RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 21/02032 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FR7D
Minute n° 22/00263
LA DIRECTRICE GENERALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS, S.A.S. HASBRO FRANCE, Etablissement Public LA DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DES DROITS I NDIRECTS DE LORRAINE
C/
LA DIRECTRICE GENERALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS, Etablissement Public LA DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DES DROITS I NDIRECTS DE LORRAINE, S.A.S. HASBRO FRANCE
Tribunal de Grande Instance de NANCY
18 Mai 2018
Cour d'appel de NANCY
Arrêt du 15 Janvier 2019
Cour de cassation
Arrêt du 12 Mai 2021
COUR D'APPEL DE METZ
1ère CHAMBRE CIVILE
RENVOI APRES CASSATION
ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2022
DEMANDEUR A LA REPRSE D'INSTANCE:
Mme LA DIRECTRICE GENERALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Hervé HAXAIRE, avocat postulant au barreau de METZ
et par Me Claire LITAUDON, avocat plaidant au barreau de PARIS
LA DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS DE NANCY, représentée par Monsieur le Directeur Régional des douanes et des droits indirects de LORRAINE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Hervé HAXAIRE, avocat postulant au barreau de METZ
et par Me Claire LITAUDON, avocat plaidant au barreau de PARIS
S.A.S. HASBRO FRANCE , représentée par son représentant légal.
SAVOIE TECHNOLAC
[Localité 3]
Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Jean-marie SALVA, avocat plaidant au barreau de PARIS
DEFENDEUR A LA REPRISE D'INSTANCE:
Mme LA DIRECTRICE GENERALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Hervé HAXAIRE, avocat postulant au barreau de METZ
et par Me Claire LITAUDON, avocat plaidant au barreau de PARIS
LA DIRECTION REGIONALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS DE NANCY, représentée par Monsieur le Directeur Régional des douanes et des droits indirects de LORRAINE
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Hervé HAXAIRE, avocat postulant au barreau de METZ
et par Me Claire LITAUDON, avocat plaidant au barreau de PARIS
S.A.S. HASBRO FRANCE , représentée par son représentant légal.
SAVOIE TECHNOLAC
[Localité 3]
Représentée par Me Gilles ROZENEK, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Jean-marie SALVA, avocat plaidant au barreau de PARIS
DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 09 Juin 2022 , l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 11 Octobre 2022, en application de l'article 450 alinéa 3 du code de procédure civile
GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Cindy NONDIER
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
PRÉSIDENT : Mme FLORES, Présidente de Chambre
ASSESSEURS : Mme BIRONNEAU,Conseillère
Mme FOURNEL, Conseillère
ARRÊT :Contradictoire
Rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme FLORES, Présidente de Chambre et par Mme Cindy NONDIER, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCEDURE
Par procès-verbal n°1 du 19 avril 2011, le service régional d'enquête (SRE) de l'administration des Douanes de [Localité 7] a débuté un contrôle portant sur la régularité des opérations d'importation de jouets et de jeux réalisées sur la période du 19 mai 2008 au 27 septembre 2012 par la SAS Hasbro France, pour une valeur de 34 905 832 euros.
Par procès-verbal n°32 du 17 juillet 2013, ce même service a notifié à la SAS Hasbro France plusieurs infractions de fausse déclaration d'espèces tarifaires et de valeurs lors de l'importation de produits. Le montant des droits et taxes éludés s'élève à 1 942 327 euros.
Contestant la position prise par le SRE de [Localité 7] pour certaines déclarations d'importation, la SAS Hasbro France a saisi la commission de conciliation et d'expertise douanière (CCED) le 29 juillet 2013.
Le 30 juillet 2013, la recette régionale de Loraine a émis un avis de mise en recouvrement n°838/13381 portant sur le montant des droits et taxes éludés, soit 1 942 327 euros.
Le 6 aout 2013, la SAS Hasbro France a contesté l'avis de mise en recouvrement concernant 1 622 688 euros de droits de douane réclamés. Parallèlement, elle s'est acquittée de la somme de 319 639 euros correspondant à la TVA résultant des droits de douane réclamés.
Le 22 mars 2016, la CCED a rendu son avis, notifié le 13 mai 2016 à la SAS Hasbro France.
Par acte d'huissier délivré le 19 janvier 2017, la SAS Hasbro France a assigné devant le tribunal de grande instance de Nancy la direction régionale des douanes et des droits indirectes (DRDDI) de Lorraine en contestation de l'avis de mise en recouvrement du 30 juillet 2013.
Par jugement contradictoire du 18 mai 2018, le tribunal de grande instance de Nancy a :
déclaré l'action irrecevable,
condamné la SAS Hasbro France à verser à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu que la décision émise par la CCED, saisie par la société Hasbro France, lui avait été notifiée le 13 mai 2016. Par la suite, la SAS Hasbro France a assigné la direction régionale des douanes et droits indirects en contestation de l'avis de mise en recouvrement par acte délivré le 19 janvier 2017, soit au-delà du délai de recours prévu à l'article 346 du code des douanes qui expirait au 14 janvier 2017. Il en a déduit que l'action de la SAS Hasbro France est irrecevable pour cause de prescription.
Par déclaration d'appel du 30 mai 2018 enregistrée le 1er juin 2018, la SAS Hasbro France interjette appel de ce jugement.
Par arrêt du 15 janvier 2019, la cour d'appel de Nancy a :
infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'action de la SAS Hasbro France irrecevable,
Statuant à nouveau,
déclaré la SAS Hasbro France recevable en son action,
Evoquant la cause,
Vu l'article 568 du code de procédure civile,
annulé le procès-verbal de notification d'infraction du 17 juillet 2013 et l'avis de mise en recouvrement n°838/13381 du 30 juillet 2013,
dit que la SAS Hasbro France est fondée à solliciter le non recouvrement des droits notifiés garantis pour un montant de 1 622 688 euros, cette somme étant non conforme aux classifications retenues
débouté la SAS Hasbro France de sa demande en remboursement à la recette régionale des douanes de Loraine des frais occasionnés par la garantie constituée dans le cadre de la contestation de l'avis de mise en recouvrement,
condamné la direction régionale des douanes et droits indirects de Lorraine à payer la somme de 5 000 euros à la SAS Hasbro France au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
débouté la direction régionale des douanes et droits indirects de Lorraine de sa demande de condamnation de la SAS Hasbro au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour se déterminer ainsi, au visa des articles 346 et 347 du code des douanes, la cour d'appel a retenu que la contestation d'un avis de mise en recouvrement s'effectue par la saisine du tribunal de grande instance dans un délai de deux mois à compter de la réponse de rejet du directeur régional des douanes. Toutefois à défaut de réponse, ce recours peut être effectué à l'expiration du délai de six mois octroyé à l'administration pour répondre. En l'espèce, à défaut de réponse expresse du directeur régional des douanes, la saisine de la juridiction n'était soumise à aucun délai de prescription particulier, à l'exception de la prescription quinquennale édictée par l'article 2224 du code civil. La saisine du tribunal de grande instance par la SAS Hasbro France le 19 janvier 2017 devait donc être déclarée recevable.
Au visa de l'article 447 du code des douanes, la cour d'appel a estimé que seules les constatations matérielles et techniques issues de l'avis de la CCED s'imposent au juge. La position tarifaire retenue, quant à elle, doit être considérée comme un élément de preuve entrant dans l'appréciation des circonstances de la cause. Reprenant ainsi onze types de produits, la cour d'appel a donné droit à la SAS Hasbro France pour la majorité des positions tarifaires soutenues.
Les positions retenues par l'administration des douanes ayant été en partie infirmées, la cour d'appel a annulé le procès-verbal de notification d'infraction du 17 juillet 2013 ainsi que l'avis de mise en recouvrement n°838/13381 du 30 juillet 2013.
Le directeur général des douanes et droits indirects ainsi que la direction régionale des douanes et droits indirects de Lorraine ont formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cet arrêt.
Par un arrêt du 12 mai 2021, la cour de cassation a :
cassé et annulé, sauf en ce qu'il déclare la SAS Hasbro France recevable en son action, l'arrêt rendu le 15 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
remis, sauf sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la cour d'appel de Metz,
condamné la SAS Hasbro France aux dépens,
rejeté la demande formée par la SAS Hasbro France au titre de l'article 700 du code de procédure civile
condamné la SAS Hasbro France à payer au directeur général des douanes et droits indirects et au directeur régional des douanes et des droits indirects de Lorraine la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.
Au visa de l'article 338 du code des douanes et de l'article 4 du code civil, la cour de cassation a fait grief à la cour d'appel d'avoir annulé le procès-verbal de notification d'infraction du 17 juillet 2013 ainsi que l'avis de mise en recouvrement du 30 juillet 2013 alors que l'erreur des positions tarifaires retenues par l'administration des douanes n'est pas une cause de nullité des procès-verbaux de douane. Il appartenait donc à la cour d'appel de fixer le montant des droits de douane dont la SAS Hasbro France restait redevable en considération des classifications tarifaires jugées exactes afin de déterminer le montant pour lequel cette société était fondée à solliciter le non-recouvrement.
Par déclaration déposée au greffe le 3 aout 2021, la directrice générale des douanes et droits indirects ainsi que la direction régionale des douanes et des droits indirects ont saisi la cour d'appel de Metz, désignée en qualité de juridiction de renvoi.
Cette demande a été enregistrée sous le n° RG 21/02079.
Par déclaration déposée au greffe le 5 aout 2021, la SAS Hasbro France a également saisi la cour d'appel de Metz.
Cette demande a été enregistrée sous le n° RG 21/02032.
Par décision du 13 janvier 2022, le juge de la mise en état a ordonné la jonction de ces deux procédures sous le n° RG 21/02032.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions déposées le 8 mars 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la SAS Hasbro France a demandé à la cour d'appel de :
infirmer le jugement du 18 mai 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Nancy,
Statuant à nouveau,
considérer que tous les jouets et jeux Habro doivent être classés sous les espèces tarifaires suivantes qu'elle soutient,
dire et juger que la SAS Hasbro France est fondée à solliciter le non recouvrement d'une partie des droits de douane notifiés et recouvrés,
enjoindre à l'administration des douanes d'annuler l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381, et d'en émettre un nouveau à hauteur de la somme de 69 994 euros,
condamner l'administration des douanes à verser à la SAS Hasbro France la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
condamner l'administration des douanes aux entiers dépens.
Au soutien de ses prétentions, la SAS Hasbro France affirme que l'avis de la CCED basé sur des constatations matérielles et techniques s'impose au juge dès lors qu'elles ont été faites sur la base d'échantillons des produits présentés devant la CCED et pour lesquels la commission disposait de moyens techniques d'observation. En l'espèce, les saisies effectuées par la douane étaient constituées d'échantillons de chaque produit. L'avis de la CCED basé sur ces échantillons correspond donc à des constatations matérielles et techniques s'imposant au juge.
La SAS Hasbro France rappelle également que l'administration de la douane n'a pas remis en cause devant la cour de cassation les positions tarifaires reconnues par la cour d'appel de Nancy, entérinant ainsi le débat sur ce point.
Pour déterminer la position tarifaire de chacun de ses produits, la SAS Hasbro France soutient se référer au tarif douanier commun, à la nomenclature combinée de l'union européenne adoptée en application de la nomenclature du système harmonisé, aux règles générales d'interprétation ainsi qu'aux divers instruments contraignants et non contraignants. Aussi, la SAS Hasbro France insiste sur le fait que la majorité de ses positions ont été validées par la CCED. La SAS Hasbro France déclare faire siennes les positions tarifaires telles que retenues par la cour d'appel de Nancy reprenant notamment, concernant les produits Fur Real Dizzy Dancers, Rollin Family, Gator Golf et Star Wars legends figures, celles soutenues par l'administration des douanes. Ce faisant la SAS Hasbro France accepte donc le paiement de 69 664 euros de droits de douane correspondant aux positions tarifaires de ces produits.
Par conclusions déposées le 14 avril 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la direction générale des douanes et droits indirects et la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine (ci-après dénommées la DGDDI et la DRDDI) demandent à la cour de :
confirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nancy le 18 mai 2018 en ce qu'il a condamné la SAS Hasbro France à verser à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
infirmer le jugement pour le surplus et, l'évoquant,
juger que l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381 du 30 juillet 2013 est bien fondé pour la somme de 1 896 911 euros ;
débouter la SAS Hasbro France de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions plus amples et contraires ;
condamner la SAS Hasbro France France à verser à la direction régionale des douanes et droits indirects de Lorraine la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
juger qu'il y a lieu à dépens sur le fondement de l'article 367 du code des douanes.
Sur la portée des avis de la CCED, la DGDDI et la DRDDI soutiennent, au visa de l'article 447 du code des douanes, que la juridiction est tenue par les constatations matérielles et techniques faites par la commission relative à l'espèce ou à l'origine des marchandises litigieuses ou servant à déterminer la valeur d'une marchandise. Cependant, elle n'est pas tenue par la position tarifaire proposée par la CCED sur la base de ces constations. Quant à la portée des renseignements tarifaires contraignants (RTC) invoqués par la SAS Hasbro France, l'intimée indique que les RTC sur lesquels la SAS Hasbro France se fonde ont été délivrés à sa société mère située en Suisse, personne morale distincte. Dès lors, puisque la délivrance de RTC ne lie les autorités douanières que par rapport à leur titulaire, la position tarifaire de la SAS Hasbro France fondée sur ces RTC ne s'impose pas à l'administration des douanes.
La DGDDI et la DRDDI affirment également que, contrairement aux arguments de la SAS Hasbro France tendant à évincer la problématique afférente au classement tarifaire des jouets et jeux importés par elle, la cour d'appel de Metz, sur renvoi après cassation, est saisie de l'entier litige. Seule la recevabilité de l'action par la SAS Hasbro France a force de chose jugée.
La DGDDI et la DRDDI rappellent qu'elles ont admis les classifications proposées par la CCED pour les produits « Play skool Gloworld » et « Spiderman Web Blaster », soit 45 416 euros de taxes douanières qui ne sont plus à recouvrer et que la SAS Habro France admet désormais le bien-fondé de certains droits réclamés notamment pour les produits « Star Wars Legend » et « Rollin Family ». Pour le surplus, la DGDDI et la DRDDI maintiennent leurs prétentions quant aux produits Beyblade, M. Patate, Pata la tortue, Cosmic Catch, Little Pet shop, My Little Poney, Fur Real Friend, Nerf, Spiderman Deluxe, Gator Golf et Fur Real Dizzy Dancers. Ainsi, la cour d'appel doit déclarer l'avis de recouvrement valide pour 1 896 911 euros.
MOTIFS DE LA DECISION
I- Sur la portée du renvoi de cassation et l'étendue de la saisine de la cour de renvoi
L'article 626 du code de procédure civile dispose qu'en « cas de cassation suivie d'un renvoi de l'affaire à une juridiction, celle-ci est désignée et statue, le cas échéant, conformément à l'article L431-4 du code de l'organisation judiciaire ».
L'article 638 du code de procédure civile ajoute que « l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation».
Il résulte de ces dispositions que l'effet nécessaire de l'arrêt de cassation et du renvoi de l'affaire à une autre juridiction est de dessaisir de plein droit, de toute connaissance ultérieure de l'affaire, le juge dont la décision a été cassée pour en investir exclusivement le juge de renvoi. La cassation d'une décision dans toutes ses dispositions investit ainsi la juridiction de renvoi de la connaissance de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit et lui confère plénitude de juridiction.
La juridiction de renvoi ne peut donc renvoyer l'affaire devant la cour dont l'arrêt a été cassé et se trouve ainsi substituée au premier juge dans toutes les attributions qui lui avaient appartenu sur le litige.
En l'espèce, par un arrêt du 12 mai 2021, la cour de cassation a cassé et annulé, sauf en ce qu'il déclare la SAS Hasbro France recevable en son action, l'arrêt rendu le 15 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy et remis, sauf sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel de Metz.
Il s'en déduit que le chef de l'arrêt du 15 janvier 2019 selon lequel la cour d'appel de Nancy a infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré l'action de la SAS Hasbro France irrecevable a désormais autorité de chose jugée et que la présente cour doit statuer uniquement sur le fond du litige, y compris sur les positions tarifaires, sans être tenues par celles fixées par la cour d'appel de Nancy.
II- Sur les positions tarifaires à retenir
Les positions tarifaires qui ne font plus l'objet de contestations
S'agissant des jouets « Playskool Gloworld » et « Spiderman web blaster », l'administration des douanes ne formule plus de réclamations.
S'agissant des jouets « Rollin Family », « Star Wars Legend Basic Figures », « Fur Real Dizzy Dancers » et « Gator Golf », la SAS Hasbro France fait savoir qu'elle ne conteste plus les positions tarifaires proposées par la DGDDI et la DRDDI car elles ont été confirmées par la CCED et la cour d'appel de Nancy.
La cour ne se prononcera donc pas sur le bien-fondé de ces quatre positions tarifaires qui ne sont plus contestées.
Les positions tarifaires qui demeurent contestées
L'importation en France, et plus largement sur le territoire communautaire, d'une marchandise provenant d'un pays tiers entraine le paiement de droits de douane proportionnels à la valeur de la marchandise. Le paiement des droits de douanes dépend du classement du produit au sein de la nomenclature combinée de l'Union européenne (NCUE) adoptée en application de la nomenclature du Système Harmonisé géré par l'Organisation Mondiale des Douanes.
L'annexe 1 du règlement CEE n°2658/87 du 23 juillet 1987 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun prévoit dans sa première partie-titre premier-A les règles générales d'interprétation de la nomenclature combinée à savoir :
« Le classement des marchandises dans la nomenclature combinée est effectué conformément aux principes ci-après.
1. Le libellé des titres de sections, de chapitres ou de sous-chapitres est considéré comme n'ayant qu'une valeur indicative, le classement étant déterminé légalement d'après les termes des positions et des notes de sections ou de chapitres et, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux termes desdites positions et notes, d'après les règles suivantes.
2. a) Toute référence à un article dans une position déterminée couvre cet article même incomplet ou non fini à la condition qu'il présente, en l'état, les caractéristiques essentielles de l'article complet ou fini. Elle couvre également l'article complet ou fini, ou à considérer comme tel en vertu des dispositions qui précèdent, lorsqu'il est présenté à l'état démonté ou non monté.
b) Toute mention d'une matière dans une position déterminée se rapporte à cette matière soit à l'état pur, soit mélangée ou bien associée à d'autres matières. De même, toute mention d'ouvrages en une matière déterminée se rapporte aux ouvrages constitués entièrement ou partiellement de cette matière. Le classement de ces produits mélangés ou articles composites est effectué suivant les principes énoncés dans la règle 3.
3. Lorsque des marchandises paraissent devoir être classées sous deux ou plusieurs positions par application de la règle 2 b) ou dans tout autre cas, le classement s'opère comme suit.
a) La position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale. Toutefois, lorsque deux ou plusieurs positions se rapportent chacune à une partie seulement des matières constituant un produit mélangé ou un article composite ou à une partie seulement des articles dans le cas de marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, ces positions sont à considérer, au regard de ce produit ou de cet article, comme également spécifiques même si l'une d'elles en donne par ailleurs une description plus précise ou plus complète.
b) Les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l'assemblage d'articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la règle 3 a), sont classés d'après la matière ou l'article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu'il est possible d'opérer cette détermination.
c) Dans le cas où les règles 3 a) et 3 b) ne permettent pas d'effectuer le classement, la marchandise est classée dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d'être valablement prises en considération.
4. Les marchandises qui ne peuvent pas être classées en vertu des règles visées ci-dessus sont classées dans la position afférente aux articles les plus analogues.
5. Outre les dispositions qui précèdent, les règles suivantes sont applicables aux marchandises reprises ci-après.
a) Les étuis pour appareils photographiques, pour instruments de musique, pour armes, pour instruments de dessin, les écrins et les contenants similaires, spécialement aménagés pour recevoir un article déterminé ou un assortiment, susceptibles d'un usage prolongé et présentés avec les articles auxquels ils sont destinés, sont classés avec ces articles lorsqu'ils sont du type normalement vendu avec ceux-ci. Cette règle ne concerne pas, toutefois, les contenants qui confèrent à l'ensemble son caractère essentiel.
b) Sous réserve des dispositions de la règle 5 a) ci-dessus, les emballages (1) contenant des marchandises sont classés avec ces dernières lorsqu'ils sont du type normalement utilisé pour ce genre de marchandises. Toutefois, cette disposition n'est pas obligatoire lorsque les emballages sont susceptibles d'être utilisés valablement d'une façon répétée.
6. Le classement des marchandises dans les sous-positions d'une même position est déterminé légalement d'après les termes de ces sous-positions et des notes de sous-positions ainsi que, mutatis mutandis, d'après les règles ci-dessus, étant entendu que ne peuvent être comparées que les sous-positions de même niveau. Aux fins de cette règle, les notes de sections et de chapitres sont également applicables sauf dispositions contraires ».
Selon une jurisprudence constante de la cour de justice de l'Union Européenne, dans l'intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d'une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives, telles que définies par le libellé de la position de la nomenclature combinée et des notes de section ou de chapitre. Les notes explicatives élaborées, en ce qui concerne la nomenclature combinée, par la Commission et, en ce qui concerne le système harmonisé, par l'Organisation mondiale des douanes, contribuent de façon importante à l'interprétation de la portée des différentes positions tarifaires sans avoir toutefois force obligatoire de droit (sur ce point voir par exemple arrêt 17 juillet 2014, Sysmex Europe, C-480/13).
Par ailleurs, en application de l'article 12 du code des douanes de l'Union Européenne et de l'article 11 du règlement d'application, les renseignements tarifaires contraignants dit RTC délivrés par une autorité douanière européenne à un tiers ne lient les autorités douanières que lorsqu'ils sont invoqués par son titulaire; ils peuvent néanmoins être invoqués à titre de preuve par une personne autre que son titulaire.
En conséquence la cour pourra prendre en considération, à titre d'élément d'appréciation, les RTC délivrés par le Royaume-Uni à la SAS Hasbro, société-mère de la SAS Hasbro.
Enfin l'article 447 alinéa 1 du code des douanes dans sa version en vigueur du 1er janvier 1949 au 1er janvier 2017, applicable au présent litige, dispose que les constatations matérielles et techniques faites par la commission, relatives à l'espèce ou l'origine des marchandises litigieuses ou servant à déterminer la valeur d'une marchandise, sont les seules qui peuvent être retenues par le tribunal.
Il s'en déduit que la juridiction n'est pas tenue par la position tarifaire proposée ni même par les constatations techniques faites par la commission, dès lors que cette dernière ne s'est prononcée ni sur l'origine ni sur l'espèce du produit en litige.
L'avis de la CCED sur les positions tarifaires à retenir s'agissant des produits Hasbro ne portant pas sur l'origine ni l'espèce de ces produits, il constitue dans le cadre des présents débats un simple élément d'appréciation.
Au vu des principes ci-dessus exposés, il y a lieu d'examiner successivement les différents jouets pour déterminer la position tarifaire la plus adéquate.
Pata la tortue
Le jouet « Pata la tortue » est une boîte en plastique percée d'orifices de différentes formes destinées à accueillir des objets de forme géométrique en plastique.
Il s'agit donc d'une simple boîte à formes, jouet traditionnellement destiné aux enfants en bas âge et qui, en l'espèce, représente une tortue.
La SAS Hasbro France avait initialement déclaré ces marchandises sous la position 9503 00 49 90 et elle soutient désormais qu'elles devraient être classées sous la position tarifaire 9503 00 69 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre ' puzzles : --autres ».
Elle souligne que c'est la position retenue par la CCED et la plus pertinente au regard des règles générales d'interprétation de la nomenclature, plus particulièrement la règle 3 a), le caractère de puzzle étant plus spécifique que celui de « --autres---en matière plastique » proposé par les Douanes (position 9503 00 95).
Il sera observé que la position tarifaire 9503 00 69 00 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre ' puzzles : --autres » doit être analysée au regard de la position tarifaire 9503 00 61 qui la précède immédiatement « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre ' puzzles : --en bois».
La position tarifaire soutenue par la SAS Hasbro concerne donc exclusivement les puzzles autres que ceux faits en bois.
Or, il est constant qu'un puzzle a pour objet la reconstitution de pièces dans l'objectif de reconstituer une image, ce qui n'est pas l'activité rendue possible par Pata la tortue. Le caractère essentiel de la marchandise est conféré par sa fonction qui consiste à emboîter des objets de formes différentes dans des ouvertures prévues à cet effet.
Le jouet Pata la tortue ne peut donc pas être placé dans la catégorie 9503 00 69 00 ainsi que suggéré par la CCED, sans qu'il y ait lieu d'appliquer la règle 3 a) selon laquelle la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale.
Conformément aux règles générales d'interprétation de la nomenclature et plus particulièrement la règle 3c), il convient de placer la marchandise dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d'être prises en considération.
Ainsi, la position tarifaire proposée par la DGDDI et la DRDDI à savoir la position 9503 00 95 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre- autres : --autres :---en matière plastique » apparaît la plus adaptée et sera celle retenue par la cour.
Toupies « beyblade »
Les marchandises en litige sont les suivantes : des toupies, en plastique et acier, leurs lanceurs, en matière plastique, des articles destinés à assembler les pièces constitutives des toupies et des articles en forme de cuvette, en matière plastique, appelées « stadium » ou « arènes » destinées à y faire évoluer une ou plusieurs toupies.
La SAS Hasbro France a classé ces produits sous la position 9504 90 80 00 « consoles et machines de jeux vidéo, articles pour jeux de société, y compris les jeux à moteur ou à mouvement, les billards, les tables spéciales pour jeux de casino et les jeux de quilles automatiques (bowling par exemple) ' autres -- autres ».
L'Administration des Douanes considère pour sa part que cette position est erronée et que les jouets Beyblade doivent être classés sous la position 9503 00 95. Elle invoque la position tarifaire « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roue similaires, landaus et poussettes pour poupées ; autres jouets, modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non, puzzle en tout genre- autres--autres---autres » (qui correspond en réalité à la position 9503 00 99 et non à la position 9503 00 95).
A l'appui de leur argumentation, la DGDDI et la DRDDI font valoir la note 3 du chapitre 95, selon laquelle les parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux articles du présent chapitre sont classés avec ceux-ci ainsi que les notes explicatives relatives à la position 9503 D) 19), qui précisent que ce groupe comprend les jouets destinés essentiellement à l'amusement des personnes (enfants ou adultes) à savoir «les cerceaux, diabolos, toupies (même musicales), cordes à sauter (munies de poignées), balles et ballons (autres que les balles et ballons des n°9504 ou 9506) ».
Pour autant, si l'enfant peut jouer avec une seule toupie et hors de l'arène, l'intérêt du jeu réside en le fait que les enfants peuvent organiser des batailles de toupies au sein de l'arène, de sorte que la dimension de collaboration et de compétition apparaît essentielle et que la qualification de jeu de société apparaît dès lors justifiée.
Au surplus, et conformément aux règles générales d'interprétation de la nomenclature, (règle 3a), la position la plus spécifique doit avoir la priorité sur les positions d'une portée plus générale. Or la position 9504 90 80 00 est plus spécifique que la position 9503 00 95, position par défaut pouvant inclure un nombre indéterminé de jouets.
C'est manifestement la raison pour laquelle une juridiction britannique a approuvé, dans une décision du 25 mai 2018, le classement de ces jouets sous la position 9504, la SAS Hasbro produisant d'ailleurs des RTC émis en 2012 par le Royaume-Uni qui a retenu cette position tarifaire.
S'agissant des lanceurs et des arènes, en considération de la note 3 du chapitre 95 de la nomenclature tarifaire qui souligne que sous réserve de la note 1 ci-dessus, les parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux articles du présent chapitre sont classés avec ceux-ci, ils doivent être classés avec les toupies.
Dans ces conditions, le classement des lanceurs et des arènes sous la position 9504 se justifie également et les droits réclamés par la DGDDI et la DRDDI pour les jouets « toupies Beyblade » au motif de leur classement en position tarifaire 9503 ne sont pas dus.
Monsieur Patate
Le célèbre M. Patate représente une pomme de terre en plastique à laquelle peuvent être ajoutés des bras, des jambes, des mains, des pieds, des oreilles, des chapeaux et divers autres accessoires.
La SAS HASBRO considère que le jouet Monsieur Patate doit être classé sous la position 9503 00 49 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre ' Jouets représentant des animaux ou des créatures non humaines -- autres », en faisant valoir que de nombreuses RTC acceptent ce positionnement tarifaire.
L'Administration des Douanes considère que ce produit doit être classé sous la position 9503 00 35 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre ' autres assortiments et jouets de construction -- en matière plastique », au visa notamment des notices explicatives relatives aux autres jouets de la position 95 03 selon lesquelles ce groupe comprend les jouets destinés essentiellement à l'amusement des personnes (enfants ou adultes).
Concernant M. Patate, il sera relevé que les accessoires, qui se complètent mutuellement et ne sont pas en eux-mêmes appropriés au jeu, peuvent être combinés au jouet principal de différentes façons, de sorte que l'enfant est libre d'élaborer le personnage non humain de son choix.
Pour autant, le caractère essentiel de la marchandise consiste non pas à élaborer une construction libre ou suivant une notice d'utilisation, mais à favoriser la créativité de l'enfant.
Or, dans l'intérêt de la sécurité juridique et de la facilité des contrôles, le critère décisif pour la classification tarifaire des marchandises doit être recherché, d'une manière générale, dans leurs caractéristiques et propriétés objectives.
Par ailleurs, selon les règles générales d'interprétation, dans le cas où les règles 3 a) et 3 b) ne permettent pas d'effectuer le classement, la règle 3c) dispose que la marchandise est classée dans la position placée la dernière par ordre de numérotation parmi celles susceptibles d'être valablement prises en considération.
Or la position tarifaire 9503 00 49 défendue par la SAS Hasbro est bien la dernière des deux en débat.
Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que le classement de M. Patate en sous-position tarifaire 9503 00 49 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre - Jouets représentant des animaux ou des créatures non humaines -- autres », invoqué par la SAS Hasbro est fondé.
Ainsi les droits réclamés par l'administration des douanes pour le jouet M. Patate au motif de la position tarifaire 9503 00 35 ne sont pas dus.
Animaux en plastique et accessoires (My Little Pony, Fur Real et Pet Shop)
Il s'agit de figurines en plastique représentant des animaux, avec parfois des accessoires.
La SAS Hasbro considère que ces marchandises doivent être classées sous la position 9503 00 49 « Tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées; autres jouets; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre -- Jouets représentant des animaux ou des créatures non humaines - autres ».
L'Administration des Douanes considère pour sa part que ces produits doivent être classés sous la position 9503 00 70 « tricycles, trottinettes, autos à carriole et jouets à roues similaires ; landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non; puzzles de tout genre, - autres jouets, présentés en assortiments ou en panoplies » au motif que les notes explicatives de cette position tarifaire précise que « en application de la note 4 du chapitre 95, la présente sous-position inclut également les assortiments destinés a l'amusement des enfants, composés d'articles relevant du n ° 9503 en combinaison avec un ou plusieurs articles qui, s'ils étaient présentés séparément, se classeraient dans d'autres positions, pour autant que la combinaison présente la caractéristique essentielle de jouets ».
Toutefois, cette note explicative est destinée à couvrir la situation de produits qui, isolément, relèveraient d'autres positions mais qui prennent le caractère de jouets du fait de leur groupement ou de leur présentation (par exemple une panoplie de petit chimiste).
Elle ne peut faire échec aux règles générales d'interprétation (règle 3b) selon lesquelles les produits mélangés, les ouvrages composés de matières différentes ou constitués par l'assemblage d'articles différents et les marchandises présentées en assortiments conditionnés pour la vente au détail, dont le classement ne peut être effectué en application de la règle 3 a), sont classés d'après la matière ou l'article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu'il est possible d'opérer cette détermination.
Or en l'espèce, c'est bien l'animal qui définit le caractère essentiel du jouet.
La SAS Hasbro justifie d'ailleurs de RTC émis par les autorités britanniques et validant la position tarifaire qu'elle soutient et la CCED a également retenu la position tarifaire 9503 00 49.
La SAS Hasbro est donc fondée à considérer que ces jouets relèvent de la position tarifaire 95 03 00 49 (jouets représentants des animaux ou des créatures non humaines autres que rembourrés) et les droits réclamés par la DGDDI et la DRDDI ne sont pas dus.
Pistolets, fléchettes (Nerf)
Les marchandises consistent en un ensemble composé de pistolets, fléchettes, paires de lunettes, cibles, plastrons, le tout conditionné ensemble pour la vente au détail.
La SAS Hasbro France considère que ces produits relèvent de la position 9503 00 81 90 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animes ou non; puzzles de tout genre - autres --Armes-jouets - autres ».
L'Administration des Douanes considère pour sa part que ces produits doivent être classés à la position 9503 00 70 00 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires, landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre - autres jouets, présentés en assortiments ou en panoplies », au motif que la note 4 du chapitre 9503 dispose que « sous réserve des dispositions de la note 1 ci-dessus, le n °9503 s'applique également aux articles de cette position combinés à un ou plus d'un article et qui ne peuvent être considérés comme assortiments au sens de la règle générale interprétative 3 b), mais qui s'ils étaient présentés séparément, se classeraient dans d'autres positions, pour autant que les articles soient conditionnés ensemble pour la vente au détail et que cette combinaison d'articles présente la caractéristique essentielle de jouets ».
La note 3 du chapitre 95 précise pourtant que sous réserve de la note 1, les parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux articles du présent chapitre sont classés avec ceux-ci.
Les lunettes servent à protéger les yeux des joueurs contre un lancer malencontreux de fléchettes et les plastrons servent de cible tout en protégeant le torse des joueurs, ils sont donc indispensables et exclusifs au bon exercice de l'activité réalisée avec le pistolet.
Ils constituent donc des accessoires aux pistolets et fléchettes et non des panoplies ou des assortiments comme le soutiennent la DGDDI et la DRDDI.
La CCED a d'ailleurs conclu au classement sous la position tarifaire 9503 00 81.
L'ensemble de la gamme Nerf relève donc de la position tarifaire 95 03 00 81 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animes ou non; puzzles de tout genre - autres --Armes-jouets - autres » et les droits réclamés par la DGDDI et la DRDDI ne sont pas dus.
Spiderman Deluxe Web
Il s'agit d'une bombe de liquide à projeter, d'un récipient en plastique à poser sur un support à attacher par des bandes élastiques au poignet et d'un gant en tissu.
La SAS Hasbro France considère que ces produits relèvent de la position 9503 00 81 90 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animes ou non; puzzles de tout genre - autres --Armes-jouets ».
L'Administration des Douanes considère pour sa part que ces produits doivent être classés à la position 9503 00 70 00 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires, landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animés ou non ; puzzles de tout genre - autres jouets, présentés en assortiments ou en panoplies » », au motif que la note 4 du chapitre 9503 dispose que « sous réserve des dispositions de la note 1 ci-dessus, le n °9503 s'applique également aux articles de cette position combinés à un ou plus d'un article et qui ne peuvent être considérés comme assortiments au sens de la règle générale interprétative 3 b), mais qui s'ils étaient présentés séparément, se classeraient dans d'autres positions, pour autant que les articles soient conditionnés ensemble pour la vente au détail et que cette combinaison d'articles présente la caractéristique essentielle de jouets ».
La note 3 du chapitre 95 précise pourtant que sous réserve de la note 1, les parties et accessoires reconnaissables comme étant exclusivement ou principalement destinés aux articles du présent chapitre sont classés avec ceux-ci.
L'ensemble sert à projeter de la mousse. Le gant et le récipient en plastique constituent des accessoires nécessaires au bon fonctionnement du propulseur de mousse.
La SAS Hasbro justifie pour ces jouets de RTC des autorités britanniques autorisant le dédouanement sous le code 95 03 00 81 90 à la même période que celle du contrôle et la CCED a conclu au classement sous la position tarifaire 9503 00 81, au motif que cette dernière couvre les dispositifs à projectiles.
L'ensemble de la gamme Spiderman Deluxe Web doit alors relever du code 95 03 00 81 90 « tricycles, trottinettes, autos à pédales et jouets à roues similaires; landaus et poussettes pour poupées; poupées ; autres jouets ; modèles réduits et modèles similaires pour le divertissement, animes ou non; puzzles de tout genre - autres --Armes-jouets » et les droits réclamés par la DGDDI et la DRDDI ne sont pas dus.
Cosmic Catch
Ce produit consiste en une balle et six bracelets considérés comme interdépendants, la balle étant interactive puisqu'elle est capable d'identifier chacun des bracelets, de donner des instructions de jeu et d'en vérifier l'application.
La SAS Hasbro fait valoir que ce jouet devrait être classé sous la position 9504 90 80 00 « consoles et machines de jeux vidéo, articles pour jeux de société, y compris les jeux à moteur ou à mouvement, les billards, les tables spéciales pour jeux de casino et les jeux de quilles automatiques (bowling par exemple), les jeux fonctionnant par l'introduction d'une pièce de monnaie, d'un billet de banque, d'une carte bancaire, d'un jeton ou par tout autre moyen de paiement, -autres -- autres ».
L'Administration des Douanes considère pour sa part que ces produits doivent être classes sous la position 9506 69 90 00 « articles et matériel pour la culture physique, la gymnastique, athlétisme, les autres sports (y compris le tennis de table) ou les jeux de plein air, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent chapitre ; piscines et pataugeoires, ballons et balles, autres que les balles de golf ou de tennis de table - autres -- autres », au motif que les balles sont reprises nommément dans les libelles des positions 9506, 9506 69, 9506 69 90 et que le jeu ne consiste pas en un jeu de société mais seulement en un jeu soumis à des règles, qui repose pour l'essentiel sur la présence d'une balle, laquelle impose une activité physique et sert à tester des joueurs et leur habilité à la saisir.
En réalité, la description de ce jeu ne correspond pas à un jeu de balle ou de ballon destiné à permettre l'exercice physique, tels les articles couverts par la position 9506, mais plutôt à un jeu interactif. La CCED a d'ailleurs validé la position tarifaire 9504 90 80 proposée par la SAS Hasbro.
Le jouet « cosmic catch » sera donc classé sous la position tarifaire 9504 90 80 00 et les droits réclamés par la DGDDI et la DRDDI ne sont pas dus.
Récapitulatif des droits de douanes dus par la SAS Hasbro
Jouet
Position tarifaire retenue
Droits directs
TVA à 19,6%
TOTAL
Star Wars Legend
9503 00 21 90
3 163 euros
621 euros
3 784 euros
[Adresse 8]
9503 00 95 90
2 594 euros
509 euros
3 103 euros
Pata la tortue
9503 00 95
6 949 euros
1 361 euros
8 310 euros
[Adresse 6]
95 03 00 95 90
15 222 euros
2 984 euros
18 206 euros
Gator Golf
95 03 00 70 00
48 685 euros
9 542 euros
58 227 euros
La SAS Hasbro rappelle qu'en dépit de sa contestation, elle a réglé la somme de 319 639 euros, qui correspond à la TVA associée aux droits de douanes en litige, ce que la DGDDI et la DRDDI ne contestent pas.
De même, il sera rappelé que l'avis de mise en recouvrement en litige faisait suite à un redressement au titre de droits et taxes éludés et que la SAS Hasbro avait déjà réglé les droits de douane correspondant aux positions tarifaires déclarées par elle.
Enfin, l'erreur sur les positions tarifaires retenues par l'Administration des Douanes n'est pas une cause de nullité des procès-verbaux établis par ses agents. Il n'y a donc pas lieu d'enjoindre à la DGDDI et à la DRDDI d'annuler l'avis de mise en recouvrement.
En conséquence et statuant à nouveau, la cour rejette la demande de faire injonction à la DGDDI et à la DRDDI d'annuler l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381 du 30 juillet 2013, confirme cet avis de mise en recouvrement à hauteur de 91 630 euros et dit que la SAS Hasbro France est fondée à solliciter le non-recouvrement à hauteur de 1 850 697 euros TVA incluse.
III- Sur les dépens et les frais irrépétibles
L'article 367 du code des douanes dans sa version en vigueur du 31 décembre 2002 au 1er janvier 2020 dispose qu'en première instance et sur l'appel, l'instruction est verbale sur simple mémoire et sans frais de justice à répéter de part ni d'autre.
La cour infirme donc le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS Hasbro France aux dépens.
Elle l'infirme également en ce qu'il a condamné la SAS Hasbro à verser à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de l'article 367 précité il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens de l'appel y compris ceux engagés devant la cour d'appel de Nancy.
Toutefois pour des considérations d'équité, la DGDDI et la DRDDI seront condamnées à payer à la SAS Hasbro la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés à hauteur de cour.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement rendu le 18 mai 2018 par le tribunal de grande instance de Nancy en ce qu'il a condamné la SAS Hasbro France à verser à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a condamné la SAS Hasbro France aux dépens de première instance ;
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de faire injonction à la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine et à la directrice générale des douanes et droits indirects d'annuler l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381 du 30 juillet 2013 ;
Confirme l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381 pour la somme de 91 630 euros;
Rappelle que la SAS Hasbro France s'est acquittée de la somme de 319 639 euros correspondant à la TVA résultant des droits de douane réclamés ;
Dit que la SAS Hasbro France est fondée à solliciter le non-recouvrement concernant l'avis de mise en recouvrement n° 838/13381 à hauteur de 1 850 697 euros TVA incluse ;
Dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens de première instance ;
Y ajoutant,
Dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les dépens de l'appel y compris ceux concernant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la direction régionale des douanes et des droits indirects de Lorraine et la directrice générale des douanes et droits indirects à payer à la SAS Hasbro France la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière La Présidente de Chambre