselle a été applicable à la relation de travail.

En dernier lieu, M. [B] exerçait les fonctions de superviseur de production.

Par courrier du 14 janvier 2021, M. [B] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 29 janvier 2021.

Par lettre du 3 février 2021, il a été licencié pour faute grave.

Estimant son licenciement infondé, M. [B] a saisi, le 12 mars 2021, la juridiction prud'homale.

Par jugement contradictoire du 15 décembre 2021, la formation paritaire de la section industrie du conseil de prud'hommes de Thionville a dit le licenciement justifié par une faute grave, rejeté les prétentions de M. [B], débouté la société Umicore autocat France de sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et mis les dépens à la charge de M. [B].

Le 14 janvier 2022, M. [B] a interjeté appel par voie électronique.

Dans ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 24 février 2023, M.[B] requiert la cour d'infirmer le jugement, puis, statuant à nouveau, de juger son licenciement infondé et de condamner la société Umicore autocat France à lui a payer les sommes suivantes :

* 7 856,44 euros brut à titre d'indemnité de préavis ;

* 785,64 euros brut à titre de congés payés sur préavis ;

* 29 461,66 euros net à titre d'indemnité de licenciement ;

* 78 564,40 euros net à titre de dommages et intérêts ;

* 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de ses conclusions, il expose :

- qu'à la reprise au mois de janvier 2021, après la fermeture de l'usine les deux derniers jours du mois de décembre 2020, il lui manquait trois opérateurs sur le poste de nuit qu'il devait rejoindre le 2 janvier 2021 au soir ;

- que son supérieur hiérarchique lui a annoncé l'arrivée d'une seule personne en renfort;

- qu'il n'avait ainsi pas la possibilité de produire ce qui lui était demandé ;

- qu'il a fait appel à une intérimaire, Mme S.F., qui était déjà mise à disposition de la société intimée par une entreprise de travail temporaire et qui était présente depuis plusieurs mois ;

- que le contrat de travail de Mme S.F. a été renouvelé notamment pour les deux nuits pendant lesquelles elle a travaillé dans son équipe ;

- que les contrats de travail antérieurs et notamment ceux du mois de décembre prévoyaient une possibilité de souplesse englobant les deux jours litigieux ;

- qu'il a agi dans l'intérêt de l'entreprise pour permettre une production correcte au poste de nuit;

- que son employeur n'a subi aucun préjudice ;

- que la société avait fréquemment recours à des intérimaires pour lesquels elle signait des contrats de travail a posteriori.

Sur le non-respect du droit au repos, il affirme :

- que Mme S.F. a travaillé les 27 et 28 décembre au matin, puis les 29 et 30 décembre 2020 l'après-midi ;

- que la reprise de cycle de cette salariée était prévue le 6 janvier 2021 ;

- qu'en travaillant les 2 et 3 janvier 2021, Mme S.F. a bénéficié de deux jours de repos avant de venir renforcer l'équipe, puis a disposé à nouveau de deux jours de congés, de sorte que les règles prévues pour le repos du personnel n'ont pas été 'bafouées'.

Il estime que l'employeur, en l'absence de réaction immédiate, ne saurait se prévaloir d'une faute grave à son encontre.

Il ajoute :

- qu'il a effectivement commandé des chaussures de sécurité pour sa femme à la société CMI qui est le fournisseur habituel de son employeur en matière d'équipements de travail ;

- que la société CMI a adressé par erreur la facture à la société Umicore autocat France, ce qui a été régularisé ;

- qu'il n'y a eu aucun manquement de sa part à l'obligation de loyauté, puisqu'il pouvait parfaitement passer commande à titre personnel d'un équipement dont la facture serait ensuite établie à son nom.

Dans ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 6 juin 2023, la société Umicore autocat France sollicite que la cour :

- confirme le jugement, en ce qu'il a dit le licenciement justifié par une faute grave et en ce qu'il a débouté M. [B] de l'ensemble de ses prétentions ;

à titre subsidiaire,

- juge le licenciement comme reposant sur une cause réelle et sérieuse ;

- fixe l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 7 856,44 euros brut, les congés payés y afférents à la somme de 785,64 euros brut et l'indemnité de licenciement à la somme de 29 461,66 euros net ;

- rejette les autres prétentions de M. [B] ;

à titre infiniment subsidiaire,

- juge que M. [B] ne justifie d'aucun préjudice ;

- fixe l'indemnisation de M. [B] toutes causes de préjudice confondues à un montant de 11 784,66 euros correspondant à trois mois de salaire, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail ;

en tout état de cause,

- condamne M. [B] à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Elle souligne :

- que M. [B] a occupé, en dernier lieu, le poste de superviseur de production et connaissait, à ce titre, les règles élémentaires liées à la gestion d'un contrat de travail, notamment la nécessité de respecter les démarches liées à l'embauche d'un salarié et celle de veiller au respect des règles en matière de durée du travail ;

- que l'appelant savait qu'au sein de la société, l'ensemble de ces démarches incombait au service des ressources humaines ;

- que les opérateurs ne travaillaient pas sans contrat plusieurs jours d'affilée au sein de la société;

- qu'en matière de gestion du personnel, la moindre irrégularité expose la société et sa direction à de lourdes sanctions ;

- que M. [B] admet avoir demandé à une personne sous contrat de mission temporaire de venir renforcer son équipe ;

- que le salarié n'a pas attendu l'autorisation de sa hiérarchie avant de prendre une telle initiative;

- que, pour les journées des 2 et 3 janvier 2021, Mme S.F. n'était couverte par aucun contrat, le contrat de mission n'ayant été signé que le 4 janvier 2021 donc a posteriori;

- que le précédent contrat de mission courait du 27 au 30 décembre 2020, étant observé que les 2 et 3 janvier 2021 ne faisaient pas partie de la 'possibilité de souplesse'.

Elle affirme que M. [B] avait fait l'objet, quelques mois plus tôt, d'une mise à pied de trois jours pour des faits similaires, à savoir des négligences notamment dans le domaine de la sécurité, ainsi qu'une absence d'exemplarité dans les propos tenus, les méthodes utilisées et l'attitude générale.

Elle fait valoir :

- que Mme S.F. était affectée dans l'équipe d'un autre salarié que l'appelant ;

- que M. [B], en faisant venir sans validation Mme S.F., a fait travailler celle-ci les 2 et 3 janvier dans sa propre équipe en rompant le rythme de travail convenu ;

- qu'il a outrepassé ses pouvoirs et 'bafoué' les prérogatives de sa propre hiérarchie.

Elle ajoute que M. [B] ne l'a pas informée de l'achat de chaussures de sécurité pour son épouse et a tenté de lui faire supporter cet achat, ce qui était une atteinte au règlement intérieur, chacun devant agir dans l'intérêt de la société et avoir un comportement exemplaire.

Elle soutient :

- que les faits ont été constatés les 3 et 8 janvier 2021, qu'elle a dû procéder à des vérifications et que M. [B] a été convoqué dès le 14 janvier 2021, de sorte qu'elle n'a pas agi tardivement;

- que M. [B] sollicite une indemnité équivalente à vingt mois de salaire, ce qui est supérieur au 'barème Macron' ;

- que le salarié ne donne aucune explication ni justificatif relatifs à son préjudice.

Le 5 juillet 2023, le magistrat chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction.

MOTIVATION

Sur le licenciement pour faute grave

Par lettre du 3 février 2021, M. [B] a été licencié pour faute grave, dans les termes suivants :

' (...) Les faits qui vous sont reprochés sont les suivants :

1) Non-respect des procédures internes de validation liées à l'embauche de salariés intérimaires

Samedi 2 janvier, vous échangez par sms avec votre responsable de production M. [Z] pour augmenter le nombre de personnes disponibles, eu égard aux objectifs supérieurs de production sur vos 2 derniers postes de nuit.

Vous lui proposez l'entrée d'un intérimaire inscrit en agence mais qui n'a pas encore d'expérience chez nous.

M. [Z] ne répond que l'après-midi à votre sms du matin et vous précise qu'il refuse l'entrée d'un nouvel intérimaire, et vous informe qu'un intérimaire d'une autre équipe va être transféré pour compléter votre équipe.

Or, sans attendre la réponse de M. [Z], vous avez outrepassé vos droits en demandant sans validation, et directement, à une intérimaire d'une autre équipe de venir le samedi en nuit ainsi que le dimanche.

Or, il n'est pas dans les attributions d'un superviseur d'engager sans validation un intérimaire.

D'autre part, l'intérimaire concernée avait fini son cycle de 6 jours le mercredi 30 décembre et devait reprendre un cycle le lundi 3 janvier.

Cette personne n'était donc pas légalement autorisée à travailler sans respect des périodes de repos prévues par le Code du Travail.

Par ailleurs, ni l'agence d'intérim, ni la Direction n'étaient au courant de cet "arrangement ", que vous avez directement convenu avec l'intérimaire ! En cas d'accident, vous engagiez donc la responsabilité du Directeur d'usine.

Faire venir un intérimaire sans obtenir l'accord préalable de votre hiérarchie, ni même de l'employeur de l'intérimaire, à savoir l'agence de travail temporaire, et de surcroît, sans avoir respecté les durées minimales de repos, constitue donc une faute d'une extrême gravité !

Lors de l'entretien préalable, vous n'avez fourni aucun argument susceptible d'excuser votre comportement ! Vous avez même admis avoir arrangé la venue avant l'échange par sms du samedi avec M. [Z]. Vous soutenez d'autre part que l'intérimaire que vous avez fait venir était encore sous contrat, ce qui n'est pas le cas.

2) Achat de matériel de sécurité sur le compte de l'entreprise pour votre épouse, non salariée au sein de notre entreprise

Vous avez commandé des chaussures de sécurité pour femme, que vous avez prétendu être pour votre femme, à la société CMI Equipement en décembre 2020 sur notre zone industrielle et avez fait envoyer la facture à Umicore.

Lorsque la facture datée du 31 décembre a été adressée à la comptabilité d'Umicore, celle-ci a détecté un achat sans commande et a demandé le 8 janvier à M. [Z] sa validation.

Votre nom apparaissant sur la facture, ainsi que la mention qu'il s'agissait d'un modèle de femme, M. [Z] se rapproche de vous pour vous signifier que l'entreprise ne peut pas prendre cet achat en charge. Vous proposez alors de le régler en direct.

Cette démarche est tout simplement scandaleuse. Jamais vous n'auriez dû tenter de faire prendre en charge par l'entreprise une telle dépense et auriez dû la régler directement lors de l'achat.

Pour rappel, vous avez fait l'objet en novembre 2020 d'une procédure disciplinaire qui a abouti à une mise à pied disciplinaire de 3 jours. Il était dit dans le courrier : "Vous devez comprendre que cette sanction signifie que vous avez une dernière chance d'être à la hauteur de votre fonction. Tout nouveau manque à vos obligations professionnelles signifiera un licenciement."

Comme vous le savez, ces faits ont gravement mis en cause la bonne marche de notre société.

Pour les motifs précités, nous vous notifions donc par la présente votre licenciement pour faute grave.

Compte tenu de leur gravité et de ses conséquences, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. (...)'

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

En cas de faute grave, la charge de la preuve repose sur l'employeur qui doit établir à la fois la réalité et la gravité des manquements du salarié.

'

La faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la mise en 'uvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits allégués.

'

En l'espèce, l'employeur produit une facture du 31 décembre 2020 émise à son encontre pour des 'chaussures de sécurité femme' facturées au prix de 49,67 euros HT, étant observé que la mention 'Vos références : [B]' figure sur ce document.

(pièce n° 12 de l'intimée).

Le salarié a reconnu, dans un courriel du 20 janvier 2021 (pièce n° 13 de l'intimée) adressé à son supérieur hiérarchique, qu'il devait prendre cet achat à sa charge ('si tu l'as tu me la donne et je passe la régler perso'), puis, dans ses conclusions d'appel, qu'il s'agissait d'une commande pour son épouse.

Sur la facture du 5 février 2021 correspondant au même bien (pièce n° 9 de l'appelant), le fournisseur, la société CMI équipement, a indiqué avoir commis une erreur de facturation et qu'un avoir serait établi 'à votre nom'.

Il s'ensuit que c'est par erreur que le fournisseur a demandé le paiement de la paire de chaussures de sécurité à la société Umicore autocat France, de sorte qu'il n'est pas démontré que M. [B] a tenté de faire supporter cette dépense par son employeur.

Le grief n'est donc pas retenu.

Par ailleurs, s'agissant de l'autre grief, M. [B], en sa qualité de superviseur de production, était sous les ordres de son supérieur hiérarchique, M. [Z], directeur de production (voir pièce n° 6).

Le contrat de travail du salarié et ses avenants ne stipulaient aucunement que M. [B] était habilité à prendre seul la décision d'avoir recours à un intérimaire sans consulter son supérieur hiérarchique.

La fiche de poste de 'superviseur de production' transmise par la société Umicore autocat France mentionne que le salarié "met en 'uvre l'affectation de l'équipe pour répondre aux exigences du planning de production" et qu'il 'gère les absences non planifiées et réaffecte les effectifs', ce qui signifie que M. [B] était responsable de l'affectation de son équipe mais non du choix - et a fortiori de l'embauche - des intérimaires qui y travaillaient.

Les échanges de SMS entre M. [B] et M. [Z] transmis par la société intimée (sa pièce n° 8), dans lesquels le salarié demande expressément l'accord de son supérieur hiérarchique pour recourir aux services d'un intérimaire précisément dénommé, démontrent que M. [B] avait parfaitement conscience de la nécessité d'obtenir l'autorisation préalable de son supérieur.

M. [B] reconnaît dans ses écritures (page 5) avoir dans un premier temps demandé à M. [Z] la mise à disposition de l'intérimaire M. [X], ce qui lui a été refusé. Il déclare qu'ensuite, afin de respecter les quotas de production dans de bonnes conditions, comme il lui fallait 'trois personnes et avec un intérimaire en plus', il a fait appel à une intérimaire extérieure à son équipe, Mme S.F., pour travailler dans la nuit du 2 au 3 janvier 2021.

Pour ce faire, il n'a pas consulté son supérieur hiérarchique, alors que :

- l'article 5.1 du règlement intérieur de la société Umicore autocat France enjoint au salarié de se conformer aux instructions de la hiérarchie de l'établissement notamment à celle de son supérieur direct (pièce n° 14 de l'intimée) ;

- le contrat de travail à durée indéterminée de M. [B] du 4 juillet 1996 stipule que le salarié est astreint au respect des prescriptions du règlement intérieur et des instructions émanant de la direction (pièce n° 3).

En procédant ainsi, le salarié a mis son employeur dans l'illégalité, puisque le contrat de mise à disposition du 27 décembre 2020 prenait fin dès le 30 décembre 2020 inclus, voire le 1er janvier 2021 en incluant la période de 'souplesse' (pièce n° 15 de l'intimée)

Au surplus, Mme S.F. - qui travaillait habituellement dans une autre équipe que celle de M. [B] - était en poste, à la lecture des propres conclusions de l'appelant, les 27 et 28 décembre 2020 au matin, puis les 29 et 30 décembre 2020 après-midi et sa 'reprise de cycle' n'était pas prévue que le 6 janvier 2021.

Il n'était donc pas envisagé par l'employeur que Mme S.F. retourne au travail dès la nuit du 2 au 3 janvier 2021 avec le risque qui en découlait de contrevenir aux règles légales en matière de temps de travail.

La signature par la société Umicore autocat France d'un nouveau contrat de mission temporaire le 4 janvier 2021 couvrant le 31 décembre 2020 et le mois de janvier 2021 (pièce n° 6 de l'appelant) ne vaut ni acceptation tacite ni accord a posteriori de la société intimée qui a été contrainte de régulariser la situation de Mme S.F.

Il ne ressort ni des pièces ni des données du débat qu'une pratique courante de la société consistait à régulariser la situation des intérimaires, de façon empirique, une fois seulement la mission commencée, comme l'invoque M. [B].

En définitive, en outrepassant ses prérogatives de façon consciente, en mettant son employeur dans l'illégalité et en faisant potentiellement courir un danger à Mme S.F., M. [B] - qui, selon l'affirmation non contestée de l'employeur dans ses conclusions, avait fait l'objet quelques mois auparavant d'une décision de mise à pied de trois jours notamment pour des négligences dans le domaine la sécurité - a commis une faute justifiant la mesure de licenciement.

Cette faute ne faisait toutefois pas obstacle au maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis, étant observé que, d'une part, M. [B] avait une ancienneté de 25 années au moment de la rupture sans antécédent disciplinaire connu et antérieur à la fin de l'année 2020 et que, d'autre part, un des deux griefs retenus par l'employeur dans le courrier de licenciement n'a pas été établi.

En conséquence, sans qu'il y ait lieu d'examiner si l'employeur a engagé la procédure disciplinaire dans un délai suffisamment restreint, le licenciement pour faute grave est requalifié en licenciement avec cause réelle et sérieuse, ce qui emporte rejet de la demande de dommages et intérêts pour licenciement infondé.

Le jugement est infirmé en ce sens.

Sur les indemnités de rupture

'''''''''' L'article L. 1234-1 du code du travail dispose que, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur.

'

Le salarié a droit à un préavis de deux mois s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans.

L'article L. 1234-5 du même code ajoute que lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.

'

''''''' '''Par ailleurs, il résulte de l'article L. 1234-9 du code du travail que le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement et de l'article R. 1234-2 du même code, en sa version applicable à l'espèce, que l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans et un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

En l'espèce, l'employeur conteste, dans leur principe mais non dans leurs montants, les indemnités de rupture sollicitées par M. [B].

En conséquence, la société Umicore autocat France est condamnée à payer à M. [B] les sommes de 7 856,44 euros brut à titre d'indemnité de préavis, 785,64 euros brut au titre des congés payés y afférents et 29 461,66 euros à titre d'indemnité de licenciement.'

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement est infirmé s'agissant des dépens de première instance.

La société Umicore autocat France est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement, en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par M. [W] [B] à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a rejeté les prétentions des parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Infirme le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Requalifie le licenciement pour faute grave en licenciement avec cause réelle et sérieuse;

Condamne la SAS Umicore autocat France à payer à M. [W] [B] les sommes suivantes :

- 7 856,44 euros brut à titre d'indemnité de préavis ;

- 785,64 euros brut à titre de congés payés y afférents ;

- 29 461,66 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la SAS Umicore autocat France aux dépens de première instance et d'appel.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 22/00152
Date de la décision : 29/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-29;22.00152 ?
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