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22/09/2022 | FRANCE | N°21/01257

France | France, Cour d'appel de Metz, 3ème chambre, 22 septembre 2022, 21/01257


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS













N° RG 21/01257 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FP64

Minute n° 22/00315





[O]

C/

S.C.A. VEOLIA EAU - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX-CGE









Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THIONVILLE, décision attaquée en date du 29 Janvier 2021, enregistrée sous le n° 19/00542





COUR D'APPEL DE METZ



3ème CHAMBRE - TI



ARRÊT DU 22 SE

PTEMBRE 2022





APPELANTE :



Madame [B] [O]

Chez Madame [H] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° RG 21/01257 - N° Portalis DBVS-V-B7F-FP64

Minute n° 22/00315

[O]

C/

S.C.A. VEOLIA EAU - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX-CGE

Jugement Au fond, origine TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THIONVILLE, décision attaquée en date du 29 Janvier 2021, enregistrée sous le n° 19/00542

COUR D'APPEL DE METZ

3ème CHAMBRE - TI

ARRÊT DU 22 SEPTEMBRE 2022

APPELANTE :

Madame [B] [O]

Chez Madame [H] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat au barreau de METZ

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/007175 du 16/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de METZ)

INTIMÉE :

S.C.A. VEOLIA EAU Représentée par son représentant légal

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Yves ROULLEAUX, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS : A l'audience publique du 12 mais 2022 tenue par Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés et en a rendu compte à la cour dans leur délibéré pour l'arrêt être rendu le 22 septembre 2022.

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame Sophie GUIMARAES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Madame GUIOT-MLYNARCZYK, Président de Chambre

ASSESSEURS : Madame BASTIDE, Conseiller

Monsieur MICHEL, Conseiller

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Mme GUIOT-MLYNARCZYK, Présidente de Chambre, et par Mme GUIMARAES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat conclu le 12 février 2008, la SCA Veolia Eau-Compagnie Générale des Eaux (ci-après «'la SCA Veolia») s'est vue confier la gestion du service public de distribution d'eau par la ville de[Localité 4]).

Le 3 mai 2018, la SCA Veolia a adressé à Mme [B] [O] une facture d'arrêt de compte d'un montant de 6.430,47 euros majorée de 13,24 euros suite à un rappel pour le logement sis [Adresse 3] dont elle était locataire.

Par acte d'huissier du 3 mai 2019, elle a fait assigner Mme [O] devant le tribunal d'instance de Thionville et au dernier état de la procédure, elle a sollicité la condamnation à lui verser les sommes de 6.443,71 euros au titre de la facture du 3 mai 2018 majorée des pénalités de retard, 500 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [O] a soulevé la nullité de l'assignation et s'est opposée aux demandes, sollicitant une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 29 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Thionville a':

- condamné Mme [O] à verser à la SCA Veolia la somme de 6.443,71 euros au titre de la facture du 3 mai 2018 majoréé

- débouté la SCA Veolia de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné Mme [O] aux dépens.

Le premier juge a rejeté la demande de nullité de l'assignation, aux motifs que si le représentant légal de la SCA Veolia n'est pas indiqué sur l'acte, il n'y a pas de défaut de pouvoir de ce représentant non mentionné et que le défaut de désignation du représentant légal constitue un vice de forme nécessitant la preuve d'un grief qui n'est pas rapportée.

Sur la demande en paiement, il a relevé, au visa des articles 1103 et 1353 du code civil et des articles L. 2224-12-4 III bis et R. 2224-20-1 du code général des collectivités territoriales que la SCA Veolia justifie de sa demande par ses pièces, que Mme [O] ne produit aucun élément permettant d'établir que sa consommation d'eau devait être considérée comme anormale et qu'elle est redevable de la somme de 6.443,71 euros. Il a en outre rejeté la demande de dommages et intérêts en l'absence de préjudice.

Par déclaration d'appel déposée au greffe de la cour le 18 mai 2021, Mme [O] a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle'a rejeté la nullité de l'assignation et l'a condamnée à verser à la SCA Veolia Eau CGE la somme de 6.443,71 euros au titre de la facture du 3 mai 2018 majorée et aux dépens.

L'appelante demande à la cour d'infirmer le jugement et de prononcer la nullité de l'assignation du 3 mai 2019'et celle du jugement, subsidiairement, réduire le montant de la créance de la SCA Veolia à la somme de 140,76 euros'et débouter la SCA Veolia du surplus de ses demandes et la condamner aux entiers dépens.

Sur la nullité de l'assignation, elle expose au visa de l'article 54 du code de procédure civile que l'acte ne mentionne pas le représentant légal de la SCA Veolia, qu'étant non représentée la société était dépourvue de capacité d'ester en justice ce qui constitue une nullité de fond et conclut à la nullité de l'assignation et à l'annulation du jugement.

Subsidiairement, elle fait valoir qu'en 2018 l'intimée lui a facturé la somme de 6.430,47 euros pour 1.537 m3 d'eau alors qu'en 2016, ses consommations d'eau étaient de l'ordre de 136/178 m3 et en 2017 de l'ordre de 15/19 m3 car elle était moins présente à son domicile. Elle précise que la société ne l'a jamais avertie du caractère anormal de la consommation d'eau pour la période concernée et n'a pas respecté les dispositions du code général des collectivités, de sorte qu'elle ne doit que la part correspondant à sa consommation moyenne, soit la somme de 140,76 euros.

La SCA Veolia conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de'débouter Mme [O] de l'ensemble de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Sur l'assignation, elle ne conteste pas l'absence de mention de son représentant légal mais soutient qu'il ne peut y avoir de défaut de pouvoir pour un représentant non mentionné, que le défaut de désignation de l'organe représentant la personne morale constitue un vice de forme, qu'il n'est justifié d'aucun grief puisque l'appelante a pu assurer sa défense en première instance et que la nullité a été couverte par ses premières conclusions indiquant qu'elle est représentée par son gérant.

Sur le fond, l'intimée expose que rien ne permet d'affirmer que la consommation d'eau de l'appelante excéderait le double du volume d'eau moyen consommé par elle au cours des 3 années précédentes, que la facture d'eau de son voisin n'est pas probante, qu'il n'est pas démontré que sa consommation d'eau est anormale, qu'il n'incombe pas au distributeur d'eau de rechercher l'origine de la forte consommation de ses abonnés et rappelle les termes de l'article 20 du règlement du service des eaux de la commune. Elle conclut en conséquence la confirmation du jugement.

MOTIFS DE LA DECISION :

Vu les écritures déposées le 29 avril 2022 par Mme [O] et le 18 avril 2022 par la SCA Veolia, auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 2 mai 2022 ;

Sur la nullité de l'assignation

Selon les articles 56 et 648 du code de procédure civile, les actes d'huissier indiquent à peine de nullité la forme, la dénomination, le siège social et l'organe qui représente légalement la personne morale, si celle-ci est la requérante.

Conformément à l'article 114 du code de procédure civile, cette omission constitue un vice de forme, ce qui implique la preuve d'un grief, étant rappelé qu'en application de l'article 115 du même code, la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.

En l'espèce, si l'assignation du 3 mai 2019 a été délivrée à la demande de la SCA Veolia sans mention de l'organe la représentant, le premier juge a exactement dit que Mme [O] ne justifie d'aucun préjudice alors qu'elle a pu exposer les moyens de sa défense et que les premières conclusions de la société mentionnent qu'elle est représentée par son directeur régional M. [C] [D], ce qui a couvert et régularisé le vice de forme de l'assignation.

Sur le défaut de capacité d'ester en justice, il ressort de l'extrait Kbis du 22 octobre 2019 et de la délégation de pouvoirs en date du 29 décembre 2017 que la société a la capacité juridique et que M. [C] [D], directeur de la région Est, bénéficie d'une délégation de pouvoirs pour notamment représenter la société et exercer toute action en justice. Ce moyen est également inopérant.

En conséquence Mme [O] doit être déboutée de ses demandes de nullité de l'assignation et du jugement.

Sur la demande en paiement

Selon l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ce qui les ont faits. En application des articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil, il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver, et réciproquement à celui qui se prétend libéré de justifier du paiement ou du fait ayant éteint son obligation.

Selon l'article L.2224-12-4 III bis du code général des collectivités territoriales dans sa version applicable au litige, dès que le service d'eau potable constate une augmentation anormale du volume d'eau consommé par l'occupant d'un local d'habitation susceptible d'être causée par la fuite d'une canalisation, il en informe sans délai l'abonné. Une augmentation du volume d'eau consommé est anormale si le volume d'eau consommé depuis le dernier relevé excède le double du volume d'eau moyen consommé par l'abonné ou par un ou plusieurs abonnés ayant occupé le local d'habitation pendant une période équivalente au cours des trois années précédentes ou, à défaut, le volume d'eau moyen consommé dans la zone géographique de l'abonné dans des locaux d'habitation de taille et de caractéristiques comparables. L'abonné n'est pas tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne s'il présente au service d'eau potable, dans le délai d'un mois à compter de l'information prévue au premier alinéa du présent III bis, une attestation d'une entreprise de plomberie indiquant qu'il a fait procéder à la réparation d'une fuite sur ses canalisations.

Il peut demander, dans le même délai d'un mois, au service d'eau potable de vérifier le bon fonctionnement du compteur. L'abonné n'est alors tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne qu'à compter de la notification par le service d'eau potable, et après enquête, que cette augmentation n'est pas imputable à un défaut de fonctionnement du compteur. A défaut de l'information mentionnée au premier alinéa du présent III bis, l'abonné n'est pas tenu au paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne.'

L'article R.2224-20-1 du même code dispose que :

I- les dispositions du III bis de l'article L. 2224-12-4 s'appliquent aux augmentations de volume d'eau consommé dues à une fuite sur une canalisation d'eau potable après compteur, à l'exclusion des fuites dues à des appareils ménagers et des équipements sanitaires ou de chauffage

II- lorsque le service d'eau potable constate une augmentation anormale de consommation au vu du relevé de compteur enregistrant la consommation d'eau effective de l'abonné, il en informe l'abonné par tout moyen et au plus tard lors de l'envoi de la facture établie d'après ce relevé. Cette information précise les démarches à effectuer pour bénéficier de l'écrêtement de la facture prévu au III bis de l'article L. 2224-12-4.

III- lorsque l'abonné, faute d'avoir localisé une fuite, demande la vérification du bon fonctionnement du compteur en application du troisième alinéa du III bis de l'article L. 2224-12-4, le service lui notifie sa réponse dans le délai d'un mois à compter de la demande dont il est saisi.'

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que le 3 mai 2018, la SCA Veolia a facturé à Mme [O] la somme de 6.430,47 euros pour une consommation d'eau de 1.537 m3 alors qu'au vu des factures produites par l'appelante, la consommation d'eau relevée pour son logement de 78 m² était en 2015 de 11 m3, en 2016 de 136 à 178 m3 et en 2017 de 15 à 19 m3, étant observé que la facture litigieuse porte sur la période du 19 au 20 avril 2018, soit en une seule journée une consommation de 1.537 m3. Il ressort en outre des échanges entre Mme [O] et son bailleur que cette consommation est due à une fuite qui a été réparée (pièce n°7 et 8). Il se déduit de ses éléments que l'augmentation du volume d'eau consommé, causée par une fuite, est anormale puisqu'elle excède largement le double du volume d'eau moyen consommé au sein du logement au cours des trois années précédentes.

Selon les textes susvisés, la SCA Veolia devait informer son abonnée de l'augmentation anormale de la consommation d'eau, au plus tard lors de l'envoi de la facture et lui préciser les démarches à effectuer pour bénéficier de l'écrêtement de la facture. Il est constaté que la facture litigieuse ne contient aucune information sur les démarches à effectuer pour bénéficier de l'écrêtement de la facture et qu'il n'est justifié d'aucun autre courrier d'information, de sorte que Mme [O] n'est pas tenue au paiement de la part de la consommation excédant le double de sa consommation moyenne en application de l'article L.2224-12-4 III bis du code général des collectivités territoriales.'En outre, si l'intimée invoque l'article 20 du règlement du service de l'eau pour soutenir qu'elle ne peut s'opposer au paiement de la facture, ce moyen est inopérant puisque cette stipulation contractuelle ne peut permettre à la SCA Veolia de se soustraire à ses obligations et aux dispositions légales protectrices du consommateur.

Sur le montant dû, eu égard au fait que l'appelante admet que l'année 2017 est particulière puisqu'elle n'a pratiquement pas occupé le logement, il convient de calculer la somme due sur la base de l'année 2016. Le double de sa consommation moyenne étant de 157m3 (136+178/2), elle doit régler la somme de 1.429,96 euros TTC (soit une somme de 1.299,96 euros HT (157m3 x 4,14 euros/m3 x2) à laquelle est appliquée la T.V.A. de 10%).

En conséquence, le jugement entrepris est infirmé et Mme [O] condamnée à payer à la SCA Veolia la somme de 1.429,96 euros au titre de la consommation d'eau.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La SCA Veolia est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les parties succombant partiellement l'une et l'autre dans leurs prétentions, chacune gardera à sa charge ses dépens d'instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DEBOUTE Mme [B] [O] de sa demande de nullité de l'assignation et du jugement déféré;

CONFIRME le jugement en ce qu'il a'débouté la SCA Veolia Eau-Compagnie Générale des Eaux de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'INFIRME en ce qu'il a condamné Mme [B] [O] à verser à la SCA Veolia Eau-Compagnie Générale des Eaux la somme de 6.443,71 euros au titre de la facture du 3 mai 2018 majorée et aux dépens, et statuant à nouveau,

CONDAMNE Mme [B] [O] à verser à la SCA Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux la somme de la somme de 1.429,96 euros au titre de la facture du 3 mai 2018 ;

DEBOUTE la SCA Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux de sa demande au titre au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE chacune des parties à supporter ses propres dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01257
Date de la décision : 22/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-22;21.01257 ?
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