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27/05/2024 | FRANCE | N°22/01605

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 3, 27 mai 2024, 22/01605


Arrêt n° 24/00266



27 Mai 2024

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N° RG 22/01605 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FYML

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Pole social du TJ de METZ

11 Mai 2022

20/01114

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ



CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale





ARRÊT DU



vingt sept Mai deux mille vingt quatre





APPELANTE :



Madame [I] [D]

[Adresse 3]

[Localité 5]


représenté par l'association [8], prise en la personne de Mme [K] [A], salariée de l'association munie d'un pouvoir spécial



INTIMÉS :



Société [10]

[Adresse 15]

[Adresse 15]

[Localité 7]

Représentée par Me Frédéri...

Arrêt n° 24/00266

27 Mai 2024

---------------

N° RG 22/01605 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FYML

------------------

Pole social du TJ de METZ

11 Mai 2022

20/01114

------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE SOCIALE

Section 3 - Sécurité Sociale

ARRÊT DU

vingt sept Mai deux mille vingt quatre

APPELANTE :

Madame [I] [D]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par l'association [8], prise en la personne de Mme [K] [A], salariée de l'association munie d'un pouvoir spécial

INTIMÉS :

Société [10]

[Adresse 15]

[Adresse 15]

[Localité 7]

Représentée par Me Frédéric BEAUPRE, avocat au barreau de METZ

substitué par Me CABOCEL , avocat au barreau de METZ

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MOSELLE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Mme [H], munie d'un pouvoir général

FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Sabrina BONHOMME, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Carole PAUTREL, Conseillère, magistrat chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre

Mme Carole PAUTREL, Conseillère

Mme Anne FABERT, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MATHIS, Greffier

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Monsieur Philippe ERTLE, Président de Chambre, et par Madame Sylvie MATHIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Né le 20 août 1941, Monsieur [M] [D] a travaillé pour la société [16] de 1972 à 1984, puis pour la société [19] entre 1985 et 1994.

Un diagnostic de cancer bronchopulmonaire primitif, en lien avec son exposition à l'amiante, a été porté chez Monsieur [D] le 31 juillet 2017.

Ce dernier est décédé des suites de sa maladie le 23 janvier 2018.

La caisse primaire d'assurance maladie de Moselle (ci-après caisse ou CPAM) a, par décision du 9 octobre 2018, reconnu le caractère professionnel de cette maladie au titre du tableau 30bis des maladies professionnelles, puis, par décision du 12 décembre 2018, l'imputabilité du décès à cette pathologie.

La caisse a attribué à Monsieur [D] une rente annuelle en considération de son taux d'incapacité permanente fixé à 100%, puis une rente de conjoint survivant à sa veuve, Madame [I] [D], et ce à compter du 1er février 2018.

Les ayants-droits de Monsieur [D] ont accepté l'offre d'indemnisation du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante ([13]) au titre des préjudices extrapatrimoniaux subis par le défunt, et au titre de leur propre préjudice moral et d'accompagnement.

Par requête introductive d'instance du 25 septembre 2020, Madame [D] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Metz en vue de faire reconnaître la faute inexcusable de la société [11].

Par jugement du 11 mai 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Metz a :

*jugé recevables en la forme les demandes du [13] et de Madame [D] en vue de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur ;

*déclaré le jugement commun à la CPAM de Moselle ;

*dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision concernant la contestation par la société [10] relative à l'opposabilité de la décision de prise en charge du caractère professionnel de la maladie contractée par Monsieur [D], prise par la CPAM de Moselle;

*Ordonné la mise hors de cause de la société [10] ;

*Débouté Madame [I] [D], le [13] et la CPAM de Moselle de leurs demandes dirigées à l'encontre de ladite société ;

*Condamné Madame [I] [D], le [13] et la CPAM de Moselle aux dépens engendrés par la présente procédure.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont retenu que la preuve de la qualité d'employeur de la société [10] n'avait pas été rapportée.

Par courrier remis au greffe le 7 juin 2022, Madame [D] a interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée par LRAR reçue le 17 mai 2022.

Par conclusions datées du 30 janvier 2024 et soutenues oralement lors de l'audience de plaidoirie par son représentant, Madame [D] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement entrepris ;

- Débouter la société [10] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

Statuant à nouveau :

- Juger que la maladie professionnelle et le décès de Monsieur [M] [D] sont dus à une faute inexcusable de la société [10].

- Juger que Madame [I] [D] a droit à la majoration de sa rente de conjoint survivant à son taux maximal.

- Condamner la caisse à lui payer cette majoration.

- Condamner la caisse à lui verser l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L452-3 du code de la sécurité sociale, Monsieur [D] ayant bénéficié d'un taux d'IPP de l00%.

- Condamner la société [10] à payer à Madame [I] [D] la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du CPC

- La condamner aux entiers frais et dépens.

Par conclusions datées du 19 décembre 2023 et soutenues oralement lors de l'audience de plaidoirie par son conseil, le [13], subrogé dans les droits des ayants-droits de Monsieur [D], demande à la cour de :

- INFIRMER le jugement entrepris, et, statuant à nouveau,

- DECLARER recevable la demande formée par Madame [I] [D], dans le seul but de faire reconnaitre l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur de son époux,

- DECLARER recevable la demande du Fonds d'Indemnisation des Victimes de l'Amiante, subrogé dans les droits des ayants-droits de Monsieur [D],

- DIRE que la maladie professionnelle dont était atteint Monsieur [M] [D] est la conséquence de la faute inexcusable de la société [10],

- ACCORDER le bénéfice de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L.452-3, alinéa ler, du code de la sécurité sociale, et DIRE que cette indemnité sera versée par la CPAM de Moselle à la succession de Monsieur [D],

- FIXER à son maximum la majoration de la rente servie au conjoint survivant de la victime, en application de l'article L452-2 du Code de la sécurité sociale, et DIRE que cette majoration sera directement versée à ce conjoint survivant par l'organisme de sécurité sociale,

- FIXER l'indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [D] comme suit :

Souffrances morales 45.000 €

Souffrances physiques 14.500 €

Préjudice d'agrément 14.500 €

Préjudice esthétique 2.000 €

TOTAL 76.000 €

- FIXER l'indemnisation des préjudices moraux de ses ayants droit, comme suit :

Madame [D] [I] (conjoint) 32.600 €

Madame [B] [X] (enfant) 8.700 €

Monsieur [D] [S] (enfant) 8.700 €

Monsieur [D] [J] (enfant) 8.700 €

Monsieur [D] [T] (petit enfant) 3.300 €

Madame [D] [C] (petit enfant) 3.300 €

Madame [B] [F] (petit enfant) 3.300 €

Monsieur [B] [P] (petit enfant) 3.300 €

- DIRE que la CPAM de Moselle devra verser ces sommes au [13], créancier subrogé, en application de l'article L452-3 alinéa 3, du Code de la sécurité sociale, soit un total de 147.900 €,

- CONDAMNER la société [10] à payer au [13] une somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNER la partie succombante aux dépens, en application des articles 695 et suivants du code de procédure civile.

Par conclusions datées du 15 février 2024 et soutenues oralement lors de l'audience de plaidoirie par son représentant, la CPAM de Moselle demande à la cour de :

- donner acte à la caisse qu'elle s'en remet à la sagesse de la cour en ce qui concerne la faute inexcusable reprochée à la société [10] ;

Le cas échéant :

- donner acte à la caisse qu'elle s'en remet à la cour en ce qui concerne la demande de versement de l'indemnité prévue par l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, et la fixation du montant de la majoration de la rente de conjoint survivant ;

- donner acte à la caisse qu'elle s'en remet à la cour en ce qui concerne la fixation des préjudices extra-patrimoniaux subis par feu Monsieur [D] ;

- donner acte à la caisse qu'elle s'en remet à la cour en ce qui concerne la fixation des préjudices moraux subis par les ayants-droits ;

- déclarer irrecevable toute éventuelle demande d'inopposabilité de l'employeur ;

- condamner la société [10], dont la faute inexcusable aura été préalablement reconnue, à rembourser à la caisse les sommes qu'elle sera tenue de verser en application des dispositions de l'article L.452-3-1 du code de la sécurité sociale.

Par conclusions datées du 12 février 2024 et soutenues oralement lors de l'audience de plaidoirie par son conseil, la société [10] demande à la cour de :

A TITRE PRINCIPAL :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause la société [10] ;

A TITRE SUBSIDIAIRE :

- DIRE ET JUGER que la maladie professionnelle de M. [D] rattachée au tableau n°30 bis des maladies professionnelles ne résulte pas de la faute inexcusable de la société [9] ;

A TITRE ENCORE PLUS SUBSIDIAIRE :

- DEBOUTER le [13] de toutes ses demandes dirigées contre la société [9] ;

- DEBOUTER les Consorts [D] de toutes leurs demandes dirigées contre la société [9] ;

- DEBOUTER la CPAM de toutes ses demandes dirigées contre la société [9] ;

- CONDAMNER le demandeur aux entiers dépens ;

A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE :

- RAMENER à de plus justes proportions les demandes d'indemnisation du FIVA.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées et soutenues à l'audience, ainsi qu'aux pièces déposées par elles.

SUR CE,

Sur la mise en cause de la société [10]

Madame [D] sollicite l'infirmation du jugement entrepris, faisant valoir qu'il résulte des pièces qu'elle produit la preuve de la qualité d'employeur d'[10]. Elle souligne que son époux ayant été employé par le groupe [21] avec un numéro RCS identique à celui de la société [17] reprise par la société [10], cette qualité est suffisamment démontrée.

La société [10] sollicite la confirmation du jugement entrepris, faisant valoir que Monsieur [D] ayant été employé par les sociétés [16] puis [18], reprises par la société [12], la société [10] n'a pas la qualité d'employeur.

La caisse s'en rapporte à l'analyse de la cour.

********************

Il découle des dispositions de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale que :

« Lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants ».

Il est constant que pour qu'une instance en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur puisse être diligentée, il est indispensable de déterminer, au préalable, l'existence d'un contrat de travail entre le salarié et l'employeur mis en cause. Pour ce faire, il faut que l'identité de l'employeur attrait en justice ne soit pas remise en cause et soit clairement établie.

En l'espèce, il résulte notamment de l'attestation émise par la société [19] le 8 juillet 1996 que Monsieur [D] a travaillé pour la société [19] du 5 janvier 1959 au 1er novembre 1994, ayant été affecté au site de [Localité 14] à compter du 1er avril 1972 en qualité d'agent de maîtrise (pièce n°13 de l'appelante).

Si Madame [D] soutient que cette société est devenue [17] aux droits de laquelle est ensuite venue la société [10], il apparaît qu'elle ne produit aucun traité d'apport d'actif permettant d'établir le lien entre la société [17], la société [19] et la société [10].

Ainsi, le bulletin de paie versé aux débats (pièce n°12 de l'appelante) émanant de la société [20] est insuffisant à établir la qualité d'employeur d'[10], dès lors que cette qualité est contestée par l'intimée et qu'aucun autre bulletin de paie ne permet de démontrer que Monsieur [D] a bien été employé pour le compte d'une des sociétés reprises par la société [10].

Au surplus, il convient de relever que la procédure d'instruction concernant la reconnaissance de la pathologie diagnostiquée chez Monsieur [D] comme étant d'origine professionnelle, puis l'imputabilité du décès de Monsieur [D] à cette pathologie, a été menée par la CPAM à l'encontre de la société [12] en qualité d'employeur (pièces n°30 à 33 de la société [10]).

Ainsi, en l'état du dossier et en l'absence d'éléments probants, il n'est pas établi que la société [10] a eu la qualité d'employeur de Monsieur [M] [D].

Par conséquent, il convient de confirmer le jugement entrepris qui a ordonné la mise hors de cause de la société [10] et de débouter Madame [I] [D] de l'intégralité de ses demandes.

SUR LES DEMANDES ANNEXES

L'issue du litige conduit la cour à débouter Madame [I] [D] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et à la condamner aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Metz en date du 11 mai 2022 ;

DEBOUTE Madame [I] [D] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Madame [I] [D] aux dépens d'appel.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 3
Numéro d'arrêt : 22/01605
Date de la décision : 27/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-27;22.01605 ?
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