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14/06/2022 | FRANCE | N°19/01311

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 14 juin 2022, 19/01311


Arrêt n° 22/00310



14 juin 2022

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N° RG 19/01311 -

N° Portalis DBVS-V-B7D-FBCL

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

15 avril 2019

F 18/00072

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1







ARRÊT DU



Quatorze juin deux mille vingt deux







APPELANTE :


>SAS ESKA [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

Représentée par Me Véronique HEINRICH, avocat postulant au barreau de METZ et Me Marine CHOLLET, avocat plaidant au barreau de NANCY





I...

Arrêt n° 22/00310

14 juin 2022

---------------------

N° RG 19/01311 -

N° Portalis DBVS-V-B7D-FBCL

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de THIONVILLE

15 avril 2019

F 18/00072

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Quatorze juin deux mille vingt deux

APPELANTE :

SAS ESKA [Localité 4] prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

Représentée par Me Véronique HEINRICH, avocat postulant au barreau de METZ et Me Marine CHOLLET, avocat plaidant au barreau de NANCY

INTIMÉ :

M. [R] [T]

[Adresse 1]

Représenté par Me Christelle MERLL, avocat postulant au barreau de METZ et Me Marcel-Aimé VEINAND, avocat plaidant au barreau de THIONVILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 février 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Mme Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Anne FABERT, Conseillère, substituant la présidente de chambre régulièrement empêchée et par Mme Hélène BAJEUX, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS

M. [R] [T] a été embauché à compter du 1er février 1999, par contrat à durée indéterminée, par la société CFF Sicafrance en qualité de chauffeur super poids lourd.

Ce contrat a été repris par la SAS ESKA, exerçant à l'enseigne Derichebourg Environnment, à compter du 1er octobre 2001.

Il percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle brute de 2 150 euros, hors primes et 13ème mois, la moyenne des salaires de l'année 2017 s'établissant à 2 759,16 euros bruts.

Un avertissement a été délivré au salarié le 8 avril 2015 pour quatre infractions au temps de conduite et de repos.

Le salarié a fait l'objet d'un nouvel avertissement le 28 novembre 2017 car il ne portait pas ses vêtements de travail sur un chantier.

Le 29 novembre 2017, M. [T] soutient avoir remis à son supérieur hiérarchique un certificat médical indiquant que son état de santé nécessitait l'exemption de porter un uniforme professionnel de couleur rouge, mais ce fait est formellement contesté par l'employeur.

Le 10 janvier 2018, la SAS ESKA a envoyé à M. [T] une mise en demeure de porter ses vêtements de travail.

M. [T] a été convoqué à un entretien préalable le 16 janvier 2018 et mis à pied à titre conservatoire et il a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 30 janvier 2018 pour refus réitéré de porter ses vêtements de travail.

Par acte introductif entré au greffe le 9 avril 2018, M. [T] a saisi le conseil de prud'hommes de Thionville pour contester le bien fondé de ce licenciement et demander la condamnation de la SAS ESKA, outre aux dépens de l'instance, à lui payer les sommes de :

- 1380 euros au titre de la mise à pied conservatoire injustifiée et 138 euros pour les congés payés afférents,

- 4123,38 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 412,33 euros pour les congés payés afférents,

- 21 390 euros net au titre de l'indemnité de licenciement,

- 66 240 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 15 avril 2019, le conseil de prud'hommes a fait droit à la demande, mais en réduisant l'indemnité légale de licenciement et les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse aux montants nets respectifs de 17617,10 euros et 32031,10 euros.

La SAS ESKA a régulièrement interjeté appel le 27 mai 2019 et, par ses dernières conclusions entrées au RPVA le 11 octobre 2021, elle demande à la Cour de dire que le licenciement pour faute grave de M. [R] [T] était bien fondé, que celui-ci soit débouté de toutes ses prétentions et condamné aux dépens.

L'appelante fait essentiellement valoir que malgré un avertissement, puis une mise en demeure, M. [T] a refusé de porter les vêtements de travail de couleur rouge imposés par plusieurs documents de sécurité, alors que l'employeur est en droit, aux termes d'une abondante jurisprudence, d'imposer une telle tenue si elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché, tout manquement à cette obligation relevant de l'insubordination, donc de la faute grave ; que le salarié a été largement informé de cette obligation, à laquelle il n'a néanmoins pas déféré.

Elle conteste avoir eu connaissance du certificat médical produit par l'intimé, dont elle relève le caractère de complaisance, faisant observer que M. [T] aurait le cas échéant de saisir le médecin du travail pour avis.

Elle conteste de même divers arguments avancés par le salarié, dont l'éventuelle prescription des faits, et commente les photographies et témoignages produits par lui.

Enfin, elle réfute toute volonté de se débarrasser de M. [T] à moindre coût et explique qu'il a été remplacé à son poste, comme elle en justifie.

Par conclusions en date du 6 janvier 2020, M. [T] demande la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions et que la SAS ESKA soit condamnée aux dépens d'appel et à lui payer une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le salarié explique que durant 19 ans il a effectué la même tournée de l'établissement de [Localité 4] à l'usine TRW-ZF de [Localité 3], où il allait récupérer des chutes ou copeaux d'usinage et que le seul reproche qui lui a été fait était une coupure trop courte, de sorte qu'il estime que son licenciement repose sur un faux prétexte.

Il précise que l'employeur a toujours toléré qu'il ne porte pas la tenue de travail rouge, une couleur qu'il a en aversion, et cite des jurisprudences qui ont dans ce cas estimé qu'il n'y avait pas faute grave. Il estime aussi que les faits sont prescrits puisque l'employeur avait de longue date connaissance des faits fautifs.

Il fait encore valoir qu'il a toujours porté les équipements de protection conformément aux règles applicables dans l'entreprise, qui imposent une tenue de travail mais en aucun cas de couleur rouge, ce dont attestent plusieurs collègues de travail, dont certains qu'il portait l'ancienne tenue de travail de couleur bleue, précisant qu'il produit des photographies montrant que la société n'est pas aussi exigeante avec les autres prestataires et collègues de travail, qui ne portent pas tous les équipements de sécurité.

Il considère aussi n'avoir pas été remplacé à son poste, le site de [Localité 4] ne comportant plus que deux chauffeurs au lieu de trois et rappelle que la couleur rouge est une question d'image, le logo de la société ayant cette couleur, et non de sécurité et qu'il avait remis un certificat médical qui l'exemptait du port de cette couleur.

M. [T] indique enfin qu'à 53 ans il n'a pas retrouvé d'emploi stable en contrat à durée indéterminée pour un même niveau de rémunération.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 octobre 2021.

Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la prescription des faits fautifs

Aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail « aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. »

Du fait de l'emploi des termes « à lui seul » une jurisprudence constante estime que cet article ne s'oppose pas à la prise en considération d'un fait antérieur à deux mois si le salarié a renouvelé ou poursuivi un comportement identique durant le délai non prescrit.

En l'espèce, M. [T] reconnaît qu'il ne portait pas habituellement les vêtements de travail de couleur rouge fournis par la société et il ne conteste pas qu'il n'a pas déféré à l'injonction de son employeur d'avoir à les mettre après l'avertissement du 28 novembre 2017 et la mise en demeure du 10 janvier 2018, de sorte qu'il y eu poursuite du fait fautif, à le supposer comme tel, et même réitération nonobstant l'ordre de l'employeur et ce jusqu'à l'introduction de la procédure de licenciement le 16 janvier 2018.

La prescription de deux mois n'a donc pas pu jouer.

Sur le bien fondé du licenciement

La lettre de licenciement de M. [T] pour faute grave énonce que :

« Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements qui nous ont amenés à envisager votre licenciement. Les faits qui vous sont reprochés sont les suivants :

Depuis un certain temps, vous avez été régulièrement rappelé à l'ordre verbalement, car vous ne portiez pas vos vêtements de travail.

Le 28 novembre 2017, un avertissement vous était notifié puisque vous persistiez à ne pas respecter cette consigne de sécurité, vous rappelant qu'il s'agissait d'une obligation issue du Règlement Intérieur.

Vous n'avez tenu aucun compte de cette sanction, nous obligeant à vous mettre en demeure de porter ces vêtements de travail à compter du 15 janvier 2018, sous peine de sanction lourde pouvant aller jusqu'au licenciement.

Vous avez maintenu votre position, ce que nous estimons être une réelle provocation.
Vous comprendrez aisément que nous ne pouvons pas admettre une telle attitude au sein d'une entreprise où tous les EPI sont obligatoire de la prise à la fin de poste.

Dans le cadre de la procédure, nous vous avons convoqué par LRAR à un entretien préalable le 25 janvier 2018 avec votre supérieur hiérarchique.

Lors de cet entretien, pour lequel vous n'avez pas souhaité être assisté, vous avez encore refusé de porter vos vêtements de travail, sans pour autant pouvoir donner des explications recevables.

Nous nous voyons donc dans l'obligation de vous licencier pour faute grave. »

La Cour rappelle que lorsque l'employeur invoque une faute grave du salarié pour prononcer un licenciement avec effet immédiat, il lui incombe d'apporter la preuve des griefs avancés dans les termes énoncés par la lettre de licenciement, à charge ensuite pour le juge d'apprécier le caractère réel et sérieux de ces griefs et de rechercher s'ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, si la SAS ESKA ne justifie pas des rappels à l'ordre qui auraient été faits verbalement au salarié, elle produit par contre :

- l'avertissement du 28 novembre 2017 qui mentionne que M. [T] a été surpris à plusieurs reprises sur le chantier et au volant de son camion par son supérieur hiérarchique alors qu'il ne portait pas ses vêtements de travail et rappelait au salarié la nécessité de respecter les consignes de sécurité, dont l'article 14.2 du règlement intérieur, qui impose de porter impérativement les équipements de protection individuelle sur les sites ;

- la mise en demeure du 10 janvier 2018 relevant la persistance du salarié à refuser de mettre ses vêtements de travail, malgré l'avertissement précédent, et faisant mention d'une mise en demeure de porter sans faute ces vêtements et tous les EPI obligatoires à compter du lundi 15 janvier 2018, sous peine d'une mesure disciplinaire allant jusqu'à un licenciement pour faute grave après l'indication que « cette attitude frondeuse est juste intolérable » (en gras dans le texte).

La SAS ESKA justifie aussi des différents documents et consignes de sécurité dont a eu connaissance le salarié, selon mentions contresignées par lui, notamment lors d'un entretien avec le chef de chantier le 22 octobre 2012 lors duquel il s'est vu remettre le règlement intérieur, le livret d'appel sécurité, et des fiches de sécurité circulation et déplacement sur chantiers, conduite poids lourds et manutention, a attesté avoir suivi la formation sécurité et s'est vu rappeler les EPI mis à sa disposition : casque, chaussures de sécurité, gants, tenue de travail en rapport avec le poste et gilet et tee-shirt fluo :

- le livret d'accueil sécurité, qui comporte une mention « pour travailler en sécurité, portez vos équipements de protection individuelle » , qui présente sous forme de dessins tous ces équipements, dont la tenue de travail de couleur rouge portant des bandes réfléchissantes de couleur grise,

- la fiche « circulation et déplacement sur chantier » (l'exemplaire produit a été signé par M. [T] le 30 mai 2017) qui énumère les risques, moyens de prévention et consignes à tenir et notamment pour le risque « heurt ou écrasement par engins de manutention ou véhicules » comme moyens de prévention :

« Ne pas circuler ou travailler dans l'aire d'évolution des engins. Le cas échéant, se signaler impérativement. Port de la tenue de travail rouge et du gilet réflectorisant (fluorescent). [mis en gras par la Cour] Respect et connaissance du plan de circulation. »

le port obligatoire des EPI de signalisation étant aussi rappelé dans les consignes ;

le règlement intérieur de la société dont l'article 14-2 a été cité lors de l'avertissement, lequel rajoute que « le personnel est tenu d'utiliser les vêtements de travail qui lui ont été remis ».

Il résulte clairement de ces documents que M. [T] ne pouvait ignorer qu'il était tenu de porter tous les équipements individuels de protection, dont une tenue de travail comportant un pantalon et une veste de couleur rouge à bandes réfléchissantes (ou un tee-shirt de la même couleur l'été comme le montrent les photos de ses collègues qu'il produit lui-même aux débats), cette tenue étant prévue, au même titre que le gilet jaune fluo, pour que les employés officiant à proximité des aires de circulation des camions et autres engins soient bien visibles et ne puissent être heurtés ou écrasés.

L'employeur étant aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité qui est de moyens renforcés, l'obligation au port de cette tenue ne peut être considérée comme une atteinte à la liberté du salarié, étant parfaitement justifiée et proportionnée au but recherché, lequel salarié ne peut donc refuser de s'y soumettre, a fortiori comme en l'espèce pour une simple question de couleur.

Cette question de la couleur rouge est en l'occurrence un argument spécieux, car l'intimé ne pouvait ignorer que la tenue remise par l'employeur avait cette couleur depuis des années, peu important s'il s'agit aussi de la couleur du logo de la société, et que donc l'obligation portait sur des vêtements rouges, spécialement munis de bandes réfléchissantes, comme l'indiquaient au surplus expressément le livret d'accueil sous forme d'un dessin et la fiche de sécurité circulation et déplacement en toutes lettres.

Le certificat médical produit par M. [T], établi par son médecin traitant et indiquant que son état de santé nécessite l'exemption de porter un uniforme professionnel de couleur rouge, dont il n'est pas avéré qu'il ait été remis à l'employeur, qui le conteste fermement, et qui paraît de pure complaisance car délivré le lendemain de l'avertissement, ne saurait par ailleurs excuser le refus du salarié.

Il est relevé que M. [T] n'a pas contesté l'avertissement du 28 novembre 2017, ni réagi à la mise en demeure du 10 janvier 2018, ne fournissant aucune explication écrite ou même apparemment verbale à son comportement et, s'il estimait avoir une raison médicale à faire valoir, c'est à lui qu'il appartenait de saisir le médecin du travail pour la faire constater, seul ce dernier ayant le pouvoir de se prononcer sur la question et d'imposer éventuellement à l'employeur une restriction dans le sens souhaité ' dispense de la tenue ou changement de couleur.

Ni les photographies, même commentées par lui, que l'intimé produit, dont on ne sait pas quand elles ont été prises n'étant pas datées, montrant pour certaines des personnes en jeans ou sans gilet jaune et/ou autres équipements de protection, sans preuve qu'il s'agit de salariés de la société ESKA en train de travailler, ni les attestations d'anciens collègues de travail, qui témoignent que l'intimé portait ses EPI, à l'exception des vêtements de travail, ou qu'il ne mettait ces derniers que du temps où ils étaient de couleur bleue, l'un précisant au sigle de CFF, mais sans donner plus de précisions, notamment quant à la période concernée ou la date où la couleur rouge aurait été imposée, ne sauraient non plus excuser le refus réitéré du salarié de se soumettre à la légitime demande de l'employeur ' même faite tardivement en 2017, puisque M. [T] connaissait au moins depuis fin 2012 les consignes de sécurité applicables dans l'entreprise, dont celle du port obligatoire de la tenue de travail, qui était déjà rouge à cette date.

Enfin aucun élément du dossier ne permet d'affirmer que l'employeur aurait voulu licencier à peu de frais un salarié avec une grande ancienneté et que M. [T] n'aurait pas été remplacé à son poste.

Au regard de tous ces éléments, la Cour estime que la SAS ESKA avait un motif tant réel que sérieux de licencier M. [T], à partir du moment où elle l'a averti, puis mis en demeure de porter ses vêtements de travail, imposés dans un but de sécurité, et qu'il n'a pas obtempéré, ni fourni de justification valable à son refus.

Par contre, au regard de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise, sans incident disciplinaire autre qu'un seul avertissement pour des faits différents, du fait que l'employeur a, comme l'indiquent les témoignages produits, sans être contredits par l'appelante, toléré durant plusieurs années que M. [T] ne respecte pas cette seule obligation du port de la tenue fournie, l'intéressé ayant néanmoins fait usage des autres équipements, dont son gilet fluorescent, la Cour considère qu'il n'était pas justifié de rompre à effet immédiat le contrat de travail et donc qu'il n'y a pas lieu de retenir la faute grave.

Sur les conséquences financières

La SAS ESKA ne conteste pas les montants accordés au salarié au titre du salaire retenu durant la mise à pied, de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité légale de licenciement, toutes créances dues au salarié à défaut de faute grave, de sorte que le jugement sera confirmé sur ces montants.

La Cour ayant par contre retenu la cause réelle et sérieuse, M. [T] ne peut prétendre à des dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail et le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur le surplus

M. [T], qui succombe pour partie, supportera les dépens de première instance et d'appel et il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour ces deux instances.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Ecarte la fin de non recevoir tirée de la prescription des faits fautifs ;

Dit que le licenciement de M. [R] [T] repose sur une cause réelle et sérieuse, mais pas sur une faute grave ;

Confirme le jugement entrepris sur les montants accordés à M. [T] au titre du salaire retenu durant la mise à pied avec les congés payés afférents, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents et de l'indemnité légale de licenciement ;

Infirme ce jugement pour le surplus et, statuant à nouveau,

Déboute M. [R] [T] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne M. [R] [T] aux dépens de première instance et d'appel ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière,P/La Présidente régulièrement empêchée,

La Conseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 19/01311
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;19.01311 ?
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