RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/00362 - N° Portalis DBVS-V-B7G-FVQX
Minute n° 22/00418
[Y]
C/
S.A. BANQUE CIC EST
Jugement Au fond, origine Juge de l'exécution de METZ, décision attaquée en date du 20 Janvier 2022, enregistrée sous le n° 20/00984
COUR D'APPEL DE METZ
3ème CHAMBRE - JEX
ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2022
APPELANTE :
Madame [M] [Y]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/927 du 23/02/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)
INTIMÉE :
S.A. BANQUE CIC EST venant aux droits de la SA CREDIT INDUSTRIEL ALSACE LORRAINE (CIAL), prise en la personne de son représentant légal.
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat au barreau de METZ
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 4 octobre 2022 tenue par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 8 décembre 2022.
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre
ASSESSEURS : Madame BASTIDE, Conseiller
Monsieur MICHEL, Conseiller
ARRÊT : Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme GUIMARAES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE':
Par acte notarié du 30 juin 2000, la SA Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine a consenti à M. [J] [E] et Mme [M] [Y] un prêt immobilier d'un montant de 42.685,72 euros au taux de 5,371 % l'an remboursable en 180 mensualités de 371,16 euros, et un prêt à taux zéro d'un montant de 10.671,43 euros remboursable en 178 mensualités de 37,39 euros et 24 mensualités de 224,87 euros, destinés au financement de l'acquisition d'une maison située [Adresse 4].
Par acte notarié du 29 avril 2002, M. [E] et Mme [Y] ont contracté un nouveau prêt auprès de la SA Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine portant sur la somme de 23.000 euros au taux de 5,80 %, remboursable en 180 mensualités de 198,46 euros pour l'acquisition d'un immeuble situé à [Adresse 5].
Suite au commandement aux fins de saisie immobilière signifié le 31 mai 2006 à Mme [Y] et par ordonnance du 28 février 2007 confirmée par arrêt de la cour d'appel de Metz du 23 septembre 2008, le tribunal d'instance de Boulay a ordonné, à la requête de la Sa Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine, l'adjudication forcée de l'immeuble inscrit au livre foncier de Boulay section 1 n° [Adresse 1].
Le 8 janvier 2020, la SA Banque CIC Est venant aux droits de la SA Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine a fait signifier à Mme [Y] un commandement aux fins de saisie-vente puis le 24 août 2020 un procès-verbal de saisie-vente de ses biens mobiliers pour paiement de la somme de 86.981,33 euros en principal, intérêts et frais due en vertu des actes notariés des 30 juin 2000 et 29 avril 2002.
Par acte d'huissier du 8 octobre 2020, Mme [Y] a fait assigner la SA Banque CIC Est devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Metz aux fins de voir annuler la saisie-vente du 24 août 2020.
Par jugement du 20 janvier 2022, le juge de l'exécution a rejeté l'intégralité des demandes de Mme [Y] et l'a condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 8 février 2022, Mme [Y] a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions.
Aux termes de ses conclusions du 20 septembre 2022, elle demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté ses demandes d'annulation de la saisie-vente du 24 août 2020 et de versement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 500 euros sur ce même fondement, et de :
- juger prescrite la créance de la SA Banque CIC Est et abusive l'action qu'elle poursuit
- en conséquence annuler la saisie-vente de ses biens pratiquée le 24 août 2020
- condamner la SA Banque CIC Est venant aux droits de la SA Crédit Industriel d'Alsace et de Lorraine à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts, la somme de 2.000 euros du chef des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
L'appelante soutient que l'effet interruptif de prescription de l'action tendant à la vente forcée de l'immeuble a pris fin avec la décision du 28 février 2007 ordonnant l'adjudication forcée de l'immeuble, de sorte que la prescription était acquise le 20 juin 2013, cinq années après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008. Elle fait valoir à titre subsidiaire qu'aucune adjudication n'a eu lieu et qu'hormis deux convocations à l'étude du notaire en charge des opérations d'exécution forcée immobilière les 27 novembre 2008 et 24 mars 2011, aucune mesure n'a été entreprise par la banque qui n'a pas manifesté son intention de poursuivre la procédure, ne donnant aucune réponse à sa demande d'autorisation de vendre de gré à gré l'immeuble. Elle indique que si l'effet interruptif attaché au commandement aux fins de saisie immobilière se poursuit jusqu'à l'abandon de la procédure d'exécution forcée ou la clôture des opérations d'exécution forcée immobilière, il n'est pas établi que l'ordonnance d'adjudication forcée immobilière du 28 février 2007 a été régulièrement inscrite au livre foncier conformément à l'article 145 de la loi du 1er juin 1924, cette irrégularité entraînant sa nullité et la privant de tout effet, qu'il n'est pas davantage justifié de l'établissement d'un cahier des charges fixant la mise à prix et les conditions de l'adjudication alors que le notaire était tenu de procéder sans délai à sa rédaction, ces infractions aux prescriptions de la procédure entraînant nécessairement son annulation, de sorte que l'effet interruptif de la prescription doit être considéré comme non avenu.
Subsidiairement, Mme [Y] soutient qu'en s'abstenant de toute diligence pendant deux ans, la banque a laissé périmer l'instance conformément à l'article 386 du code de procédure civile, qu'elle ne peut dès lors se prévaloir de l'interruption de la prescription et qu'il est indifférent qu'elle ait pu procéder au renouvellement des inscriptions hypothécaires en 2017 soit plus de dix ans après l'ordonnance du 28 février 2007, de sorte qu'elles étaient éteintes. Elle en déduit que ces éléments révèlent que la banque a implicitement abandonné la procédure d'exécution forcée immobilière par l'effet de la nullité de la procédure, subsidiairement par l'acquisition de la péremption et plus subsidiairement encore par son abandon.
Elle affirme qu'en tout état de cause la règle selon laquelle l'effet interruptif attaché au commandement aux fins de saisie immobilière se poursuit jusqu'à l'abandon de la procédure d'exécution forcée immobilière ou la clôture des opérations d'exécution forcée, aboutit à une méconnaissance des principes du procès équitable en raison du particularisme du droit local applicable, que les règles relatives à la péremption et la caducité de l'instance ne s'appliquant pas en Alsace Moselle, le débiteur peut rester indéfiniment soumis à l'inconséquence de son créancier, une telle solution étant inacceptable au regard des dispositions de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relative au droit d'être jugé dans un délai raisonnable, de sorte que l'action de la banque est irrecevable comme prescrite. Elle ajoute qu'elle est recevable à soulever la péremption de la procédure d'expropriation forcée alors que la fin de non recevoir tirée de la prescription d'une action qui s'appuie sur la péremption d'une précédente instance ne constitue pas une demande tendant à voir constater la péremption de l'instance devant en application de l'article 388 du code de procédure civile, être formée avant tout autre moyen.
Enfin, à titre très subsidiaire, Mme [Y] soutient que les intérêts échus depuis plus de deux avant le commandement aux fins de saisie vente signifié le 8 janvier 2020 sont prescrits, qu'il y aura donc lieu à cantonnement de la saisie, que la banque doit produire un décompte expurgé des intérêts prescrits, qu'en tout état de cause la saisie vente des biens pour un montant total de 86.980,33 euros en principal, intérêts et frais est manifestement abusive dès lors qu'il appartenait à la banque d'entreprendre toutes les démarches utiles et nécessaires pour faire vendre l'immeuble dans le cadre de la saisie immobilière et qu'elle dispose d'un titre lui permettant de recouvrer sa créance, qu'il convient d'en tirer les conséquences et d'annuler la saisie pratiquée.
Par conclusions du 21 septembre 2022, la SA Banque CIC Est demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, déclarer irrecevable subsidiairement rejeter les demandes de Mme [Y] et la condamner aux dépens et au paiement d'une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle expose que l'effet interruptif attaché au commandement aux fins de saisie immobilière se poursuit jusqu'à l'abandon de la procédure d'exécution forcée immobilière ou la clôture des opérations d'exécution forcée immobilière, qu'en l'espèce la procédure d'exécution forcée immobilière n'a pas été clôturée et qu'elle n'a jamais manifesté son intention d'abandonner la procédure, ce que confirme le renouvellement de son inscription hypothécaire dans le délai de 10 ans, étant observé que les inscriptions expiraient le 31 décembre 2017 et qu'elle n'avait aucun intérêt à procéder à un renouvellement anticipé. Elle fait état de la mauvaise foi de l'appelante qui pouvait rechercher un acquéreur afin de vendre de gré à gré son immeuble et ne pouvait ignorer que le bien immobilier, objet de la procédure d'exécution forcée immobilière, était invendable en raison de son délabrement ainsi qu'il résulte des photographies produites aux débats.
La banque rappelle que la créance relative à l'acte notarié du 30 juin 2000 a fait l'objet d'une mise en demeure en 2005, d'un commandement de payer aux fins de saisie immobilière le 31 mai 2006, d'une ordonnance d'exécution forcée immobilière du 28 février 2007 confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Metz en date du 23 septembre 2008 suite au pourvoi immédiat formé par la débitrice laquelle n'a alors soulevé aucune exception ayant trait à la prescription de la créance, que ces décisions sont revêtues de l'autorité de chose jugée et ne peuvent être remises en question par Mme [Y] qui est irrecevable à invoquer dans le cadre de la présente procédure la nullité de la procédure d'exécution forcée immobilière tenant à l'absence d'inscription au livre foncier de l'ordonnance du 28 janvier 2007 et l'absence de rédaction par le notaire du cahier des charges. Elle en déduit que la procédure d'exécution forcée immobilière qui a eu pour effet d'interrompre la prescription étant toujours en cours à défaut de clôture des opérations, la saisie pratiquée est valable et ne saurait être constitutive d'un abus de droit. Elle soutient que l'appelante est tout aussi irrecevable à invoquer la péremption de l'instance pour la première fois en cause d'appel par application de l'article 388 du code de procédure civile et qu'en tout état de cause ce moyen nouveau n'est pas repris dans le dispositif de ses conclusions.
Sur l'application de la CEDH, elle fait valoir que Mme [Y] qui est redevable d'une créance certaine liquide et exigible en vertu de décisions ayant acquis l'autorité de chose jugée, a été jugée dans un délai raisonnable, que tout au long de la procédure d'exécution forcée immobilière, elle a disposé de recours et a toujours eu accès à un juge'et que contrairement à ce qu'elle soutient, elle n'est pas à la merci de sa créancière, mais de son incurie et de son inconséquence.
Concernant la prescription des intérêts, la banque rappelle que l'article L. 218-2 du code de la consommation est issu d'une ordonnance de 2016 inapplicable au présent litige et que dans sa version antérieure, l'article L. 137-2 du même code a été créé par la loi du 17 juin 2008 tout aussi inapplicable, l'ordonnance d'adjudication forcée immobilière datant du 28 février 2007.
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la validité de la saisie-vente pratiquée le 24 août 2020
Selon l'article L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l'exécution sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d'exécution. Constituent des titres exécutoires en vertu des dispositions applicables dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, aux termes de l'article L. 111-5 du même code dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 applicable au présent litige, et de la jurisprudence constante, les actes établis par un notaire de ces trois départements qui ont pour objet le paiement d'une somme d'argent déterminée et qui mentionnent au jour de leur signature, outre le consentement du débiteur à son exécution forcée immédiate, le montant du capital emprunté et ses modalités de remboursement permettant au jour de la poursuite d'évaluer la créance dont le remboursement est poursuivi.
Il résulte de l'article L. 236 du code de l'organisation judiciaire que le juge de l'exécution connaît de manière exclusive des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit.
Sur la prescription de l'action en recouvrement forcé de la créance, il est rappelé que les actes notariés revêtus de la formule exécutoire sont soumis pour leur exécution au délai de prescription de la créance qu'ils constatent, soit en l'espèce s'agissant d'un prêt immobilier, au délai de 10 ans prescrit par l'article L. 110-4 du code de commerce en ce qui concerne le régime antérieur à l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. Ce délai a été réduit à deux ans par ladite loi conformément à l'article L. 137-1 devenu L. 218-2 du code de la consommation, s'agissant d'une action d'un professionnel pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs, cette disposition qui réduit la prescription s'appliquant, selon l'article 2222 du même code, aux prescriptions à compter du 18 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Par ailleurs, selon l'article 2244 du code civil, le délai de prescription est interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d'exécution ou un acte d'exécution forcée.
En l'espèce, il n'est pas contesté que la prescription n'était pas acquise au jour du premier acte interruptif de prescription, s'agissant du commandement aux fins de saisie immobilière signifié à la débitrice le 31 mai 2006, suivi de l'ordonnance ordonnant l'adjudication forcée de l'immeuble en date du 28 février 2007. Etant rappelé que l'effet interruptif attaché au commandement aux fins de saisie immobilière et au jugement d'adjudication se poursuit jusqu'à l'abandon de la procédure d'exécution forcée immobilière, la clôture de l'ordre ou le jugement de distribution du prix de vente, Mme [Y] n'est pas fondée à soutenir que l'effet interruptif du délai de prescription de la créance de la banque a cessé avec l'ordonnance du tribunal d'instance de Boulay en date du 28 février 2017 ordonnant la vente par adjudication forcée de son immeuble inscrit au livre foncier de Boulay, feuillet 129, confirmée par arrêt de la cour d'appel de Metz en date du 23 septembre 2008.
Sur la nullité de la procédure d'exécution forcée immobilière, il est rappelé que selon l'article 2 de l'annexe relative aux départements de Moselle, Bas-Rhin et Haut-Rhin, les dispositions du code de procédure civile ne sont applicables en matière de vente judiciaire d'immeuble que sous réserve des règles établies par la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation française dans ces départements. Résultant des dispositions de l'article 159 de ladite loi que les objections et observations concernant la procédure antérieure à l'adjudication doivent être produites au tribunal d'exécution au plus tard une semaine avant l'adjudication, Mme [Y] est recevable en son moyen, lequel n'est en revanche pas fondé dès lors que le défaut de publication de l'ordonnance d'exécution forcée au livre foncier n'est pas sanctionné par la nullité de l'ordonnance d'exécution forcée mais par son inopposabilité aux tiers au sens de la publicité foncière, et que l'absence de rédaction par le notaire du cahier des charges dans le délai prescrit par l'article 148 de la loi du 1er juin 1924 a pour seul effet de ne pas faire courir le délai prescrit par l'article 159 précité.
Sur la péremption de l'instance relative à l'exécution forcée immobilière, l'article 386 du code de procédure civile n'est pas applicable à la procédure d'exécution forcée immobilière de droit local des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle dans la mesure où la phase notariale de la procédure n'est pas une instance au sens de ce texte. Tant la fin de non recevoir du moyen opposée par la SA Banque CIC Est par application de l'article 388 du code de procédure civile que le moyen lui-même seront donc rejetés, étant ajouté que le fait que l'appelante n'ait pas formé de demande en ce sens dans le dispositif de ses écritures est inopérant au regard des dispositions de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, s'agissant d'un simple moyen exposé à l'appui de la demande de prescription.
L'appelante ne peut pas davantage soutenir que la SA Banque CIC Est aurait abandonné la procédure d'exécution forcée immobilière en s'abstenant de toute mesure pendant plusieurs années, à défaut d'acte manifestant clairement et sans équivoque sa volonté de mettre fin à la procédure, alors que, comme justement relevé par le premier juge, elle a procédé le 22 décembre 2017 dans le délai de 10 ans, au renouvellement des inscriptions hypothécaires sur l'immeuble objet de la procédure d'exécution forcée immobilière.
Il sera enfin rappelé que si la procédure d'exécution forcée immobilière applicable dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin est soumise aux exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits et libertés fondamentales en ce qui concerne la procédure suivie devant le tribunal, les dispositions de ce texte ne sont pas applicables devant le notaire chargé de la vente d'un bien ordonnée précédemment par une juridiction. Mme [Y], qui disposait en outre de recours devant le tribunal de l'exécution forcée immobilière, n'est pas fondée en son moyen.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en recouvrement de créance de la SA Banque CIC Est, la procédure d'adjudication forcée produisant toujours son effet interruptif.
Sur le caractère abusif de la saisie-vente
En application des dispositions de l'articles L.'111-7 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution de sa créance et il peut notamment utiliser deux voies d'exécution différentes pour tenter d'assurer au mieux le recouvrement de sa créance, dans la mesure où l'exécution de ces mesures n'excède pas ce qui est nécessaire pour obtenir paiement de l'obligation. En vertu de l'article L. 121-2 du même code, le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages-intérêts pour abus de saisie.
En l'espèce, le caractère abusif de la saisie-vente mobilière pratiquée le 24 août 2020 alors même que la procédure d'exécution forcée immobilière est toujours en cours, n'est pas démontré, compte tenu de l'importance de la créance réclamée à hauteur de la somme de 86.281,33 euros et de l'état de délabrement de l'immeuble tel qu'il ressort des photographies produites, qui constitue un obstacle à sa vente, étant observé en outre que la débitrice qui avait soutenu, à l'appui du pourvoi formé contre l'ordonnance d'adjudication forcée, qu'elle était en mesure de vendre amiablement son bien, ne justifie d'aucune démarche à cet effet.
L'appelante est en conséquence déboutée de sa demande tendant à la mainlevée de la saisie-vente pour abus de saisie ainsi qu'au paiement de dommages-intérêts.
Sur la prescription des intérêts
Les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire suite à la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur, sont soumises depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, au délai biennal de prescription prévu à l'article L. 137-1 devenu L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance, se prescrivaient dans le régime antérieur, par cinq ans, conformément aux dispositions de l'article 2277 ancien du code civil.
Il résulte des éléments du dossier que l'appelante a cessé de s'acquitter des mensualités des prêts contractés le 30 juin 2000 respectivement à compter des échéances du 5 août 2003 et 5 juin 2004, de sorte qu'au jour du premier acte interruptif de prescription, s'agissant du commandement de payer aux fins de saisie-immobilière signifié à la débitrice le 31 mai 2006, la prescription n'était pas acquise.
L'effet interruptif de prescription attaché à la procédure de saisie-immobilière se poursuivant, aucune prescription ne peut être opposée à la SA Banque CIC Est. La demande de ce chef est donc rejetée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Les dispositions du jugement sur les frais irrépétibles et les dépens sont confirmées.
Mme [Y], partie perdante, devra supporter les dépens d'appel et il est équitable qu'elle soit condamnée à verser à l'intimée la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée en première instance. Il convient en outre de la débouter de sa propre demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
CONFIRME le jugement rendu le 20 janvier 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Metz en ce qu'il a débouté Mme [M] [Y] de ses demandes tendant à la prescription de l'action en recouvrement de sa créance poursuivie par la SA Banque CIC Est et à la mainlevée de la saisie-vente des biens pratiquée le 24 août 2020, et l'a condamnée à payer à la SA Banque CIC Est la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;
Y ajoutant,
DEBOUTE Mme [M] [Y] de sa demande relative à la prescription des intérêts contractuels, de sa demande de nullité de la saisie-vente pratiquée le 24 août 2020, de sa demande de dommages-intérêts pour abus de saisie et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [M] [Y] à payer à la SA Banque CIC Est la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [M] [Y] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT