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14/06/2022 | FRANCE | N°18/03299

France | France, Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 14 juin 2022, 18/03299


Arrêt n° 22/00322



14 juin 2022

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N° RG 18/03299 -

N° Portalis DBVS-V-B7C-E5MZ

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Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

04 décembre 2018

17/00603

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE METZ



Chambre Sociale-Section 1





ARRÊT DU



Quatorze juin deux mille vingt deux







APPELANTE :



S.A.R.L. DO

CTE GESTIO dite DG HOT POT prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Christine SALANAVE, avocat au barreau de METZ, avocat postulant et par Me Laurence GUETTAF-PECHEN...

Arrêt n° 22/00322

14 juin 2022

---------------------

N° RG 18/03299 -

N° Portalis DBVS-V-B7C-E5MZ

-------------------------

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de METZ

04 décembre 2018

17/00603

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Quatorze juin deux mille vingt deux

APPELANTE :

S.A.R.L. DOCTE GESTIO dite DG HOT POT prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Christine SALANAVE, avocat au barreau de METZ, avocat postulant et par Me Laurence GUETTAF-PECHENET, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant

INTIMÉE :

Mme [F] [B] épouse [H]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe ZENTNER, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 février 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Mme Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne FABERT, Conseillère, substituant la Présidente de Chambre régulièrement empêchée et par Mme Hélène BAJEUX, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

Mme [F] [B], épouse [H], a été embauchée à temps partiel à compter du 24 juin 2013 en qualité d'employée de service au sein de l'EHPAD de [5] de [Localité 6], d'abord par la société Sodexo selon divers contrats à durée déterminée puis, suite à un changement de prestataire, par la SARL Docte Gestio dite DG Hot Pot, avec laquelle elle a conclu un contrat à durée indéterminée à effet du 1er janvier 2015. Son dernier salaire mensuel était de 1 255,97 euros bruts, primes comprises, pour 28 heures de travail hebdomadaires.

La convention collective applicable est celle du personnel des entreprises de restauration de collectivités.

Suite à une réunion de service du 6 janvier 2016, Mme [H] a été mise à pied à titre conservatoire.

Elle a été convoquée le 18 janvier 2015 à un entretien préalable fixé au 27 janvier 2016, puis elle a été licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 février 2016.

Le 31 mai 2017, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Metz aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et demandert la condamnation de la SARL DG Hot Pot, outre aux dépens de l'instance, à lui payer les sommes de :

- 2 947,68 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 294,77 euros pour les congés payés afférents,

- 3 861,46 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

- 1 220,23 euros de rappel de salaire pour la période de mise à pied,

- 26 529,12 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

- 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive dans la remise des documents de fin de contrat,

- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 4 décembre 2018, le conseil de prud'hommes de Metz a fait droit aux demandes de la salariée, sauf celles au titre du préjudice moral et de la résistance abusive, en fixant à 3 086,36 euros le montant du au titre de l'indemnité légale de licenciement et à 13 264,56 euros le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La SARL DG Hot Pot a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 20 décembre 2018 et, par dernières conclusions datées du 1er février 2021, elle demande l'infirmation de ce jugement sur ses dispositions en faveur de la salariée, que le licenciement de Mme [H] soit dit fondé et que la salariée soit déboutée de l'intégralité de ses demandes et condamnée, outre aux dépens de l'instance, à lui payer une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions en date du 2 février 2021, Mme [F] [B], épouse [H] demande la confirmation du jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat et au titre de la mise à pied injustifiée et elle forme un appel incident pour qu'il soit ajouté à ce jugement la condamnation de la SARL DG Hot Pot, outre aux dépens de l'instance, à lui payer les sommes de :

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour remise tardive des documents obligatoires suite à rupture du contrat de travail ;

- 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la mise à pied injustifiée,

- 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif,

- 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 mai 2021.

Il convient en application de l'article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement de Mme [H] en date du 2 février 2016, rédigée par Mme [A] [K], gérante de la SARL DG Hot Pot, énonce que :

« Nous faisons suite à l'entretien préalable du mercredi 27 janvier 2016 et sommes contraints de vous notifier votre licenciement pour faute grave, compte tenu des éléments suivants :

J'ai été alertée par M. [W] [S], votre supérieur hiérarchique, chef de cuisine, sur le fait que :

vous déstabilisez l'équipe,

vous mettez en péril son bon fonctionnement par le refus d'exécuter les ordres donnés,

par les bruits que vous colportez à l'encontre de votre supérieur,

il y a refus de préparer les plats,

refus d'assumer le nettoyage demandé,

mise en cause du chef de cuisine vers les tiers quant au refus de faire,

tensions au sein de l'équipe,

il vous en a plusieurs fois avertie et se trouve actuellement dans une impasse.

J'ai été alertée par la directrice de l'Ehpad, Mme [V] [G], qui n'a pu que constater votre mauvaise volonté à servir les résidents et à leur donner les compléments alimentaires demandés en faisant croire que les ordres viennent de votre supérieur. Mme [G] parle elle aussi de déstabilisation au niveau de l'Ehpad dans la mesure où vous colportez des bruits sur votre supérieur auprès des personnes de la maison de retraite. Il en est ainsi pour M. [S], il en a été ainsi pour le précédent chef de cuisine, M. [M], cela va jusqu'à inquiéter les résidents qui vous entendent.

Tous ces comportements dangereux ont entraîné votre mise à pied à titre conservatoire. (...) »

La Cour rappelle que lorsque l'employeur invoque une faute grave du salarié pour prononcer un licenciement avec effet immédiat, il lui incombe d'apporter la preuve des griefs avancés dans les termes énoncés par la lettre de licenciement, à charge ensuite pour le juge d'apprécier le caractère réel et sérieux de ces griefs et de rechercher s'ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Il est constaté en l'espèce que la lettre de licenciement ne cite aucun fait précis, daté et circonstancié, mais fait seulement état de griefs en des termes généraux, sans citer d'exemple, qui auraient été émis par deux personnes, M. [S], chef de cuisine et supérieur hiérarchique de Mme [H] et Mme [G], directrice de l'Ehpad.

Pour justifier de ces griefs, l'appelante produit :

- un mail de Mme [G] en date du 21 juin 2015 en réponse à une demande de Mme [K] pour savoir ce qui se serait passé entre les deux personnes de Hot Pot (outre un cuisinier, le service géré par Hot Pot ne comprenait alors que deux employées de service, Mme [F] [H] et Mme [D] [T]) et le cuisinier (selon les conclusions de l'appelante, il s'agissait de M. [O] [C], qui a démissionné en période d'essai, cuisinier embauché en remplacement de M. [M], ce dernier licencié pour faute grave suite au signalement par Mme [H] de problèmes d'hygiène au sein de la cuisine ' il a notamment servi de la viande déjà cuite congelée puis décongelée -, lui même ensuite remplacé par M. [S]), qui indique :

« Je ne sais pas exactement ce qu'il s'est passé entre eux. Il apparaît qu'elles n'ont pas d'esprit d'équipe. (...) De même, [F] aurait été directive avec [O] »

Mme [G] évoque aussi des difficultés relationnelles entre [F], [D] et l'équipe de [5], mais sans plus de précision, puis émet le v'u que cela se passera mieux avec M. [S].

Ce mail, outre qu'il est ancien au regard de la date du licenciement, ne peut être retenu comme preuve des griefs dès lors que, outre le fait que Mme [G] ne parle qu'au conditionnel, la mésentente rapportée ne concernait pas M. [S] ou M. [M], seules « victimes » visées par la lettre de licenciement, laquelle ne reproche pas non plus à Mme [H] d'avoir eu des difficultés relationnelles avec le personnel de l'Ehpad, mais seulement d'avoir colportée des « bruits » sur M. [S].

- le témoignage sous forme d'un courrier daté du 15 janvier 2018, émanant de Mme [Z] [E], épouse [P], qui indique avoir fait un remplacement de plusieurs semaines au sein de l'Ehpad au printemps 2015 suite au départ de M.[M] et au moment de l'intégration de M. [C], qui accuse Mme [H] de lui avoir parlé de façon agressive et peu agréable, puis d'avoir critiqué sans cesse M.[C] dont elle n'aimait pas la méthode de travail, avant d'indiquer qu'elle « pense » que Mme [H] n'avait pas l'esprit d'équipe, aimait mettre la zizanie dans l'équipe, allait se plaindre à l'équipe AMAPA (l'Ehpad est géré par l'Association qui porte ce nom) ou intervenait auprès de la direction alors que ce n'était pas son rôle.

Ce témoignage n'est pas plus probant dans la mesure où il évoque des faits anciens, totalement imprécis et pas davantage évoqués par la lettre de licenciement, outre que le témoin fait plus état d'un ressenti subjectif que de faits concrets.

- un mail de Mme [G] à Mme [K] en date du 4 janvier 2016, qui évoque « une situation conflictuelle grandissante en cuisine », une mésentente entre M. [S] et les aides de cuisine, qui « dépasse l'entendement», surtout avec Mme [H], « qui refuse d'agir en l'absence du chef ». Elle précise que l'équipe de [5] se plaint d'être prise à partie et d'entrer en cuisine « au milieu des cris », ajoutant que « [W] [S] refuse de travailler avec ses aides »

Mme [G] cite un fait du dimanche 27/12 où Mme [H] était seule en cuisine et a refusé de servir de la sauce au motif que le chef ne l'avait pas préparée, M. [S] ayant au contraire indiqué avoir délégué cette tâche à Mme [H], afin de ne pas faire tomber la mousseline. Elle précise que sur insistance du personnel, Mme [H] a servi un bol de mayonnaise. Elle critique aussi le fait que Mme [H] n'a servi que trois nuggets et trois asperges par assiette, ce qui ne ne respecterait pas les quantités à servir, mais parle aussi d'une « repasse » qualifiée de « bondée ». De même elle évoque des tartes au chocolat empilées sur le chariot de dessert (elle indique joindre des photos, mais celles-ci ne sont pas produites) et une réponse de Mme [H] « c'est le chef ». Enfin, elle fustige le fait que Mme [H] a servi la nourriture sans porter de gants, ce qu'elle estimé contraire aux règles d'hygiène, ajoutant « je n'ose même pas vous décrire l'état de ses mains », avant de conclure son mail en disant qu'elle est satisfaite des prestations culinaires de M. [S] et serait désolée s'il devait partir, parlant aussi d'un d'un regrettable jeu de pouvoir qui gâche la prestation et d'une situation plus sereine lors de l'absence de Mme [H].

- une attestation de témoin rédigée par Mme [G] en juin 2017, qui indique :

* avoir constaté que Mme [F] [H] perturbait le fonctionnement du service hôtelier de la résidence, citant un refus de cette dernière de « servir les résidents qui demandaient un agrément de leur plat (mayonnaise...) » ,

* que Mme [H] « a interpellé des résidents, famille de résident ou membres du personnel afin de faire part d'information interne à la cuisine, créant un mouvement de ''panique'' chez les résidents »

* que le service n'a pas été « respectueux »,à savoir « nous avons constaté que des tartes étaient empilées, les fromages empilés ou les plats mal présentés »

* avoir demandé à Mme [K] de veiller à régulariser la situation pour rendre sereines les relations entre la cuisine et l'EHPAD pour la satisfaction des résidents.

- une attestation de M. [S], en partie illisible, daté de ' 2017, qui indique avoir travaillé durant un an avec Mme [H] et avoir constaté à plusieurs reprises des refus d'exécuter les instructions et « des contradictions constantes », citant pour exemple la date d'arrivée des fiches de salaire '''.

M. [S] évoque aussi la vente par Mme [H] aux salariés de la maison de retraite de produits fabriqués par son mari et des conflits avec le personnel de service lors du service au restaurant « pour le dressage des plats et sa façon de servir qui n'est pas conforme aux normes d'hygiène. »

- un document manuscrit daté de janvier 2016, intitulé « Problèmes ''d'entente'' : [F] », rédigé apparemment par M. [S], mais qui n'a pas valeur d'attestation en bonne et due forme, qui mentionne successivement le fait que Mme [H] ne veut pas « être au chaud », avec pour exemple qu'elle fait semblant de ne pas savoir faire les mixés à l'identique du plat, le fait qu'elle se sert dans les cadeaux offerts par Sodexo, avec pour exemple le beaujolais nouveau, la vaisselle du soir souvent sale, le refus des tâches de nettoyage l'après midi ou un nettoyage mal fait sous prétexte qu'il y a trop de travail, le refus de goûter les plats pour vérifier l'assaisonnement, le fait de ne pas s'impliquer pour faire plaisir aux résidents, le fait qu'elle lui ordonne d'envoyer les plannings le 15 du mois et qu'elle vient toujours se plaindre et entraîne [D] dans sa rébellion.

En considération de ces quatre derniers éléments, la Cour relève qu'il y est fait état de nombreux faits ne correspondant pas à des griefs retenus par la lettre de licenciement ou cités par elle (notamment le non respect des règles d'hygiène par la salariée), que le mail et le témoignage de Mme [G] ne sont directs et précis que sur le seul fait du 27 décembre, mais particulièrement vagues pour le surplus notamment sur les supposées informations colportées par Mme [H] qui auraient créées une « panique » ( ! ) chez les résidents ou encore la mésentente qui régnerait au sein de la cuisine, dont il n'apparaît pas que la directrice a été le témoin direct, alors que paradoxalement elle a aussi indiqué dans son mail que M. [S] refusait de travailler avec ses aides, enfin que le témoignage de M. [S], pour celui donné en bonne et due forme, est lui aussi totalement imprécis, s'agissant du conflit qui aurait existé entre lui et Mme [H], la seule référence à des refus d'exécuter les instructions à plusieurs reprises, sans qu'aucun fait concret ne soit évoqué, plus accessoirement d'un conflit avec le personnel de service sur le dressage des plats, étant notoirement insuffisante à caractériser la déstabilisation ou la mise en péril de l'équipe, le refus de préparer les plats, d'assumer le nettoyage demandé ou l'imputation à Mme [H] seule des tensions au sein de l'équipe.

Le seul reproche un tant soit peu concret et circonstancié établi par ces pièces à l'encontre de l'intimée est celui de ne pas avoir préparé une sauce, remplacée par de la mayonnaise, le 27 décembre 2015 ' un fait que ne cite pas M. [S], mais uniquement Mme [G], qui parle aussi d'aliments empilés et de portions mal servies, soit un grief ne correspondant pas vraiment à celui visé par la lettre de licenciement d'avoir mis de la mauvaise volonté à servir des résidents ou refusé de leur donner des « compléments alimentaires », a fortiori en faisant croire que l'ordre venait de M. [S], son supérieur.

Les faits ainsi évoqués caractérisent davantage une insuffisance professionnelle qu'un comportement fautif, notamment une insubordination de la salariée ou une mauvaise volonté délibérée à exécuter ses tâches.

Mme [H], qui conteste formellement les faits qui lui sont reprochés, fait justement valoir que les fautes, non datées, ce qui les rend invérifiables, sont tant vagues et imprécises que non prouvées et que l'incident du 27 décembre 2015, qui ne repose que sur les dires de Mme [G], n'a pas été cité dans la lettre de licenciement.

Il est encore relevé qu'il n'est justifié par l'appelante d'aucun avertissement qui aurait été délivré à la salariée, qui produit de son côté les témoignages de M. [L] [I], ancien chef de cuisine de juin 2013 à juillet 2014, et de Mme [D] [T], sa collègue, qui attestent le premier d'une bonne entente en cuisine durant sa présence, la seconde du fait que Mme [H] n'a jamais refusé d'exécuter un ordre de son supérieur, ni dénigré celui-ci, le seul désaccord dont elle a été témoin portant sur le fait de servir des denrées périmées aux résidents.

En définitive, il y a lieu de constater que les griefs ne sont pas établis dans les termes cités par la lettre de licenciement, de sorte qu'ils ne peuvent être qualifiés ni de réels, ni de sérieux, encore moins fonder une faute grave.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé pour avoir dit que le licenciement de Mme [F] [B], épouse [H], était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes indemnitaires

La SARL Docte Gestio DG Hot Pot conteste les demandes indemnitaires de Mme [H] fondées sur une ancienneté de 2,62 années, estimant qu'il ne faudrait tenir compte que de l'ancienneté acquise au sein de la société à compter du 1er janvier 2015 et non des contrats antérieurs avec Sodexo, au motif que Mme [H] n'aurait pas fait partie des salariés transférés par cette dernière puisqu'elle remplaçait en contrat à durée déterminée une autre salariée.

Cependant, il ressort des contrats à durée déterminée conclus par Mme [H] qu'à compter du 24 juin 2013, elle a occupé le même poste d'aide de cuisine au sein de l'Ehpad et qu'à compter du 27 juillet 2013, elle a remplacé en continu la même salariée, Mme [Y], aide de cuisine, en absence pour maladie professionnelle et il n'est pas avéré que le dernier contrat, conclu pour un remplacement à compter du 3 mars 2014 pour une durée minimale de un mois, mais en fait avec pour terme la disparition de son objet, avait pris fin au moment de la passation du nouveau marché.

Aux dires mêmes de l'appelante, elle n'employait que deux aides de cuisine, Mme [H] et Mme [T], et elle ne justifie pas, ni que Sodexo lui aurait indiqué que Mme [H] ne faisait pas partie des travailleurs à reprendre, ni que la salariée remplacée en aurait fait partie et que son absence aurait cessé au moment de la signature du contrat à durée indéterminée.

Il est relevé par ailleurs que les bulletins de salaire émis par DG Hot Pot à compter de l'embauche de Mme [H] font tous état d'une ancienneté de cette dernière au 03/03/2014, ce qui indique a contrario une reprise du dernier contrat avec Sodexo.

Il sera dès lors tenu compte de l'entière ancienneté de Mme [H] dans le poste, étant rappelé que le préavis est fixé en tenant compte, aux termes de l'article L. 1234-1 du code du travail, d'une ancienneté de « services continus » chez le même employeur, sans distinction en cas de successions de contrat ou de contrats de nature différente, de même que l'article L. 1234-9 sur l'indemnité légale de licenciement parle d'ancienneté « ininterrompue » chez le même employeur.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur les montants alloués à Mme [H] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité légale de licenciement telle que recalculée par les premiers juges.

Il sera aussi confirmé s'agissant du salaire indûment retenu par l'employeur durant la mise à pied de la salariée, sans qu'il n'y ait lieu d'accorder des dommages et intérêts en sus à ce titre.

S'agissant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme [H] peut prétendre, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au jour du licenciement de la salariée, à une indemnité qui ne soit pas inférieure au salaire des six derniers mois.

Pour prétendre à un montant plus important, elle doit justifier de la réalité de son préjudice, or elle ne produit pas d'attestation Pôle Emploi pour justifier que, comme elle le prétend, elle n'aurait pas retrouvé d'emploi, mais seulement une convocation à un premier entretien.

Le montant des dommages et intérêts qui lui sera alloué sera donc fixé à 9 000 euros, le jugement étant amendé sur ce point.

Ce montant indemnise toutes les conséquences dommageables du licenciement, observation étant faite que Mme [H] n'a pas interjeté appel incident s'agissant du rejet par les premiers juges de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct, qui est définitif.

En application de l'article L 1235-4 du code du travail l'employeur sera tenu de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement jusqu'au jour du jugement, dans la limite de six mois de ces indemnités, le jugement étant complété sur ce point.

Sur le surplus

Même si Mme [H] justifie qu'elle a du adresser deux courriers à son employeur courant février 2016 pour réclamer l'envoi des documents de fin de contrat et qu'elle s'est adressée à la DIRECCTE aux mêmes fins, il s'avère que ces documents lui sont parvenus fin février 2016, soit dans le mois de son licenciement et elle ne justifie d'aucun préjudice particulier subi du fait de ce léger retard, rappel étant fait au surplus que ces documents sont quérables et non portables.

Le jugement entrepris sera donc confirmé pour l'avoir déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Aucun abus de l'employeur dans son droit de former recours n'étant caractérisé, Mme [H] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif.

Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL DG Hot Pot, qui succombe, supportera les dépens d'appel.

Il est équitable par ailleurs d'allouer à Mme [H] une somme de 2 000 euros pour les frais autres que les dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le montant des dommages et intérêts alloué à la salariée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant,

Condamne la SARL Docte Gestio DG Hot Pot à payer à Mme [F] [B], épouse [H], les sommes de :

- 9 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute Mme [F] [B], épouse [H] du surplus de ses prétentions ;

Condamne la SARL Docte Gestio DG Hot Pot aux dépens d'appel.

La Greffière P/La Présidente régulièrement empêchée

La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Metz
Formation : Chambre sociale-section 1
Numéro d'arrêt : 18/03299
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;18.03299 ?
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