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19/04/2024 | FRANCE | N°24/00300

France | France, Cour d'appel de Metz, Rétention administrative, 19 avril 2024, 24/00300


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 19 AVRIL 2024





Nous, Géraldine GRILLON, conseillère, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sonia DE SOUSA, greffière ;



Dans l'affaire N° RG 24/00300 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GESJ opposant :



M. le procureur de la République



Et



M. LE PREFET DU BAS RHIN



À



M. [O] [I]

né le 30 avril 1990 à [Localit

é 2] au MAROC

de nationalité Marocaine

Actuellement en rétention administrative.



Vu la décision de M. LE PREFET DU BAS RHIN prononçant l'obligation de quitter le territoire ...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE METZ

ORDONNANCE DU 19 AVRIL 2024

Nous, Géraldine GRILLON, conseillère, agissant sur délégation de Monsieur le premier président de la cour d'appel de Metz, assistée de Sonia DE SOUSA, greffière ;

Dans l'affaire N° RG 24/00300 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GESJ opposant :

M. le procureur de la République

Et

M. LE PREFET DU BAS RHIN

À

M. [O] [I]

né le 30 avril 1990 à [Localité 2] au MAROC

de nationalité Marocaine

Actuellement en rétention administrative.

Vu la décision de M. LE PREFET DU BAS RHIN prononçant l'obligation de quitter le territoire français et prononçant le placement en rétention de l'intéressé pour une durée n'excédant pas 48 heures ;

Vu le recours de M. [O] [I] en demande d'annulation de la décision de placement en rétention ;

Vu la requête de M. LE PREFET DU BAS RHIN saisissant le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz tendant à la prolongation du maintien de l'intéressé dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de vingt huit jours;

Vu l'ordonnance rendue le 17 avril 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz ordonnant la remise en liberté de M. [O] [I] ;

Vu l'appel avec demande d'effet suspensif formé le 17 avril 2024 à 17h40 par M. le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Metz;

Vu l'appel de Me RANNOU de la SELARL Centaure avocat au barreau de Paris représentant M. LE PREFET DU BAS RHIN par email du 17 avril 2024 à 19h53 contre l'ordonnance ayant remis M. [O] [I] en liberté ;

Vu l'appel incident formé le 17 avril 2024 à 18h27 par Me GASIMOV, du barreau de strasbourg conseil de M. [I] ;

Vu l'ordonnance du 18 avril 2024 conférant l'effet suspensif à l'appel du procureur de la République et ordonnant le maintien de M. [O] [I] à disposition de la Justice ;

Vu l'avis adressé à Monsieur le procureur général de la date et l'heure de l'audience ;

A l'audience publique de ce jour, à 10h00, en visioconférence se sont présentés :

- Mme Clara ZIEGLER, substitut du procureur général, a présenté ses observations au soutien de l'appel du procureur de la République, présente lors du prononcé de la décision

- Me Dominique MEYER, avocat au barreau de Metz substituant la SELARL Centaure avocats du barreau de Paris, représentant M. LE PREFET DU BAS RHIN a présenté ses observations et a sollicité l'infirmation de la décision présente lors du prononcé de la décision

- M. [O] [I], intimé, assisté de Me Dilbadi GASIMOV, présent lors du prononcé de la décision et de M. [R] [E], interprète assermenté en langue arabe présent lors du prononcé de la décision, ont sollicité la confirmation de l'ordonnance entreprise ;

SUR CE,

Il convient d'ordonner la jonction des procédure N° RG 24/00299 et N°RG 24/00300 sous le numéro RG 24/00300.

I - Sur le risque de fuite et les garanties de représentation :

Le procureur de la République et la préfecture du Bas-Rhin demandent l'infirmation partielle de l'ordonnance entreprise. Ils soutiennent que M. [I] ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour éviter le placement en rétention.

M. [I] sollicite la confirmation de l'ordonnance entreprise. Il soutient qu'il bénéficie de garanties de représentation suffisantes, ayant remis son passeport en cours de validité et bénéficiant d'un hébergement à [Localité 4]. Il ajoute que la menace à l'ordre public ne peut pas être retenue à son encontre contrairement à ce qu'a soutenu le ministère public à l'audience.

****

La Cour considère que M. [I] ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour éviter le placement en rétention. En effet, M. [I], à l'issue de son placement en garde à vue dans le cadre de la plainte de son épouse pour des faits de violences, a fait l'objet d'une COPJ pour le 12 septembre 2024 devant le tribunal judiciaire de Strasbourg et a été placé sous contrôle judiciaire avec en particulier l'obligation de résider hors du domicile du couple et de s'abstenir de paraître dans ou aux abords immédiats de celui-ci. Dans le cadre de l'audience relative au contentieux de la rétention, il a présenté une attestation de M. [H] [J] qui se présente en tant que président de l'association Pluriel à [Localité 4], lequel indique qu'il hébergera M. [I] jusqu'à la régularisation de sa situation familiale.

Si M. [I] dispose ainsi d'une faculté d'hébergement chez M. [H] [J] pour l'avenir, il ne peut qu'être constaté que M. [I], qui ne peut plus retourner vivre au domicile conjugal qui constituait sa résidence effective et où vit actuellement l'enfant commun, ne bénéficie pas d'un lieu de vie dans lequel il peut justifier s'y être stabilisé et y avoir ses intérêts pour garantir qu'il restera à cette adresse sans risque de se soustraire à l'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention qui a remis en liberté M. [I] sur le fondement de garanties de représentation suffisantes.

Il convient désormais de statuer sur la demande de prolongation de la rétention présentée par la préfecture du Bas-Rhin.

I - Sur les exceptions de procédure :

M. [I] soutient que la garde à vue dont il a fait l'objet est nulle en ce que ses droits lui ont été notifiés tardivement et en ce que le procureur de la République n'a pas été informé de la mesure. Il doit être remis en liberté.

- Sur la notification tardive des droits en garde à vue :

En application de l'article 63-1 du code de procédure pénale, la personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend, le cas échéant au moyen du formulaire prévu au treizième alinéa, de ses droits ; le 13ème alinéa de ce texte prévoit que si la personne ne comprend pas le français, ses droits doivent lui être notifiés par un interprète, le cas échéant après qu'un formulaire lui a été remis pour son information immédiate.

En l'espèce, ainsi que l'a relevé le juge des libertés et de la détention, conformément à ce texte, un formulaire a été remis à M. [I] en langue arabe dès sa présentation à un OPJ le 12 avril à 18H10, soit immédiatement lors de son placement en garde à vue, la notification orale par un interprète ayant ensuite eu lieu à 20H11.

Dès lors, les dispositions légales ont été respectées. Il convient de confirmer l'ordonnance entreprise sur ce point.

- Sur l'information du procureur de la République du placement en garde à vue :

L'article 63 du code de procédure pénale prévoit que dès le début de la mesure de garde à vue, l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue.

La cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il convient d'adopter que le juge des libertés et de la détention a écarté ce moyen soulevé devant lui et repris devant la cour d'appel. En effet, la procédure fait apparaître un procès-verbal établi à 18H10 qui fait état de l'information faite au procureur de la République du placement en garde à vue, étant ajouté que les dispositions légales n'exigent pas de formalisme particulier pour l'exécution de cette information.

L'ordonnance entreprise est confirmée sur ce point.

II - Sur la légalité de l'arrêté de placement en rétention :

- Sur la compétence du signataire de l'arrêté :

M. [I] soutient que l'arrêté contesté est signé par Monsieur [N] [C]. L'autorité administrative doit justifier que la délégation de signature est légale et qu'elle est publiée au recueil des actes administratifs. La Préfecture a versé aux débats l'arrêté du 29 janvier 2024 donnant délégation à Monsieur [C] à effet de prendre toute mesure urgente notamment dans le cadre de placement en rétention des étrangers. Toutefois, ce pouvoir lui est reconnu dans le cadre des permanences qu'il doit assurer. La Préfecture ne justifie pas que Monsieur [C] était de permanence le 14 avril 2024.

Le préfet fait valoir que le signataire de l'arrêté de placement en rétention n'avait pas besoin de délégation.

Il est rappelé qu'aucune disposition légale n'oblige l'administration à justifier de l'indisponibilité du délégant et des empêchements éventuels des délégataires. Il appartient à M. [I] de démontrer que M. [C] n'avait pas compétence pour signer l'arrêté de placement en rétention ou qu'il n'était pas de permanence le jour où il a signé l'arrêté, preuve qui n'est pas rapportée.

L'ordonnance entreprise est également confirmée sur ce point.

- Sur l'absence d'interprète lors de l'arrivée au local de rétention administrative :

Monsieur [I] fait valoir que dans un premier temps il a été placé dans le local de rétention de [Localité 3] suivant la fin de sa garde à vue. Il y est resté du 14 avril 2024, 21h35 à 15 avril 2024 13h00. Ses droits

lui ont été notifiés sans l'assistance d'un interprète en langue arabe. Ces droits lui ont été notifiés avec l'assistance d'un interprète en langue arabe une fois arrivé au centre de rétention de [Localité 1] le 15 avril

2024 à 16h05, soit un jour plus tard.

La cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il convient d'adopter que le juge des libertés et de la détention a écarté ce moyen soulevé devant lui et repris devant la cour d'appel.

L'ordonnance entreprise qui a rejeté ce moyen est confirmée sur ce point.

III - Sur la prolongation de la rétention :

L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatif à la procédure applicable, prévoit que le maintien en rétention au-delà de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision de placement initiale peut être autorisé par le juge des libertés et de la détention saisie à cette fin par l'autorité administrative.

M. [I], de nationalité Marocaine, fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, prise moins de 3 ans auparavant et pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; cette obligation est assortie d'une interdiction de circulation sur le territoire ; il en a reçu notification le 14 avril 2024.

Pour garantir l'exécution de cette décision d'éloignement, M. [I] a été placé en rétention administrative le 14 avril 2024.

Des contraintes matérielles ne permettent pas à la personne retenue de quitter le territoire dans les 48 heures suivant la notification de la décision de placement la concernant. Son éloignement demeure néanmoins une perspective raisonnable dans la mesure où une demande de routing a été faite dès le 15 avril 2024, étant rappelé que l'administration dispose du passeport de M. [I].

Ainsi, les diligences effectuées par l'administration sont justifiées conformément aux dispositions de l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En conséquence, et au regard de ce qui a été dit ci-dessus s'agissant de l'insuffisance des garanties de représentation de M. [I], il convient de faire droit à la requête de la préfecture en prolongation de 28 jours de la rétention.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

Ordonne la jonction des procédure N° RG 24/00299 et N°RG 24/00300 sous le numéro RG 24/00300.

Déclarons recevable l'appel de M. LE PREFET DU BAS RHIN et de M. le procureur de la République à l'encontre de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Metz ayant remis en liberté M. [O] [I].

Déclarons recevable l'appel de Me GASIMOV conseil de M. [I].

INFIRMONS l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention de Metz le 17 avril 2024 à 11h42.

Déclarons la décision de placement en rétention prononcé à l'encontre de M. [O] [I] régulière.

PROLONGEONS la rétention administrative de M. [O] [I] du 16 avril 2024 jusqu'au 14 mai 2024 inclus.

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

DISONS n'y avoir lieu à dépens.

Prononcée publiquement à Metz, le 19 avril 2024 à 11h35

La greffière, La conseillère,

N° RG 24/00300 - N° Portalis DBVS-V-B7I-GESJ

M. LE PREFET DU BAS RHIN contre M. [O] [I]

Ordonnnance notifiée le 19 Avril 2024 par courriel, par le greffe des rétentions administratives de la cour d'appel à :

- M. LE PREFET DU BAS RHIN et son conseil

- M. [O] [I] et son représentant

- Au centre de rétention administrative de [Localité 1]

- Au juge des libertés et de la détention du tribunal judicaire de Metz

- Au procureur général de la cour d'appel de Metz

- Au procureur de la République du tribunal judiciaire de Metz


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Rétention administrative
Numéro d'arrêt : 24/00300
Date de la décision : 19/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-19;24.00300 ?
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