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17/01/2023 | FRANCE | N°20/01325

France | France, Cour d'appel de Metz, 1ère chambre, 17 janvier 2023, 20/01325


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 20/01325 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJ6R

Minute n° 23/00022





S.C.I. LES CRINS

C/

[I]









Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 24 Juin 2020, enregistrée sous le n° 18/03577





COUR D'APPEL DE METZ



1ère CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 17 JANVIER 2023









APPELANTE :



S.C.I. LES CRINS prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Patrick VANMANSART, avocat postulant au barreau de METZ et par Me SIMONET, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 20/01325 - N° Portalis DBVS-V-B7E-FJ6R

Minute n° 23/00022

S.C.I. LES CRINS

C/

[I]

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de METZ, décision attaquée en date du 24 Juin 2020, enregistrée sous le n° 18/03577

COUR D'APPEL DE METZ

1ère CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 JANVIER 2023

APPELANTE :

S.C.I. LES CRINS prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Patrick VANMANSART, avocat postulant au barreau de METZ et par Me SIMONET, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG

INTIMÉ ET APPELANT INCIDENT :

Monsieur [B] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Yves ROULLEAUX, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Fabrice JEHEL, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 23 Juin 2022 tenue par Madame Laurence FOURNEL, Magistrat rapporteur, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans son délibéré, pour l'arrêt être rendu le 17 Janvier 2023, en application de l'article 450 alinéa 3 du code de procédure civile.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Jocelyne WILD

COMPOSITION DE LA COUR:

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre

ASSESSEURS : Mme FOURNEL,Conseillère

Mme BIRONNEAU, Conseillère

ARRÊT : Contradictoire

Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Cindy NONDIER, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Selon contrat de bail dérogatoire au statut des baux commerciaux signé le 1er décembre 2013, la SCI Les Crins a donné en location à M. [B] [I] des locaux désignés comme « centre d'entraînement équestre partiel 10 boxes » situés [Adresse 5] (57), moyennant un loyer mensuel HT de 1.000 € majoré des taxe et provision pour charges.

Aucun état des lieux d'entrée n'a été réalisé.

Le site était également exploité par un autre locataire, en dernier lieu par M. [W].

Les locataires ayant l'un et l'autre cessé toute activité et quitté les lieux, la SCI Les Crins a fait réaliser le 31 mai 2018 un constat d'état des lieux de sortie par Me [L], huissier de justice. Le procès-verbal dressé fait état de nombreuses dégradations et du très mauvais état de l'ensemble des lieux.

Par acte d'huissier signifié le 17 octobre 2018, la SCI Les Crins a assigné M. [I] devant le tribunal de grande instance de Metz afin principalement d'obtenir sa condamnation au paiement d'une somme de 70.748,82 € au titre des réparations pour les dégradations commises, outre 20.000 € à titre de dommages et intérêts compte tenu de l'impossibilité actuelle de louer le centre équestre, et 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [I] s'est opposé à la demande, arguant du fait que le locataire principal, qui entraînait ses chevaux, était M. [W], que lui-même n'avait accepté de louer dix boxes que pour être agréable à la SCI en lui assurant une rentrée d'argent, et qu'en outre, selon les attestations produites, les locaux n'étaient pas en bon état lorsqu'il les a pris à bail. Reconventionnellement il a sollicité des dommages et intérêt à raison du caractère abusif de la procédure.

Par jugement du 24 juin 2020, le tribunal judiciaire de Metz a :

débouté la SCI Les Crins de ses demandes,

débouté M. [I] de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice moral,

condamné la SCI Les Crins à payer à M. [I] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI Les Crins aux dépens.

Pour se déterminer ainsi, le tribunal judiciaire a considéré, au vu des éléments produits, que les locaux donnés à bail à M. [I] se limitaient à dix boxes, et que à défaut de production du bail passé avec M. [W] il était impossible de connaître la répartition des locaux entre les locataires, et rien ne permettait de faire peser sur eux des obligations solidaires.

Il a ensuite rappelé que, au visa de l'article 1731 du code civil et à titre préliminaire, si aucun état des lieux d'entrée n'a été établi, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état des réparations locatives et doit les rendre comme tels, sauf preuve contraire.

Le tribunal a relevé que, selon les attestations de témoins fournies par M. [I], le centre équestre était mal entretenu et en mauvais état au moment de la signature du bail. Il a ensuite retenu que la SCI Les Crins n'apportait pas la preuve des travaux qu'elle prétendait avoir réalisés et, par conséquent, du bon état des lieux au moment de l'entrée en jouissance de M. [I]. Enfin, le tribunal a considéré que le constat d'huissier ne permettait pas d'isoler l'état des dix boxes loués à M. [I] selon application stricte du contrat de bail.

Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Metz du 28 juillet 2020, La SCI Les Crins a interjeté appel à l'encontre du jugement de 1ère instance en ce qu'il a rejeté l'ensemble de ses demandes.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par ses dernières conclusions du 9 avril 2021, la SCI Les Crins demande à la cour d'appel de :

« - déclarer l'appel recevable en la forme,

Au fond, le dire bien fondé,

Statuant à nouveau,

Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

condamner l'intimé à verser à l'appelante un montant de 70.748,82 euros au titre des frais de réparations et de dégradations avec les intérêts légaux à compter de la signification de la demande,

condamner l'intimé à payer à l'appelante un montant de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et préjudice commercial,

déclarer l'appel incident irrecevable en tout cas mal fondé,

Le rejeter,

condamner l'intimé en tous les frais et dépens tant de 1ère instance que d'appel ainsi qu'à un montant de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ».

La SCI Les Crins expose qu'elle avait effectivement loué une partie des boxes du centre d'entraînement à une société Écurie Training Horse puis, à la suite de la liquidation de celle-ci, à M. [W] qui louait 10 boxes de même que M. [I]. Elle indique que M. [W] entraînait les chevaux de M. [I], et que ce dernier, qui seul avait une licence d'entraîneur, passait régulièrement sur place.

Au soutien de ses prétentions, elle revendique l'application de l'article 1731 du code civil, et ajoute que la preuve du bon état des lieux au moment de la signature du bail est consolidée par les dires de M. [I] qui reconnaît devant l'huissier que M. [A], ancien gérant aujourd'hui décédé de la SCI Les Crins, avait procédé à d'importants travaux de remise en état début de l'année 2012. De même, M. [F], consultant immobilier, atteste avoir constaté, lors d'une visite en début de l'année 2013 pour l'évaluation du centre équestre en vue de sa vente, que différents travaux de réfections ont été réalisés et que le domaine était entretenu.

La SCI Les Crins considère que les témoignages fournis par M. [I] sont des attestations de complaisance et déplore que le tribunal ait préféré les prendre en compte plutôt que de se fonder sur les dires de M. [I] et de M. [F].

Elle fait valoir également que, au titre de l'article 2-1-1 du contrat de bail, l'obligation d'entretien incombe au preneur, non au bailleur. Elle reproche d'une part au tribunal de l'avoir débouté de ses demandes au motif qu'elle n'apportait pas d'éléments permettant de déterminer quels étaient les boxes loués à M. [I] de ceux loués à M. [W], alors que, seuls locataires, ils avaient la jouissance totale du centre équestre et utilisaient indifféremment les boxes qui leur convenaient, chacun étant locataire de 10 boxes sur les 30 que comptait le centre. D'autre part, elle relève que les constatations d'huissier mettent en évidence un mauvais entretien des locaux et donc une violation des obligations mises à la charge du preneur.

Elle ajoute en outre que M. [W], n'est pas titulaire de la licence France Galop, obligatoire pour être entraîneur public. Elle en déduit que M. [W], qui entraînait les chevaux de M. [I], était le préposé de ce dernier. La SCI Les Crins affirme ainsi qu'il incombe au preneur ou à son préposé d'assurer l'entretien des locaux mis à leur disposition et qu'il est constaté que cette obligation n'a pas été respectée.

Enfin elle conclut au rejet de l'appel incident, son action en justice n'ayant rien d'abusif alors que de son côté M. [I] a agi de connivence avec M. [W] sans respecter ses obligations.

Aux termes de ses conclusions du 25 janvier 2021 comportant appel incident, M. [I] demande à la cour d'appel de :

«  déclarer l'appel principal irrecevable et mal-fondé,

débouter l'appelante de l'intégralité de ses demandes, moyens et prétentions,

faire droit à l'ensemble des demandes, moyens et prétentions de l'intimé,

en conséquence,

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes de la SCI Les Crins et l'a condamné à verser à M. [I] une somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur l'appel incident,

condamner la SCI les Crins à payer à M. [I] la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,

En tout état de cause,

la condamner aux dépens tant de 1ère instance qu'à hauteur d'appel, ainsi qu'à payer une somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles à hauteur d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ».

M. [I] affirme que les lieux étaient loués initialement par la SCI à M. [W], qui entraînait ses chevaux, et que devant les difficultés financières de celui-ci la SCI l'a convaincu de payer en direct la location des dix boxes qu'occupaient à l'époque ses chevaux. Il se prévaut des attestations versées aux débats sur ce point.

Sur les demandes de la SCI il rappelle que l'article 1731 du code civil énonce une présomption simple de bon état d'entretien pouvant être combattue par tous moyens. Il produit à nouveau les attestations établies par M. [D], M. [J] et M. [E] indiquant chacun que les installations se trouvaient en mauvais état dès la prise de bail de M. [I]. De plus, Ils déclarent que seuls quelques menus travaux nécessaires pour certains boxes avaient été effectués par la SCI Les Crins. Il ajoute que les factures produites par la SCI Les Crins datées d'avant sa prise à bail corroborent les témoignages apportés en ce que le bailleur n'a procédé qu'aux travaux indispensables et nécessaires relevant de son obligation de délivrance mais n'apportent pas la preuve d'un bon état d'entretien.

M. [I] relève en outre que la SCI ne tient aucun compte de ce qu'il n'était locataire que de dix boxes, et entend lui réclamer des montants qui représentent la remise en état de la totalité de son centre équestre alors que celui-ci avait été exclusivement donné à bail à un tiers, en l'occurrence M. [W], lui même se contentant de venir une fois par semaine afin de suivre l'évolution des chevaux entraînés par M. [W]. Il fait valoir que le fait que M. [W] n'ait pas eu une licence d'entraîneur est sans aucune incidence, dès lors que ce dernier réalisait un pré-entrainement des chevaux, et qu'il est établi tant par le bail que par les attestations de témoins que M. [I] n'a jamais lui même exploité le centre.

Enfin, M. [I] affirme que, en le poursuivant devant les juridictions aux fins d'obtenir la remise en état de l'ensemble du centre équestre alors que la totalité ne lui a pas été donné à bail et qu'il n'a jamais exploité les lieux, la SCI Les Crins abuse de son droit d'ester en justice et porte ainsi atteinte à l'obligation légale d'exécuter les contrats de bonne foi.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

I- Sur la demande principale en paiement de la somme de 70.748,82 € au titre des frais de réparation

Le contrat de bail versé aux débats et signé le 1er décembre 2013, mentionne qu'il est donné en location à M. [I] un « centre d'entraînement partiel 10 boxes », les lieux loués étant à usage exclusif de l'entraînement de chevaux.

Outre la discussion relative à l'état des lieux donnés en location, les parties ne s'accordent pas non plus sur l'étendue exacte des locaux et équipements donnés à bail et il convient de trancher préalablement cette question.

Il résulte du jugement rendu le 24 avril 2019 dans le litige opposant la SCI Les Crins à M. [W] pour le paiement des loyers échus et la résolution du bail conclu entre les parties, que la SCI avait initialement conclu avec la société Écuries training horses dont le gérant était M. [W], un bail dérogatoire en date du 15 avril 2012, portant sur le centre équestre dans son ensemble, moyennant un loyer mensuel de 2.000 € HT jusqu'en août 2012 puis de 3.200 € HT à compter de septembre 2012 outre avances sur charges, soit un loyer largement supérieur à celui réclamé à M. [I] à compter du 1er décembre 2013, et portant sur la totalité du centre équestre.

Il apparaît donc que l'ensemble du centre équestre était déjà loué à un seul locataire avant que n'intervienne le « bail dérogatoire » conclu avec M. [I], et rien parmi les éléments versés aux débats n'établit que, pour l'établissement de ce nouveau bail, la SCI aurait modifié le précédent bail conclu avec la société Écuries training horses, pour modifier la consistance du bien donné en location et en soustraire ce qui allait être loué à M. [I].

A cet égard la seule intervention d'un jugement d'ouverture d'une liquidation judiciaire n'avait pas pour conséquence de mettre fin à ce bail et il n'est rien dit des décisions prises par le liquidateur et du sort réservé à ce contrat.

Selon les termes du jugement précité et les conclusions de la SCI Les Crins, un bail verbal n'a été conclu avec M. [W] qu'en 2017. Cependant il est versé aux débats de nombreuses factures établies par M. [W] à destination de M. [I] et ce dès l'année 2014, faisant mention d'un loyer payé à la SCI Les Crins venant en déduction des sommes facturées à M. [I], ce dont il s'évince qu'en suite de la liquidation de sa société M. [W] est resté dans les lieux bien avant l'année 2017 et exerçait toujours son activité, au moins entre 2014 et 2017, sans qu'il soit précisé sous quelle forme (en société ou en nom personnel).

Ainsi et contrairement à ce que soutient la SCI Les Crins, M. [W] ne facturait pas à M. [I] le loyer qu'il devait lui-même payer à la SCI, puisqu'une déduction était systématiquement opérée chaque mois, au titre du loyer payé par M. [I] à la SCI et également certains mois pour l'eau ou le sable également payés par M. [I].

Il apparaît donc que les sommes payées à la SCI par M. [I] étaient incluses dans les montants dont M. [W] était redevable vis à vis de cette société et qu'elles étaient remboursées à M. [I] en moins prenant sur les montants à lui facturés.

Il en résulte que la somme de 1.000 € versée mensuellement par M. [I] en exécution de son propre contrat de bail, ne constituait pas pour la SCI paiement d'un loyer supplémentaire, distinct de celui acquitté par la société Ecuries training horses puis par M. [W], mais davantage paiement d'une partie du loyer dû par M. [W], et dont M. [I] s'acquittait à sa place, de même qu'il a pu par moments avancer des sommes au titre de la consommation d'eau ou de la livraison de sable.

Ceci résulte également des termes de l'attestation de M. [D], qui déclare connaître le centre d'entraînement depuis 2004, et expose que M. [A], ancien gérant de la SCI Les Crins, confronté aux retards de paiement de M. [W], a « pour limiter les risques financiers, approché M. [B] [I] et l'a convaincu de lui payer en direct la location de la dizaine de boxes qu'occupaient à l'époque ses chevaux. De son côté M. [W] est resté locataire du centre qu'il utilisait pour tous les chevaux qu'il y entraînait y compris ceux de M. [I] ».

Par ailleurs le fait que M. [W] ait entraîné les chevaux de M. [I] ne fait pas pour autant de M. [W] le préposé de M. [I] contrairement à ce qui est affirmé, et aucun élément probant n'est fourni en ce sens. Au contraire M. [W] facturait ses prestations à M. [I] et il n'est pas contesté par la SCI qu'il entraînait également d'autres chevaux et avait donc une activité indépendante.

De même aucun des éléments versés aux débats n'établit que M. [I] aurait eu une activité d'entraîneur, en particulier sur le site loué, alors que la pièce 20 produite par la SCI établit que son activité professionnelle est la culture de céréale de légumineuses et de graines oléagineuses.

Dès lors, le fait que les chevaux de M. [I] aient, pour les besoins de l'entraînement dispensé par M. [W], utilisé les équipements du centre équestre, n'a pas pour conséquence de faire de M. [I] le locataire de ces éléments d'équipement. De même le point de savoir si M. [W] disposait ou non d'une licence d'entraîneur est sans incidence sur la solution du litige, dès lors que l'absence de cette licence n'a pas fait obstacle à ce que la SCI lui loue l'ensemble de ses installations pour l'entraînement de chevaux.

Aussi, M. [I] ne peut tout au plus répondre que de l'état des dix boxes qu'il a pris à bail.

Quant à l'entretien de l'ensemble des installations nécessaires à l'exercice de l'activité d'entraîneur, celles-ci restaient sous la responsabilité du locataire initial à savoir la société Ecuries training horses puis M. [W].

Quant à l'état des boxes pris directement à bail par M. [I], il est constant qu'il n'est pas possible en l'état de déterminer précisément quels boxes étaient concernés et il n'est pas clairement contesté que les chevaux de l'un et de l'autre pouvaient le cas échéant changer de box.

Aux termes de l'article 1731 du code civil, dont l'application n'est pas contestée en l'espèce s'agissant d'un bail dérogatoire au statut des baux commerciaux, s'il n'a pas été fait d'état des lieux le preneur est réputé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire.

Par ailleurs aux termes de l'article 2.1.1. du contrat de bail, le preneur prendra les biens loués dans l'état où ils se trouveront au moment de l'entrée en jouissance, sans pouvoir exiger du bailleur aucune réfection, remise en état ou travaux quelconques, devra assurer sans aucun recours contre le bailleur l'entretien complet des biens loués de manière à ce qu'ils soient constamment maintenus en état de propreté, et ne pourra rien faire qui puisse détériorer les biens loués.

En l'espèce, il résulte des termes du constat d'état des lieux réalisé le 31 mai 2018 par Me [L], huissier de justice, que M. [I] a « confirmé » devant elle « que feu [G] [A] alors gérant de la SCI avait effectué d'importants travaux de remise en état de l'écurie et de ses abords début 2012 ».

D'autre part, si aussi bien M. [J] que M. [E], dans les attestations versées aux débats, confirment que le centre équestre dans son ensemble était en mauvais état et peu entretenu, M. [J] indique néanmoins que « à part la réfection nécessaire de certains boxes au départ de [H] [K] et de l'entrée de l'écurie qui allait s'effondrer je n'ai constaté aucun entretien » . De son côté M. [E] mentionne que lors du départ de M. [K] M. [A] n'a effectué « que des travaux indispensables et nécessaires » et « qu'il avait dû remplacer les planches de séparation des boxes qui étaient partiellement ou complètement cassées ».

Ceci apparaît en relation avec la facture de la société RSM du 28 décembre 2011 qui porte notamment sur la fourniture de 3 paquets de lattes de 4,50 ml, de bois, visserie, équerre, pointes et plaques prélaquées pour un coût total de 3.820,50 €.

Il doit dès lors être considéré que, quoi qu'il en soit de la valeur probante des attestations produites quant à l'état d'ensemble du centre équestre, de sa toiture, de son entrée ou de ses abords, des travaux de remise en état des boxes avaient été effectués à la fin de l'année 2011 ou au début de l'année 2012, ce qui est également corroboré par l'attestation de M. [F] qui, ayant visité les lieux en vue de leur mise en vente, a constaté que différents travaux de réfection avaient été faits.

Le constat réalisé par Me [L] établit sans conteste l'état de total délabrement des locaux, la présence de très nombreux déchets entreposés, l'état de dégradation des sols du manège et de la piste, la dégradation des abords et du paddock.

S'agissant des boxes il est ainsi constaté que tous les boxes intérieurs sont en très mauvais état, que le lattage de bois délimitant l'espace est en très mauvais état dans tous les boxes, que de nombreuses dalles sont cassées, que le bois pourrit et que des trous sont visibles.

Me [L] constate qu'aucun box n'est épargné, qu'il est « évident qu'aucun entretien n'a été réalisé par les locataires et ce depuis de nombreuses années » et que ces dégradations peuvent présenter un danger pour les chevaux.

Les photos produites sont sur ce point parfaitement éloquentes.

Dès lors, ayant assumé la location pour ses chevaux de dix boxes, ce qui permettait de pérenniser l'entraînement de ceux-ci par M. [W], M. [I] doit répondre de leur état lors de la sortie des lieux.

Seul le devis de l'EURL Objectif toit correspond en partie à des travaux de réfection des boxes, à savoir : dépose de planches de box d'écurie endommagé +portail métallisé + porte intérieure en bois, fourniture et pose de planche de chaine (sic) avec vis en inox représentant les sommes HT de 9.850 € et 7.510 € soit au total 17.360 € HT et 20.832 € TTC.

N'étant locataire que de 10 boxes sur 30 M. [I] supportera le tiers de cette somme soit 6.944 €.

En revanche le surplus des devis produits concerne les équipements généraux du centre équestre, loués à la société Ecuries training horses puis à M. [W].

Il convient donc d'infirmer le jugement dont appel et de condamner M. [I] à verser à la SCI Les Crins la somme de 6.944 €, outre intérêts légaux à compter de la présente décision en application de l'article 1231-7 du code civil.

II- Sur la demande en paiement d'une somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et préjudice commercial

La solution donnée au présent litige établit que la résistance de M. [I] ne peut être considérée comme abusive, et par ailleurs la SCI Les Crins n'illustre en rien un préjudice commercial qui serait directement imputable à M. [I].

Le jugement dont appel est donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande sur ce point.

III- Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour préjudice moral

Dès lors que la demande de la SCI à l'encontre de M. [I] est en partie fondée, il ne peut être considéré que celle-ci aurait été animée d'une intention de nuire en intentant une procédure entièrement infondée à l'encontre de celui-ci.

Le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté ce chef de demande.

IV- Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens

Dès lors qu'il est partiellement fait droit aux demandes de la SCI Les Ecrins, il convient d'infirmer la décision de première instance pour ce qui concerne la charge des dépens et la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la différence entre les sommes réclamées et celles allouées, M. [I] ne supportera qu'un quart des dépens de première instance. 

Il est en outre équitable de le condamner à verser à la SCI Les Ecrins, en remboursement des frais irrépétibles exposés à l'occasion de la procédure de première instance, une indemnité de 800 €.

A hauteur d'appel et pour les mêmes raisons, les dépens seront répartis à raison de 1/4 à la charge de M. [I] et 3/4 à la charge de la SCI Les Crins.

L'équité commande en outre d'allouer à la SCI Les Ecrins une indemnité de 1.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement dont appel en ce qu'il a :

débouté la SCI Les Crins de sa demande en paiement de la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts,

débouté M. [I] de sa demande en dommages et intérêts pour préjudice moral

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Condamne M. [B] [I] à payer à la SCI Les Crins la somme de 6.944 € avec intérêts légaux à compter du présent arrêt,

Condamne M. [B] [I] à supporter un quart des dépens de première instance et d'appel et condamne la SCI Les Crins à supporter trois quart des dépens de première instance et d'appel,

Condamne M. [B] [I] à verser à la SCI Les Crins les sommes de 800 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et 1.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

La Greffière La Présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20/01325
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;20.01325 ?
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