La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/04/2024 | FRANCE | N°24/00325

France | France, Cour d'appel de Metz, Rétention administrative, 28 avril 2024, 24/00325


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 28 AVRIL 2024



1ère prolongation



Nous, Olivier MICHEL, conseiller, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assisté de Sonia DE SOUSA, greffière ;



Dans l'affaire N° RG 24/00325 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GEZU ETRANGER :



M. [B] [F]

né le 04 Octobre 2002 à [Localité 2] EN TUNISIE

de nationalité Tunisienne

Actuellement en rétention administrative.
<

br>



Vu la décision de M. LE PREFET DU BAS RHIN prononçant le placement en rétention de l'intéressé pour une durée n'excédant pas 48 heures ;



Vu le recour...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 28 AVRIL 2024

1ère prolongation

Nous, Olivier MICHEL, conseiller, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assisté de Sonia DE SOUSA, greffière ;

Dans l'affaire N° RG 24/00325 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GEZU ETRANGER :

M. [B] [F]

né le 04 Octobre 2002 à [Localité 2] EN TUNISIE

de nationalité Tunisienne

Actuellement en rétention administrative.

Vu la décision de M. LE PREFET DU BAS RHIN prononçant le placement en rétention de l'intéressé pour une durée n'excédant pas 48 heures ;

Vu le recours de M. [B] [F] en demande d'annulation de la décision de placement en rétention;

Vu la requête de M. LE PREFET DU BAS RHIN saisissant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz tendant à la prolongation du maintien de l'intéressé dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de vingt huit jours;

Vu l'ordonnance rendue le 26 avril 2024 à 09h54 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz déboutant l'intéressé de sa demande d'annulation de l'arrêté de rétention et ordonnant la prolongation de la rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire et ce pour une durée maximale de 28 jours jusqu'au 24 mai 2024 inclus ;

Vu l'acte d'appel de l'association assfam ' groupe sos pour le compte de M. [B] [F] interjeté par courriel du 26 avril 2024 à 16h31 contre l'ordonnance rejetant la demande d'annulation de la décision de placement en rétention et ayant statué sur la prolongation de la mesure de rétention administrative ;

Vu l'avis adressé à Monsieur le procureur général de la date et l'heure de l'audience ;

A l'audience publique de ce jour, à 15 H 30, en visioconférence se sont présentés :

- M. [B] [F], appelant, assisté de Me Nabila BOULKAIBET, avocat de permanence commis d'office, présente lors du prononcé de la décision et de [P] [V], interprète assermenté en langue arabe, présent lors du prononcé de la décision

- M. LE PREFET DU BAS RHIN, intimé, représenté par Me Aurélie MULLER, avocat au barreau de Metz substituant la selarl centaure avocats du barreau de Paris, présente lors du prononcé de la décision

Me Nabila BOULKAIBET et M. [B] [F], par l'intermédiaire de l'interprète ont présenté leurs observations ;

M. LE PREFET DU BAS RHIN, représenté par son avocat a sollicité la confirmation de l'ordonnance entreprise ;

M. [B] [F], par l'intermédiaire de l'interprète, a eu la parole en dernier.

Sur ce,

- Sur la recevabilité de l'acte d'appel :

L'appel est recevable comme ayant été formé dans les formes et délai prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

- Sur l'exception de procédure :

L'article L.813-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que si à l'occasion d'un contrôle mentionné à l'article L.812-2, il apparaît qu'un étranger n'est pas en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, il peut être retenu aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Dans ce cadre, l'étranger peut être conduit dans un local de police ou de gendarmerie pour y être retenu par un officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale.

Selon l'article L.813-3 du même code, l'étranger ne peut être retenu que pour le temps strictement exigé par l'examen de son droit de circulation ou de séjour et, le cas échéant, le prononcé et la notification des décisions administratives applicables. La retenue ne peut excéder vingt-quatre heures à compter du début du contrôle mentionné à l'article L. 812-2.

En l'espèce, M. [F] conteste la régularité de la mesure de retenue administrative dont il fait l'objet aux motifs d'une part qu'aucun élément n'est produit permettant de vérifier la régularité du contrôle opéré par les autorités allemandes avant sa remise aux autorités françaises, d'autre part qu'en tenant compte de sa privation antérieure de liberté, la durée de la 'rétention administrative' aurait excédé la durée légale de 24 heures.

Toutefois et comme l'a pertinemment relevé le premier juge, il n'appartient pas au juge français de se prononcer sur la régularité des opérations de contrôle des autorités étrangères et il est observé en outre que M. [F] à qui incombe la charge de la preuve de l'exception qu'il invoque, ne fournit pas même une explication sur les raisons pour lesquelles la régularité de ce contrôle est susceptible d'être incriminée.

S'agissant de la durée de la mesure de retenue, le premier juge a exactement dit qu'elle s'apprécie à compter de la remise de l'intéressé aux autorités française et que les pièces figurant aux dossiers, notamment les procès-verbaux de saisine et de fin de retenue permettent de s'assurer de la régularité de la mesure, en particulier que sa durée n'a pas excédé 24 heures. L'ordonnance est confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception de procédure.

- Sur la contestation de l'arrêté portant placement en rétention :

. Sur l'insuffisance de motivation au regard de l'état de vulnérabilité :

Selon l'article L.741-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décison de placement en rétention doit être écrite et motivée.

Il résulte par ailleurs de l'article L.741-4 du même code que la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Ces dispositions n'instaurent pas une obligation de motivation spécifique afférente à l'état de vulnérabilité, mais imposent à l'autorité administrative de le prendre en considération s'il existe.

En l'espèce, M. [F] prétend que l'arrêté portant rétention est insuffisamment motivé faute de prendre en considération sa vulnérabilité du fait de sa minorité, déclarant être né le 4 octobre 2006.

Cependant, il ne peut être valablement reproché au préfet du Bas-Rhin de ne pas avoir pris en compte d'un état dont l'intéressé lui même n'a pas fait état. En effet, lors de son audition en retenue, M. [F] assisté d'un interprète, a expressément déclaré sans la moindre réserve, qu'il est né à [Localité 2] , en Tunisie le 4 octobre 2002. Ce n'est qu'en suite à son placement en rétention que M. [F] a prétendu être né quatre années plus tard, sans en justifier d'une quelconque manière. Le premier juge observe par ailleurs à juste titre que dans ses considérants l'arrêté incriminé relève exactement qu'il ne ressort ni des déclarations de l'intéressé, ni des documents qu'il a remis, que son état de santé s'opposerait à son placement en rétention. Il s'ensuit que l'arrêté a pris en compte l'éventuel état de vulnérabilité de l'appelant.

. Sur l'erreur d'appréciation sur l'état de vulnérabilité et sur la minorité :

Selon l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Il résulte des développements qui précèdent que M. [F] ne justifie en rien de l'état de minorité dont il se prévaut désormais. Aucune pièce n'est produite à cet égard et les déclarations de l'intéressé, préalables à son placement en rétention, elles mêmes ne font pas état de la vulnérabilité qu'il allègue. L'arrêté contesté fonde son appréciation sur les éléments dont disposait le préfet du Bas-Rhin à l'époque, précisant expressément que si l'intéressé est susceptible de deux identités quant à sa nationalité tunisienne ou libyenne, il a pour date de naissance le 4 octobre 2002, comme le mentionnait l'appelant. Aucun élément n'est de nature à objectiver le caractère erroné de cette considération, tant au moment où l'arrêté a été pris qu'aujourd'hui. Il est observé d'ailleurs que lors de son placement en rétention administrative, M. [F] a rempli et signé avec l'assistance d'un interprète, un questionnaire relatif à éventuel état de vulnérabilité lequel ne mentionne aucun élément susceptible de caractériser cet état. C'est donc a bon droit que l'ordonnance déférée a rejeté les moyens de contestation de l'arrêté tirés de l'erreur d'appréciation.

. Sur le caractère injustifié du placement en rétention :

Il résulte des dispositions de l'article L.740-1 du du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le placement en rétention administrative doit permettre d'assurer l'exécution de la mesure d'éloignement dont fait l'objet un étranger.

Au soutient de sa contestation de l'arrêté portant rétention, M. [F] fait valoir qu'étant de nationalité libyenne, il n'existe aucune perspective raisonnable d'éloignement vers la Lybie en raison de l'instabilité politique de ce pays et du manque de relations diplomatique avec ce pays.

Le premier juge a exactement rappelé que s'agissant d'une première prolongation de la mesure de rétention, il lui appartient d'apprécier le risque de non exécution de la mesure d'éloignement et l'existence de diligences pour sa mise en oeuvre. Il a également pertinemment observé que la décision d'éloignement ne vise pas la Libye, mais le 'pays d'origine' de l'intéressé ou 'son pays de réadmission après accord des autorités de ce pays'. M. [F] a expressément déclaré aux services de police au cours de la mesure de retenue être de nationalité tunisienne et avoir menti aux autorités allemandes en leur déclarant être de nationalité libyenne 'par peur d'être éloigné'. Il ressort par ailleurs des éléments figurant au dossier que l'administration a d'ores et déjà effectué des diligences auprès des autorités tunisiennes en écrivant au consul et en lui adressant un courriel aux fins d'obtenir un laissez-passer l'autorisant à regagner la Tunisie. En l'état, un risque de non exécution de la mesure d'exécution, n'est objectivé par aucun élément probant, les déclarations de l'intéressé sur sa nationalité pouvant d'autant moins être considérées comme telles qu'il a lui même admis avoir menti. C'est donc à juste titre que le premier juge a rejeté ce moyen.

L'ordonnance déférée est confirmée en ce qu'elle a rejeté la contestation portant placement en rétention.

- Sur la demande de prolongation :

L'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que l'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision; ce risque est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 .

Aux termes des articles L. 742-1, L. 742-2 et L. 742-3 du même code, le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé, dans les conditions prévues au titre relatif à la rétention administrative, par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court pour une période de vingt-huit jours à compter de l'expiration du délai de quarante-huit heures mentionné à l'article L. 741-1.

Enfin, il résulte de l'article L. 741-3 qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ; l'administration doit exercer toute diligence à cet effet.

En l'espèce, l'appelant conteste la prolongation de la mesure de rétention au motif que l'administration n'a effectué aucune diligence auprès des autorités libyennes pour mettre en oeuvre son éloignement. Il résulte toutefois des développements qui précèdent que M. [F] à lui même reconnu lors de son audition par les services de police avoir menti aux autorités allemandes en leur déclarant qu'il est de nationalité libyenne alors qu'il est de nationalité tunisienne. Il apparaît également que l'administration française a dès le 24 avril 2024, contacté le consul de Tunisie par lettre et courriel aux fins d'obtention d'un laissez-passer. Il est ainsi justifié de l'exercice de toutes diligences au sens de l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen est rejeté.

C'est à juste titre que le premier juge a autorisé la prolongation de la rétention dont fait actuellement l'objet M. [F]. Il résulte en effet des précédents développements que l'intéressé fait l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'il ne bénéficie pas d'un document de voyage en cours de validité. Il apparaît également que M. [F] ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dès lors qu'il se présente sous différents états civils, qu'il ressort de ses déclarations qu'il s'est rendu en Allemagne pour se soustraire à la mesure d'éloignement et qu'il ne justifie pas d'une résidence effective ou d'un hébergement stable en France. Si par ailleurs les contraintes matérielles ne permettent pas à l'appelant de quitter immédiatement le territoire, son éloignement reste une perspective raisonnable.

L'ordonnance est confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement,, en dernier ressort,

DÉCLARONS recevable l'appel de M. [B] [F] à l'encontre de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz ayant statué sur la demande d'annulation de la décision de placement en rétention et sur la prolongation de la mesure de rétention administrative ;

CONFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Metz le 26 avril 2024 à 09h54 ;

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance ;

DISONS n'y avoir lieu à dépens.

Prononcée publiquement à Metz, le 28 avril 2024 à 16h00

La greffière, Le conseiller,

N° RG 24/00325 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GEZU

M. [B] [F] contre M. LE PREFET DU BAS RHIN

Ordonnance notifiée le 28 Avril 2024 par courriel, par le greffe des rétentions administratives de la cour d'appel à :

- M. [B] [F] et son conseil

- M. LE PREFET DU BAS RHIN et son représentant

- Au centre de rétention administrative de [Localité 1]

- Au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz

- Au procureur général de la cour d'appel de Metz


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00325
Date de la décision : 28/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-28;24.00325 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award