RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 20/01932 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FLTF
Minute n° 23/00037
S.A.S. FRANCELOT
C/
[E], [L], S.E.L.A.R.L. SELARL SCHAMING-FIDRY & [X], S.A.R.L. LOTIBAT
Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THIONVILLE, décision attaquée en date du 31 Août 2020, enregistrée sous le n° 16/00156
COUR D'APPEL DE METZ
1ère CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 31 JANVIER 2023
APPELANTE :
S.A.S. FRANCELOT, venant aux droits de la Société KHOR IMMOBILIER, représentée par son représentant légal
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Stéphane FARAVARI, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Thomas FERRANT, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉS :
Monsieur [W] [E]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Gilles ROZENEK, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Loïc DEMAREST, avoca plaidant au barreau de NANCY
Madame [D] [L]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Gilles ROZENEK, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Loïc DEMAREST, avoca plaidant au barreau de NANCY
SAS KOCH & ASSOCIES, mandataires judiciaires venant aux droits de la SELARL SCHAMING-FIDRY & [X] prise en la personne de Maître [X], en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la SARL BATIVIA
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ
S.A.R.L. LOTIBAT Représentée par son représentant légal
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Non représentée
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 25 Octobre 2022 tenue par Madame Laurence FOURNEL, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l'arrêt être rendu le 31 Janvier 2023, en application de l'article 450 alinéa 3 du code de procédure civile.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Cindy NONDIER
COMPOSITION DE LA COUR:
PRÉSIDENT : Mme BIRONNEAU, Conseillère faisant fonction de Présidente de chambre
ASSESSEURS : Mme FOURNEL,Conseillère
Mme DEVIGNOT, Conseillère
ARRÊT : Par défaut
Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme BIRONNEAU, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre et par Mme Cindy NONDIER, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Selon acte notarié de vente en l'état futur d'achèvement (ci-après VEFA) du 29 juin 2012, M. [W] [E] et Mme [D] [L] se sont portés acquéreurs auprès de la société Khor Immobilier d'une maison d'habitation jumelée dénommée K2, située sur la commune d'[Localité 5], pour un montant de 197 600 euros. La date de livraison du bien était contractuellement prévue dans un délai de 13 mois à compter de la signature de l'acte, soit pour le 29 juillet 2013 au plus tard.
Par acte d'huissier du 3 février 2014, faisant valoir l'existence de non-conformités de l'immeuble construit par rapport aux plans contractuels, les consorts [E]-[L] ont assigné la société Khor Immobilier devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Thionville afin d'obtenir la réalisation d'une expertise judiciaire.
Par ordonnance du 18 mars 2014, le juge des référés a fait droit à cette demande et désigné Mme [Y] [H] en qualité d'expert judiciaire.
A partir du 27 mars 2014, la SAS Francelot venant aux droits de la société Khor Immobilier a convoqué M. [E] et Mme [L] à plusieurs réunions de livraison, puis par sommation d'huissier du 26 mai 2014, pour remise des clés et paiement du solde du prix. M. [E] et Mme [L] n'ont pas donné suite à ces convocations.
Par ordonnance du juge des référés du 21 octobre 2014, les opérations d'expertises ont été étendues aux SARL Lotibat et Bativia, respectivement chargées de la maitrise d''uvre et de certains lots de gros-'uvre et à leurs assureurs respectifs, la SA Generali et la SMABTP.
Par acte d'huissier du 9 décembre 2014, M. [E] et Mme [L] ont introduit une deuxième procédure de référé et assigné la SAS Francelot, aux fins notamment de la faire condamner à leur verser une provision de 40 000 euros et à mettre le bien en conformité avec les plans contractuels.
La SAS Francelot a attrait à la cause les sociétés Lotibat et Bativia afin que ces dernières la garantissent de toute condamnation.
Par ordonnance du 31 mars 2015, le juge des référés a condamné la SAS Francelot à payer aux consorts [E]-[L] une provision de 25 000 euros et condamné les sociétés Bativia et Lotibat à garantir la société Francelot à hauteur de la provision susvisée.
Sur un appel principal interjeté par les SARL Bativia et Lotibat et un appel incident relevé par la SAS Francelot, la cour d'appel de Metz, par arrêt du 31 janvier 2017, a confirmé l'ordonnance du 31 mars 2015 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle avait condamné les sociétés Bativia et Lotibat à garantir la société Francelot.
Le 28 janvier 2016, les consorts [E]-[L] ont assigné une nouvelle fois la société Francelot devant le juge des référés, notamment pour l'obtention d'une provision supplémentaire. Les sociétés Lotibat et Bativia ont été appelées en cause par la SAS Francelot.
Mme [Y] [H] a déposé son rapport définitif le 6 aout 2016.
Par ordonnance du 13 octobre 2016, le juge des référés a condamné la SAS Francelot à verser une provision supplémentaire de 15 000 euros aux consorts [E]-[L] et a condamné les sociétés Bativia et Lotibat à garantir la société Francelot.
Sur un appel interjeté par les sociétés Francelot, Bativia et Lotibat, la cour d'appel de Metz, par arrêt du 5 décembre 2017, a infirmé l'ordonnance du 13 octobre 2016, en considérant principalement que la demande de provision des acquéreurs se heurtait à une contestation sérieuse.
S'agissant de la procédure au fond, par acte d'huissier du 6 janvier 2016, la SAS Francelot a saisi le tribunal de grande instance de Thionville, aux fins notamment de le voir prononcer la résolution du contrat de VEFA aux torts des consorts [E]-[L], en soutenant qu'ils avaient refusé, sans fondement, de prendre livraison de l'immeuble pourtant achevé.
Les consorts [E]-[L] ont constitué avocat et ont présenté plusieurs demandes reconventionnelles à l'encontre de la SAS Francelot, notamment afin de faire condamner cette société à mettre l'immeuble en conformité avec les documents contractuels, et ce sous astreinte et afin de la faire condamner à leur payer diverses sommes dont la somme de 120 206,66 euros au titre des pénalités de retard et la somme de 25 000 euros pour chacun des acquéreurs à titre de dommages et intérêts.
Par actes d'huissier du 21 février 2017, la SAS Francelot a fait appeler en intervention forcée la SARL Lotibat et la SARL Bativia, afin que ces dernières la garantissent de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit des consorts [E]-[L].
Les SARL Loribat et Bativia ont constitué avocat et ont contesté les prétentions de la SAS Francelot, les considérant comme étant irrecevables.
Par ordonnance du 5 mars 2018, le juge de la mise en état a condamné la SAS Francelot à verser aux consorts [E]-[L] une provision de 15 000 euros et l'a déboutée de sa demande de garantie formée à l'encontre des sociétés Bativia et Lotibat.
Par jugement du 19 décembre 2018, la SARL Bativia a fait l'objet d'une ouverture de procédure de liquidation judiciaire et Mme [X] a été désignée ès qualités de liquidateur.
Par acte d'huissier du 18 avril 2019, la SAS Francelot a fait assigner en intervention forcée Mme [X] ès qualités de liquidateur de la SARL Bativia.
Mme [X] ès qualités de liquidateur de la SARL Bativia a constitué avocat et a contesté les prétentions de la SAS Francelot, les considérant comme étant irrecevables.
Par jugement du 31 aout 2020, le tribunal judiciaire de Thionville a :
débouté la SAS Francelot de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de M. [E] et Mme [L] à l'exception de la demande de prise en compte des provisions déjà versées à ces derniers qui viendront en déduction de sommes qui leur sont allouées,
condamné la société Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 n°2477 reçu par les soins de Me [O], notaire à la résidence de [Localité 4] en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 120 206,66 euros à titre de pénalité de retard pour la période du 29 juillet 2013 au 31 juillet 2018 (à déduire les provisions déjà versées),
fixé les pénalités de retard pour la période postérieure au 31 juillet 2018 à la somme de 65,866666 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien litigieux,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 37 800 euros et ce, pour la période du 1er aout 2013 au 31 juillet 2018 au titre de la réparation du préjudice de jouissance,
fixé le préjudice complémentaire de jouissance pour la période postérieure au 1er août 2018 à la somme de 630 euros par mois jusqu'à la livraison effective du bien litigieux,
condamné la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L], chacun, une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté M. [E] et Mme [L] du surplus de leurs demandes,
condamné in solidum la société Loribat et la SELARL Schaming-Fidry & [X] prise en la personne de Me [X] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Bativia à garantir et relever indemne la SAS Francelot de toutes les condamnations pécuniaires prononcées à l'encontre de cette dernière,
déboute la SAS Francelot de ses autres demandes à l'encontre de la société Loribat et de la SELARL Schaming-Fidry & [X], prise en la personne de Me [X] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Bativia,
débouté la société Loribat et la SELARL Schaming-Fidry & [X], prise en la personne de Me [X] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Bativia de leurs demandes,
condamné la SAS Francelot en tous les frais et dépens y compris ceux des procédures de référé I 14/32 ; I 14/126 ; I 15/0016,
ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Pour se déterminer ainsi, le tribunal judiciaire de Thionville a considéré, au visa de l'article R. 261-1 du code de la construction, qu'il résulte de l'analyse de l'acte notarié de vente, du plan de la maison d'habitation annexé à cet acte et du rapport d'expertise judiciaire que plusieurs pièces du bien litigieux sont affectées de défauts de conformité. Le tribunal a ainsi relevé que le garage souffre d'une réduction de sa superficie de 19% et qu'il ne dispose plus des dimensions suffisantes pour recevoir un véhicule, de sorte qu'il n'est pas conforme à sa destination. Jugeant que ce seul défaut de conformité ne peut qu'être considéré comme substantiel, le tribunal a retenu que les acquéreurs étaient fondés à refuser à la fois la livraison du bien et le paiement du solde du prix correspondant à 35% du prix de vente.
Sur le fondement de l'article 1134 dans sa version applicable au présent litige, de l'article 1601-1 du code civil et de l'acte notarié de vente en l'état futur d'achèvement, le tribunal a constaté que le vendeur a incontestablement dépassé le délai de livraison, dès lors que le bien acquis par M. [E] et Mme [L] n'était pas achevé à la date prévue contractuellement, soit le 29 juillet 2013. Le tribunal a également relevé que la SAS Francelot n'a pas rapporté la preuve d'un cas de force majeure ou d'une cause légitime répondant aux stipulations du contrat pouvant excuser ce retard. En application de la clause contractuelle le prévoyant, le tribunal a donc fait droit à la demande des acquéreurs et condamné la société Francelot à mettre le bien vendu en conformité avec les plans contractuels, et ce sous astreinte.
Le tribunal judiciaire a également retenu que, en application de l'article 1152 du code civil dans sa version applicable au présent litige, les acquéreurs étaient fondés à se prévaloir de la clause contractuelle instituant une pénalité de retard à raison de 1/3 000ème du prix d'achat par jour de retard écoulé, sans que cette clause ne puisse être considérée comme manifestement excessive.
Le tribunal a considéré que le préjudice de jouissance des consorts [E]-[L] se distingue du préjudice lié au retard de livraison réparé par la clause pénale et doit donc être indemnisé. Rappelant que seul un préjudice réel donne droit à indemnisation, le tribunal a indiqué que le trouble de jouissance doit être réparé en prenant en compte les loyers réellement exposés par les consorts [E]-[L], et non en fonction de la valeur locative du bien immobilier dont les consorts [E]-[L] ne peuvent jouir.
S'agissant de la demande de dommages et intérêts à titre d'indemnité de remboursement anticipé, le tribunal a retenu que les consorts [E]-[L] n'apportent pas la preuve d'un lien de causalité entre la faute établie et le préjudice allégué. Le tribunal a en effet considéré que ce n'est qu'en raison de l'absence d'application du jugement intervenu entre eux et la BNP qu'ils ont été contraints de souscrire un nouveau prêt et de procéder au remboursement anticipé du prêt souscrit auprès de cet établissement bancaire.
Le tribunal a rejeté la demande des consorts [E]-[L] quant à l'indemnisation des sommes versées à titre d'acompte pour la cuisine, de modification des plans de la cuisine et des sommes versées à la société Marbolux au motif qu'ils n'apportent pas la preuve de la réalité de leur préjudice.
Sur le fondement des articles 1792 et 1792-1 1°, du code civil, le tribunal a retenu la responsabilité des sociétés Bativia et Lotibat en tant que constructeurs liés au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage. Le tribunal a, d'une part, relevé que ces sociétés ne contestaient pas leur faute dans la réalisation du dommage. D'autre part, ces sociétés ne démontrent pas en quoi le déroulement de leurs relations contractuelles avec la SAS Francelot postérieurement à leurs fautes contractuelles seraient de nature à constituer une cause étrangère, seul motif leur permettant d'être exonérées de leur responsabilité. Le tribunal a enfin ajouté que les sociétés Lotibat et Bativia n'apportent pas la preuve de leur évincement abusif par la SAS Francelot antérieurement aux faits générateurs, de sorte qu'elles ne peuvent se prévaloir d'aucune exonération de leurs responsabilités sur ce fondement.
Le tribunal en a déduit que les sociétés Lotibat et Bativia doivent garantir la société Francelot de toutes les condamnations pécuniaires prononcées à son encontre. Retenant que la société Bativia est en liquidation judiciaire et que la société Lotibat n'est pas une entreprise de gros 'uvre, le tribunal a précisé que celles-ci ne peuvent procéder à la reprise des défauts de conformité.
Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Metz du 26 octobre 2020, la SAS Francelot venant aux droits de la société Khor Immobilier a interjeté appel aux fins d'annulation, subsidiairement infirmation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thionville le 31 aout 2020 en ce qu'il a :
débouté la SAS Francelot de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de M. [E] et de Mme [L], à l'exception de la demande de prise en compte des provisions déjà versées à ces derniers qui viendront en déduction des sommes qui leur sont allouées,
condamné la société Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 N° 2477 reçu par les soins de Me [O] en conformité avec les plans contractuels et ce dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 120 206,66 euros à titre de pénalités de retard pour la période du 29 juillet 2013 au 31 juillet 2018 (à déduire les provisions déjà versées),
fixé les pénalités de retard pour la période postérieure au 31 juillet 2018 à la somme de 65,866666 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien litigieux,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 37 800 euros pour la période du 1er août 2013 au 31 juillet 2018 au titre de la réparation du préjudice de jouissance,
fixé le préjudice complémentaire de jouissance pour la période postérieure au 1er août 2018 à la somme de 630 euros par mois jusqu'à la livraison effective litigieux,
condamné la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] chacun une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté la SAS Francelot de ses autres demandes à l'encontre de la société Lotibat et de la SELARL Schaming-Fidry & [X], prise en la personne de Me [X], es qualité de mandataire liquidateur de la société Bativia,
condamné la SAS Francelot en tous les frais et dépens y compris ceux des procédures de référé I 14/32, I 14/126 et I 15/0016,
ordonné l'exécution provisoire du jugement,
rejeté les demandes de la SAS Francelot tendant à voir constater que le bien est achevé au sens des dispositions de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation, tendant à voir dire et juger fautif le refus des consorts [E]-[L] de prendre livraison du bien, tendant à voir constater l'absence de règlement du solde du prix malgré l'achèvement du bien, tendant à voir ordonner la résolution de la vente formalisée par le contrat de vente en l'état futur d'achèvement signé entre la SNC Khor Immobilier et les consorts [E]-[L], tendant à voir condamner les consorts [E]-[L] à lui verser une indemnité de 19 760 euros équivalente à 10 % du prix par application du contrat de VEFA, tendant à titre subsidiaire s'il était jugé le bien inachevé, à réduire le montant de la clause pénale à la somme maximale de 72 000 euros de laquelle il convient de déduire les provisions déjà versées à hauteur de 55 000 euros, de dire et juger que les consorts [E]-[L] ne justifient pas d'un préjudice distinct de celui couvert par la clause pénale.
Par assignation du 20 novembre 2020, la SAS Francelot a saisi le premier président de la cour d'appel de Metz en référé, aux fins, notamment, de le voir suspendre l'exécution provisoire assortie au jugement du 31 aout 2020.
Par ordonnance de référé du 11 février 2021, le magistrat délégué par ordonnance de la première présidente de la cour d'appel de Metz a :
ordonné la suspension de l'exécution provisoire concernant les obligations et condamnations suivantes issues du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thioville le 31 aout 2020 : « Condamnation de la SAS Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 reçu par Me [O], notaire à Cattenom, en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard et ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive, Fixation des pénalités de retard pour la période postérieure au 31 juillet 2018 à la somme de 65,86666 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien litigieux »,
rejeté la demande de suspension de l'exécution provisoire pour les autres dispositions du jugement du tribunal judiciaire de Thionville le 31 aout 2020,
rejeté la demande tendant à la consignation des sommes assorties de l'exécution provisoire,
dit que chacune des parties conservera les dépens qu'elle a exposé pour la procédure de référé devant le premier président,
rejeté les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Lotibat, assignée par procès-verbal de recherches infructueuses le 4 février 2021, n'a pas constitué avocat.
Le conseil de la société Koch et Associés, issue d'une fusion avec la SELARL Schaming-Fidry & [X], a déposé son mandat le 4 novembre 2021 sans conclure. La société Koch et Associés n'a pas constitué avocat par la suite.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES
Par conclusions déposées le 8 novembre 2021 auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, et au visa des articles R. 261-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation et des articles 1152 ancien, 1601-2, 1709 et suivants et 1792 et suivants du code civil, la SAS Francelot demande à la cour d'appel de :
- infirmer le jugement rendu le 31 août 2020 par le Tribunal judiciaire de Thionville en ce qu'il a :
débouté la société Francelot de sa demande de résolution du contrat de vente en l'état futur d'achèvement,
condamné la société Francelot à mettre l'immeuble en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant un délai de six mois, passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive,
condamné la société Francelot à payer aux consorts [E]-[L] la somme de 120 206,66 euros à titre de pénalités de retard pour la période du 29 juillet 2013 au 31 juillet 2018,
fixé les pénalités de retard pour la période postérieure à la somme de 65,86 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien litigieux,
condamné la société Francelot à payer aux consorts [E]-[L] la somme de 37 800 euros au titre de leur préjudice de jouissance pour la période du 1er août 2013 au 31 juillet 2018,
fixé le préjudice de jouissance postérieur à la somme de 630 euros par mois jusqu'à la livraison effective du bien litigieux,
condamné la société Francelot à payer aux consorts [E]-[L] à chacun une somme de 5 000 euros au titre de leur préjudice moral,
débouté la société Francelot de ses autres demandes à l'encontre de la société Lotibat et de la SELARL Schaming-Fidry,
condamné la société Francelot à tous les frais et dépens y compris ceux des procédures de référé I 14/32 ; I 14/126 ; I 15/0016.
Statuant à nouveau,
A titre principal,
ordonner la résolution de la vente formalisée par le contrat de VEFA signé entre la SNC Khor Immobilier aux droits de laquelle vient la société Francelot, d'une part, et les consorts [E]-[L], d'autre part,
condamner les consorts [E]-[L] à verser à la société Francelot une indemnité de 19 760 euros équivalente à 10 % du prix par application du contrat de VEFA,
condamner les consorts [E]-[L] à restituer à la société Francelot les provisions indûment versées à hauteur de 55 000 euros,
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour jugerait le bien inachevé,
juger l'application de la clause pénale manifestement excessive,
réduire le montant de la clause pénale à la somme maximale de 72 000 euros, de laquelle il convient de déduire les provisions déjà versées à hauteur de 55 000 euros,
dire et juger que les consorts [E]-[L] ne justifient pas d'un préjudice distinct de celui couvert par la clause pénale,
débouter les consorts [E]-[L] de l'ensemble de leurs demandes tendant à une indemnisation complémentaire,
dire et juger que la société Francelot ne pourra être tenue qu'à une obligation par équivalent au titre des non-conformités affectant l'immeuble,
la condamner à verser la somme de 15 000 euros au titre des travaux réparatoires,
rejeter l'appel incident des consorts [E]-[L], le dire mal fondé,
rejeter la demande des consorts [E]-[L] tendant à la condamnation de la société Francelot à leur verser une provision de 60 000 euros,
condamner in solidum la SAS Koch & Associés-Mandataires judiciaires, venant aux droits de la SELARL Schaming-Fidry & [X], prise en la personne de Me [X], es qualité de liquidateur judiciaire de la société Bativia, et la société Lotibat, à garantir et relever indemne la société Francelot de toutes condamnations éventuellement prononcées à son encontre, tant réparatoires qu'indemnitaires, en ce compris la somme de 55 000 euros déjà versée à titre de provision,
En tout état de cause,
rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires,
condamner les consorts [E]-[L] à verser à la société Francelot la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'instance et d'appel.
Au soutien de ses prétentions, la société Francelot affirme que l'acquéreur qui veut opposer l'exception d'inexécution au vendeur doit démontrer que l'immeuble est affecté de défauts de conformité et de malfaçons graves, présentant un caractère substantiel, de nature à faire obstacle à l'achèvement de l'ouvrage. La société Francelot prétend que le bien est conforme aux normes minimales d'habitabilité telles que prescrites par l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation. Elle ajoute que l'immeuble comporte tous les éléments d'équipement indispensables à son utilisation et son habitabilité, conformément à la clause contractuelle définissant l'état d'achèvement. La société Francelot affirme qu'en matière de droit de la construction, la constatation de l'achèvement n'emporte pas reconnaissance de la conformité aux prévisions du contrat. L'appelante en conclut que les non-conformités contractuelles, dont elle reconnait par ailleurs l'existence, n'affectent pas l'habitabilité du bien telle qu'exigée par l'acte de VEFA, de sorte que le refus de livraison opposé par les acquéreurs n'est pas justifié.
La société Francelot soutient en outre que, malgré l'achèvement du bien et la clause contractuelle prévoyant le paiement du solde du prix une fois le bien achevé, les consorts [E]-[L] n'ont pas payé le solde restant dû représentant 35% du prix total, soit 69 160 euros. La société Francelot estime donc que la clause résolutoire contractuellement prévue lui est acquise, d'une part en raison de la défaillance de l'acquéreur pour le paiement du solde du prix et d'autre part, pour le refus illégitime de prendre possession du bien achevé.
S'agissant de l'application de la clause pénale sollicitée par les consorts [E]-[L], la société Francelot affirme que le montant de cette clause est manifestement disproportionné relativement au prix d'achat du bien. Selon elle, le juge de première instance n'a pas appliqué la règle selon laquelle la disproportion s'apprécie en fonction de l'importance du préjudice effectivement subi et le montant conventionnellement fixé. La société Francelot retient ainsi que l'application de la clause pénale faite par le tribunal judiciaire revient à octroyer aux consorts [E]-[L] un bien d'habitation à titre gratuit.
Aussi, la société Francelot reproche au tribunal judiciaire d'avoir cumulé l'application de la clause pénale avec l'octroi de dommages et intérêts pour des préjudices non distincts de ceux réparés par ladite clause. Soutenant que la clause pénale, applicable à un retard de livraison, vise l'indemnisation des désagréments résultant de ce retard, la société Francelot estime que les préjudices soutenus par les acquéreurs sont liés à ce retard et sont donc non distincts de ceux réparés par cette clause.
La société Francelot conteste par ailleurs, s'agissant du préjudice de jouissance allégué, la nécessité de relogement soutenue, le bien loué présentant une superficie et un nombre de chambres supérieurs à la maison mitoyenne pour laquelle ils se sont portés acquéreurs. La société Francelot émet notamment des réserves sur le montant du loyer, constatant que la quittance de loyer présentée par les consorts [E]-[L] émane de M. [K], associé co-gérant d'une SCI avec M. [E].
Concernant le préjudice moral, la société Francelot conteste la réalité des difficultés financières alléguées par les consorts [E]-[L] et affirme qu'il ne peut lui être reproché d'être à l'origine de leur attente anormale pour avoir un enfant.
La société Francelot établit à 55 000 euros le montant des provisions versées aux consorts [E]-[L] et affirme qu'il conviendra, en tout état de cause, de les déduire à cette hauteur. Elle ajoute que la cour d'appel ayant, en référé, infirmé les ordonnances de condamnation des sociétés Bativia et Lotibat à garantir la société Francelot, ces dernières devront lui verser la somme de 55 000 euros d'ores et déjà réglée aux acquéreurs.
La société Francelot conteste également la décision du tribunal judiciaire en ce qu'il l'a condamnée au paiement des dépens des trois procédures de référé alors que l'une a permis d'établir la responsabilité des sociétés Bativia et Lotibat dans les désordres et non-conformité constatés, et alors que les autres étaient destinées à l'octroi de provisions aux consorts [E]-[L] en raison du retard de livraison. De plus, la société Francelot rappelle que le tribunal a condamné les sociétés Lotibat et Schaming-Fidry & [X] à la garantir et la relever indemne. La société Francelot en déduit qu'il serait justifié que la cour d'appel condamne ces sociétés à la garantir et la relever indemne des dépens qu'elle pourrait être condamnée à prendre en charge.
Subsidiairement, sur la mise en conformité de l'ouvrage, la société Francelot tient à faire observer qu'elle n'est pas locateur d'ouvrage et que, par conséquent, elle ne peut être condamnée à une obligation en nature. Elle ajoute qu'une telle condamnation sous astreinte ne lui permettrait pas de maîtriser les délais d'étude et de réalisation d'une entreprise spécialisée en la matière, la soumettant ainsi à un aléa indépendant de son contrôle. L'expert judiciaire ayant évalué les travaux de mise en conformité à 15 000 euros, la société Francelot soutient qu'il conviendrait de prononcer une condamnation par équivalent au paiement de cette somme.
Par conclusions déposées le 18 aout 2021, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, les consorts [E]-[L] demandent à la cour d'appel de :
confirmer le jugement rendu le 31 aout 2020 par le tribunal judiciaire de Thionville en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a limité à 630 euros par mois le préjudice de jouissance subi par M. [E] et Mme [L] au titre du trouble de jouissance, postérieurement au 1er juillet 2017 et en ce qu'il a limité à 5 000 euros le préjudice moral de M. [E] et Mme [L],
statuant à nouveau sur ces seuls points,
condamner la société Francelot à payer M. [E] et Mme [L] la somme de 74 980 euros au titre de leur préjudice de jouissance pour la période du 1er aout 2013 au 30 avril 2021,
condamner la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] la somme de 1 000 euros par mois au titre de leur préjudice de jouissance à compter du 1er mai 2021 jusqu'à la livraison d'une maison conforme au plan contractuel,
condamner la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral,
condamner la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
la condamner encore aux entiers dépens d'appel,
déclarer irrecevable la demande subsidiaire de la société Francelot tendant à ce que la cour, après avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a retenu que la maison n'était pas achevée conformément au contrat, condamne cette dernière à payer à M. [E] et Mme [L] une indemnité de 15 000 euros HT pour réaliser les travaux de mise en conformité,
dans l'hypothèse où cette demande ne serait pas déclarée irrecevable,
dire que le montant dû par la société Francelot à M. [E] et Mme [L] devra correspondre très exactement au montant réel des travaux,
condamner la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une provision de 60 000 euros en vue de financer les travaux de mise en conformité avec les plans et de suppression des moisissures affectant la maison, à parfaire sur la base du coût réel.
S'agissant de la résolution du contrat, les consorts [E]-[L] soutiennent qu'il résulte des articles 1601-2 du code civil et des articles R. 261-1 et L. 261-5 du code de la construction et de l'habitation qu'un immeuble est achevé dès lors qu'il dispose des ouvrages et éléments d'équipements indispensables à son utilisation et que les défauts de conformité l'affectant ne sont pris en considération que s'ils ont un caractère substantiel. Les consorts [E]-[L] affirment que le caractère habitable du bien, qu'ils contestent par ailleurs, est inopérant et qu'il convient seulement d'analyser la gravité des non-conformités. A cet égard, ils soutiennent que ces non-conformités sont suffisamment substantielles pour justifier leur refus d'accepter la livraison du bien, le garage et au moins l'une des chambres se trouvant impropres à leur destination du fait d'une réduction significative de leur surface. Ils ajoutent que les diminutions des surfaces constatées sont supérieures aux 5% de marge d'erreur acceptable prévue contractuellement.
Sur la mise en conformité de l'ouvrage, les consorts [E]-[L] affirment que, étant acquis et non contesté que l'ouvrage n'est pas conforme aux plans contractuels, ils sont fondés, en vertu des articles 1134 ancien et 1601-1 du code civil ainsi que du contrat conclu, à demander la mise en conformité du bien. Ils ajoutent que l'astreinte de 1 000 euros par jour de retard passé un délai de 3 mois exigée par le tribunal est justifiée compte tenu de l'importance du retard pris et de l'absence de diligences prises par la société alors que le problème avait été signalé dès l'été 2012. M. [E] et Mme [L] soutiennent que, malgré les arguments de la société Francelot à cet égard en première instance, il n'y a aucune difficulté technique ou juridique s'opposant à la mise en conformité du bien.
Les consorts Rele-[L] soulèvent par ailleurs que la demande de la société Francelot, en lieu et place de l'obligation de réaliser les travaux de mise en conformité, à une réparation par équivalent par l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 15 000 euros est une demande nouvelle produite pour la première fois dans ses conclusions du 16 juillet 2021. S'appuyant sur les articles 564 et 910-4 du code de procédure civile, les acquéreurs en déduisent l'irrecevabilité de cette demande. De plus, considérant le bien comme inachevé dont la propriété a été conservée par la société Francelot, les consorts [E]-[L] considèrent qu'ils ne peuvent être contraints de faire réaliser eux-mêmes les travaux de mise en conformité, d'autant qu'ils ne disposent pas des clés du logement.
Subsidiairement, ils contestent la somme de 15 000 euros pour la mise en conformité, soutenant que l'évaluation faite par l'expert judiciaire était indicative et que, d'après l'estimation d'un autre expert mandaté par eux, M. [B], le coût des travaux ne pourrait être inférieur à 60 000 euros, sans compter la reprise des moisissures présentes à l'intérieur du bien.
Sur les pénalités contractuelles de retard, M. [E] et Mme [L] contestent leur caractère disproportionné, soutenant notamment que cette pénalité a été contractuellement fixée par la société Francelot elle-même et que son montant actuellement dû résulte de sa propre inertie à mettre le bien en conformité. Ils énoncent pour se justifier que les défauts avaient été décelés précocement et que, à tout le moins, la société Francelot aurait pu procéder aux travaux de reprise dès le dépôt du rapport de l'expert judiciaire en 2016. Aussi, les intimés énoncent que les pénalités de retard doivent être fixées à partir du 29 juillet 2013, date de livraison initiale, à défaut pour la société Francelot de justifier des intempéries et de la défaillance d'une entreprise qu'elle invoque pour retarder la date de livraison effectivement prévue.
Les consorts [E]-[L] soutiennent enfin que le préjudice de jouissance qu'ils allèguent est distinct de celui réparé par la clause pénale, en ce qu'il n'est pas lié au retard de livraison mais au fait d'avoir été contraints de continuer à louer un logement alors qu'ils auraient dû y mettre un terme pour le 29 juillet 2013 au plus tard. Ils ajoutent que, contrairement aux dires de la société Francelot, la maison dans laquelle ils sont en location est de taille similaire à celle pour laquelle ils se sont portés acquéreurs.
S'agissant de leur préjudice moral, M. [E] et Mme [L] évoquent les difficultés financières qu'ils ont subies par la faute de la société Francelot, les obligeant à supporter le remboursement du prêt en plus des loyers pour le logement qu'ils ont continué à occuper. Ils ajoutent à cela l'incertitude totale quant à l'achèvement de la maison, la possibilité de pouvoir un jour y habiter et par la longueur de la procédure judiciaire qu'ils affrontent.
MOTIFS DE LA DECISION
I- Sur la recevabilité des demandes de réparation par équivalent formées par la SAS Francelot
L'article 565 du code de procédure civile dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent. L'article 566 précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. L'article 567 précise que les demandes reconventionnelles sont recevables en appel.
L'article 910-4 du même code dispose qu'à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Les prétentions formées par la SAS Francelot à hauteur de cour de faire dire et juger, à titre subsidiaire, que la société Francelot ne pourra être tenue qu'à une obligation par équivalent au titre des non-conformités affectant l'immeuble et de la faire condamner à verser la somme de 15 000 euros au titre des travaux réparatoires apparaissent recevables, au regard des articles 565, 566 et 567 précédemment cités, dès lors que ces demandes se rattachent avec la demande originaire des consorts [E]-[L] de mise en conformité par un lien suffisant.
Néanmoins, ces prétentions ne figuraient pas dans les premières conclusions justificatives d'appel de la SAS Francelot déposées le 25 janvier 2021. Elles ont été rajoutées dans des conclusions ultérieures.
En conséquence, les prétentions portées par la SAS Francelot à hauteur de cour de faire dire et juger, à titre subsidiaire, que la société Francelot ne pourra être tenue qu'à une obligation par équivalent au titre des non-conformités affectant l'immeuble et de la faire condamner à verser la somme de 15 000 euros au titre des travaux réparatoires apparaissent irrecevables en application de l'article 910-4 précité.
I- Sur la demande de résolution du contrat de vente formée par la SAS Francelot et sur sa demande en paiement de l'indemnité forfaitaire de 10% du prix de vente
L'article R.261-1 du code de la construction et de l'habitation dans sa version en vigueur du 8 juin 1978 au 28 mars 2016, applicable au présent litige, dispose que :
« L'immeuble vendu à terme ou en l'état futur d'achèvement est réputé achevé au sens de l'article 1601-2 du code civil, reproduit à l'article L. 261-2 du présent code, et de l'article L. 261-11 du présent code lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement qui sont indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat. Pour l'appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation.
La constatation de l'achèvement n'emporte par elle-même ni reconnaissance de la conformité aux prévisions du contrat, ni renonciation aux droits que l'acquéreur tient de l'article 1642-1 du code civil, reproduit à l'article L. 261-5 du présent code ».
La notion d'achèvement, au sens de l'article précité, exige simplement que l'immeuble puisse être utilisé conformément à sa destination définie par le contrat. Son habitabilité est une condition nécessaire, mais non suffisante, dès lors qu'il convient de s'assurer qu'au-delà de son caractère habitable, l'immeuble respecte sa destination contractuelle.
En l'espèce, le paiement du prix était prévu selon les modalités suivantes : 65% à la signature de l'acte et 35% à la livraison.
Par ailleurs, dans le paragraphe « tolérances de l'achèvement », il est stipulé : « au niveau des superficies, il est précisé que des différences de 5% des surfaces exprimées par les plans seront tenues pour admissibles et ne pourront fonder aucune réclamation, à condition que les normes applicables au financement de l'opération soient respectées ».
Enfin la clause résolutoire stipulée au contrat de vente est la suivante : « indemnité en cas de résolution : en cas de résolution amiable ou judiciaire de la présente vente, la partie à laquelle cette résolution serait imputable serait redevable envers l'autre d'une indemnité égale à 10% du prix de vente. Toutefois la partie à laquelle la résolution serait imputable demeurera tenue de réparer le préjudice que l'autre aura effectivement subi, si cette dernière partie le demande ».
Il résulte des plans versés aux débats, de l'acte notarié de vente du 29 juin 2012 et du rapport d'expertise judiciaire déposé par Mme [H] qu'en raison d'une erreur sur le positionnement de la cage d'escalier, la dimension des pièces qui avait été contractuellement convenue a été modifiée. Si certaines pièces ont vu leur surface augmenter de soixante-quatre centimètres à savoir le WC au rez-de-chaussée, la salle de bains et une chambre arrière à l'étage, la surface d'autres pièces, à savoir le garage au rez-de-chaussée et les chambres à l'étage, a été réduite.
La réalité et l'étendue de ces défauts ne sont pas contestées par la SAS Francelot.
Il résulte des stipulations de l'acte notarié de vente que les différences de 5% par rapport aux surfaces exprimées sur les plans seront tenues pour admissibles,
Sur les deux chambres concernées par la réduction de superficie, la perte de surface est de 17% pour l'une et de 29% pour l'autre.
De plus, la surface du garage s'est aussi trouvée réduite de 19% et elle ne permet pas de faire rentrer une voiture, de sorte que cette pièce n'est pas conforme à sa destination.
La réduction de surface de ces trois pièces, bien au-delà du seuil de tolérance de 5% contractuellement prévu et le fait que le garage ne puisse pas accueillir un véhicule constituent bien des défauts substantiels qui font obstacle à ce que l'immeuble soit considéré comme étant conforme à sa destination.
Dans ces conditions, les acquéreurs étaient fondés à refuser la livraison du bien puisque ce dernier n'était pas achevé.
Ils étaient fondés également à refuser le paiement du solde de 35% de la valeur du marché, ce solde étant dû selon les stipulations contractuelles à la livraison du bien.
De plus, en l'absence de résolution ou de résiliation du contrat de vente aux torts des acquéreurs, la SAS Francelot n'est pas fondée à réclamer l'indemnité forfaitaire équivalente à 10% du prix de vente.
Enfin, si l'arrêt du 5 décembre 2017 de la cour d'appel de Metz statuant en référé a infirmé l'ordonnance du juge des référés qui avait alloué aux consorts [L]-[E] une provision complémentaire de 15 000 euros, il n'est pas nécessaire de prononcer la condamnation des intimés à restituer cette somme, dès lors que l'arrêt du 5 décembre 2017 constitue lui-même un titre exécutoire. S'agissant des autres provisions allouées, la cour rappellera dans son dispositif qu'elles devront être déduites des condamnations prononcées.
La cour confirme donc le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Francelot de sa demande de résolution du contrat de vente en l'état futur d'achèvement et en paiement du d'une indemnité forfaitaire de 19 760 euros équivalente à 10 % du prix par application du contrat de VEFA et y ajoutant, déboute la SAS Francelot de ses demandes de remboursement de provisions.
II- Sur la demande d'exécution du contrat de vente formée par les consorts [E]-[L]
L'article 1134 du code civil dans sa version applicable au présent litige dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
S'agissant de l'astreinte, l'article L.131-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que :
« L'astreinte est indépendante des dommages-intérêts.
L'astreinte est provisoire ou définitive. L'astreinte est considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif.
Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire ».
Selon la clause contractuelle relative au délai d'achèvement, le vendeur s'engageait à mener les travaux de telle manière que la livraison puisse intervenir dans un délai de treize mois à compter de la signature de l'acte notarié, soit au plus tard le 29 juillet 2013.
La clause contractuelle sur la prorogation de délai est la suivante :
« Tout retard dans le délai de livraison qui ne pourra pas être imputé à une cause prévue par la clause définissant la prorogation de ce délai, sera de la responsabilité du promoteur. Ce retard s'il y a lieu sera constaté dans les 15 jours après livraison par le Maitre d'oeuvre de l'opération sans qu'il puisse être contesté sauf procédure judiciaire.
Le promoteur s'engage alors à verser une compensation ayant valeur de clause pénale égale à 1 /3000e du prix d'achat par jour écoulé. Ce versement devant avoir lieu dans les 45 jours de la livraison.
Obligation d'achever
Le Vendeur s'oblige à poursuivre la construction et à l'achever dans le délai ci-dessus fixe et conformément aux énonciations de la notice descriptive, des plans, coupes et élévations, de la notice descriptive et d'une façon générale, aux règles de l'art.
Cette obligation d'achever comporte pour le Vendeur celle de procéder le moment venu à la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux au permis de construire conformément aux articles L462-1 et suivants et les articles R 462-1 à R 462-10 Code de l'Urbanisme.
Prorogation de ce délai :
Ce délai pourra être prorogé en cas de survenance d'un cas de force majeure ou, plus généralement d'une cause légitime de suspension du délai de livraison. Pour l'application de cette disposition, seraient considérées notamment comme des causes légitimes de suspension du délai de livraison : Les intempéries au sens de la règlementation du travail applicable aux chantiers du bâtiment ; Toutes situations exceptionnelles et en particulier : la grève générale ou particulière au bâtiment et à ses industries annexes spéciales ou complémentaires aux entreprises travaillant sur le chantier ou à leurs fournisseurs ;la faillite ou la déconfiture des ou de l'une des entreprises effectuant les travaux ou de leurs fournisseurs ;les injonctions administratives ou judiciaires de suspendre ou arrêter les travaux (à moins que lesdites injonctions ne soient fondées sur les fautes ou négligences imputables au Vendeur) ; le retard dans la mise à disposition par les organismes concessionnaires des différents fluides (à moins que ledit retard ne soit fonds sur des fautes ou négligences imputables au Vendeur), toutes sujétions liées au sous-sol, fondations spéciales, pollution, fouilles archéologiques ; les troubles résultant d'accident de chantier de révolutions, de mouvements populaires, de cataclysmes ou de catastrophes naturelles ou non; carence dune des entreprises titulaires du marché qui ne se présenterait pas sur le chantier, contraignant, le Maitre d'Ouvrage à faire procéder à son remplacement ; la survenance de Ia faillite d'une des entreprises titulaires du marché après l'envoi du projet de notification par le notaire à l'acquéreur, contraignant le Maitre d'ouvrage à interrompre les travaux et/ ou à faire procéder à son remplacement.
En cas de survenance d'un cas de force majeure ou cause légitime de suspension du délai de livraison définis ci-dessus, la date prévue pour l'achèvement des travaux pourra être différée pour le calcul des pénalités de retard d'un temps égal à celui pendant lequel l'évènement considérs aurait mis obstacle directement ou par ses répercussions à la poursuite des travaux. Le décompte des journées de retard causées par cas de force majeure ou cause légitime de suspension des délais établis par le Maitre d''uvre sera porté à la connaissance de l'acquéreur à la date prévue pour la remise de clefs.
L'Acquéreur reconnait être parfaitement informés de ce que quels que soient les renseignements oraux ou écrits qu'il aurait pu recueillir sur la date probable de la livraison du logement objet des présentes, seul le courrier fixant la date précise de remise de ces adresses sous la signature du Vendeur engage ce dernier dans le respect du délai contractuel ci-dessus fixe. Cette date pourra être décalée en cas de refus de prendre livraison par l'acquéreur.
En conséquence, l'acquéreur veillera à ne pas libérer le logement qu'il occupe pendant les 45 jours qui suivent la réception du courrier » ;
La SAS Francelot admet les défauts de conformité confirmés par les opérations d'expertise judiciaire, de sorte qu'il est établi que le délai de livraison a été dépassé et que l'immeuble n'est toujours pas achevé à ce jour. Par ailleurs, elle n'invoque pas la force majeure ou un autre motif légitime répondant aux stipulations contractuelles précitées.
Dans ces conditions, M. [E] et Mme [L] apparaissent bien fondés à demander la condamnation de la SAS Francelot à mettre l'immeuble en conformité.
Mais si la cour devait confirmer la décision de première instance sur les modalités de l'astreinte, celle-ci pourrait courir jusqu'à une lointaine demande de liquidation portant sur des montants très conséquents. Par ailleurs, dans son ordonnance du 11 février 2021, le premier président avait ordonné la suspension de l'exécution provisoire en ce qui concerne cette obligation.
Enfin, contrairement à ce que soutient la SAS Francelot, les travaux de reprise sont techniquement réalisables quoique complexes, selon les indications de l'expert judiciaire et de l'expert privé consulté par les consorts [E]-[L]. Néanmoins, les particularités techniques détaillées dans ces deux rapports justifient un délai de réalisation de huit mois.
Dans ces conditions, la cour :
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 n°2477 reçu par les soins de Me [O], notaire à la résidence de [Localité 4] en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive ;
Statuant à nouveau,
Condamne la SAS Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 n°2477 reçu par les soins de Me [O], notaire à la résidence de [Localité 4] en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de huit mois à compter de la signification du présent arrêt et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 500 euros par jour de retard ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive.
III- Sur les demandes indemnitaires formées par les acquéreurs
Sur la clause pénale
L'article 1152 du code civil dans sa version applicable au présent litige dispose que :
« Lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite ».
L'article R.231-14 alinéa 1 du code de la construction et de l'habitation dispose qu'en cas de retard de livraison, les pénalités prévues au i de l'article L. 231-2 ne peuvent être fixées à un montant inférieur à 1/3000ème du prix convenu par jour de retard.
Cette disposition est d'ordre public.
Dans ces conditions, la SAS Francelot n'est pas fondée à contester la stipulation contractuelle qui prévoit une clause pénale précisément fixée à 1/3000ème du prix d'achat par jour écoulé.
Si la SAS Francelot se plaint du montant disproportionné de cette clause pénale compte tenu du prix d'achat de la maison, il lui sera rappelé que les acquéreurs avaient signalé ces non-conformités au promoteur dès l'automne 2013, par le biais de deux courriers recommandés du 24 septembre 2013 et du 31 octobre 2013, qu'à ce stade les désordres invoqués étaient facilement vérifiables et auraient pu être corrigés en cours de chantier et que le montant élevé des pénalités de retard est la conséquence de son choix de privilégier la procédure contentieuse, même après les conclusions très claires de l'expertise judiciaire.
La cour entend seulement modifier la formulation concernant les pénalités de retard, afin de prévenir d'éventuelles difficultés d'exécution.
Dans ces conditions, la cour confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 120 206,66 euros à titre de pénalité de retard pour la période du 29 juillet 2013 au 31 juillet 2018, l'infirme en ce qu'il a fixé les pénalités de retard pour la période postérieure au 31 juillet 2018 à la somme de 65,866666 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien litigieux et statuant à nouveau, condamne la SAS Francelot à payer la somme de 65,866666 euros par jour à compter du 1er août 2018 et jusqu'à la livraison effective du bien litigieux et ce au titre des pénalités de retard.
Sur le préjudice de jouissance
Il est constant qu'en matière de responsabilité civile, le principe est celui de la réparation intégrale des préjudices.
Par ailleurs, il se déduit de l'article 1147 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, que le créancier d'une clause pénale peut demander la réparation d'autres préjudices à condition de démontrer qu'il s'agit d'un préjudice distinct de celui réparé par la clause pénale.
Le préjudice de jouissance lié au retard correspond à la privation de l'immeuble acquis à partir de la date de livraison convenue et il est distinct de la perte financière liée au paiement de loyers puisque, ne pouvant prendre possession des lieux, les acquéreurs ont été contraints de poursuivre leurs locations et le paiement de loyers.
Par les pièces versées aux débats dont les quittances de loyers, les consorts [E]-[L] justifient des loyers qu'ils ont dû payer postérieurement au 1er août 2013 :
630 euros par mois entre août 2013 et juin 2017 pour un appartement à [Localité 5] soit un total de 28 980 euros ;
1000 euros par mois à partir de juillet 2017 pour une maison située à [Localité 6] et similaire à celle objet du présent litige, soit un total de 46 000 euros entre juillet 2017 et avril 2021.
La SAS Francelot souligne les liens entre M. [L] et la SCI propriétaire de cette maison sans pour autant démontrer ni même alléguer que les quittances de loyers produites seraient des faux documents. Ces documents seront donc considérés comme étant probants.
Ainsi les prétentions des consorts [E]-[L] au titre du préjudice de jouissance apparaissent bien fondées.
En conséquence la cour infirme le jugement entrepris en ce qu'il a:
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 37 800 euros et ce, pour la période du 1er aout 2013 au 31 juillet 2018 au titre de la réparation du préjudice de jouissance ;
fixé le préjudice complémentaire de jouissance pour la période postérieure au 1er août 2018 à la somme de 630 euros par mois jusqu'à la livraison effective du bien litigieux ;
Statuant à nouveau,
condamne la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 74 980 euros et ce, pour la période du 1er aout 2013 au 30 avril 2021, au titre de la réparation du préjudice de jouissance ;
Condamne la SAS Francelot à payer la somme de 1000 euros par mois au titre du préjudice de jouissance pour la période postérieure au 1er mai 2021 et jusqu'à la livraison effective du bien litigieux.
Sur le préjudice moral
Le tribunal a alloué aux consorts [E]-[L] la somme de 5 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral.
Si le lien entre le suivi psychologique de Mme [L] et les difficultés liées à l'immeuble en litige n'est pas établi, il est incontestable que les acquéreurs de l'immeuble ont subi un stress considérable, dans la mesure où ils n'ont pas pu construire leur vie de famille dans la maison en litige, qu'ils ont dû engager de nombreux recours devant le juge des référés et le juge du fond alors même que les défauts de conformité n'étaient pas réellement contestés, essentiellement parce que la SAS Francelot s'est refusée à exécuter ses obligations en sa qualité de vendeur en l'état futur d'achèvement.
Le préjudice moral de chacun des acquéreurs sera donc plus justement évalué à la somme de 10 000 euros.
En conséquence, la cour infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L], chacun, une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et statuant à nouveau, condamne la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L], chacun, une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.
IV- Sur l'appel en garantie formée par la SAS Francelot à l'égard des sociétés Bativia et Lotibat
L'article 954 alinéa 6 du code de procédure civile dispose que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
L'article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
L'article 1792-1 1°du code civil dispose qu'est réputé constructeur de l'ouvrage : tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage.
S'agissant de l'immeuble en litige, il est constant que la société Khor Immobilier avait confié la maîtrise d''uvre à la SARL Lotibat et la réalisation du lot gros-'uvre à la SARL Bativia.
L'expertise judiciaire a permis de confirmer l'erreur d'implantation de la cage d'escalier dont il résulte la réduction de la superficie de certaines pièces par rapport aux spécifications contractuelles, rendant de ce fait le garage impropre à sa destination.
Dans leurs conclusions de première instance, aussi bien la SARL Lotibat que la SARL Bativia avaient admis que ces erreurs leur étaient imputables.
Dans ces conditions, la SAS Francelot est fondée à demander leur garantie au titre des condamnations pécuniaires prononcées à son encontre en principal.
Ainsi, la cour confirme la décision entreprise en ce qu'elle a condamné in solidum la société Lotibat et la société Bativia prise en la personne de son mandataire liquidateur à garantir et relever indemne la SAS Francelot de toutes les condamnations pécuniaires prononcées à l'encontre de cette dernière.
V- Sur les dépens et les frais irrépétibles
Si la SAS Francelot demande à ce que les SARL Lotibat et Bativia la garantissent également de sa condamnation au titre des dépens, il sera rappelé qu'elle succombe au moins partiellement et le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la SAS Francelot en tous les frais et dépens y compris ceux des procédures de référé I 14/32, I 14/126 et I 15/0016.
La cour confirme également la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SAS Francelot qui succombe au moins partiellement sera condamnée aux dépens de l'appel.
Pour des considérations d'équité, elle sera également condamnée à payer à M. [E] et à Mme [L] la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déclare irrecevables sur le fondement de l'article 910-4 du code de procédure civile les prétentions portées par la SAS Francelot à hauteur de cour de faire dire et juger, à titre subsidiaire, que la société Francelot ne pourra être tenue qu'à une obligation par équivalent au titre des non-conformités affectant l'immeuble et de la faire condamner à verser la somme de 15 000 euros au titre des travaux réparatoires ;
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
condamné la société Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 n°2477 reçu par les soins de Me [O], notaire à la résidence de [Localité 4] en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive ;
fixé les pénalités de retard pour la période postérieure au 31 juillet 2018 à la somme de 65,866666 euros par jour jusqu'à la livraison effective du bien ;
condamné la société Francelot à payer à M. [E] et Mme [L] une somme de 37 800 euros et ce, pour la période du 1er aout 2013 au 31 juillet 2018 au titre de la réparation du préjudice de jouissance ;
fixé le préjudice complémentaire de jouissance pour la période postérieure au 1er août 2018 à la somme de 630 euros par mois jusqu'à la livraison effective du bien litigieux;
condamné la SAS Francelot à payer à M. [E] et Mme [L], chacun, une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Confirme le jugement entrepris pour le surplus des dispositions déférées à la cour en ce qu'il a :
débouté la SAS Francelot de sa demande de résolution du contrat de vente en l'état futur d'achèvement et en paiement d'une indemnité forfaitaire de 19 760 euros équivalente à 10 % du prix par application du contrat de VEFA;
condamné la SAS Francelot à payer à M. [W] [E] et Mme [D] [L] une somme de 120 206,66 euros à titre de pénalités de retard pour la période du 29 juillet 2013 au 31 juillet 2018 (à déduire les provisions déjà versées) ;
condamné in solidum la société Lotibat et la SELARL Schaming-Fidry & [X] prise en la personne de Mme [X] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Bativia à garantir et relever indemne la SAS Francelot de toutes les condamnations pécuniaires prononcées à l'encontre de cette dernière ;
condamné la SAS Francelot en tous les frais et dépens y compris ceux des procédures de référé I 14/32 ; I 14/126 ; I 15/0016 ;
Statuant à nouveau,
Condamne la SAS Francelot à mettre l'immeuble, objet de l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 29 juin 2012 n°2477 reçu par les soins de Me [O], notaire à la résidence de [Localité 4] en conformité avec les plans contractuels et ce, dans un délai de huit mois à compter de la signification du présent arrêt et passé ledit délai, sous peine d'une astreinte de 500 euros par jour de retard ce pendant un délai de 6 mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive ;
Condamne la SAS Francelot à payer la somme de 65,866666 euros par jour à compter du 1er août 2018 et jusqu'à la livraison effective du bien litigieux et ce au titre des pénalités de retard ;
Condamne la SAS Francelot à payer à M. [W] [E] et Mme [D] [L] une somme de 74 980 euros et ce, pour la période du 1er aout 2013 au 30 avril 2021 au titre de la réparation du préjudice de jouissance ;
Condamne la SAS Francelot à payer la somme de 1000 euros par mois au titre du préjudice de jouissance pour la période postérieure au 1er mai 2021 et jusqu'à la livraison effective du bien litigieux ;
Condamne la SAS Francelot à payer à M. [W] [E] et Mme [D] [L], chacun, une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
Y ajoutant,
Déboute la SAS Francelot de ses demandes de remboursement de provisions ;
Rappelle que les provisions judiciairement allouées à M. [W] [E] et Mme [D] [L], soit 40 000 euros au total (ordonnances du 31 mars 2015 et du 5 mars 2018), devront être déduites des condamnations prononcées à l'encontre de la SAS Francelot ;
Condamne la SAS Francelot aux dépens de l'appel ;
Condamne la SAS Francelot à payer à M. [W] [E] et Mme [D] [L], chacun, une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La Greffière La Conseillère faisant fonction de Présidente de chambre