Arrêt n°22/00610
20 Septembre 2022
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N° RG 19/01287 - N° Portalis DBVS-V-B7D-FBAU
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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ
23 Avril 2019
17/01299
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE METZ
Chambre Sociale-Section 1
ARRÊT DU
vingt septembre deux mille vingt deux
APPELANTE :
SARL ADP prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 2]
Représentée par Me Laure-anne BAI-MATHIS, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Benjamin RENAUD de la SELARL RENAUD AVOCATS, avocat plaidant au barreau de LYON
INTIMÉES :
Mme [J] [L] épouse [H]
[Adresse 3]
Représentée par Me Emmanuelle SABATINI-GOEURIOT, avocat postulant au barreau de METZ et par Me Christine ESPIE, avocat plaidant au barreau de PARIS
S.A. REPUBLICAIN LORRAIN
[Adresse 1]
Représentée par Me Michel VORMS et Me Frédéric RICHARD-MAUPILLIER, avocats postulant au barreau de METZ et par Me Pascal CREHANGE, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre
Mme Anne FABERT, Conseillère
Madame Laëtitia WELTER, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE, Greffier
ARRÊT :
Contradictoire
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Anne FABERT, conseillère pour la Présidente de Chambre régulièrement empêchée, et par Mme Hélène BAJEUX, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DES FAITS
Mme [J] [H] née [L] a été embauchée le 7 novembre 2012 par la société Fanzel Presse, devenue SARL ADP, selon contrat à durée indéterminée à temps plein, en qualité d'employée de dépôt de presse.
Par lettre remise en main propre le 21 mars 2017, Mme [H] a été convoquée à un entretien préalable fixé le 30 mars 2017.
Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 19 avril 2017, Mme [J] [H] a été licenciée pour motif économique.
Par acte introductif enregistré au greffe le 1er décembre 2017 et complété ultérieurement, Mme [J] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Metz d'une action dirigée contre la SARL ADP et contre la SA Le Républicain Lorrain aux fins de :
Dire et juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;
Condamner solidairement la SARL ADP et la SA Le Républicain Lorrain à lui verser les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de l'introduction de la demande et exécution provisoire :
'31 365,00 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
'3 515,00 € au titre du préavis ;
'351,00 € au titre des congés payés afférents ;
'3 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
D'obtenir la remise de bulletins de paie rectifiés dans les 8 jours du jugement à intervenir sous astreinte de 50,00 € par jour de retard ;
D'obtenir la fourniture d'un certificat de travail, d'un bulletin de paie de solde de tout compte et d'une attestation Pôle emploi dans les 8 jours du jugement à intervenir sous astreinte de 50,00 € par document et par jour de retard ;
Condamner l'employeur aux dépens.
La SARL ADP s'opposait aux demandes formées contre elle au titre de la rupture du contrat de travail de Mme [H], et subsidiairement demandait :
- de limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement abusif à la somme de 10545,00€ ;
- de condamner la SA Le Républicain Lorrain à relever et garantir la SARL ADP sur l'intégralité des dommages et intérêts attribués à Mme [H] ;
- Reconventionnellement, de condamner Mme [H] à lui verser 2 500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.
La SA Le Républicain Lorrain demandait au conseil de prud'hommes de :
- se déclarer incompétent en ce qui concerne la mise en cause de la SA Le Républicain Lorrain par Mme [H] et/ou la SARL ADP ;
- en tout état de cause, déclarer la demande dirigée contre elle irrecevable et mal-fondée ;
- condamner à titre reconventionnel Mme [H] et la SARL ADP in solidum au paiement d'une indemnité de 3000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 23 avril 2019, le conseil de prud'hommes de Metz, section commerce, a statué ainsi qu'il suit :
Dit que le conseil est incompétent pour juger de la relation entre ADP et le RL ;
Déclare la demande dirigée par Mme [H] contre le Républicain Lorrain recevable et fondée ;
Dit que le conseil est compétent pour juger la relation au visa de l'article L 1224-1 du code du travail ;
Dit que la demande dirigée contre la SARL ADP est recevable à ce titre ;
Dit que la SA Le Républicain Lorrain n'avait pas l'obligation de reprendre la salariée au titre de l'article L 1224-1 du code du travail ;
Dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse tant au point de vue économique que sur l'obligation de reclassement ;
En conséquence, condamne la SARL ADP, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme [H] les sommes suivantes :
. 3 515,00 € au titre du préavis, outre 351,00 € bruts au titre des congés payés y afférents, avec intérêts de droit à compter de la notification de la demande ;
. 15 000,00 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts légaux à compter du prononcé ;
. 1 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, avec intérêts légaux à compter du prononcé ;
Rappelle l'exécution provisoire de plein droit en application de l'article R 1454,28 du code du travail et ordonne l'exécution provisoire conformément à l'article 515 du code de procédure civile à hauteur de 2 000,00 € ;
Ordonne la remise d'un certificat de travail, le solde de tout compte et d'une attestation Pôle emploi dans les 15 jours suivant la notification du présent jugement sous astreinte de 10 € par document et par jour de retard, et se réserve le droit de liquider l'astreinte ;
Déboute Mme [H] du surplus ;
Déboute la SARL ADP et la SA Le Républicain Lorrain de leurs demandes reconventionnelles ;
Condamne la SARL ADP aux entiers frais et dépens et aux éventuels frais d'exécution.
Par déclaration formée par voie électronique le 23 mai 2019, la SARL ADP a régulièrement interjeté appel du jugement.
Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 avril 2021, la SARL ADP demande à la Cour de :
Juger irrecevables les pièces transmises par la SA Le Républicain Lorrain le 22 octobre 2020 et écarter en conséquences les pièces de la SA Le Républicain Lorrain ;
Infirmer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes de Metz le 23 avril 2019 en ce qu'il a :
. dit que le conseil est incompétent pour juger de la relation entre ADP et le RL ;
. déclaré la demande dirigée par Mme [J] [H] contre le RL recevable et fondée ;
. dit que le conseil est compétent pour juger la relation au visa de l'article L 1224-1 du code du travail ;
. dit que la demande dirigée contre la SARL ADP est recevable à ce titre ;
. dit que la SA Le Républicain Lorrain n'avait pas l'obligation de reprendre la salariée au titre de l'article L 1224-1 du code du travail ;
. dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse tant au point de vue économique que sur l'obligation de reclassement ;
. en conséquence, condamné la SARL ADP, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme [J] [H] les sommes de 3 515,00 € au titre du préavis ('), 351,00 € bruts au titre des congés payés y afférents ('), et 15 000,00 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (...);
Et statuant à nouveau :
. juger bien fondé le licenciement de Mme [J] [H] ;
. en conséquence, débouter Mme [J] [H] de l'intégralité de ses demandes formulées au titre de la rupture de son contrat de travail ;
. subsidiairement, limiter le montant des dommages et intérêts pour licenciement abusif a somme de 10 545,00 € ;
. juger que la SA Le Républicain Lorrain aurait dû reprendre le contrat de travail de Mme [J] [H] conformément aux dispositions de l'article L 1244-1 du code du travail ;
. par conséquent condamner la SA Le Républicain Lorrain à relever et garantir la SARL ADP sur l'intégralité des dommages et intérêts attribués à Mme [J] [H] ;
. en tout état de cause, condamner Mme [J] [H] au paiement de la somme de 2 500,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et la SA Le Républicain Lorrain à lui verser 2 500,00 € sur le même fondement ;
. condamner Mme [J] [H] aux entiers dépens.
Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 juin 2021, Mme [J] [H] demande à la Cour de :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné la SARL ADP à lui verser une indemnité de préavis et les congés payés afférents ;
Infirmer le jugement entrepris quant au montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a dit qu'il n'y avait pas lieu pour la SA Le Républicain Lorrain de reprendre le contrat de Mme [J] [H] ;
Statuant à nouveau,
- condamner solidairement la SARL ADP et la SA Le Républicain Lorrain à verser à Mme [J] [H] les sommes de :
. 31 365,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
. 3 000,00 € au titre des frais irrépétibles d'appel ainsi qu'aux entiers dépens ;
- condamner solidairement avec la SARL ADP la SA Le Républicain Lorrain au paiement de toute somme mise à la charge de la SARL ADP ;
Confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
Débouter la SARL ADP et la SA Le Républicain Lorrain de toute demande plus ample ou contraire.
Par ordonnance du 1er juillet 2020, le conseiller de la mise en état de la chambre sociale de la cour d'appel de Metz a déclaré irrecevables les conclusions établies à la date du 29 octobre 2019 pour le compte de la SA Le Républicain Lorrain comme n'ayant pas été notifiées par voie électronique dans le délai de l'article 909 du code de procédure civile, et a rejeté la demande aux fins de déclarer caduc l'appel interjeté par la SARL ADP.
Par ordonnance du 30 mars 2021, le conseiller de la mise en état de la chambre sociale de la cour d'appel de Metz s'est déclaré incompétent pour statuer sur l'irrecevabilité des pièces communiquées le 22 octobre 2020 par la SA Le Républicain Lorrain et a déclaré irrecevable le moyen soulevé par la SOC tirée de la caducité de l'appel.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mars 2022.
Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.
MOTIFS
Sur la recevabilité des pièces produites par la SA Le Républicain Lorrain
Aux termes de l'article 906 du code de procédure civile, les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l'avocat de chacune des parties à celui de l'autre partie ('). Les pièces communiquées et déposées au soutien des conclusions irrecevables sont elles-mêmes irrecevables.
En l'espèce, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions d'intimé de la SA Le Républicain Lorrain par décision du 1er juillet 2020, celles-ci n'ayant pas été communiquées par voie électronique dans le délai prévu à l'article 909 du code de procédure civile. Cette décision n'ayant pas été frappée de recours, il convient de constater dès lors que toutes les conclusions ultérieures établies par la SA Le Républicain Lorrain (conclusions de « rejet d'appel et appel incident » notifiées par voie électronique et datées du 12 décembre 2019) et toutes les pièces produites à l'appui de ses conclusions (pièces communiquées par voie électronique le 23 octobre 2020 et le 26 janvier 2021) sont également irrecevables.
Les pièces communiquées à hauteur d'appel par la SA Le Républicain Lorrain seront donc déclarées irrecevables.
Par ailleurs, selon le dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas devant la cour d'appel ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
En application de ces dispositions, dès lors que les conclusions de la SA Le Républicain Lorrain ont été déclarées irrecevables, celle-ci est réputée s'être appropriée les motifs du jugement.
Sur la validité du licenciement économique prononcé par la SARL ADP
Aux termes de l'article L 1233-3 du code du travail, dans sa version en vigueur au jour du licenciement litigieux, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4° A la cessation d'activité de l'entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.
En outre, l'article L 1233-4 du même code prévoit que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.
Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.
La cour rappelle que le bien fondé d'un licenciement économique s'apprécie tant pour les difficultés économiques que pour les mutations technologiques au niveau de l'entreprise si elle ne fait pas partie d'un groupe ou au niveau du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient si elle est intégrée dans un groupe.
Elle rappelle aussi qu'en ce qui concerne l'obligation de reclassement, l'employeur doit rechercher les possibilités de reclassement à la fois au sein de la société et des sociétés du groupe auquel il appartient, en ce cas parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, même si ces entreprises sont situées à l'étranger.
Dans sa lettre de licenciement datée du 19 avril 2017, la SARL ADP justifie du motif économique du licenciement de Mme [J] [H] par la crise structurelle affectant l'activité de distribution de la presse en France, affectant les marchés sur lesquels évolue la SARL ADP et le groupe MLP auquel elle appartient, mais également par les contraintes imposées au groupe MLP en termes de transfert des titres entre messageries et de contribution au redressement de la messagerie Presstalis, précarisant l'ensemble du groupe MLP qui ne dispose plus de moyens pour soutenir ses filiales. Elle ajoute que la perte de l'activité qu'elle exerçait pour la SA Le Républicain Lorrain affecte de façon importante son chiffre d'affaires global, de sorte qu'elle n'est plus en mesure de maintenir son niveau d'activité et de conserver le poste d'assistante commerciale de Mme [J] [H].
Si la SARL ADP produit dans ses pièces des éléments de nature à justifier des difficultés économiques du secteur de la distribution de presse (évolution entre 1990 et 2014 du chiffre d'affaires de la presse ; évolution du nombre de dépôts de presse entre 1987 et 2017 ; rapport du Conseil Supérieur des Méssageries de Presse du 12 novembre 2013 et décision du 28 juillet 2012; délibération du 13 septembre 2012 de l'Autorité de Régulation et de la Distribution de la Presse), elle ne justifie pas des difficultés économiques précises du groupe MLP auquel elle appartient au moment du licenciement.
Elle ne produit en effet, s'agissant du groupe MLP, qu'un courriel daté du 29 mars 2017 dans lequel le représentant du groupe MLP, consulté dans le cadre de la recherche de reclassement de Mme [H] et de 5 autres salariés, invoque une période de réorganisation importante qui engendre des suppressions de poste.
Ces informations générales ne permettent pas de déterminer les difficultés économiques du groupe MLP auquel appartient la SARL ADP, de sorte que le motif économique du licenciement de Mme [H] n'est pas suffisamment caractérisé.
Par ailleurs, et de façon surabondante, la SARL ADP ne justifie pas de recherches de reclassement au sein de la SARL ADP elle-même, seule un contact auprès du représentant du groupe MLP étant versé aux débats. Elle n'invoque et ne justifie enfin d'aucun critère établi sur l'ordre des départs, de sorte que les dispositions des articles L 1233-4 et L 1233-5 du code du travail sur l'obligation de reclassement et l'ordre des licenciements ne sont pas respectés.
Compte tenu de ces éléments et en application de l'article L 1233-2 du code du travail, le licenciement de Mme [H] doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse, et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes indemnitaires
- sur l'indemnité de préavis
Selon l'article L 1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit (') s'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.
En outre aux termes de l'article L 1234-5 du même code, lorsque le salarié n'exécute pas le préavis, il a droit, sauf s'il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. L'inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l'employeur, n'entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s'il avait accompli son travail jusqu'à l'expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.
En l'espèce, il est constant et il résulte de l'examen des bulletins de salaire de la salariée et du certificat de travail établi par l'employeur que Mme [H] bénéficie d'une ancienneté de plus de deux ans comme ayant travaillé pour la SARL ADP du 7 novembre 2012 au 20 avril 2017.
Les parties s'accordent pour dire que Mme [H] percevait en dernier lieu un salaire brut de 1757,50 €, de sorte qu'il convient de faire droit à la demande formée par la salariée en paiement de la somme de 3 515,00 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 351,00€ pour les congés payés afférents.
La décision des premiers juges sera confirmée sur ce point.
- sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Aux termes des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable à l'espèce, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, et si la réintégration n'est pas demandée, le juge octroie une indemnité au salarié, à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être inférieure au salaire des six derniers mois, si le salarié a plus de deux ans d'ancienneté et si l'entreprise compte au moins onze salariés, ce qui n'est pas contesté en l'espèce.
Au delà de ce minimum de six mois, le salarié doit justifier de la réalité de son préjudice.
En l'espèce, le licenciement de Mme [H] est dépourvu de cause réelle et sérieuse et la salariée bénéficie d'une ancienneté de plus de deux ans.
Compte tenu de son âge au moment de son licenciement (50 ans), de la situation professionnelle qu'elle a eu par la suite (chômage puis autoentreprise), de son ancienneté au sein de la SARL ADP et des circonstances de la rupture, la société sera condamnée à payer à Mme [H] une indemnité égale à 15 000,00 € mois de salaire, comme justement évaluée par les premiers juges.
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur la demande de garantie formée par la SARL ADP contre la SA Le Républicain Lorrain
Selon l'article L 1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.
Il est constant que pour qu'il y ait transfert et application des dispositions visées ci-dessus, il est nécessaire qu'il y ait d'une part une modification dans la situation juridique de l'employeur et d'autre part un transfert d'une entité économique.
En l'espèce, la SARL ADP reconnaît dans ses conclusions que le marché que lui confiait la SA Le Républicain Lorrain, dénoncé par lettre du 30 mars 2016 prenant effet au 30 mars 2017, représentait près de 39 % de son chiffre d'affaires, de sorte que la SA Le Républicain Lorrain n'était pas son seul client.
La SARL ADP ne prétend pas par ailleurs que sa structure juridique a changé du fait de la perte du marché de la SA Le Républicain Lorrain, notamment par fusion, transformation, vente, ou encore procédure collective.
Aucun élément ne démontre en outre que l'activité de distribution des journaux du Républicain Lorrain a été conservée par la SA Le Républicain Lorrain et n'a pas fait l'objet de la conclusion d'un nouveau marché avec une autre société de distribution.
Dès lors, le transfert de l'entité économique n'étant pas démontré et la perte d'un marché n'étant pas suffisante pour emporter le transfert des contrats de travail, la SA Le Républicain Lorrain n'était pas tenue de reprendre les contrats de travail des six salariés affectés par la SARL ADP à la distribution du journal Le Républicain Lorrain, dont faisait partie Mme [H].
Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point en ce qu'il a débouté la SARL ADP de sa demande de garantie formée contre la SA Le Républicain Lorrain.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le jugement entrepris sera confirmé sur ses dispositions sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.
La SARL ADP étant la seule partie perdante à l'instance, elle sera condamnée aux dépens d'appel, et les demandes formées contre la SA Le Républicain Lorrain au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure à hauteur d'appel seront rejetées.
La SARL ADP sera également condamnée à verser à Mme [H] la somme de 2 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant contradictoirement, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Déclare irrecevables les pièces produites par la SA Le Républicain Lorrain dans le cadre de la procédure d'appel ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL ADP, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Mme [J] [H] la somme de 2 000,00 € en application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel,
Condamne la SARL ADP aux dépens d'appel.
La GreffièreP/ La Présidente régulièrement empêchée
La Conseillère