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11/10/2022 | FRANCE | N°21/00075

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 11 octobre 2022, 21/00075


Arrêt n° 22/00645



11 Octobre 2022

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N° RG 21/00075 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FNBH

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

17 Décembre 2020

F 20/61

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1



ARRÊT DU



onze octobre deux mille vingt deux



APPELANTE :



Mme [Z] [H]

[Adresse 2]

R

eprésentée par Me Sarah SCHIFFERLING-ZINGRAFF, avocat au barreau de SARREGUEMINES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001996 du 09/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnel...

Arrêt n° 22/00645

11 Octobre 2022

---------------------

N° RG 21/00075 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FNBH

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de FORBACH

17 Décembre 2020

F 20/61

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

onze octobre deux mille vingt deux

APPELANTE :

Mme [Z] [H]

[Adresse 2]

Représentée par Me Sarah SCHIFFERLING-ZINGRAFF, avocat au barreau de SARREGUEMINES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/001996 du 09/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BAJ)

INTIMÉES :

S.A.S. EURONET PROPRETE & SERVICES prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

Représentée par Me Christine SALANAVE, avocat postulant au barreau de METZ et Me Frédérique STEFANELLI-DUMUR, avocat plaidant au barreau de METZ

ASSOCIATION SAINT NABOR SERVICES prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 3]

Représentée par Me Stéphane VUILLAUME, avocat postulant au barreau de METZ et Me Philippe WITTNER, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Septembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Hélène BAJEUX

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

 Mme [Z] [H] a été embauchée par la société SAS Euronet Propreté et Services à compter du 10 septembre 2006 en exécution d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel en qualité d'agent de service.

Par courrier en date du 23 décembre 2019, Mme [H] a été informée que les sites Logiest / Neolia sur lesquels elle intervenait avaient été repris par l'entreprise Saint Nabor services.

 

La SAS Euronet Propreté et Services a notifié à Mme [H] son affectation sur le site de la société Bakeline à [Localité 6] à compter du 27 janvier 2020.

Le 31 janvier 2020 la Euronet Propreté et Services a mis la salariée en demeure de se présenter à son poste.

Par courrier en date du 11 février 2020, Mme [Z] [H] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement.

Mme [Z] [H] a été licenciée pour faute grave le 25 février 2020, pour absence injustifiée.

Mme [Z] [H] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Forbach par acte enregistré au greffe le 17 avril 2020, aux fins de condamner l'association Saint Nabor Services à lui payer les sommes de 2 000 euros de dommages et intérêts pour refus de fourniture de travail et de paiement de salaire, 5 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral, afin qu'il soit rappelé à l'association Saint Nabor Services qu'elle doit lui fournir travail et salaire depuis le 2 janvier 2020 et de condamner l'association Saint Nabor Services à lui verser une somme mensuelle de 691,08 euros brut de salaire depuis le 2 janvier 2020 et à lui délivrer ses fiches de paie depuis le mois de janvier 2020, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

A titre subsidiaire, à défaut de transfert, Mme [Z] [H] a demandé au conseil de constater que son licenciement est dépourvu de faute grave et de cause réelle et sérieuse, de condamner la SAS Euronet Propreté et Services à lui payer les sommes de 1 382,16 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 138,22 euros brut de congés payés sur préavis, 2 562,06 euros nets à titre d'indemnité de licenciement, 12 500 euros nets à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive et vexatoire et 2 000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, de fixer le salaire mensuel moyen à la somme de 691,08 euros brut, et condamner la partie défenderesse en tous les frais et dépens y compris aux frais avancés par l'État au titre de l'éventuelle aide juridictionnelle accordée à la partie demanderesse.

Par jugement en date du 17 décembre 2020, le conseil de prud'hommes de Forbach a statué comme suit :

'Constate que la société Euronet propreté et services était seul employeur de Mme [Z] [H] ;

Dit et juge que le licenciement de Mme [Z] [H] repose sur une faute grave ;

En conséquence,

Déboute Mme [Z] [H] de l'ensemble de ses demandes ;

Déboute Mme [Z] [H], la SAS Euronet propreté et services, ainsi que l'Association Saint Nabor services, en la personne de leurs représentants légaux respectifs, de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens''. 

Mme [Z] [H] a régulièrement interjeté appel des dispositions de ce jugement par déclaration électronique en date du 12 janvier 2010. 

Dans ses dernières conclusions datées du 24 février 2021, Mme [Z] [H] demande à la cour de statuer comme suit :

'Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

Rappeler à l'association Saint Nabor Services qu'elle doit lui fournir travail et salaire depuis le 02 janvier 2020,

Condamner l'association Saint Nabor Services à lui verser une somme mensuelle de 691,08 euros brut de salaire depuis le 2 janvier 2020,

Condamner l'association Saint Nabor Services à lui délivrer ses fiches de paie depuis le mois de janvier 2020, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

Condamner l'association Saint Nabor Services à lui payer une somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour refus de fourniture de travail et de paiement de salaire,

Condamner la SAS Euronet Propreté et Services à lui payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

A titre subsidiaire, à défaut de transfert,

Constater que son licenciement est dépourvu de faute grave et de cause réelle et sérieuse

Condamner la SAS Euronet Propreté et Services à lui payer :

1 382,16 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de préavis

138,22 euros brut à titre de congés payés sur préavis

2 562,06 euros net à titre d'indemnité de licenciement

12 500,00 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive et vexatoire

Condamner la SAS Euronet Propreté et Services et l'association Saint Nabor Services à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile de première instance et 3 000 euros à hauteur de cour,

Fixer le salaire mensuel moyen à la somme de 691,08 euros brut,

Condamner les intimées aux entiers frais et dépens, d'instance et d'appel''.

 

Sur ses demandes à l'encontre de l'association Saint Nabor services, Mme [H] évoque l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté (ancienne annexe 7) qui garantit aux salariés affectés sur un marché la continuité de leur contrat de travail ; elle affirme que l'activité principale de l'association Saint Nabor Services était bien une activité de nettoyage.

Mme [H] soutient que l'association Saint Nabor Services ne peut sérieusement se soustraire à ses obligations en matière de reprise des salariés, dès lors qu'elle a récupéré des chantiers soumis aux dispositions de la convention collective de la propreté et qu'elle a reconnu, lors de la convocation des salariés à une réunion des nouveaux entrants et la remise de leurs outils de travail, que le contrat avait bien été transféré.

Mme [H] assure que son contrat a été transféré de plein droit à l'association Saint Nabor Services qui doit être tenue de lui fournir du travail.

Elle sollicite un rappel de salaire, depuis le 2 janvier 2020, sur une base mensuelle de 691,08 euros brut et ses fiches de paie depuis janvier 2020 sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Elle considère également être bien fondée à solliciter le versement d'une somme de 2 000 euros de dommages intérêts pour le préjudice subi du fait de l'absence de fourniture de travail et de rémunération.

 

Sur ses demandes à l'encontre de la société Euronet propreté et services, Mme [Z] décline ses prétentions en envisageant deux options :

- En cas de transfert :

Mme [H] évoque la manière dont elle a été traitée par la SAS Euronet Propreté et Services, alors que son contrat avait automatiquement été transféré à l'association Saint Nabor Services, le fait qu'elle n'a eu aucun soutien, qu'on lui ait menti avant de la licencier sous de faux prétextes alors qu'elle est une personne vulnérable puisqu'elle est reconnue travailleur handicapé ; elle sollicite l'indemnisation de son préjudice moral par l'allocation d'une indemnisation à hauteur de 5 000 euros.

- A défaut de transfert :

Mme [H] invoque le caractère abusif du licenciement dont elle a fait l'objet par la Société Euronet propreté et services. Elle soutient que la modification du lieu de travail constitue une modification des conditions de travail que l'employeur était en droit d'imposer à la salariée de sorte que même si elle avait refusé la proposition de modification, ce qui n'a pas été le cas, l'employeur ne pouvait pas la licencier pour absences injustifiées dès lors qu'elle n'a commis aucune faute.

Elle souligne que le conseil de prud'hommes a renversé la charge de la preuve, en considérant que c'était à la salariée de prouver qu'elle n'avait pas commis de faute. C'est à la SAS Euronet Propreté et Services qu'il appartient de prouver que la salariée a refusé d'être affectée sur le site de Bakeline, ce qui n'est pas le cas puisqu'elle a seulement demandé un aménagement de 10 minutes de ses horaires, et qu'elle a commis une faute grave dans sa demande d'aménagement des horaires.

Mme [H] explique qu'elle n'avait pas le permis et pas de possibilité de le passer vu son handicap, que les bus n'arrivaient qu'à 8 heures 02 et qu'elle faisait déjà un effort puisqu'elle acceptait de prendre, 2 bus, soit 1 heure de trajet, pour parcourir 8 km.

Mme [H] fait valoir que lorsque l'employeur demande au salarié de changer d'horaires de travail, le refus du salarié d'accepter ce changement ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement dès lors que ce changement n'est pas compatible avec des obligations impérieuses et qu'il relève d'un abus de pouvoir de l'employeur. Elle affirme que si elle ne s'est pas présentée à son poste, c'est parce que M. [I], qui savait pourtant qu'elle était handicapée, lui a dit qu'avec 10 minutes de retard il était inutile qu'elle se présente car personne ne l'accueillerait sur site et qu'il a manifestement abusé de sa crédulité et de son handicap, dans le seul but de la licencier à moindre coût. De plus, Mme [H] souligne que la SAS Euronet Propreté et Services ne peut pas sérieusement justifier qu'elle ait refusé de décaler ses horaires de 10 minutes seulement et que l'attitude de l'employeur est donc non seulement détestable et démontre un mépris non dissimulé pour ses salariés mais elle est encore parfaitement contraire à la loi.

Dans ses dernières conclusions datées du 3 août 2021, l'association Saint Nabor Services demande à la cour de statuer comme suit :

'Déclarer l'appel principal de Mme [Z] [H] et l'appel incident de la société Euronet Propreté et Services mal fondés ; 

En conséquence :

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Mme [H] de l'intégralité de ses demandes et constaté que le seul et unique employeur de Mme [H] à compter du 1.01.2020 était la société Euronet propreté et services.

Et statuant à nouveau :

Dire et juger que les prétentions de Mme [H] et de la société Euronet propreté et services sont irrecevables et mal fondées.

En conséquence,

Constater que la société Euronet Propreté et Services était seul employeur de Mme [H],

Débouter Mme [H] de l'intégralité de ses demandes à son encontre,

Débouter la société Euronet Propreté et Services de sa demande de mise hors de cause ainsi que de sa demande de juger sans effet le licenciement qu'elle a prononcé à l'encontre de Mme [Z] [H],

Condamner Mme [Z] [H] et la société Euronet Propreté et Services au paiement de la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner Mme [Z] [H] et la société Euronet propreté et services aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel''.

 

L'association Saint Nabor Services soutient qu'elle est une association de droit local spécialisée dans le secteur d'activité de l'action sociale sans hébergement et qu'elle intervient dans le cadre de réinsertion professionnelle dans divers domaines, tels que la gestion d'aires d'accueils des gens du voyage ou l'entretien d'espaces verts : la convention collective applicable est celle des Ateliers et Chantiers d'Insertion, et si en application de la convention collective des Entreprises de Propreté un transfert des contrats de travail des salariés en cas de reprise de sites est automatique, cela n'est pas le cas en application de la convention collective des Ateliers et Chantiers d'Insertion. C'est la raison pour laquelle, au moment de la reprise des chantiers Logiest ex Neolia, les contrats de travail des salariés exerçant sur ce site n'ont pas été transférés à l'association.

L'association Saint Nabor Services soutient qu'elle a toutefois proposé aux salariés de la société Euronet Propreté et Services une embauche selon un nouveau contrat de travail et notamment à Mme [H] mais que cette dernière a refusé. En outre, les régies de quartier, dont l'un des objectifs prioritaires est l'insertion des personnes en grande difficulté, assurent diverses activités au gré des besoins des habitants du quartier dans lequel elles interviennent ; elles ne relèvent pas du champ d'application de l'accord du 29 mars 1990 fixant les conditions d'une garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire dans le secteur de la propreté.

Afin de ne pas laisser la société Euronet Propreté et Services dans l'ignorance, l'association avait même rappelé l'existence de cette jurisprudence et sa portée à la société dans son courrier du 3 janvier 2020.

L'association Saint Nabor Service retient que la seule et unique société pouvant être condamnée au titre de la relation de travail entretenue avec Mme [H] est la société Euronet Propreté et Services, et qu'elle doit par voie de conséquent être mise hors de cause. ; la société Euronet Propreté et Services ne peut quant à elle se prévaloir de sa propre turpitude en faisant état du fait que le licenciement qu'elle a elle-même notifié serait privé d'objet.

Enfin, l'association Saint Nabor service souligne que Mme [H] ne s'est jamais tenue à sa disposition, et que l'appelante ne lui a jamais rendu la moindre prestation de travail. Elle retient que Mme [H] ne justifie d'aucun préjudice ; elle n'a pris la peine de la contacter qu'au mois d'avril 2020, soit quatre mois après la reprise du chantier, après avoir fait l'objet d'un licenciement par la société Euronet Propreté et Services.

 

Dans ses dernières conclusions déposées le 20 mai 2021, la société Euronet Propreté et Services demande à la cour de statuer comme suit :

''A titre principal,

Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté qu'elle était seul employeur de Mme [Z] [H] et l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Et, statuant à nouveau :

Dire et juger que le contrat de travail de Mme [Z] [H] a été repris à compter du 2 janvier 2020 par l'Association Saint Nabor services,

En conséquence,

La mettre hors de cause,

Dire et juger que le licenciement pour faute prononcé à l'encontre de Mme [Z] [H] est sans effet,

A titre subsidiaire,

Dire et juger que le licenciement de Mme [Z] [H] repose sur une faute grave,

En tout état de cause,

Débouter Mme [Z] [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées contre la société Euronet Propreté et Services,

Condamner Mme [Z] [H] à lui payer en application de l'article 700 du Code de procédure civile, la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés devant le conseil de prud'hommes et la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés devant la présente juridiction,

Condamner Mme [H] aux entiers dépens''.

A titre principal, sur sa mise hors de cause, la SAS Euronet Propreté et Services fait valoir que le contrat de travail de Mme [H] a fait l'objet d'un transfert conventionnel en vertu de la convention collective des entreprises de propreté et non sur le fondement de l'article L.1224-l du code du travail.

La société Euronet Propreté et Services note qu'aucune convention collective particulière n'est attribuée au code d'activité NAF 8899B de l'association Saint Nabor Services, et que l'activité principale de cette dernière est le service de propreté.

La SAS Euronet Propreté et Services considère que le contrat de travail de Mme [H] a été transféré de plein droit à son nouvel employeur, l'Association Saint Nabor Services ; cette dernière en a d'ailleurs parfaitement conscience puisqu'à réception des dossiers des salariés concernés, elle a convoqué l'ensemble des salariés dont le contrat avait été transféré et leur a fourni leur matériel afin qu'ils puissent procéder au nettoyage des entrées du marché Logiest / ex Neolia.

La Société Euronet Propreté et Services explique qu'elle n'était obligée à rien mais qu'elle n'a pu se résigner à laisser Mme [H] dans une situation de précarité ; elle lui a donc offert une nouvelle affectation temporaire sur le marché de Bakeline et n'a certainement pas fait preuve de turpitude en cherchant une issue à la situation de Mme [H].

La société Euronet Propreté et Services soutient que le licenciement de Mme [H] est nécessairement privé d'effet, et que l'action de la salariée ne peut être dirigée qu'à l'encontre de l'association Saint Nabor Services, qui n'avait pas souhaité reprendre le contrat de travail de la salariée malgré le transfert de plein droit de celui-ci.

A titre subsidiaire, sur le bien fondé du licenciement pour faute grave, la SAS Euronet Propreté et Services fait valoir que Mme [H] ne s'est plus présentée sur son lieu de travail à compter de sa nouvelle affectation.

La société ajoute que Mme [H] se borne à prétendre que cette absence se justifie par le fait que M. [I] lui aurait dit oralement de ne pas se présenter si elle avait 10 minutes de retard mais qu'une telle allégation est d'autant plus contestable qu'elle est parfaitement contraire à ce que lui écrivait son employeur le 24 janvier 2020.

Dans ces conditions, la société Euronet propreté et services estime qu'elle n'a eu d'autre choix que de licencier Mme [H] pour faute grave.

En tout état de cause, sur le préjudice moral, la société Euronet propreté et services soutient que, si préjudice moral il y a, ce n'est certainement pas du fait de l'ancien employeur qui a essayé de réparer l'absence de reprise du contrat de travail de Mme [H].

 

Pôle Emploi Alsace Champagne-Ardenne Lorraine a adressé un courrier le 27 juin 2016 à la cour sollicitant le remboursement de la somme de 11 057,40 euros au cas où il y aurait lieu à application de l'article L. 1235-4 du code du travail.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 mai 2022.

Il convient en application de l'article 455 du Code de Procédure Civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

SUR CE, LA COUR,

Sur le transfert du contrat de travail

L'article 1.1 de la convention collective nationale des entreprises de propreté indique qu'elle s'applique à tous les employeurs et salariés des entreprises et établissements exerçant sur le territoire français, et ce quel que soit le pays d'établissement de l'employeur, exerçant :

- une activité de nettoyage de locaux classée sous le code APE 81.2, y compris les activités de nettoyage à l'occasion de remises en état,

et/ou

- une activité de nettoyage à domicile de moquettes, tapis, tentures et rideaux relevant du code APE 96.01 A.

L'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté fixe les conditions de garantie de l'emploi et de continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire.

L'article 7.1 de la convention collective précitée prévoit que ses dispositions relatives à la garantie d'emploi et à la continuité du contrat de travail du personnel s'appliquent aux employeurs et aux salariés des entreprises ou établissements exerçant une activité relevant des activités classées sous le numéro de code APE 81.2, qui sont appelés à se succéder lors d'un changement de prestataire pour des travaux effectués dans les mêmes locaux, à la suite de la cessation du contrat commercial ou du marché public.

En outre, l'article 7.2 de la convention collective précitée mentionne les conditions applicables au personnel entrant bénéficiant du maintien de l'emploi qui s'impose au nouveau prestataire :

« A. Appartenir expressément :

- soit à l'un des 4 premiers niveaux de la filière d'emplois « exploitation » de la classification nationale des emplois (AS, AQS, ATQS et CE) et passer sur le marché concerné 30 % de son temps de travail total effectué pour le compte de l'entreprise sortante ;

- soit à l'un des 2 premiers échelons du niveau agent de maîtrise exploitation de la classification nationale des emplois (MP1 et MP2) et être affecté exclusivement sur le marché concerné.

B. Être titulaire :

a) Soit d'un contrat à durée indéterminée et,

- justifier d'une affectation sur le marché d'au moins 6 mois à la date d'expiration du contrat commercial ou du marché public ;

- ne pas être absent depuis 4 mois ou plus à la date d'expiration du contrat. À cette date, seul(e)s les salarié(e) s en congé maternité ou en activité partielle seront repris(es) sans limitation de leur temps d'absence. La totalité de la durée de l'absence sera prise en compte, congé de maternité ou période d'activité partielle compris, pour l'appréciation de cette condition d'absence de 4 mois ou plus, dans l'hypothèse où la/la salariée(e) ne serait pas en congé de maternité ou en activité partielle à la date d'expiration du contrat commercial ou du marché public.

(...)

C. Etre en situation régulière au regard de la législation du travail relative aux travailleurs étrangers

(...)

D. Ne pas avoir été reconnu médicalement inapte définitif sur le poste de travail attaché au marché.

E. Ne pas être en situation de préavis, exécuté ou non ».

L'article 7.2 précise par ailleurs que la carence de l'entreprise sortante dans la transmission des renseignements prévus par les dispositions de ladite convention ne peut empêcher le changement d'employeur que dans le seul cas où cette carence met l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché.

En l'espèce, il est constant que l'association Saint Nabor Services a repris le marché Logiest/Neolia, relatif au nettoyage de bureaux, et a succédé à la SAS Euronet Propreté et Services.

La discussion s'articule autour de l'applicabilité des dispositions de l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté à la SAS Euronet Propreté et Services et à l'association Saint Nabor Services, et d'un éventuel transfert conventionnel du contrat de travail de Mme [H] affectée au marché transféré.

Les parties s'accordent sur le fait que la société Euronet Propreté et Services relève bien des dispositions de ladite convention.

En ce qui concerne l'association Saint Nabor Services, la circonstance selon laquelle l'association relève de la convention collective des Ateliers et chantiers d'insertion (IDCC 3016) ne suffit pas à exclure une application de l'article 7 de la convention collective précitée entre les parties.

La cour rappelle à cet égard que la convention collective applicable aux salariés d'une entreprise est celle dont relève l'activité principale de cette entreprise, peu important les fonctions exercées, sauf dans l'hypothèse où les salariés exercent une activité nettement différenciée, dans un centre d'activité autonome.

La cour constate d'une part, que l'association Saint Nabor Services est enregistrée au répertoire SIRENE en qualité d'association de droit local ayant pour activité principale l'action sociale sans hébergement (code APE 8899B), et d'autre part que les statuts de l'association mentionnent comme objet social « contribuer à recréer, réorganiser, gérer, et revitaliser des territoires à partir d'activités économiques sur le plan national et les quartiers sensibles du bassin houiller éligibles au contrat de ville » par notamment « la gestion et l'entretien des espaces collectifs (parties communes des immeubles et espaces extérieurs, petite maintenance, etc), la rénovation des logements sociaux et la gestion de l'habitat spécifique aux populations de voyageurs (gens du voyage, terrains familiaux et grands passages), l'activité de vente à emporter et/ou de restauration rapide », si bien que l'association exerce de nombreuses activités, dont le nettoyage des locaux, dans le but de redynamiser les zone urbaines et de réinsérer socialement et professionnellement les personnes dans le besoin.

La seule allégation de la SAS Euronet Propreté et Services selon laquelle le marché Logiest/Neolia comprenait 34 salariés affectés et représentait un chiffre d'affaires de 900 000 euros ne permet pas de déduire que la prestation de nettoyage est l'activité principale de l'association Saint Nabor Service, alors que cette structure associative emploie de plus de 200 salariés et que son chiffre d'affaires global n'est pas communiqué aux débats.

Il n'est ainsi démontré ni par la SAS Euronet Propreté et Services ni par Mme [H] que les prestations de nettoyage réalisées par l'association Saint Nabor Services constituaient l'activité principale de cet établissement, ou qu'une telle activité, qui faisait partie des multiples activités proposées par l'association dans le cadre de la réinsertion professionnelle, aurait été exercée de manière différenciée et autonome.

La convention collective nationale du 26 juillet 2011 des entreprises de propreté n'a donc pas vocation à s'appliquer, ce que l'association a d'ailleurs rappelé dans son courrier en date du 3 janvier 2020 adressé en réponse à la société Euronet Propreté et Services.

Il sera au demeurant relevé que la SAS Euronet Propreté et Services et Mme [H] n'apportent aucun élément précis s'agissant de la tenue d'une prétendue réunion au sein de l'association Saint Nabor Services à laquelle l'appelante aurait été convoquée, ou de la remise d'affaires de nettoyage par l'association, d'autant que cette dernière affirme sans être démentie par l'appelante que Mme [H] a décliné son offre d'embauche.

Dès lors, Mme [H] ne peut prétendre que son contrat de travail aurait été transféré à l'association Saint Nabor Services, que ce soit de plein droit en application de l'article 7 de cette convention collective ou de manière volontaire, et c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a jugé que l'employeur de Mme [H] était la société Euronet Propreté et Services.

En conséquence, l'association Saint Nabor Services sera mise hors de cause, et Mme [H] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes à son encontre. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué en ce sens sur ces points.

Mme [H] sera par là-même également déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral à dirigée à l'encontre de la SAS Euronet Propreté et Services.

Sur le licenciement pour faute grave

Sur son bien-fondé

La lettre de licenciement pour faute grave en date du 31 janvier 2020, qui fixe les termes du litige, est rédigée comme suit :

« En date du 15.01.2020, nous vous informions d'un changement d'affectation sur le site Bakeline à [Localité 6] avec date d'effet au 27.01.2020 .

Puis, par courrier recommandé reçu le 18 janvier 2020, vous nous avez demandé de réétudier notre proposition de changement d'affectation du fait de votre statut de travail handicapé et que vous ne disposiez pas du permis de conduire.

Nous vous avons alors répondu le 24 janvier 2020 par courrier recommandé et que vous avez accusé réception le 25 janvier 2020, que nous maintenions notre position de changement d'affectation car celui-ci était conforme aux dispositions légales, conventionnelles et contractuelles. Vous deviez donc démarrer votre prestation sur le site Bakeline le 27.01.2020.

Ainsi et depuis le 27.01.2020, vous êtes en charge des prestations de propreté en tant qu'agent de services sur le site de Bakeline à [Localité 6] tous les lundis, mardis, jeudis et vendredis correspondant à une mensualisation totale de 64h83.

Or, depuis le 27 janvier 2020 soit la date de démarrage sur ce site, vous ne vous êtes jamais présentée à votre poste et nous n'avons eu aucune nouvelles de vous ni de justificatif.

En date du 31 janvier 2020, nous vous avons adressé un courrier recommandé pour vous mettre en demeure de vous justifier de vos absences depuis le 27.01.2020.

Vous avez bien accusé réception de ce courrier mais vous n'y avez donné aucune suite.

Nous avons donc poursuivi la procédure en vous adressant une convocation à entretien préalable à une éventuelle mesure de sanction pouvant aller jusqu'au licenciement en date du 11 février 2020.

La date de l'entretien est fixée au 20.02.2020 à 09h00.

Nous vous rappelons que depuis le 27 janvier 2020, vous vous trouvez en absences injustifiées et que malgré notre mise en demeure de justificatifs d'absences, nous sommes sans nouvelle de vous.

Aussi, compte tenu de vos absences injustifiées depuis le 27 janvier 2020 sur ce site, que vos absences répétées nous portent préjudices et désorganisent fortement l'exploitation, nous nous voyons contraints de vous informer de notre décision de vous licencier pour faute grave ».

En vertu des dispositions des articles L 1232-1 et L 1235-1 du code du travail, tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

La lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, soit un comportement assez explicite pour être identifiable et permettant une vérification par des éléments objectifs.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

En cas de faute grave, la charge de la preuve repose sur l'employeur qui doit établir à la fois la réalité et la gravité des manquements du salarié.

En l'espèce, suite à la perte du marché Logiest/Neolia, la SAS Euronet Propreté et Services a, par courrier du 15 janvier 2020, informé Mme [H] de la modification de son lieu de travail.

Ce courrier indique « Vous exercerez désormais votre activité à l'adresse suivante :

[Adresse 4]

Nous vous rappelons qu'il est prévu à l'article 4 de votre contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel « ... Mme [H] accepte de pouvoir être affectée à tout autre site situé dans une zone géographique de 30 kilomètres ».

La distance entre vos anciens lieux d'interventions et votre nouveau lieu d'intervention à savoir « Bakeline à [Localité 6] » étant inférieur à 30 km, vous ne pouvez donc pas vous opposer à cette modification.

Vos jours et horaires d'intervention restent inchangés et sont repris ci-après :

le lundi de 08h00 à 12h00 soit 04h00 / prestation hebdomadaire

le mardi de 06h30 à 08h30 soit 02h00 / prestation hebdomadaire

le jeudi de 06h30 à 11h45 soit 05h25 / prestation hebdomadaire

le vendredi de 06h30 à 11h45 soit 05h25 / prestation hebdomadaire

Représentant au total une mensualisation de 64h83 ».

Le contrat de travail de Mme [H] mentionne en effet que la salariée peut être affectée à tout autre site situé dans une zone géographique de 30 kilomètres, de sorte que le nouveau lieu de travail, situé à 8 km du domicile de la salariée, est d'une part dans le même bassin géographique que son ancien lieu d'affectation et d'autre part dans le champ de la clause de mobilité acceptée par cette dernière.

Il s'agit donc d'une modification des conditions de travail et non d'une modification du contrat de travail.

La cour rappelle que lorsqu'elles constituent un simple changement des conditions de travail, les mesures décidées par l'employeur en matière de changement de lieu de travail ou d'aménagement des horaires s'imposent au salarié, sauf en cas d'atteinte excessive à sa vie privée et familiale ou d'abus de droit.

Mme [H] n'a pas refusé ce changement d'affectation mais a émis des observations sur ses horaires de travail par courrier en date du 18 janvier 2020 en expliquant à son employeur :

«- Je suis reconnue qualité de travailleur handicapé avec un taux d'incapacité compris entre 50 et 79% par décision de la CDAPH du 11/06/2018 pour la période du 1/05/2018 au 30/04/2023

- Étant handicapée, je n'ai pas de permis de conduire ni de moyen de locomotion hormis les transports en commun

- Aucun moyen de transport public ne me permettrait de rejoindre les chantiers que vous me proposez aux horaires que vous indiquez ».

Mme [H] produit la décision de reconnaissance de son statut handicapé de la Maison Départementale Des Personnes Handicapées De Moselle, état de santé lui empêchant de passer le permis de conduire et d'utiliser une voiture personnelle, ainsi que les horaires des bus allant de son domicile, situé à [Localité 5], jusqu'au nouveau site d'affectation, situé à [Localité 6], qui laissent apparaître que la salariée devait prendre la ligne 1 puis la ligne 5, soit près d'une heure de trajet, et que le premier arrêt à [Localité 6] était à 8 heures 02.

Il en résulte que Mme [H] justifie que son état de santé et les transports collectifs ne lui permettaient pas de respecter les horaires de travail fixés par l'employeur, soit se rendre à 6 heures 30 ou à 8 heures sur le nouveau lieu de travail, si bien que le respect des horaires fixés par l'employeur impliquait des conséquences excessives pour la salariée.

Aussi la cour relève que la SAS Euronet Propreté et Services a ignoré les difficultés exposées par la salariée, puisque par courrier du 24 janvier 2020, l'employeur a notifié Mme [H] que « S'agissant des horaires d'intervention qui vous ont été proposés dans notre courrier recommandé du 15.01.2020, nous sommes en mesure de les adapter et de vous proposer d'autres plages horaires.

Vous pourrez ainsi bénéficier des transports en commun pour vous rendre sur le site Bakeline à [Localité 6].

En tout état de cause, nous vous demandons de vous présenter dès lundi 27 janvier 2020 à 08h00 sur le site Bakeline ; site sur lequel M. [I] sera présent pour vous remettre l'ensemble des informations et cahier des chargesrelatifs aux prestations à effectuer », sans pour autant rectifier les horaires de travail de Mme [H]. Au contraire, l'employeur a persisté à demander à la salariée d'être présente sur le site à 8 heures, alors qu'il savait pertinemment que ce n'était pas possible, puis a maintenu les horaires de 8 heures et 6 heures 30 par courrier de mise en demeure du 31 janvier 2020.

Dès lors, la SAS Euronet Propreté et Services qui avait une parfaite connaissance de l'état de santé de Mme [H] et des contraintes liées à l'utilisation des transports en commun dans les petites villes comme celle de [Localité 6], à défaut de lui assurer des moyens de se rendre sur son lieu de travail, a abusé du droit qu'elle tient de l'exercice de son pouvoir de direction en imposant à la salariée, suite au changement du lieu de travail, des horaires que la salariée était dans l'impossibilité matérielle de respecter, et en maintenant ces horaires alors que leur aménagement était tout à fait possible dans le cadre du nettoyage de vestiaires et bureaux.

En conséquence, l'abandon de poste de Mme [H], qui trouve son origine dans un manquement de l'employeur à ses obligations, ne saurait constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement et encore moins une faute grave.

Le licenciement de Mme [H] doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la salariée sur ce point et de ses demandes de dommages et intérêts pour rupture abusive et vexatoire, d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférent.

Sur les conséquences financières du licenciement

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

L'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 1er avril 2018, dispose que si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, en cas de refus de la réintégration du salarié dans l'entreprise, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par cet article, en fonction de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise et du nombre de salariés employés habituellement dans cette entreprise.

Mme [H] comptait lors de son licenciement plus de 13 ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de 11 salariés, de sorte que la salariée relève du régime d'indemnisation de l'article L.1235-3 al 2 du code du travail dans sa rédaction applicable à la cause, qui prévoit une indemnité minimale de 3 mois de salaire et une indemnité maximale de 11,5 mois de salaire.

Aussi, compte tenu de l'âge de la salariée lors de la rupture de son contrat de travail (50 ans), de son ancienneté (13 ans) et du montant de son salaire mensuel (961,08 euros bruts), et alors qu'elle justifie avoir perçu des allocations chômage en 2020, il convient d'allouer à Mme [H] la somme de 7 000 euros à titre de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice subi du fait de la rupture abusive de son contrat de travail.

Sur l'indemnité légale de licenciement

Il résulte de l'article L. 1234-9 du code du travail que le salariée titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

En vertu de l'article R. 1234-2 du code du travail, en sa version applicable au présent litige, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans et un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

Au vu de l'ancienneté de Mme [H], il convient de lui allouer la somme réclamée, non autrement contestée, de 2 562,06 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

Aux termes de l'article L.1234-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la cause, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez le même employeur. Le salarié a droit à un préavis de deux mois s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans.

En conséquence, il y a lieu d'allouer à Mme [H] la somme sollicitée de 1 382,16 euros bruts (691,08 euros x 2 mois) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, à laquelle il y convient d'ajouter la somme de 138,22 euros bruts au titre des congés payés y afférent.

Sur le surplus

Les conditions s'avèrent réunies pour ordonner le remboursement par l'employeur, en application de l'article L.1235-4 du code du travail, à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à la salariée, du jour de son licenciement au jour de la décision, dans la limite de six mois d'indemnités.

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens de première instance seront infirmées.

La SAS Euronet Propreté et Services qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Les dispositions du jugement entrepris relatives à l'article 700 du code de procédure civile seront confirmées.

Il n'est pas contraire à l'équité de laisser à la charge de l'association Saint Nabor Services et de Mme [H] leurs frais irrépétibles ; leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a dit que la société Euronet Propreté et Services était seul employeur de Mme [Z] [H], sauf en ce qu'il a débouté Mme [Z] [H] de l'ensemble de ses demandes à l'égard de l'association Saint Nabor Services et sauf en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées, et y ajoutant,

Déboute Mme [Z] [H] de sa demande à l'encontre de la SAS Euronet Propreté et Services de dommages et intérêts pour préjudice moral dans le cadre d'un transfert de contrat de travail ;

Dit que le licenciement pour faute grave de Mme [Z] [H] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS Euronet Propreté et Services à payer à Mme [Z] [H] les sommes suivantes :

- 7 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 562,06 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 382,16 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 138,22 euros bruts au titre des congés payés y afférent.

Ordonne le remboursement par la SAS Euronet Propreté et Services à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à Mme [Z] [H] du jour du son licenciement dans la limite de six mois d'indemnités.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile en faveur des parties.

Condamne la SAS Euronet Propreté et Services aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 21/00075
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;21.00075 ?
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