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21/03/2023 | FRANCE | N°21/03048

France | France, Cour d'appel de Metz, 4ème chambre, 21 mars 2023, 21/03048


Minute n°23/00198

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



Au Nom du Peuple Français

















R.G : N° RG 21/03048 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FUSM







[R]

C/

[J]





COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE DE LA FAMILLE



ARRÊT DU 21 MARS 2023







APPELANTE



Madame [O] [R] agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de l'enfant mineure [I] [K] [R].

[Adresse 6]

[Localité

4]

représentée par Me François RIGO, avocat à la Cour





INTIMÉ



Monsieur [S] [J]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Christine SALANAVE, avocat à la Cour







COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ



PRÉSIDENT : Mm...

Minute n°23/00198

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au Nom du Peuple Français

R.G : N° RG 21/03048 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FUSM

[R]

C/

[J]

COUR D'APPEL DE METZ

CHAMBRE DE LA FAMILLE

ARRÊT DU 21 MARS 2023

APPELANTE

Madame [O] [R] agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de l'enfant mineure [I] [K] [R].

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par Me François RIGO, avocat à la Cour

INTIMÉ

Monsieur [S] [J]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Christine SALANAVE, avocat à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

PRÉSIDENT : Mme Martine ESCOLANO, président de chambre

ASSESSEURS : Mme Claire-Agnès GIZARD, conseiller

Mme Marie BACHER-BATISSE, conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Véronique FELIX

ET AU PRONONCÉ DE L'ARRÊT : Mme Sylvie AHLOUCHE

DATE DES DÉBATS : à l'audience tenue hors la présence du public en date du 07 février 2023, l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 21 mars 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe selon les dispositions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

ARRET CONTRADICTOIRE

EXPOSE DU LITIGE

Mme [O] [R] a donné naissance, le [Date mariage 7] 2005 à [Localité 10] (54) à l'enfant, [I] [K] [R] qu'elle a reconnue le 17 janvier 2005.

Par acte du 19 juin 2017, Mme [O] [R], agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de l'enfant [I] a assigné M. [S] [J] devant le tribunal de grande instance de Thionville sur le fondement des articles 325 et suivants du code civil en recherche de paternité.

Par jugement avant dire droit en date du 31 août 2018, le tribunal a ordonné une expertise biologique par comparaison des sangs de M.[S] [J], Mme [O] [R] et l'enfant [I], et l'a confiée à l'institut génétique Nantes Atlantique (IGNA).

Dans son rapport du 14 janvier 2019, l'expert conclut que la paternité de M. [S] [J] vis-à-vis de l'enfant [I] était extrêmement vraisemblable (probabilité de paternité supérieure à 99,9999%).

Par jugement du 13 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Thionville a notamment :

- dit que M. [S] [J], né le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 8] (54) est le père de l'enfant [I] née le [Date naissance 1] 2005 à [Localité 10] (54),

- dit que l' autorité parentale est exercée par la mère, Mme [O] [R],

- dit que la résidence de l'enfant est fixée chez la mère,

- condamné M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R], pour sa part contributive à l'entretien et à l'éducation de son enfant [I], une pension alimentaire de 180 euros, payable mensuellement et d'avance le cinq de chaque mois au domicile de Mme [O] [R], avec indexation,

- condamné M. [S] [J] à verser à Mme [O] [R] ès qualité de représentante légale de [I], une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral de l'enfant,

- condamné M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [S] [J] aux dépens de la procédure en ce compris le coût de l'expertise.

-o0o-

Par déclaration du 23 décembre 2021 (RG 21/3048), Mme [O] [R] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- débouté Mme [O] [R] de sa demande de fixation de la pension alimentaire à compter du 19 juin 2012,

- fixé la pension alimentaire due par M. [J] pour l'entretien et l'éducation de [I] à compter du jour du prononcé de la décision.

Par déclaration du 3 février 2022 (RG 22/338), M. [S] [J] a également interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- condamné M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R], pour sa part contributive à l'entretien et à l'éducation de son enfant [I], une pension alimentaire de 180 euros par mois, payable mensuellement et d'avance avant le cinq de chaque mois au domicile de Mme [O] [R] ;

- condamné M. [S] [J] à verser à Mme [O] [R] une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudicie moral de l'enfant ;

- condamné M. [S] [J] aux dépens qui comprendront les frais d'expertise ;

- condamné M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 20 juin 2022, les deux procédures ont été jointes sous le N° RG 21/3048.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par conclusions récapitulatives en date du 26 janvier 2023, Mme [O] [R] demande à la cour d'appel de :

- ordonner la jonction des procédures 21/03048 et 22/338,

- dire l'appel de Mme [O] [R] agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de [I] recevable et bien fondé,

- rejeter l'appel formé par M. [J] [S] et le débouter de l'intégralité de ses demandes,

en conséquence,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande de rétroactivité de la pension alimentaire due par M. [J] pour l'entretien et l'éducation de [I],

et statuant à nouveau sur ce seul point,

- condamner M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R] pour sa part contributive à l'entretien et à l'éducation de [I] une pension alimentaire de 180 euros par mois et ce à compter du 19 juin 2012, subsidiairement à compter du 28 mai 2015, encore plus subsidiairement, à compter du jour de l'assignation,

- condamner M. [J] à verser à Mme [R] une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers frais et dépens.

Au soutien de ses prétentions, Mme [O] [R] fait valoir que M. [S] [J] assumait au départ la naissance de son enfant, mais qu'il s'est soudainement dédouané de ses obligations paternelles. Contrairement aux allégations du père, la mère a toujours souhaité qu'il assume son rôle de père. [I] a donc souffert de la soudaine absence de son père alors que leurs liens étaient existants et forts et a commencé à consulter un psychologue.

Mme [O] [R] n'a jamais forcé M. [S] [J] à passer du temps avec [I] et le fait de vouloir que son enfant connaisse son histoire paternelle et entretienne de bonnes relations avec son père n'est nullement une vengeance.

Elle ajoute que d'une part si le lien de paternité avait été établi dès l'origine, elle aurait pu obtenir depuis des années une pension alimentaire pour l'enfant [I], et d'autre part lorsque l'action en recherche de paternité aboutit, le jugement produit un effet rétroactif de sorte que M. [S] [J] est redevable rétroactivement de son obligation alimentaire.

M. [S] [J] s'est remarié en 2021 et partage donc l'intégralité de ses charges avec sa nouvelle épouse. Il ne produit cependant aucun justificatif financier sérieux. Mme [O] [R], quant à elle est infirmière mais est actuellement en maladie depuis décembre 2021 avec quelques reprises temporaires. Elle doit faire face à des charges mensuelles à hauteur de 2 807 euros. Ces frais incluent 1 200 euros de frais de garde à domicile pour accompagner l'enfant qui ne souhaite pas rester seule la nuit pendant le travail de nuit de sa mère. En sus, elle paie mensuellement les frais de vie scolaire, extrascolaire et de loisirs de [I].

Mme [O] [R] affirme également que [I] s'est inscrite au permis de conduire depuis avril. L'enfant est aussi suivie par un professionnel sophrologue et psychologue dont les frais incombent à la mère.

Par conclusions récapitulatives en date du 14 juin 2022, M. [S] [J] demande à la cour d'appel de :

- ordonner la jonction des procédures 21/03048 et 22/00338,

- rejeter l'appel formé par Mme [R],

- déclarer seul recevable et fondé l'appel formé par M. [J],

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné M. [J] au paiement d'une pension alimentaire de 180 euros par mois pour l'entretien et l'éducation de l'enfant commun et en ce qu'il a été condamné au versement de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

et statuant à nouveau,

- fixer à 100 euros par mois le montant de la pension alimentaire due par M. [J] pour l'entretien et l'éducation de l'enfant commun à compter du jugement entrepris,

- débouter Mme [R] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris en ce que la pension alimentaire due par M. [J] pour l'entretien et l'éducation de l'enfant est due à compter du jugement entrepris,

- condamner Mme [R] à payer à M. [J] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civil,

- condamner Mme [R] aux dépens.

Au soutien de ses prétentions, M. [S] [J] fait valoir que les parties n'ont jamais vécu ensemble, ne se voyaient qu'épisodiquement et qu'il n'était pas question d'avoir un enfant. Mme [O] [R] a toujours affirmé qu'elle serait capable d'assumer seule l'enfant et qu'elle n'attendait rien de lui. Contrairement aux allégations de la mère, il soutient que les liens entre le père et l'enfant étaient quasiment inexistants.

Il affirme n'avoir jamais assumé ses responsabilités de père à l'égard de l'enfant, tant avant la naissance de l'enfant qu'après celle-ci. Les rencontres entre M. [S] [J] et Mme [O] [R] n'avaient d'autre but que d'entretenir des relations sexuelles.

Dès le début de leur relation, Mme [O] [R] savait qu'il ne s'agissait pas de construire une relation avec M. [S] [J] déjà marié et encore moins de donner naissance à un enfant. C'est au moment où ce dernier a voulu mettre un terme à leur relation que Mme [O] [R] aurait introduit la présente procédure qui s'inscrit donc dans un contexte de vengeance et non dans l'intérêt de l'enfant.

M. [S] [J] n'a donc commis aucune faute.

M. [S] [J] fait valoir qu'il ne peut être condamné rétroactivement au versement d'une pension alimentaire pour une période où il n'avait pas la certitude d'être le père.

Il ajoute avoir perçu un revenu imposable de 2 193 euros par mois en 2019. En 2020, il a déclaré percevoir un revenu net de 1 728, 92 euros par mois. Il s'est marié avec sa nouvelle compagne le 5 juin 2021 qui perçoit désormais une pension d'invalidité de moins de 900 euros par mois. Le couple s'acquitte de charges à hauteur d'environ 2 399 euros par mois. Le revenu disponible du couple est donc inexistant.

Mme [O] [R] en tant qu'infirmière au Luxembourg gagne environ 7 000 euros par mois. A cela s'ajoute des prestations familiales.

Par conclusions du 5 décembre 2022, le procureur général demande à la cour d'appel de confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire deThionville en retenant que la paternité de M. [J] à l'égard de l'enfant [I] n'étant pas contestée les effets de la paternité judiciairement déclarée remontent à la naissance de l'enfant tandis que l'action en paiement d'une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant est soumise à la prescription quinquennale si bien que la demande ne peut être rétroactive que jusqu'au 19 juin 2012, l'action ayant été engagée par acte du 19 juin 2017.

Le procureur général s'en rapporte à la cour d'appel sur le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant, ne disposant pas des justificatifs de ressources et de charges des parties.

M. [J] avait connaissance de la naissance de l'enfant et l'a rencontrée à plusieurs reprises. en se comportant comme un père jusqu'au mois de mai 2015. L'impossibilité de connaître ses origines a nécessairement porté atteinte à l'intérêt de l'enfant. N'ayant ni souhaité reconnaître l'enfant, ni effectué de test de paternité, il peut être considéré comme fautif ce qui justifie sa condamnation à des dommages et intérêts pour l'enfant.

Par ordonnance en date du 20 juin 2022, la jonction des deux procédures a été ordonnée.

-o0o-

L'ordonnance de clôture a été rendue le 06 février 2023.

MOTIFS DE L'ARRET

Vu les conclusions sus-mentionnées des parties, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, en application des articles 455 et 954 du code de procédure civile ;

Sur l'étendue de la saisine de la cour d'appel

Attendu qu'en vertu de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel ne défère à la cour d'appel que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dependent ;

Que l'acte d'appel de Mme [R] critique les dispositions du jugement relatives au point de départ de la pension alimentaire et à sa fixation à compter du prononcé de la décision ;

Que l'acte d'appel de M. [J] vise les dispositions du jugement relatives à la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant, aux dommages et intérêts, à la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Que la cour d'appel est donc saisie du litige demeurant entre les parties s'agissant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant dans son montant et son point de départ, des dommages et intérêts et des dépens ;

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant

- sur le point de départ

Attendu que M. [J] ne conteste pas sa paternité à l'égard de l'enfant [I] ;

Attendu que les effets d'une paternité judiciairement déclarée remontent à la naissance de l'enfant ; que toutefois l'action en paiement de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant est soumise à la prescription quinquennale ;

Attendu que l'article 2241 du code civil confère à la demande en justice, même en référé un effet interruptif de la prescription et ce même si elle est portée devant une juridiction incompétente ;

Attendu que Mme [R] a d'abord fait assigner M. [J] devant le tribunal de grande instance de Briey selon acte du 03 août 2015, ce tribunal se déclarant territorialement incompétent par jugement du 15 septembre 2016;

Qu'elle a ensuite saisi le juge aux affaires familiales de Thionville selon assignation du 03 août 2016 et s'en est désistée en raison de l'incompétence matérielle et territoriale de la juridiction saisie (ordonnance de désistement du 06 mars 2017) ;

Qu'elle a finalement saisi le tribunal de grande instance de Thionville selon acte d'huissier de justice du 19 juin 2017 qui a rendu le jugement entrepris ;

Attendu que dans ces conditions, la prescription quinquennale a été regulièrement interrompue jusqu'au 03 août 2010, date à partir de laquelle M. [J] est redevable d'une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant [I] ; que toutefois, Mme [R] limitant sa demande au 19 juin 2012, le point de départ de l'obligation alimentaire de M. [J] sera fixé à cette date ;

- sur le montant de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant

Attendu que l'article 371-2 du code civil dispose que chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant et que cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l'enfant est majeur;

Qu'aux termes de l'article 373-2-2 du code civil en cas de séparation entre les parents ou entre ceux-ci et l'enfant, la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant prend la forme d'une pension alimentaire versée, selon le cas, par l'un des parents à l'autre, ou à la personne à laquelle l'enfant a été confié ; que les modalités et les garanties de cette pension alimentaire sont fixées par la convention homologuée visée à l'article 373-2-7 ou, à défaut par le juge ; que cette convention ou, à défaut, le juge peut prévoir le versement de la pension alimentaire par virement bancaire ou par tout autre moyen ; qu'elle peut en tout ou partie prendre la forme d'une prise en charge directe de frais exposés au profit de l'enfant ; qu'elle peut être en tout ou partie servie sous forme d'un droit d'usage et d'habitation ;

Que l'article 373-2-5 prévoit que le parent qui assume à titre principal la charge d'un enfant majeur qui ne peut lui-même subvenir à ses besoins peut demander à l'autre parent de lui verser une contribution à son entretien et son éducation ; que c'est au demandeur de démontrer que cet enfant ne peut lui-même subvenir à ses besoins; que le juge peut décider ou les parents convenir que cette contribution sera versée en tout ou partie entre les mains de l'enfant ;

Que chacune des parties devant faire face aux charges de la vie courante, il n'y a lieu ni de les détailler ni de les prendre en compte dans la mesure où leur montant et leur variabilité sont liés au mode de vie et de consmmation de cahcun ; que seules sont prises en compte les charges principales relatives au logement et aux éventuels crédits immobiliers contractés ; que toutefois, il sera rappelé que l'obligation alimentaire prime toute autre dépense (notamment une acquisition immobilière) ;

Attendu que pour fixer à la somme de 180 euros par mois la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant mise à la charge de M. [J], le premier juge a retenu les situations suivantes pour chacune des parties :

- M. [J] disposait d'un revenu mensuel moyen de 1 728,82 euros à titre de retraites et devait faire face à des échéances mensuelles de 1 338,26 euros pour un prêt immobilier, il partageait sa vie avec Mme [H] dont les ressources mensuelles étaient de 911,32 euros soit un revenu disponible de 1 301 euros pour vivre à deux et faire face aux charges de la vie courante ;

- Mme [R], infirmière au Grand Duché de Luxembourg percevait des revenus mensuels de 6 649 euros et devait faire face à des échéances d'un prêt immobilier pour 769,59 euros et de 433,13 euros pour un prêt véhicule, soit un revenu disponible de 5 446 euros pour vivre à deux, faire face aux frais de garde, de soins et d'éducation pour l'enfant, [I], et aux charges de la vie courante ;

Attendu que devant la cour d'appel les parties actualisent leur situation de la manière suivante :

- M. [J], retraité perçoit de la Carsat la somme de 1 305,29 euros (dernier justificatif produit septembre 2020) et deux retraites complémentaires d'Agirc-Arrco de 464,02 et 204,22 euros (selon justificatifs de septembre 2020) soit mensuellement 1 973,53 euros. Il a épousé en juin 2021 sa compagne, Mme [H] qui s'est vu attribuer une pension d'invalidité le 04 octobre 2020 de 982,43 euros par mois ; ses charges sont constituées d'un prêt immobilier de 1 338,26 euros et d'un crédit voiture de 332,86 euros;

- Mme [R] infirmère au centre hospitalier d'[Localité 9] (GDL) justifie d'un salaire net de 5 856,30 euros au 30 novembre 2022, elle ne s'explique pas sur la perception d'allocations familiales du Grand Duché de Luxembourg, elle doit faire face à des prêts mymoney bank de 527,40 euros et 242,19 euros par mois, des frais de location de véhicule de 227,57 euros par mois ; elle justifie pour l'enfant de frais de suivi de sophrologie de 69 euros par mois, de suivi psychologique de 50 euros par mois, de frais de garde à domicile de nuit de 1 200 euros par mois, de frais d'école de musique de 30 euros par mois et de cantine de 54,26 euros par mois, l'enfant suit également des cours de conduite accompagnée ;

Attendu que dans ces conditions, l'offre de M. [J] de payer une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant de 100 euros par mois doit être déclarée satisfactoire et qu'il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce sens ;

Attendu que Mme [R] ne demande ni dans ses conclusions justificatives d'appel ni dans ses dernières conclusions que la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant soit indexée ;

Que selon les dispositions de l'article 208 in fine du code civil, le juge peut

selon les circonstances de l'espèce, assortir la pension alimentaire d'une clause de variation permise par les lois en vigueur ;

Qu'en l'espèce, en attendant plus de 10 ans après la rupture des liens entre le père et l'enfant, avant d'introduire son action en recherche de paternité et de demande de contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant, Mme [R] a créé du seul fait de l'écoulement du temps et de la rétroactivité des éffets du jugement déclaratif de paternité une situation potentiellement délicate pour le père susceptible d'avoir à faire face à un arrièré conséquent au titre des aliments alors que sa situation financière était profondément modifiée par sa mise à la retraite ;

Que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de prévoir d'indexation de la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant ;

Sur les dommages et intérêts

Attendu que selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ;

Qu'il n'est pas contesté que M. [J] connaissait la naissance de l'enfant ; qu'il n'a accompli aucune démarche pour la reconnaître ou pour contester sa paternité ; qu'il résulte des pièces de Mme [R] qu'il a, jusqu'aux dix ans de l'enfant, entretenu des contacts avec l'enfant (cf photographies de loisirs en commun) ; qu'il a rompu toute relation avec l'enfant à partir de cette date ;

Attendu que Mme [R] justifie que l'enfant a besoin d'un suivi psychologique et sophrologique ; que l'un des praticiens a tenté des explications sans succès auprès de M. [J] ;

Attendu que les premiers juges ont justement retenu que cette situation et l'impossibilité pour l'enfant de connaître ses origines lui ont causé un préjudice moral indiscutable qu'ils ont justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 2 000 euros et qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point ;

Sur les autres demandes

Attendu que selon l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie;

Que dès lors, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné M. [S] [J] aux dépens en ce compris les frais d'expertise et qu'il sera condamné également aux dépens d'appel ;

Attendu qu'en raison de cette condamnation aux dépens, il convient de débouter M. [J] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Qu'en outre l'issue du litige et l'équité ne commandent pas qu'il soit fait droit à la demande de Mme [R] au titre de l'article 700 du code de procédure civile et qu'il convient également de la débouter de ce chef de demande ;

PAR CES MOTIFS

La cour d'appel statuant publiquement, après débats hors la présence du public et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant,

Et statuant à nouveau de ce chef,

Condamne M. [S] [J] à payer à Mme [O] [R] à titre de contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant [I] la somme mensuelle de 100 (cent) euros, à compter du 19 juin 2012,

Précise que la pension alimentaire restera due au-delà de la majorité de l'enfant en cas d'études normalement poursuivies et justifiées ou jusqu'à l'obtention d'un emploi rémunéré lui permettant de subvenir à ses besoins,

Précise que le créancier devra justifier de la situation des enfants majeurs encore à charge (certificat de scolarité ou de formation) le 1er octobre de chaque année sur réquisition du débiteur,

Rappelle, pour satisfaire aux prescriptions de l'article 465-1 du code de procédure civile qu'en cas de défaillance dans le règlement des sommes dues :

1) le créancier peut en obtenir le règlement forcé en utilisant à son choix une des voies d'exécutions suivantes :saisie-arrêt entre les mains d'un tiers, autres saisies, paiement direct entre les mains de l'employeur, recouvrement public par l'intermédiaire du proCuréur de la République,

2) le débiteur encourt les peines prévues par les articles 227-3 et 227-29 du code pénal, soit 2 ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende, interdiction des droits civiques, civils et de famille, suspension ou annulation du permis de conduire, interdiction de quitter le territoire de la République,

Rappelle que le créancier peut saisir l'Agence nationale de recouvrement des impayés de pension alimentaire dès le premier mois d'impayé, suivant les modalités explicitées sur le site internet www.pension-alimentaire.caf.fr,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [S] [J] aux entiers dépens d'appel.

Le greffier, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/03048
Date de la décision : 21/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-21;21.03048 ?
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